Nous sommes parvenus à l’article qui constitue la raison d’être de ce texte.
Les dispositions dont nous avons débattu n’étaient en quelque sorte qu’une mise en jambes ; un texte de loi était nécessaire pour mettre en place le système d’information dont nous allons maintenant discuter, et l’on en a profité pour introduire les mesures que nous avons déjà examinées. Autrement dit, sans cette disposition, il n’y avait pas véritablement de raison de saisir le Parlement.
Pour éviter de discuter alinéa par alinéa de l’article 6, sans avoir à l’esprit ce dont il s’agit, pour ne pas aborder les choses de manière décomposée, analytique, comme on le fait au travers de la discussion des amendements, je veux, mes chers collègues, vous rappeler, de manière aussi synthétique que possible, en quoi consiste ce dispositif, approuvé par la commission des lois.
Il s’agira du dispositif central du déconfinement. Nous pourrons poser au Gouvernement toutes les questions que nous voudrons quant à sa capacité à le mettre en place dès lundi prochain, mais je crois que, malheureusement, cela ne pourra être fait que progressivement. Pourtant, il est nécessaire.
À quoi ce dispositif servira-t-il ? À permettre, une fois les Français déconfinés, de contrôler, autant que faire se peut, les contaminations.
Il s’agira, au fond, du nouveau moyen de lutte contre l’épidémie, se subsistant au confinement et s’ajoutant, bien évidemment, au respect des gestes barrières et à d’autres mesures spécifiques. Ainsi, il y a, d’un côté, les comportements que nous, Français, devons observer, et, de l’autre, la politique de santé publique à mettre en œuvre pour identifier les sources de contamination.
Que veut faire le Gouvernement ? Laissons, pour l’instant, de côté le système d’information. La commission des lois, comme la commission des affaires sociales, a accepté que, chaque fois qu’est médicalement déclaré un cas de contamination par le virus, l’on procède à la recherche des « cas contacts », c’est-à-dire des personnes ayant été en contact avec le malade.
Ce n’est pas facile ; on a évalué entre 20 et 25 le nombre de personnes qui auront été approchées par une personne contaminée dans les 48 ou 72 heures – cela reste à déterminer – précédant la découverte de la contamination.
Comment les trouver, ces 20 à 25 personnes ? Le plus simple serait de signaler son infection au médecin consulté en raison des symptômes que l’on présentait et qui nous a fait subir le test de dépistage confirmant son diagnostic. Mais cela ne suffirait pas, car les médecins n’iront pas chercher eux-mêmes, seuls, ces 25 personnes.
L’idée est donc que l’assurance maladie prolonge l’action du médecin, avec le concours des laboratoires d’analyses biologiques ayant analysé le prélèvement démontrant la contamination.
En pratique, le médecin enverra son patient, en raison d’un soupçon de Covid-19, au laboratoire d’analyses biologiques, qui le déclarera positif ; c’est là qu’entre en jeu le système d’information. L’assurance maladie sera alors informée ; elle prendra contact avec la personne révélée comme porteuse du virus et identifiera, avec celle-ci, la liste des individus rencontrés au cours des jours précédents.
Chacune des personnes ainsi désignées par le porteur du virus sera alors contactée, afin, premièrement, de la soumettre dans les 24 heures à un test de dépistage et, deuxièmement, de la mettre en quatorzaine, car, même si l’on ignore encore si elle est porteuse du virus ou non, elle est potentiellement contaminante.
Ces « cas contacts », comme l’on dit dans le jargon de l’épidémiologie, subiront donc tous un test de dépistage et, s’ils se révèlent porteurs du virus, ils seront eux-mêmes déclarés comme tels. Dès lors, l’assurance maladie leur demandera, à eux aussi, de désigner les personnes rencontrées au cours des jours précédents.
Il y a donc, vous le voyez, un coefficient multiplicateur ; pour chaque porteur du virus, on peut trouver, sur les 25 personnes désignées, 3 ou 4 personnes infectées, qui devront, elles aussi, désigner 20 ou 25 cas contacts, lesquels pourront être dispersés sur tout le territoire national, puisque l’on pourra circuler, si l’on a de bonnes raisons de le faire.
Voilà comment se mettra en place un dispositif qui doit permettre, à partir d’un patient zéro, de remonter toute la filière des contaminations possibles, en dévidant la pelote de laine.
Comment voulez-vous faire tout cela en vous appuyant uniquement sur le médecin de famille ? C’est impossible.