Intervention de Philippe Bas

Réunion du 5 mai 2020 à 21h30
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Article 6, amendements 72 73

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Les amendements n° 72 et 73 concernent tous deux le secret médical. Encore une fois, c’est précisément parce que nous ne pouvons pas compter sur les seuls médecins pour traiter des centaines de milliers de cas individuels par semaine qu’il faut déroger au secret médical et que nous sommes réunis ce soir. Si cette question n’était pas posée, le présent projet de loi n’existerait pas.

Ce soir, nous avons une responsabilité : soit nous acceptons que le secret médical soit partagé, moyennant quoi nous instituerons un système qui permettra de remonter les filières de contamination, soit nous renonçons à la mise en place d’un tel dispositif, et nous pourrons aller nous coucher en ayant la très grande satisfaction de nous dire que le secret médical est sauf. Pour ma part, je n’échangerais pas cette satisfaction contre celle que nous pourrions avoir en instituant un système efficace permettant de découvrir toutes les filières de contamination et de protéger nos concitoyens.

C’est la raison pour laquelle la commission des lois, dont la position à cet égard est d’ailleurs partagée par la commission des affaires sociales, émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

L’amendement n° 82 est un amendement de précision, et la précision dont il s’agit nous paraît heureuse. Je profite d’ailleurs de l’occasion pour saluer le sens de la précision de Jean-Pierre Sueur. L’avis de la commission est favorable.

J’en viens à l’amendement n° 204, présenté par le Gouvernement. Monsieur le ministre, vous préférez votre texte au nôtre ; je ne songe pas à vous en blâmer. Mais c’est tout de même un effort que vous sollicitez de notre part en nous demandant de déroger au secret médical et d’accepter un système d’information national. Dans un souci d’efficacité, vous ne pouvez pas nous demander en plus de faire survivre ce système à la fin de l’état d’urgence sanitaire. Si, à cette date, notre pays a besoin de proroger le dispositif, cela signifiera que la crise n’est pas achevée, et vous pourrez alors compter alors sur notre bienveillance si vous revenez devant le Parlement.

Mais ne nous demandez pas aujourd’hui de prolonger la durée d’application du système alors que vous aurez vous-même décidé de ne pas prolonger l’état d’urgence ; ce ne serait pas cohérent. Nous sommes dans un régime juridique d’exception. Nous avons veillé dans la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 à faire en sorte qu’il s’éteigne de lui-même le 22 mars 2021. Si nous avons besoin de le renouveler à ce moment-là, nous en délibérerons ensemble. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

La précision que notre collègue Jean-Pierre Sueur nous propose d’ajouter à l’amendement n° 83 nous a semblé, cette fois, inutile. Avis défavorable.

Par ailleurs, le système que nous avons retenu nous semble plus efficace que celui qui est proposé par les auteurs des amendements n° 65 et 177. Il est déjà intégré au texte de la commission. C’est le système du droit d’opposition, qui est assez classique en matière de traitement informatisé des données. Il nous a paru nécessaire d’apporter cette garantie, que le Gouvernement n’avait pas prévue.

Retenir le principe du consentement préalable, c’est tout de même assumer le risque qu’un nombre vraiment trop important de personnes refusent de prêter leur concours à ce qui est de nécessité publique : remonter les filières de contamination pour protéger nos concitoyens.

C’est la raison pour laquelle l’avis des deux commissions – je me permets de le dire au nom de mon excellent collègue Alain Milon, mais il pourra le faire lui-même – est défavorable sur ces deux amendements.

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