Intervention de Philippe Bas

Réunion du 5 mai 2020 à 14h30
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Article 2

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Je remercie notre collègue Françoise Gatel et les cosignataires de cet amendement d’avoir soulevé cette question. Elle intéresse beaucoup de maires en France. Même si le droit ne leur attribue pas la responsabilité d’ouvrir ou de fermer une école, il est vrai qu’ils ressentent cette responsabilité comme relevant de leur autorité. Il faut donc prendre en compte cette donnée de fait, qui est profondément ancrée dans l’esprit de nos élus locaux, ce que je comprends très bien.

Si je ne suis pas favorable à votre amendement, madame Gatel, c’est, premièrement, parce que son objet est très large. Vous voulez viser les écoles, mais vous visez en réalité, sans l’avoir souhaité je pense, tous les établissements recevant du public et les lieux de réunion. Cela fait beaucoup !

Deuxièmement, il faut prévoir une articulation entre les pouvoirs de police spéciale qui ont été donnés, dans le cadre de la lutte contre le fléau sanitaire, aux autorités déconcentrées de l’État et les pouvoirs de police générale qui sont ceux des maires. Les pouvoirs de police générale des maires ne s’exercent que par exception quand un pouvoir de police spéciale est donné au préfet. Il ne faudrait pas créer un risque de compétition entre le préfet et le maire et mettre ainsi du désordre dans la réglementation entre ce qui est permis et ce qui ne l’est pas. On ne saurait – c’est pourtant ce que nous ferions implicitement en adoptant votre amendement – rendre les maires responsables de l’ouverture des écoles. Ils ne le sont pas actuellement et soudain ils le deviendraient, au motif que circule le Covid-19 ?

Les maires nous ont réclamé de limiter les possibilités d’engagement de leur responsabilité à raison des décisions qui relèvent de leur compétence, et voilà que nous élargirions par la loi le champ de leur responsabilité, et donc celui des poursuites pénales qui pourraient être engagées sur le fondement de la disposition que nous avons adoptée hier, laquelle permet de clarifier le régime de cette responsabilité et d’éviter que le juge ait un trop large pouvoir d’appréciation ! Aujourd’hui, les maires ne peuvent pas être pénalement sanctionnés au titre de la décision d’ouvrir les écoles ; cet amendement adopté, ils pourraient l’être, même si c’est dans les conditions plus restrictives que nous avons adoptées hier.

Il faudrait bien plutôt pouvoir rassurer les élus municipaux, avec lesquels vous avez naturellement des discussions quotidiennes sur ce problème, en leur expliquant le droit applicable, l’étendue de leur compétence et des risques qu’ils encourent. Cela ne veut pas dire qu’ils doivent se désintéresser de l’ouverture des écoles : c’est bien sûr à eux de mobiliser les moyens nécessaires pour que les écoles puissent rouvrir. Toutefois, ce n’est pas à eux de prendre la décision ; la distinction est importante.

Avis défavorable, donc, à moins que vous ne retiriez votre amendement, ma chère collègue.

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