Séance en hémicycle du 5 mai 2020 à 21h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Mes chers collègues, je vais commencer par les « bonnes » nouvelles – j’insiste sur les guillemets…

Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande l’inscription, le vendredi 8 mai au soir et le samedi 9 mai au matin, sous réserve de leur dépôt, des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

Par ailleurs, en cas de nouvelle lecture de ce texte, il en demande l’inscription le dimanche 10 mai après-midi.

Acte est donné de ces demandes.

La durée de la discussion générale sur les conclusions de la commission mixte paritaire ou la nouvelle lecture du projet de loi sera fixée à quarante-cinq minutes.

En fonction du déroulement des débats, je tiendrai les présidents de groupe informés de l’évolution « météorologique »…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

En cas de nouvelle lecture, le délai limite pour le dépôt des amendements de séance serait fixé à l’ouverture de la discussion générale, comme il est de tradition.

Y a-t-il des observations ?…

Il en est ainsi décidé.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous reprenons la discussion du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

Nous en sommes parvenus à l’examen des amendements à l’article 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 53 est présenté par Mme Ghali.

L’amendement n° 63 est présenté par M. Ravier.

L’amendement n° 136 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 172 rectifié est présenté par Mmes Joissains, Morin-Desailly et Létard, MM. L. Hervé, Détraigne, Cadic et Bonnecarrère et Mmes Billon et C. Fournier.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

L’amendement n° 53 n’est pas soutenu.

La parole est à M. Stéphane Ravier, pour présenter l’amendement n° 63.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Le 18 février dernier, pour son entrée en matière médiatique, le nouveau ministre des solidarités et de la santé, M. Véran, déclarait que les mesures mises en place par le régime communiste chinois et l’emprise de celui-ci sur les réseaux sociaux avaient permis une bonne gestion de crise. Je rappelle que, selon les chiffres officiels chinois, il y a deux morts du Covid-19 par million d’habitants ; en France, c’est plus de 150 et en Italie, près du double…

Si même en France la censure sur les réseaux sociaux est monnaie courante, il semble que la fascination pour les solutions de facilité autoritaires et liberticides soit l’apanage de cet état d’urgence. Aujourd’hui, on nous propose de mettre en place un système d’information et de ciblage via la localisation de nos téléphones, en ponctionnant nos données personnelles auprès des opérateurs.

À une époque pas si lointaine, on aurait été scandalisé d’une telle menace potentielle pour nos libertés publiques. Mais, comme le dit Saint Augustin, « à force de tout voir, on finit par tout supporter… À force de tout supporter, on finit par tout tolérer… À force de tout tolérer, on finit par tout accepter… À force de tout accepter, on finit par tout approuver ! » Je serais tenté d’ajouter : et, à force, on finit par tout voter…

Plutôt que de traquer nos compatriotes, le Gouvernement devrait se contenter d’assurer la sécurité informatique des citoyens, entreprises et institutions qui ont basculé vers le télétravail pour pouvoir se confiner. L’état d’urgence doit être également profitable pour garantir la cybersécurité dans le pays et renforcer notre prévention dans ce domaine.

Comme le préconise la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), adoptons une stratégie globale, au lieu d’abandonner chacun à lui-même. Pour défendre les libertés publiques tout en combattant la propagation du virus, la priorité sur laquelle tout le monde est d’accord – ou devrait l’être – est de fournir aux Français les masques et tests de dépistage qui leur permettront de reprendre une vie normale !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 136.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Si nous ne sommes pas hostiles au dépistage – j’y reviendrai lors de la présentation de notre amendement n° 153 –, nous estimons que le droit en vigueur comporte un certain nombre de dispositions qui permettraient de l’assurer. Dès lors, nous ne comprenons pas l’utilité du système dérogatoire nouveau qui nous est proposé. D’autant que celui-ci présente un danger, déjà souligné, notamment, par M. Hervé : l’atteinte portée à un certain nombre de libertés individuelles – là aussi, nous en parlerons plus en détail dans quelques instants.

Alors que les mesures de protection du secret médical et des données personnelles sont aujourd’hui d’ordre législatif, le projet de loi les ramène dans l’ordre réglementaire. Cette dégradation dans la hiérarchie des normes pose à nos yeux un problème fondamental. C’est pourquoi nous préférons maintenir le régime actuel, dans lequel la protection des données individuelles est garantie au plan législatif. Non que nous nous défiions des décrets que le Gouvernement pourrait prendre, mais parce que le futur dispositif ne doit pas être éloigné du contrôle, absolument nécessaire, du Parlement.

C’est cette déchéance de la protection des libertés individuelles du niveau législatif au plan réglementaire qui nous conduit à nous opposer radicalement à l’article 6. Pour autant, nous n’entendons pas laisser les professionnels de santé sans armes ; c’est la raison de notre amendement n° 153, que je présenterai dans quelques instants.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour présenter l’amendement n° 172 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Avec un certain nombre de collègues, je propose de supprimer l’article 6.

Monsieur le ministre, je vais me permettre de reformuler la question que je vous ai précédemment posée.

Je vous ai demandé de nous expliquer en quoi l’inscription de données personnelles dans un fichier central national serait nécessaire au travail que, tous, nous souhaitons voir réaliser par les équipes locales. Vous m’avez répondu : on n’est plus à l’époque du crayon et de la gomme… Je puis l’entendre, comme je puis entendre que les médecins et les services de la caisse primaire d’assurance maladie qui formeront ces équipes travaillent avec des outils numériques.

Moi-même et les membres de mon groupe n’avons aucune objection à ce que M. Antoine Dupont, de Belfort, atteint du Covid-19, fasse l’objet d’une déclaration et que ses contacts soient identifiés, afin qu’une recherche soit menée, y compris avec un partage du secret professionnel ; il y aura donc un dossier informatique ouvert à son nom à la caisse primaire d’assurance maladie.

Seulement, une fois M. Dupont guéri et ses contacts identifiés, pour quelles raisons serait-il nécessaire de conserver ses données personnelles dans un fichier central national ? Monsieur le ministre, vous ne m’avez pas répondu sur ce point.

Notre extrême réticence vient aussi de ce que, comme Mme Morin-Desailly l’a signalé, un arrêté du 22 avril dernier a créé une base de données commune au Health Data Hub et à la Caisse nationale d’assurance maladie. Oui ou non, le système d’information dont nous parlons a-t-il déjà été créé ? Comme nous subodorons que oui, nous ne comprenons pas très bien la présente situation parlementaire…

Au moment même où vous nous répondiez avant la suspension, monsieur le ministre, certains de nos collègues nous communiquaient la photo d’un écran de télévision où l’on voyait annoncer sur BFM que l’application StopCovid serait opérationnelle le 2 juin prochain. Si le système d’information dont nous parlons existe déjà bel et bien et que l’installation de l’application est décidée, quelle est l’utilité de notre travail parlementaire ?

Mme Catherine Morin-Desailly et M. Loïc Hervé applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

La commission des lois comme la commission des affaires sociales recommandent à notre assemblée de rejeter ces amendements, pour une raison très simple : il nous paraît indispensable de donner à l’État la capacité de dépister chaque semaine 400 000, 500 000, 600 000 personnes – je ne sais pas exactement combien –, sur la base de l’identification de nos concitoyens qui auront été en contact avec des porteurs du virus.

La tâche est titanesque. Je puis donc comprendre qu’on ait recours aux outils les plus efficaces pour la mener à bien, étant entendu qu’il vaut mieux apprendre qu’on a rencontré un porteur du virus le plus tôt possible : car chaque jour de perdu, ce sont des contaminations supplémentaires.

Le caractère massif de ce système d’information centralisé doit répondre au caractère massif de l’épidémie. Il n’y a pas de déconfinement possible si la France n’est pas en mesure de procéder à cette identification des personnes ayant été en contact avec des porteurs du virus.

Le texte dont nous débattons n’est porté à notre connaissance de législateur que pour une seule et unique raison : avec tant de personnes à contacter, on ne peut pas se reposer sur des médecins ; or le dispositif prévu supposera la manipulation d’informations de nature médicale.

Avec la commission des affaires sociales, la commission des lois entend que ces informations soient limitées au strict nécessaire, à savoir : telle personne est-elle ou non porteuse du virus ? Reste qu’il s’agit déjà d’une information personnelle, nominative, concernant la santé de chacun.

Nous avons donc besoin de déroger au secret médical, un principe fondamental qui, d’ailleurs, n’est pas fait pour le médecin, mais pour le malade, ce qui nécessite l’adoption d’une disposition législative, car on ne peut le faire uniquement pour les besoins de l’administration. Chaque fois qu’on déroge au secret médical, on le fait sur une base législative, et non sur la base d’un décret du pouvoir exécutif, parce que la loi protège mieux les libertés que le pouvoir exécutif, même s’il est, bien évidemment, respectueux de l’État de droit.

Le Gouvernement pourrait fort bien mettre en place un système d’information centralisé sans le législateur. Le règlement général de protection des données (RGPD) que nous avons transposé dans la loi française l’y autorise, car son article 9 prévoit des dérogations au principe selon lequel on ne doit pas procéder à des traitements nominatifs de données de santé, des dérogations claires et destinées à servir un intérêt majeur de santé publique. Or si nous ne sommes pas en présence d’un intérêt majeur de santé publique, je n’ai rien compris à la situation dans laquelle se trouve actuellement notre pays…

La question du recours à un système numérique est donc déjà tranchée : le Gouvernement a le droit d’y recourir. En revanche, il n’a pas le droit d’ouvrir à d’autres que des médecins ces informations, même très réduites, mais qui concernent la santé des personnes figurant dans la base de données, à moins que la loi ne l’y autorise.

Telle est, en réalité, la seule question qui nous est posée, parce que c’est la seule qui relève de la loi. Évidemment, cette question posée, nous attrayons à nous l’ensemble des autres, et il est bien normal, s’agissant d’un dispositif sans précédent, que le Parlement se prononce globalement.

C’est la raison pour laquelle la commission des lois a demandé des garanties. Je ne vais pas les énumérer de nouveau, mais j’appelle le Gouvernement à accepter l’amendement du groupe socialiste et républicain tendant à exiger l’avis conforme de la CNIL sur le décret mettant en œuvre le système d’information ; c’est une garantie supplémentaire dont nous avons besoin, et que M. Hervé souhaite sans doute également.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas atteindre le résultat recherché par les pouvoirs publics sans système d’information, parce qu’on ne peut pas traiter 700 000 dossiers en se reposant sur une méthode manuelle, comme dans les années 1950, alors que nous disposons aujourd’hui d’outils plus efficaces.

Or ce dispositif ne peut pas être mis en œuvre si nous ne votons pas l’extension de l’obligation de secret à d’autres personnes que les médecins. Car il va de soi que les agents de l’assurance maladie qui concourront au bon fonctionnement du dispositif seront eux aussi assujettis au secret – mais pas le secret du médecin.

Telles sont les raisons pour lesquelles je demande au Sénat de ne pas adopter ces amendements.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Je le répète une fois encore : l’article 6 n’est pas StopCovid. Comme je vois certains hocher la tête, j’insisterai tant qu’il faudra : ce n’est pas StopCovid, et les deux dispositifs n’ont rien à voir ! Si un système de type StopCovid devait voir le jour, un nouveau débat parlementaire se tiendrait. Si je vous le dis autant de fois, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est tout de même engageant…

Ce que nous vous proposons – un fichier AmeliPro pour le partage d’informations avec un fichier national consacré aux malades – n’est pas nouveau. Plusieurs dispositifs de ce type existent, auxquels ont accès des médecins, mais aussi, par dérogation au secret médical, des salariés de l’assurance maladie, ceux-là mêmes qui vont être amenés à traiter le nouveau fichier de l’assurance maladie pour assurer la protection des personnes dans le cadre de l’épidémie.

Je pense, par exemple, au fichier national des arrêts de travail. Lorsqu’un médecin délivre un arrêt de travail, il en indique le motif, transcrit par des salariés de l’assurance maladie dans le fichier national de l’assurance maladie lié à AmeliePro relatif aux arrêts de travail.

De même, lorsqu’un médecin déclare à l’assurance maladie une affection de longue durée – une maladie chronique comme le diabète ou l’hypertension –, l’affection est retranscrite dans un système d’information national géré par l’assurance maladie dans le cadre du logiciel AmeliPro, et cela par des salariés de l’assurance maladie qui ne sont pas nécessairement médecins.

Vous voyez qu’il existe déjà des cas dérogatoires, qui d’ailleurs ne sont pas nouveaux – leur création doit remonter à quinze ou vingt ans, au moins –, sans que cela ait jamais posé le moindre problème à quiconque. Il s’agit simplement d’étendre ce dispositif dérogatoire au strict respect du secret médical à la lutte contre l’épidémie de coronavirus.

Comme le secret médical et son strict respect sont très protégés, ce qui est très bien, la loi énumère précisément les dérogations potentielles – j’en ai mentionné deux. Ce n’est ni plus ni moins que l’extension de cette dérogation qui nécessite aujourd’hui le recours à la loi. Recours à la loi qui, comme l’a expliqué M. Bas, soulève un certain nombre de questions et même de craintes, parfois rationnelles, parfois – pardon de le dire – non rationnelles. C’est ainsi, et notre débat vise à répondre à ces questions.

En tout cas, je répète qu’il ne s’agit pas d’inventer un dispositif nouveau, qui marquerait une rupture avec l’État de droit en matière de sécurité des données de santé et de protection des données des malades ; nous travaillons dans la continuité d’outils qui existent déjà, que nous étendons au cadre spécifique de la lutte contre le coronavirus. L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

J’informe le Sénat que j’ai été saisi d’une demande de scrutin public sur les trois amendements identiques par le groupe Les Républicains.

La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Débat absolument passionnant : il s’agit de trouver l’équilibre entre protections collectives et libertés individuelles.

Lorsque j’ai découvert le projet de loi samedi dernier, attaché comme je le suis aux libertés individuelles, j’ai d’abord incliné à voter la suppression de l’article 6.

Il est vrai qu’une éthique de conviction et de responsabilité s’impose devant les lourds enjeux évoqués par Catherine Morin-Desailly, s’agissant en particulier de la souveraineté numérique, et tous les dangers possibles autour des données de santé. De fait, cette question des données de santé, que nous avons frôlée lors du dernier débat relatif à la bioéthique, est essentielle. Songeons aux risques de cyberattaques – les amateurs de la série Le Bureau des légendes n’auront pas de mal à mesurer les enjeux…

Toutefois, notre débat de lundi matin en commission des affaires sociales a bien fait apparaître que la configuration est très particulière. La fin du confinement ne sera pas du tout le retour à la vie normale : dans ce contexte, nous devons trouver un équilibre entre l’impératif sanitaire et l’impératif économique et social.

Compte tenu de ce qu’est cette maladie – cette « saloperie », comme l’a dit le président Milon –, nous nous rendons bien compte que, sans possibilité de tester, de tracer et d’isoler, la contagion reprendrait très vite. Dès lors, il faut s’interroger sur la question des libertés individuelles, au nom desquelles on peut être tenté de supprimer l’article 6. Car si la maladie repartait, nous serions de nouveau privés d’une liberté essentielle, celle d’aller et venir.

Pour cette raison, et compte tenu de toutes les garanties apportées par le travail de réécriture de M. Bas, je pense que, très strictement encadré, un système permettant de tester, de tracer et d’isoler est nécessaire pour, sans doute, sauver des vies humaines et, en tout cas, garantir notre liberté d’aller et venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Nous allons évidemment nous opposer à ces amendements.

Le confinement s’inscrit dans la stratégie de la cloche. Il était nécessaire pour désengorger les services de réanimation, et nous y sommes parvenus. Cependant, il permet de freiner l’épidémie, et non de l’arrêter.

Comme l’a déclaré le Président de la République ce midi – je le cite peu souvent–, « on n’a pas gagné la bataille contre le virus. […] on l’a ralenti. »

Pour casser les reins de l’épidémie, pour casser la chaîne de transmission du virus, il faut absolument tracer. Pour ce faire, seuls deux systèmes sont possibles.

Dans l’avant-projet de loi, la version du système de première génération qui nous est soumis était très imparfaite. Elle nous a inspiré, à tous, un certain nombre de remarques. Nous avons ensuite découvert le texte qui avait été délibéré en conseil des ministres, après passage en Conseil d’État, puis les six garanties de la commission des lois.

L’autre système, de nouvelle génération, sera StopCovid. Cher Philippe Bonnecarrère, le secrétaire d’État Cédric O a déclaré ce matin – ce n’est pas un scoop – qu’il défendrait cette application numérique devant le Parlement durant la semaine du 25 mai prochain et que celle-ci pourrait être opérationnelle le 2 juin. Nous verrons si elle réunit un certain nombre de conditions.

Pour reprendre, avec d’autres termes, ce qu’a dit Julien Bargeton, notre métier consiste à trouver le juste équilibre entre les libertés publiques, auxquelles le Sénat est attaché, et la santé publique. Pour ce qui concerne les libertés publiques, la commission des lois a mis ceinture et bretelles, en posant six garanties qui sont absolument nécessaires. S’agissant de la santé publique, je rappelle que le nombre de morts s’élève à plus de 30 000 si l’on inclut ceux qui ont été comptabilisés par les médecins généralistes.

Nous devons décider si nous nous dotons de moyens, sachant que les moyens qui nous sont proposés sont bons et qu’ils ont, en outre, été largement encadrés par la commission des lois du Sénat. Il me semble que celle-ci n’a pas l’habitude de traiter ces sujets à la légère !

Cher Olivier Henno, je crois profondément que, dans le cas présent, éthique de conviction et éthique de responsabilité se confondent.

Très franchement, je comprends, mes chers collègues, que vous puissiez avoir des doutes, quelle que soit votre sensibilité politique, mais les garanties que nous offre la commission des lois permettront de border le dispositif, qui n’a rien à voir avec le dispositif numérique. C’est un système de traçage préhistorique, mais c’est tout ce dont nous disposons aujourd’hui, d’où sa nécessité.

Nous devons absolument voter les articles qui nous sont proposés, tels que modifiés par la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

On vient d’apprendre que Singapour abandonnait son application de traçage, qui n’a pas produit de résultats, l’épidémie étant repartie, et allait passer à des solutions plus radicales – peut-être, d’ailleurs, plus attentatoires aux libertés. Je pense donc que nous pouvons abandonner l’application StopCovid.

D’ailleurs, je ne crois pas beaucoup au solutionnisme technologique, même si je suis favorable au traçage, mais dans des conditions particulières et extrêmement encadrées, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je m’en tiens surtout à l’avis des experts – médecins, experts en cryptologie, en sécurité informatique… Or, dans une tribune du 10 décembre dernier, ceux-ci nous alertaient déjà sur le traitement des données qui seront stockées à grande échelle et concentrées dans le data hub de Microsoft, qui ne constitue pas une solution souveraine. Je tenais à le rappeler, monsieur le ministre, et à le dire à M. Bargeton.

Nous connaissons le principe de la législation américaine : en vertu du Cloud Act, Microsoft USA peut, dans certains cas, demander à tout moment les données relatives aux Européens, y compris des données de santé. Je parle bien du traitement des données collectées via le système d’information qui est mis en place, cher collègue Bruno Retailleau.

Plus récemment, des chercheurs de l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), mais aussi du monde entier, nous ont alertés sur la sécurité informatique de ces systèmes de traçage. Même anonymisées, les données peuvent être réidentifiées si on les croise avec d’autres. Nous pourrons revenir tout à l’heure sur ce sujet un peu technique.

Je ne suis évidemment pas opposée aux avancées technologiques quand elles sont bien encadrées et je suis déterminée à trouver toutes les solutions pour lutter contre le virus, mais nous devons être garants des libertés individuelles. Or, depuis le décret du 22 avril dernier, que M. Bonnecarrère a évoqué, nous ne sommes pas sûrs de la souveraineté, à terme, des données concentrées sur la plateforme, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je conviens que cette solution maximaliste n’est pas forcément la plus opérationnelle pour la poursuite d’un dialogue avec l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Il n’y a pas, dans cet hémicycle, des sénateurs qui seraient attentifs à la santé de leurs concitoyens et d’autres qui ne le seraient pas.

Monsieur Retailleau, nous sommes favorables au fait de tester, de tracer, de repérer.

En quoi l’existence d’un fichier central national détenant des données personnelles est-elle de nature à nous aider dans l’exercice de déconfinement ? Je n’ai pas obtenu de réponse à cette question.

Je n’ai pas su davantage si le système de données qui a été autorisé par l’arrêté publié au Journal officiel du 22 avril dernier était déjà créé et s’il constituait une brique de ce système d’information. N’ayant pas reçu de réponse, et partant du principe que « qui ne dit mot consent », je suis désormais convaincu que le système dont nous débattons ce soir a déjà été créé, ce qui, de mon point de vue, constitue une difficulté, notamment à l’égard du Parlement, qui est attaché à ce que les mêmes conditions s’appliquent à tous les citoyens.

Reste votre argumentation, monsieur le rapporteur. Vous affirmez que, de toute façon, la création du fichier national ne nécessite pas d’autorisation. Je ne suis pas d’accord ! Aux termes de l’article 9 du RGPD, un traitement de données personnelles peut être mis en œuvre lorsqu’il « est nécessaire pour des motifs d’intérêt public important, sur la base du droit de l’Union ou du droit d’un État membre qui doit être proportionné à l’objectif poursuivi, respecter l’essence du droit à la protection des données ». Autrement dit, la création de ce fichier public national n’est pas de droit. Certes, il faut un motif important – en l’occurrence, je ne conteste pas l’existence d’une situation de crise –, mais il faut également « respecter l’essence du droit à la protection des données ».

C’est le débat que soulève l’article 6, et que nous ne pouvons pas éviter. Je regrette que M. le ministre n’ait pas répondu à mes questions, quelle que soit la considération que je peux par ailleurs porter au Gouvernement de manière générale.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Je ne voterai évidemment pas ces amendements, parce que je considère que le dossier est plus qu’utile pour l’information, d’abord, des pouvoirs publics et, ensuite, des médecins. Nous avons besoin de connaître pour pouvoir, ensuite, tracer.

Je veux reprendre des exemples de dossiers que M. le ministre a cités.

Il a évoqué les dossiers d’affection de longue durée (ALD). Quand un médecin remplit un dossier d’ALD, il indique le nom et le prénom du patient, sa date de naissance, ses habitudes alimentaires, son traitement et sa maladie – par exemple, un diabète de type 1, de type 2… L’objectif est de connaître la prévalence de ces pathologies et les habitudes alimentaires dans les différentes régions, ainsi que les préventions alimentaires que l’on peut mettre en place pour éviter ce genre de maladies.

Je veux citer un autre exemple. Voilà quatre ou cinq ans, il a été précisé dans des dossiers que le nombre d’appendicectomies et d’opérations obstétricales était plus élevé dans certaines régions. Des tas de raisons peuvent l’expliquer. Quoi qu’il en soit, on remarque qu’il y a moins d’appendicectomies en 2020 qu’en 2010 et qu’il y en avait déjà moins en 2010 qu’en 1990, puisque, comme M. le ministre l’a indiqué, ces dossiers existent depuis longtemps.

Autre exemple, l’employeur connaît l’existence des arrêts de travail ainsi que leur motif, alors qu’il n’appartient pas au personnel médical.

Enfin, je veux citer l’exemple, auquel je tiens beaucoup, des maladies à déclaration obligatoire, comme la rougeole et la tuberculose, qui ont été évoquées en commission des lois. La déclaration de ces maladies n’est absolument pas anonyme. La seule maladie à déclaration obligatoire anonyme est le sida, pour des raisons qui tiennent à sa caractéristique de maladie sexuellement transmissible.

Le système d’information de la CNAM existe depuis vingt ou trente ans. Il a une fonction précise : collecter, analyser, mieux prévenir et mieux traiter. Il est nécessaire.

Pour ce qui concerne le Covid-19, nous avons, avec la commission des lois, encadré le dispositif, même si les déclarations ne doivent pas être anonymes, de manière à pouvoir rechercher les personnes qui ont été en contact avec les porteurs de la maladie. Nous avons bien précisé que le dispositif ne valait que pour celle-ci. Si l’on parvient, un jour, grâce à la recherche, aux traitements et, peut-être, au vaccin, à éliminer la maladie, ces dossiers disparaîtront.

En attendant, nous en avons besoin, pour faire avancer la recherche, pour orienter la politique de santé et pour vaincre la maladie.

Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Je partage rigoureusement l’argumentation de M. Bonnecarrère.

Contrairement à ce que vous avez pu suggérer, monsieur le ministre, le débat sur l’article 6 n’oppose pas les tenants et les opposants du dépistage. Nous sommes tous favorables au dépistage et à ce qu’un maximum de moyens soit donné à l’État pour assurer cette mission. N’ayez aucun doute sur nos intentions.

La discussion que suscite l’article 6 porte sur l’opportunité de créer aujourd’hui, par ce texte législatif, un système dérogatoire, alors que, comme vous l’avez très bien dit et comme l’a confirmé Alain Milon, un certain nombre de systèmes permettant ce dépistage existent déjà dans la législation actuelle. Nous voulons comprendre pourquoi vous ne pourriez pas mobiliser des systèmes qui présentent l’avantage fondamental d’être éprouvés, notamment sur le plan du respect des libertés individuelles et du secret médical.

Nous voulons aussi comprendre pourquoi, d’un point de vue médical, vous avez besoin de créer un système qui déroge à un certain nombre de libertés publiques respectées par ailleurs, ce que nous contestons.

Dans ce débat, monsieur le ministre, nous attendons de vous de la précision. Comme vous le savez, ce projet de loi sera déféré au Conseil constitutionnel. L’intention du législateur sera déterminante pour que le Conseil puisse en apprécier exactement l’utilité et le mode opératoire. En outre, cette saisine ouvrira la porte à de futures questions prioritaires de constitutionnalité (QPC). Par conséquent, quelle que soit l’issue du vote sur les amendements, nous tenons absolument à ce que votre argumentaire soit le plus précis possible.

Je vous le dis, je ne crois pas du tout à la nécessité de mettre en place un système visant à faciliter le traitement informatique des données. Cela me paraît tout à fait accessoire en comparaison de ce que vous nous proposez par ailleurs.

J’aimerais un argumentaire un peu plus fin, un peu plus précis et un peu plus médical.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Je souhaite, au nom de mon groupe, exprimer la position qui sera la nôtre sur ces amendements et dans l’ensemble du débat que soulève l’article 6.

Le dispositif que celui-ci met en place est un pari que fait le Gouvernement et que certains d’entre nous sont prêts à accompagner, contrairement à d’autres.

Nous sommes tous tendus vers un seul objectif, qui est d’éradiquer l’épidémie, mais nous savons aussi que la protection des libertés publiques et des libertés fondamentales est incontournable – elle est primordiale pour les membres de notre assemblée.

Le dispositif que vous proposez, monsieur le ministre, inquiète. D’ailleurs, les propos qui ont pu être tenus sur l’application StopCovid, y compris, encore aujourd’hui, par le secrétaire d’État, qui a annoncé un débat à l’Assemblée nationale le 28 mai prochain, rendent l’appréhension de ce dossier encore plus confuse.

Au groupe socialiste, après de très longs débats – j’imagine qu’il en a été de même au sein de tous les groupes –, nous avons décidé de ne pas voter ces amendements de suppression, parce que nous voulons pouvoir entrer dans le débat et poser un certain nombre d’exigences, lesquelles convergent, pour partie, avec des propositions faites en commission des lois, notamment par M. le rapporteur, qui nous conviennent sur certains points. Je pense, en premier lieu, au refus des ordonnances, mais ce n’est évidemment pas le seul sujet.

Nous discuterons, tout à l’heure, des données personnelles, du consentement de l’usager ou du secret médical. Ces questions n’ont pas fait l’unanimité au sein de mon groupe. Nous verrons si la solution proposée par M. le rapporteur et adoptée par la commission des lois, qui constitue déjà une première étape très satisfaisante, aura encore été améliorée au gré de la discussion.

M. le rapporteur a évoqué tout à l’heure l’opportunité de l’avis conforme de la CNIL que nous allons proposer.

Au final, nous espérons, monsieur le ministre, que nous gagnerons collectivement ce pari, qui arrive bien tard et qui, du coup, sera peut-être totalement inutile et inefficace.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Moi qui ne suis pas un spécialiste du numérique, j’ai été convaincu par les interventions de M. le rapporteur, de M. le ministre, d’Alain Milon et d’autres collègues.

Si tous les articles sont importants, l’article 6 est le cœur du dispositif de ce projet de loi.

L’urgence sanitaire commande d’être efficace.

Je peux comprendre les amendements de suppression qui ont été déposés, mais je crois qu’il faut retrouver la confiance. Si les données personnelles relèvent du domaine privé, nous pouvons nous appuyer sur les autorités indépendantes existantes, comme la CNIL.

La priorité, dans notre pays comme dans les autres, est de sauver des vies.

Le dispositif de l’article 6 va dans le bon sens. Je soutiendrai donc la position de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Julien Bargeton, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

Je tiens à rappeler que l’intérêt général, qui est un intérêt supérieur, est l’une des bases juridiques qui justifient des dérogations à l’application du RGPD.

Il est d’ailleurs arrivé que la formule « intérêt public » soit critiquée pour son caractère trop large. De fait, quel est exactement le contour de cet « intérêt public » ?

Même si toutes les préventions relatives à la protection des données sont légitimes, la condition posée par le RGPD me semble remplie par la pandémie meurtrière et terrible que connaît notre pays, et susceptible d’apparaître comme telle aux yeux du plus grand nombre.

Comme je le disais précédemment, j’ai toujours peur, sur ces sujets, que, guidés par une forme de réticence, certains citoyens ne se tournent vers d’autres types de systèmes, que nous ne maîtrisons et que nous ne contrôlons pas. Dans certains pays, de tels systèmes ont été mis en place directement par des acteurs privés. C’est important d’avoir ce fait en tête. Quel cadre apporterait autant de garanties qu’une autorité démocratique ? Les autres acteurs ne le peuvent pas.

Il convient de faire la balance entre les risques pour les données personnelles et les risques supérieurs potentiels et de vérifier que les règles sont appliquées dans le cadre qui a été fixé, à savoir celui du RGPD. En l’occurrence, elles me semblent l’être. Elles ne le seraient pas forcément dans un autre contexte.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Loïc Hervé

Sophie Joissains a été rapporteur, pour la commission des lois, du texte relatif aux conséquences de l’application en droit interne du RGPD. Je rappelle que celui-ci n’a pas nécessité de transposition, puisqu’il est d’application directe.

Le RGPD a eu des conséquences sur la loi de 1978, mais aussi sur l’intégralité de notre droit, nécessitant que nous mettions celui-ci en conformité avec le droit communautaire voilà quelques mois. Nous l’avons d’ailleurs fait dans un contexte international particulier : il était utile de montrer qu’un continent entier se dotait d’un cadre juridique extrêmement protecteur des données personnelles, de la vie privée et des libertés publiques au moment même où les États-Unis, par décision de leur président, abolissaient la quasi-intégralité des mesures permettant de protéger les Américains, en particulier les entreprises américaines, sur leur sol.

J’ai beaucoup de mal à considérer que tout système informatique est, par nature, une innovation, et que le progrès serait forcément devant nous. Je n’éprouve pas de fascination pour les technologies massives, intrusives, qui permettent de collecter le plus d’informations possible. À cet égard, je soutiens chacune des propositions de la commission des lois.

Par ailleurs, j’estime que notre rôle est de poser les questions de principe maintenant, alors que nous allons évoquer les questions opérationnelles. Les trois amendements dont nous débattons ont ce mérite.

Je pense qu’il y a, entre StopCovid et ce système d’information, une inversion du planning considérable et préjudiciable à la réflexion. Des choses qui étaient acceptables au moment du confinement ne le sont plus à l’heure du déconfinement : il est très compliqué d’expliquer, après avoir attenté aux libertés, au droit électoral, à la liberté d’aller et venir, à la liberté du commerce et de l’industrie, après avoir mis le pays à l’arrêt et au moment précis où l’on va redonner de la liberté aux gens, qu’il faudrait mettre en place des systèmes ou des logiques qui vont dans un sens différent. Telle est la raison pour laquelle je voterai ces trois amendements – je suis cosignataire de l’un d’entre eux.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

Le groupe RDSE votera contre les trois amendements de suppression.

En effet, le traçage nous paraît un outil majeur et quasiment indispensable dans le panel de mesures nécessaires pour lutter contre le Covid-19.

En outre, nous voulons que le débat puisse avoir lieu.

La commission des affaires sociales et la commission des lois ont adopté des amendements qui entourent le dispositif de garanties de sécurité et de liberté qui nous semblent satisfaisantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je mets aux voix les amendements identiques n° 63, 136 et 172 rectifié.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 153, présenté par M. Ouzoulias, Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 3113-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après le 2°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les maladies entraînant un état d’urgence sanitaire prévu aux articles L. 3131-14 et suivants du code la santé publique. » ;

2° À la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « et 2° » sont remplacés par les mots : «, 2° et 3° ».

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

L’article L. 3113-1 du code de la santé publique définit un régime particulier pour une trentaine de maladies infectieuses à déclaration obligatoire.

Son décret d’application permet aux pouvoirs publics de mettre en place d’urgence des mesures de prévention individuelle et collective et, le cas échéant, de déclencher des investigations pour identifier l’origine de la contamination ou de l’exposition. Ce régime organise des mesures d’investigation et d’intervention et la collecte de toutes les informations indispensables pour la mise en œuvre des mesures de prévention individuelle et collective. On voit que son champ d’application est extrêmement large et qu’il donne énormément de pouvoirs à l’État.

Tout ce processus est bien évidemment fondé sur un traitement informatisé des informations de santé, qui a été validé par la CNIL à plusieurs reprises. Vous avez mis en œuvre ce système, monsieur le ministre, votre gouvernement ayant ajouté la rubéole aux trente maladies infectieuses à déclaration obligatoire le 7 mai 2018.

Nous avons donc là un dispositif parfaitement connu, éprouvé, encadré, respectueux des libertés individuelles, sur lequel la CNIL a déjà eu l’occasion de donner son avis. Je vous pose de nouveau la question, monsieur le ministre : pourquoi serait-il inadapté au cas spécifique du Covid-19 ? En quoi le comportement épidémiologique de cette maladie justifierait que vous ayez besoin d’un système dérogatoire et, à nos yeux, douteux en matière de protection des libertés individuelles ?

Au fond, nous savons tous que, indépendamment du système juridique que vous allez mettre en place, ce sont les moyens humains consacrés à la mise en œuvre du dispositif et au dépistage qui compteront. L’outil informatique ne sera là que de façon accessoire, pour aider les équipes.

Nous aimerions avoir de votre part des précisions sur ces moyens humains et sur la manière dont ils seront constitués. En effet, le dépistage est tout à fait essentiel pour permettre un déconfinement dans de bonnes conditions.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 173, présenté par M. Bonnecarrère et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Par dérogation à l’article L. 1110-4 du code de la santé publique, aux fins de surveillance épidémiologique aux niveaux national et local, ainsi que pour la recherche sur le virus covid-19 et les moyens de lutter contre sa propagation, des données relatives aux personnes atteintes par ce virus et aux personnes ayant été en contact avec elles peuvent être partagées dans le cadre d’un système d’information créé par décret en Conseil d’État et mis en œuvre par le ministre chargé de la santé.

Ce ministre, ainsi que l’Agence nationale de santé publique, un organisme d’assurance maladie et les agences régionales de santé, peuvent en outre, aux mêmes fins, adapter les systèmes d’information existants et prévoir le partage des mêmes données dans les mêmes conditions que celles prévues au premier alinéa du présent I.

II. – Le système d’information mentionné au I, qui peut comporter des données de santé, a pour finalités la surveillance épidémiologique aux niveaux national et local, ainsi que la recherche sur le virus et les moyens de lutter contre sa propagation.

L’intégralité des données ayant vocation à alimenter ce système d’information seront anonymisées préalablement à leur saisie.

III. – Outre les autorités mentionnées au I, le service de santé des armées, les communautés professionnelles territoriales de santé, les établissements de santé, maisons de santé, centres de santé et médecins prenant en charge les personnes concernées, ainsi que les laboratoires autorisés à réaliser les examens de biologie médicale de dépistage sur les personnes concernées, participent à la mise en œuvre de ce système d’information et peuvent, dans cette stricte mesure, avoir accès aux seules données nécessaires à leur intervention.

IV. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par le décret en Conseil d’État mentionné au I après avis public de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Ce décret en Conseil d’État précise notamment, pour chaque autorité ou organisme mentionné aux I et III, les services ou personnels dont les interventions sont nécessaires aux finalités mentionnées au II et les catégories de données auxquelles ils ont accès, ainsi que les organismes auxquels ils peuvent faire appel, pour leur compte et sous leur responsabilité, pour en assurer le traitement.

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Cet amendement reprend un amendement que nous avions déposé devant la commission et qui n’a pas été adopté. En effet, la brièveté du délai qui nous a été accordé ne nous permettait pas de réécrire complètement l’article.

Comme Catherine Morin-Desailly, Loïc Hervé et moi-même l’avons développé tout à l’heure, nous sommes d’accord depuis le début sur le principe d’équipes épidémiologiques de terrain pour mener le combat pragmatique, mais nous ne pouvons imaginer que les données personnelles remontent dans un système informatique central sans être anonymisées. À nos yeux, la possibilité d’identifier ou non les données personnelles change tout.

Au reste, nous avons le sentiment que cela aurait également du sens par rapport à la maladie elle-même, qui est une vraie « saloperie », pour reprendre le terme qui a été utilisé précédemment, et qui, du reste, est susceptible de muter. N’étant pas épidémiologiste et appliquant volontiers les leçons d’humilité du Premier ministre, je m’arrête là.

Nous ne disposons pas d’éléments suffisants sur ce qu’est cette maladie aujourd’hui. Un travail de recherche s’appuyant sur l’analyse de centaines de milliers de situations et permettant, par exemple, de rechercher si l’existence d’un diabète ou d’une hypertension exerce une influence sur le Covid-19 nous paraît de bon aloi, mais il ne nécessite pas d’identifier les personnes : il suffit d’intégrer les données des patients.

Cet amendement vise donc à revenir sur la possibilité d’identifier M. X ou Mme Y dans cette machine centrale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

L’amendement n° 153, présenté par M. Ouzoulias, a fait l’objet d’un avis défavorable.

En effet, le régime des maladies à déclaration obligatoire a un fondement juridique qui se révèle à l’examen inapproprié pour ce que nous avons besoin de faire : remonter la filière des contaminations pour le Covid-19. C’est un système assez artisanal. Normalement, les informations sont anonymes. En fait, elles ne le sont pas, car aucun système d’information numérisé n’a été mis en place. Comme il s’agit de maladies qui, fort heureusement, surviennent assez rarement, il n’est pas nécessaire d’instituer un dispositif de gestion de santé publique à grande échelle.

Dès lors, il ne serait ni opérationnel d’un point de vue juridique ni à l’échelle du problème auquel nous sommes confrontés de nous raccrocher à ce système préexistant, même si celui-ci a tout de même le mérite de montrer que nous savons remonter des filières de contamination ; nous avons une expérience pratique en la matière.

D’ailleurs, et nous en discuterons avec le président de la commission des affaires sociales, il y aurait peut-être des initiatives parlementaires à prendre pour améliorer le régime des maladies à déclaration obligatoire, qui a besoin d’un certain toilettage si nous voulons qu’il fonctionne correctement.

Monsieur Bonnecarrère, je suis d’accord avec vous : il serait utile de créer un fichier anonyme à finalité épidémiologique. Le Sénat pourrait, me semble-t-il, suggérer cette bonne idée au Gouvernement. Mais il ne saurait s’agir d’un substitut à un système d’information permettant de remonter les filières de contamination. Faire reposer un tel système sur des données anonymes conduirait immédiatement, vous le voyez bien, à une impasse. C’est absolument impossible ! Il y a précisément besoin que les données soient nominatives. Il s’agit de rechercher des personnes, et non un pseudonyme ou un numéro, que l’on va appeler par téléphone et guider dans un parcours allant du dépistage jusque, le cas échéant, aux soins. L’idée est que des individus ayant été exposés au virus n’en contaminent pas d’autres.

Au fond, le débat que vous ouvrez est distinct de l’objet du projet de loi, même s’il est intéressant. Je pense que nous avons effectivement tout intérêt à développer la recherche épidémiologique sur la base de données anonymisées pour le Covid-19. J’imagine d’ailleurs que nous ne devons pas être les premiers à avoir eu cette idée. Je ne veux pas croire que le ministère des solidarités et de la santé ne dispose pas déjà d’une force de frappe épidémiologique permettant de mieux connaître le virus, à travers l’examen de la situation médicale d’échantillons suffisamment nombreux de porteurs du virus et de patients.

En tout état de cause, cher Philippe Bonnecarrère, ce ne peut pas être un substitut à ce que nous mettons en place dans l’objectif, tout aussi souhaitable, de découvrir les filières de contamination. De très nombreux agents de l’assurance maladie seront mobilisés. Ils prendront le relais des médecins généralistes, dont ce n’est pas le métier et qui n’auront de toute manière pas assez de temps.

C’est la raison pour laquelle je suis au regret d’émettre, au nom de la commission, un avis défavorable sur votre amendement, tout en considérant que vous faites bien de soulever un tel problème.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

Je précise toutefois que l’un des deux sera satisfait si le Sénat décide d’adopter un amendement que je présenterai un peu plus tard. Le dispositif que je propose permettrait de recouper les objectifs de la maladie à déclaration obligatoire avec ceux qui sont visés par le sénateur ayant défendu l’amendement auquel je fais allusion. Pour autant, cela n’entrerait pas à proprement parler dans un fichier qui, M. le rapporteur l’a souligné, est très spécifique, même s’il présente des caractéristiques assez proches : une maladie à déclaration obligatoire, des données de santé non anonymisées, etc. Il faut passer par un formulaire Cerfa – c’est donc un fonctionnement un peu plus à l’ancienne –, mais les données sont bien colligées dans un objectif de lutte contre l’épidémie. Cela a tout de même la couleur, l’odeur et le goût d’un régime de maladie à déclaration obligatoire.

Si je n’ai pas compris la question de M. le sénateur qui m’interpellait sur la création d’un fichier, c’est parce que nous ne créons pas de fichier national. Comme l’a souligné à juste titre M. le président de la commission des affaires sociales, il existe déjà un fichier national : celui de l’assurance maladie. Il comporte des données non anonymisées sur l’état de santé des patients, par exemple si la personne a un diabète ou un cancer. C’est pour les salariés de l’assurance maladie que les données ne sont pas anonymisées. Mais l’encadrement législatif est très ancien et n’a jamais été remis en question. C’est sur ce fichier, AmeliPro – je l’ai évoqué –, que nous nous greffons dans le cadre de la lutte contre le Covid-19. Nous y ajoutons une brique, en l’occurrence une information, pour savoir si la personne a été testée positive ou négative au coronavirus. Mais nous ne créons pas de nouveau fichier.

La confusion vient sans doute du fait que l’on parle de deux choses différentes.

D’un côté, le deuxième alinéa de l’article 6 dispose qu’un décret en Conseil d’État peut autoriser le ministre chargé de la santé à « adapter les systèmes d’information existants et à prévoir le partage des mêmes données ». En l’espèce, il est proposé d’adapter le fichier existant, c’est-à-dire AmeliPro, pour ajouter quelques informations sur le Covid-19 ; c’est ce qui nécessite le recours à la loi.

De l’autre, nous créons non pas un fichier, mais un système d’information ; la différence est importante. C’est le système d’information national de dépistage populationnel (Sidep). Il vient en appui des opérations d’identification sur la chaîne, depuis le test par prélèvement jusqu’au traitement du résultat. Si j’ai des symptômes, par exemple de la fièvre ou une perte du goût, on va me tester avec un écouvillonnage, et le prélèvement va être étiqueté dans le Sidep, ce qui permettra au laboratoire d’avoir accès aux données pour identifier le patient. Si le test fait apparaître que le patient est positif au coronavirus, le résultat est transmis à Santé publique France en vue du traitement national des données et au médecin traitant, afin qu’il puisse rappeler la personne pour l’en informer.

Entre parenthèses, je trouve le terme « traçage » un peu anxiogène.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Je pense qu’on devrait parler plutôt de « suivi épidémiologique » ; il s’agit de protéger les gens. Certes, d’aucuns seront peut-être gênés aussi par le terme « suivi » dès lors que c’est l’État qui en est chargé… Là, nous sommes vraiment sur un débat sémantique.

Mais vous avez bien compris l’idée. Il s’agit d’essayer d’identifier les personnes potentiellement malades. Nous ne créons pas un fichier national pour cela. Le système Sidep est juste une application. Et ce n’est pas une application de tracing, comme StopCovid, qui permettrait de savoir où vous étiez, avec qui vous avez été en contact, etc. C’est juste un système d’information, d’étiquetage depuis le prélèvement jusqu’au moment où l’information est rendue au patient.

Nous faisons cela, car nous avons besoin d’avoir le même système d’étiquetage que la personne ait été testée dans un laboratoire de ville, dans un laboratoire privé, sur un drive ou à domicile par une infirmière ou un médecin. À défaut, il y aurait une perte de données, et il ne serait plus possible de savoir combien de tests ont été réalisés ni combien de personnes ont été diagnostiquées, de même que nous ne serions pas certains de pouvoir identifier tous les malades pour les protéger.

Ce sont vraiment deux cadres différents.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Encore une fois, sur l’objectif à atteindre, il n’y a pas de difficulté.

En revanche, je constate toute l’énergie qui est mobilisée dans notre pays pour créer des systèmes de niveau 1, de niveau 2 ou de niveau 3 : AmeliPro, Sidep, etc. Certes, cela fait plaisir à tout le monde. Mais, comme nous le voyons régulièrement avec nos amis allemands, il y a ceux qui mettent en place des concepts et des systèmes et ceux qui sont dans la mise en œuvre pragmatique. Autant je comprends que le Gouvernement mène un combat pour installer des équipes épidémiologiques de terrain et de campagne – c’est notre vrai sujet –, autant un tel acharnement à monter des systèmes me laisse un peu plus sceptique.

Je distingue vraiment le travail de terrain, qui est indispensable et que nous encourageons pour sortir de la cloche de confinement évoquée par Bruno Retailleau, de ce besoin d’avoir des systèmes. C’est peut-être là que réside notre différence.

M. Loïc Hervé et Mme Esther Benbassa applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Monsieur le rapporteur, parmi les trente maladies à déclaration obligatoire, il y a certes la peste, qui est de moins en moins fréquente, mais également le chikungunya, la dengue et surtout la tuberculose, dont nous savons qu’elle nécessite un traitement extrêmement complexe.

Je ne suis pas le seul à défendre la proposition que je vous soumets ; l’Académie nationale de médecine l’a aussi évoquée. D’ailleurs, cette dernière ne comprend pas pourquoi, alors que l’ajout d’une maladie relève d’un simple décret, le Gouvernement ne s’est pas donné ainsi les moyens très rapidement de pouvoir faire remonter toute une masse d’informations du terrain.

Enfin, je partage totalement le point de vue de mon collègue : soyons efficaces dans l’opérationnel et évitons de monter de nouvelles usines à gaz.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Je ne comptais plus intervenir, mais les observations de notre collègue Pierre Ouzoulias m’y contraignent.

Dimanche soir, au sein de la commission des affaires sociales, et en lien avec Philippe Bas, nous avons évoqué la possibilité d’intégrer le Covid-19 dans la liste des maladies à déclaration obligatoire. Nous n’avons pas retenu cette option, parce que nous pensons qu’il s’agit d’une maladie épidémique. Elle ne reviendra peut-être plus jamais si, à l’instar de la grippe, un vaccin est trouvé. Et nous considérons que le virus peut muter, même si les études ont plutôt tendance à montrer que tel n’est pas le cas. Les autres maladies visées sont des maladies chroniques, qui arrivent régulièrement, mais qui ne sont pas épidémiques comme la grippe ou l’affection liée au Covid-19.

En revanche, l’idée qu’a développée Philippe Bas est intéressante : autant l’affection due au Covid-19 ne peut pas figurer parmi les maladies à déclaration obligatoire parce que le virus peut très bien disparaître, autant ce régime est un peu obsolète. Il faudra le revoir dans le sens de ce que nous sommes en train de mettre en place pour le Covid-19.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 72, présenté par MM. Sueur, Kanner, Antiste et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Jomier, Lurel et Marie, Mmes Monier, Préville et de la Gontrie et MM. P. Joly, Lozach, Montaugé, Éblé et Vaugrenard, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

Aux seules fins de lutter contre la propagation de l’épidémie de covid-19 et pour la durée strictement nécessaire à cet objectif ou, au plus tard, pour une durée d’un an à compter de la publication de la présente loi, les données relatives aux personnes atteintes par ce virus et aux personnes ayant été en contact avec elles peuvent être partagées, sous réserve du recueil du consentement des personnes intéressées, dans le cadre d’un système d’information créé par décret en Conseil d’État et mis en œuvre par le ministre chargé de la santé.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Dans le droit fil de ce qu’a indiqué Marie-Pierre de la Gontrie, notre groupe a énormément travaillé, comme chacun des groupes, afin de tenter de trouver les meilleures rédactions pour concilier l’impérieuse nécessité de protéger la santé publique et de lutter contre le fléau et l’impérieuse nécessité de respecter la vie privée et les libertés publiques. Chacun a au fond de lui ces différentes exigences. Nous ne sommes pas parvenus à un accord ; le mieux est de le dire. La langue de bois n’est jamais très utile.

J’ai donc l’honneur de présenter un amendement au nom de quinze collègues ; sans doute d’autres partagent-ils ce point de vue. Nous avons considéré que le consentement des personnes concernées ainsi, évidemment, que le respect du secret médical étaient nécessaires. Telle est notre position. Elle n’est pas majoritaire, mais nous avons tenu à en faire part au Sénat.

Un certain nombre de nos collègues ont fait valoir la position de la commission des lois et de la commission des affaires sociales dans leur majorité : exiger ce consentement serait contraire à l’objectif impérieux de santé publique.

Disons donc les choses comme elles sont : nous proposons cet amendement pour la clarté du débat, en sachant très bien que notre position est distincte de celle de la commission. Au demeurant, il y a de nombreux points sur lesquels notre groupe est d’accord avec cette dernière. Je pense en particulier aux six garanties – nous avons participé à leur rédaction, sur l’initiative et en accord avec Philippe Bas –, qui sont pour nous indispensables, au nom des libertés publiques.

Cet amendement est donc un amendement de clarification, afin de permettre à chacun d’être fidèle à ses positions. Je reconnais qu’il est peut-être inhabituel de présenter les choses ainsi, mais l’engagement politique n’a de sens que si l’on respecte le parler vrai.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 73, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1, au début

Supprimer les mots :

Par dérogation à l’article L. 1110-4 du code de la santé publique,

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Cet amendement vise à maintenir le respect du secret médical.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 82, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Après la première occurrence du mot :

aux

insérer le mot :

seules

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Cet amendement tend à encadrer les finalités auxquelles sont destinées la création d’un système d’information et l’adaptation des systèmes d’information existants, conformément à l’intitulé du chapitre II du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 204, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

par les mots :

strictement nécessaire à cet objectif ou, au plus tard, pour une durée d’un an à compter de la publication de la présente loi

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Cet amendement vise à permettre la mise en œuvre du système d’information pour la durée strictement nécessaire à l’objectif ou, au plus tard, pour une durée d’un an.

En effet, il est possible que la fin de l’état d’urgence sanitaire ne coïncide pas avec l’extinction totale de l’épidémie. Il nous faudrait alors continuer à casser des chaînes de contamination quand bien même nous aurions levé l’état d’urgence sanitaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 83, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

des données

par les mots :

les données

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 65, présenté par Mme Benbassa et M. Gontard, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Supprimer les mots :

, le cas échéant sans le consentement des personnes intéressées,

II. – Après l’alinéa 11

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Les données mentionnées au I et II ne peuvent être collectées qu’avec le consentement des personnes intéressées.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de l’exprimer, le dispositif proposé à l’article 6 me semble particulièrement intrusif et bureaucratique à la fois.

En plus, aucun encadrement n’est prévu pour limiter les effets pernicieux d’un tel système. En ne prévoyant qu’un simple rapport non astreignant de la CNIL comme garde-fou, le Gouvernement démontre sa volonté de légiférer en solitaire sans accepter que sa prise de décision soit pondérée par les experts. À cet égard, j’avoue qu’il y a eu quelques évolutions depuis deux jours.

La création d’un fichier recensant nos concitoyens n’a rien d’anodin ; l’histoire nous l’a bien démontré. Si un tel dispositif devait voir le jour, il semble impératif que de nouvelles précautions soient prises pour encadrer les atteintes disproportionnées aux données personnelles de nos concitoyens.

Nous proposons donc par cet amendement de faire en sorte que tout prélèvement de données ne soit réalisé qu’avec le consentement de la personne porteuse du virus. Il paraît évident qu’il faille consulter le citoyen avant que ces informations privées ne soient transférées aux autorités alors même qu’elles devraient relever du secret médical.

Bien que nous soyons opposés par principe à un système de prélèvement des données dans un objectif de fichage, il nous semble qu’un droit de regard préalable du malade concerné permettrait de tempérer un dispositif qui serait uniquement régulé par les autorités ; cela créerait une relation de confiance.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 177, présenté par M. Bonnecarrère et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Supprimer les mots :

, le cas échéant sans le consentement des personnes intéressées,

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Cet amendement, qui est présenté par l’ensemble de mon groupe, vise à obtenir le consentement des intéressés pour figurer dans ce que l’on nous a présenté tantôt comme un fichier, tantôt comme un système d’information ; tout le monde a bien compris que c’était la même idée.

Autant nous sommes favorables aux équipes épidémiologiques de terrain pour faire le travail tendant à casser les chaînes de contamination, autant nous considérons que les données médicales d’un individu lui sont personnelles et qu’il lui appartient de consentir, ou non, à ce qu’elles figurent dans un fichier national d’information.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

En règle générale, je n’aime pas évoquer des éléments personnels. Pourtant, je ferai une exception cette fois-ci. Voilà quasiment un an jour pour jour, je faisais campagne aux élections européennes – mes collègues ici présents connaissent ma passion pour l’idée européenne – pour une liste intitulée Renew Europe. Essayant de convaincre mes concitoyens, ce qui n’était pas forcément un exercice très facile, de l’importance de la construction européenne, je mettais notamment en avant l’argument suivant : si j’étais américain, les données personnelles me concernant appartiendraient à des sociétés commerciales ; si j’étais chinois, elles appartiendraient à mon État ; étant européen, elles m’appartiennent. Ce qui me contrarie véritablement ce soir, c’est de me rendre compte que ce que j’indiquais à mes concitoyens du Tarn ne sera bientôt plus vrai ; mes données personnelles appartiendront à l’État alors que je n’aurai pas donné mon accord.

Je comprends le combat pour la santé de mes concitoyens, et je répète que le combat épidémiologique de terrain doit être mené. Mais la manière de le conduire, par ce système centralisé d’information, est profondément perturbante. Je le dis en toute liberté, monsieur le ministre. J’ai voté en faveur du plan de déconfinement qui nous a été présenté par le Premier ministre hier. Vous constatez que ma position n’est pas motivée par des considérations de politique nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Les amendements n° 72 et 73 concernent tous deux le secret médical. Encore une fois, c’est précisément parce que nous ne pouvons pas compter sur les seuls médecins pour traiter des centaines de milliers de cas individuels par semaine qu’il faut déroger au secret médical et que nous sommes réunis ce soir. Si cette question n’était pas posée, le présent projet de loi n’existerait pas.

Ce soir, nous avons une responsabilité : soit nous acceptons que le secret médical soit partagé, moyennant quoi nous instituerons un système qui permettra de remonter les filières de contamination, soit nous renonçons à la mise en place d’un tel dispositif, et nous pourrons aller nous coucher en ayant la très grande satisfaction de nous dire que le secret médical est sauf. Pour ma part, je n’échangerais pas cette satisfaction contre celle que nous pourrions avoir en instituant un système efficace permettant de découvrir toutes les filières de contamination et de protéger nos concitoyens.

C’est la raison pour laquelle la commission des lois, dont la position à cet égard est d’ailleurs partagée par la commission des affaires sociales, émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

L’amendement n° 82 est un amendement de précision, et la précision dont il s’agit nous paraît heureuse. Je profite d’ailleurs de l’occasion pour saluer le sens de la précision de Jean-Pierre Sueur. L’avis de la commission est favorable.

J’en viens à l’amendement n° 204, présenté par le Gouvernement. Monsieur le ministre, vous préférez votre texte au nôtre ; je ne songe pas à vous en blâmer. Mais c’est tout de même un effort que vous sollicitez de notre part en nous demandant de déroger au secret médical et d’accepter un système d’information national. Dans un souci d’efficacité, vous ne pouvez pas nous demander en plus de faire survivre ce système à la fin de l’état d’urgence sanitaire. Si, à cette date, notre pays a besoin de proroger le dispositif, cela signifiera que la crise n’est pas achevée, et vous pourrez alors compter alors sur notre bienveillance si vous revenez devant le Parlement.

Mais ne nous demandez pas aujourd’hui de prolonger la durée d’application du système alors que vous aurez vous-même décidé de ne pas prolonger l’état d’urgence ; ce ne serait pas cohérent. Nous sommes dans un régime juridique d’exception. Nous avons veillé dans la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 à faire en sorte qu’il s’éteigne de lui-même le 22 mars 2021. Si nous avons besoin de le renouveler à ce moment-là, nous en délibérerons ensemble. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

La précision que notre collègue Jean-Pierre Sueur nous propose d’ajouter à l’amendement n° 83 nous a semblé, cette fois, inutile. Avis défavorable.

Par ailleurs, le système que nous avons retenu nous semble plus efficace que celui qui est proposé par les auteurs des amendements n° 65 et 177. Il est déjà intégré au texte de la commission. C’est le système du droit d’opposition, qui est assez classique en matière de traitement informatisé des données. Il nous a paru nécessaire d’apporter cette garantie, que le Gouvernement n’avait pas prévue.

Retenir le principe du consentement préalable, c’est tout de même assumer le risque qu’un nombre vraiment trop important de personnes refusent de prêter leur concours à ce qui est de nécessité publique : remonter les filières de contamination pour protéger nos concitoyens.

C’est la raison pour laquelle l’avis des deux commissions – je me permets de le dire au nom de mon excellent collègue Alain Milon, mais il pourra le faire lui-même – est défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n° 72 et 73 et un avis favorable sur l’amendement n° 82.

Encore une fois, l’amendement du Gouvernement vise à prolonger l’utilisation d’un système d’information existant. Si le système Covid s’arrête en même temps que l’état d’urgence sanitaire, je ne suis pas sûr que l’épidémie s’arrête longtemps. S’il faut revenir devant le Parlement pour obtenir la prolongation du dispositif, nous le ferons évidemment, mais c’est du temps qui pourrait peut-être être utilisé différemment…

Enfin, le Gouvernement émet un avis de sagesse sur l’amendement n° 83 et un avis défavorable sur les amendements n° 65 et 177.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

L’amendement n° 72 ne concerne pas simplement le secret médical. À cet égard, le président Bas a soutenu que ce secret pouvait ne pas être nécessairement respecté, à condition qu’existe un motif sérieux. Je ne parle pas là de respect de la législation, car ce n’est pas le sujet. Ce qui est en question ici, c’est le consentement des personnes.

Vous le savez, la législation française exige habituellement que l’on recueille le consentement des personnes faisant l’objet d’une collecte de données. Pourtant, dans le texte finalement adopté par la commission des lois – j’ai déjà évoqué l’avancée parfois insuffisante de nos travaux ! –, le principe du consentement n’a pas été conservé.

J’évoque ce point, car Philippe Bas, avec cette ironie mordante qui nous fait souvent sourire, n’avait peut-être pas pris suffisamment au sérieux les amendements n° 207 et 208 du Gouvernement, que je viens pour ma part de découvrir. Ces amendements prévoient que doivent être intégrés dans le fichier les résultats médicaux, y compris ceux qui ne sont pas positifs, alors même que nous sommes censés traquer une infection, et que peuvent avoir accès à certaines données les organismes qui assurent l’accompagnement social des personnes concernées dans la lutte contre l’épidémie ! En clair, nous retrouvons les acteurs visés par le Premier ministre voilà quelque temps : les collaborateurs des collectivités et de l’État dans les territoires et les associations. Du coup, le champ des personnes concernées devient considérable.

Mes chers collègues, avez-vous lu cet article du dernier Journal du dimanche, qui aura peut-être fait rêver certains d’entre vous ? §Il y était question d’un aréopage qui participe d’ores et déjà à ce travail de recherche, notamment au sein de l’AP-HP, mais de manière un peu artisanale. On y trouve diverses catégories de personnes, par exemple des ingénieurs, mais aussi des hôtesses de l’air. Formidable !

Je le dis au président Bas, ne pas prenons pas cette question à la légère. Je vais conclure, car je ne dois pas abuser de la bienveillance dont fait toujours preuve le président Gérard Larcher.

Sourires.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

Le secret médical et le consentement sont deux données fondamentales, deux sujets assez graves pour que nous décidions, à quelques-uns, de présenter l’amendement n° 72. Votre esprit vif vous aura en effet permis de noter qu’il n’a pas été signé par l’ensemble des membres du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Je n’abuserai pas de votre bienveillance, monsieur le président…

Mon groupe politique s’est non pas divisé, mais, disons-le, séparé à propos de la conception, que l’on pourrait qualifier de philosophique, de ce système d’information. Les signataires de l’amendement n° 72 souhaitent que celui-ci repose sur le consentement des personnes « fichées ».

Nous sommes parfaitement conscients que la frontière est fragile entre le respect des libertés individuelles et l’efficacité de la protection sanitaire, mais nous pensons qu’il ne faut pas mettre le doigt dans un engrenage qui, un jour ou l’autre, nous dépassera peut-être. Nous avons d’ailleurs cité, dans l’objet de l’amendement, les propos du Premier ministre prononcés mardi dernier à l’Assemblée nationale : « Notre politique repose, à cet égard, sur la responsabilité individuelle et sur la conscience que chacun doit avoir de ses devoirs à l’égard des autres. » C’est parce que nous partageons cette maxime que nous avons déposé cet amendement, tandis que la majorité de notre groupe suivait la position de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Mme de la Gontrie a précisé précédemment quelle était notre position. Nous avons accepté d’examiner l’article 6, mais sans donner pour autant un blanc-seing au Gouvernement. La question de l’encadrement de cet article n’en devient que plus essentielle.

Je salue les avancées importantes de la commission. Nous y contribuons également au travers de nos amendements, qui ont permis d’ajouter de nombreux garde-fous au texte initial du Gouvernement. Je pense en particulier aux points relatifs à la durée du traitement, mais également au comité de suivi, qui sera primordial.

Il reste encore des zones d’ombre et beaucoup de flou. Au regard de la finalité des traitements et de l’ampleur des données collectées, notamment celles qui concernent la santé, on ne peut absolument pas laisser ces zones dans l’obscurité.

La question du consentement est essentielle. Le règlement général sur la protection des données (RGPD) dispose ainsi que le consentement doit être donné par un acte positif clair par lequel la personne concernée manifeste de façon libre, spécifique, éclairée et univoque son accord au traitement des données à caractère personnel la concernant.

La prise en compte du consentement serait de nature, selon moi, non pas à complexifier les procédures, mais au contraire à expliquer la démarche et la finalité du dispositif.

Monsieur le rapporteur, vous avez présenté un amendement, qui a été adopté en commission et que je salue, visant à garantir et à préciser en aval les droits des tiers – droits d’information, de rectification, d’opposition – qui seront concernés par ces traitements de données. Cet arsenal est tout à fait positif, mais je regrette que rien ne soit prévu pour rechercher et recueillir en amont le consentement des individus.

En tant que législateurs garants des libertés publiques, nous devons faire apparaître dans la loi ce processus de recherche en amont, j’y insiste, du consentement. En effet, l’information portant sur la nature des données transmises, la finalité et l’opération de traitement sont essentielles pour le patient et responsabilisent les personnes. Elle participe de la transparence et de la confiance, deux facteurs qui conditionnent la réussite de ce système.

Oui, monsieur le ministre, nous faisons un pari. Mais cette démarche ne sera gagnante que si la stratégie sanitaire globale tient bon – les enquêteurs sanitaires, par exemple, devront être nombreux –, …

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

… et si l’encadrement de ce système est adopté par notre assemblée et maintenu, je l’espère, par la commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mes collègues Marie-Pierre de la Gontrie, Patrick Kanner et Sylvie Robert n’ont pas fait mystère du fait que nous avions eu au sein du groupe socialiste des discussions assez longues, intéressantes et sérieuses sur la manière d’aborder l’article 6.

Pour ma part, je ne suis pas signataire de l’amendement n° 72 et je ne le voterai pas. Je sais en effet que, malheureusement, à défaut de vaccin et de traitement hier, avant-hier et aujourd’hui en France, en Haïti ou en Centrafrique, il n’y a pas d’autre moyen pour éradiquer une épidémie que d’identifier les personnes atteintes et celles avec lesquelles elles ont été en contact, et de les isoler. Cela tient, hélas, à l’histoire de l’état sanitaire de la planète, qui est aussi la nôtre.

Plusieurs collègues ont dit que l’on faisait un pari. J’aimerais, monsieur le ministre, que vous puissiez évaluer cette incertitude et le risque que nous prendrons en n’adoptant pas l’amendement qui tend à exiger le consentement et à rendre l’article 6 inopérant.

Si le climat dans lequel se déroule ce débat est cordial, le contexte, en revanche, n’inspire pas confiance. Nous apprenons, un jour, que des dispositifs sont déjà lancés, puis que vous avez subrepticement ajouté un amendement visant à étendre aux cas non positifs l’inclusion dans le fichier… Ce faisant, vous amendez vous-même votre texte initial, puisque votre amendement tend non pas à revenir sur le texte de la commission, mais à élargir votre système !

En votant l’article 6, qui exige que l’on passe outre le consentement et le secret médical, nous ferons preuve d’une grande responsabilité. De ce point de vue, il fut désagréable de lire, hier, que le chef de votre parti avait trouvé utile de qualifier le Sénat d’« irresponsable ». En effet, nous aurions eu le mauvais goût de ne pas cacher aux Français que nous ne sommes pas toujours d’accord avec votre méthode, la manière dont vous procédez et vos arrière-pensées, que nous découvrons au fur et à mesure !

Pour autant, je le répète, je ne voterai pas l’amendement n° 72.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Je me dois d’apporter une précision. Si un patient qui a été diagnostiqué porteur du virus, par exemple parce qu’il est malade, refuse de prêter son concours à la recherche des personnes qu’il a rencontrées et pu contaminer, c’est très grave ! C’est pourquoi le consentement est incompatible avec la mise en œuvre de l’objectif d’alerte de toute personne exposée au risque de l’épidémie.

Je préfère le consentement au non-consentement, mais si l’on veut faire du dépistage, indépendamment même de tout système d’information, il ne faut pas que la personne malade refuse de dire qui elle a rencontré les jours précédents. C’est tout simple !

C’est la raison pour laquelle il est absolument impossible de maintenir ce projet de système d’information et, en même temps, d’imposer le consentement. Le droit d’opposition, en revanche, est un autre sujet.

Il faut cependant apporter une garantie importante : la plateforme de l’assurance maladie qui téléphonera aux cas contacts, c’est-à-dire les personnes rencontrées par le malade, ne devra pas indiquer l’identité de celui-ci, qui pourrait apparaître comme un dénonciateur.

Il est important, pour protéger les cas contacts, de les alerter et de leur recommander de se faire dépister, mais aussi de ne pas donner à cette occasion l’identité de la personne malade.

Les représentants de l’assurance maladie qui étaient auditionnés ce matin à l’Assemblée nationale, car les deux chambres travaillent en même temps, ont indiqué qu’il n’était pas prévu dans le dispositif mis en place de dévoiler l’identité du patient zéro lorsque sont contactées les personnes qu’il a rencontrées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Notre faiblesse face à ce virus tient à ce que nous connaissons très peu de choses sur sa propagation et sur le processus de contamination. Les systèmes épidémiologiques nous permettront d’y voir plus clair, de sortir de la nuit, même si c’est sans doute pour aller vers le brouillard… Si nous n’y recourons pas, nous ne disposerons d’aucune donnée.

Je souhaite relier différentes interventions, qui portaient notamment sur le RGPD et sur le régime d’appartenance des données.

Le RGPD est le régime le plus protecteur au niveau mondial dès lors qu’il n’y a pas de consentement – Philippe Bas vient très justement d’expliquer que la levée du consentement rendrait le système inutile. Ce règlement prévoit en effet que, s’il n’y a pas de consentement, une loi est nécessaire. Voilà pourquoi il ne sera peut-être pas utile de légiférer sur l’application StopCovid…

Ce régime est donc non seulement protecteur, mais aussi souple. Son article 15 est en effet très clair. Dans le cas d’une crise telle que celle que nous connaissons, il est possible de déroger à un certain nombre de règles. Nous ne nous écartons pas du RGPD.

Pour conclure, je veux essayer de rassurer Philippe Bonnecarrère, à moins que je ne parvienne qu’à l’inquiéter…

Le RGPD ne nous confie pas, pardonnez-moi de vous le révéler, la patrimonialisation de nos données personnelles. La preuve en est que nos données partent chez les Gafam et qu’il y a quelques semaines – vous pourrez nous le confirmer, monsieur le ministre – Google a révélé très exactement quelle était, dans 131 pays, la fréquentation des pharmacies, des parcs publics et d’un certain nombre de commerces alimentaires.

En clair, les Gafam en savent plus aujourd’hui que l’État français sur les mouvements de ses propres citoyens ! Telle est la situation dans laquelle nous sommes. Il faut rétablir l’équilibre, avancer pour mieux connaître l’épidémie et prévoir, comme l’a fait Philippe Bas, un maximum de garanties. C’est pourquoi nous ne pourrons pas, monsieur le ministre, accepter la demande d’extension que vous souhaitez. Nous vous l’avions indiqué dans notre requête. Je suis certain que vous apprécierez la perspective de venir nous voir plus souvent !

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement est adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 39, présenté par Mme Rossignol, MM. Daudigny, P. Joly et Kerrouche, Mmes Préville et Meunier, M. Assouline, Mme Féret, M. Lurel, Mme Taillé-Polian, MM. Gillé, Leconte et Manable, Mme Lepage, MM. Tourenne, M. Bourquin et Antiste et Mmes Conway-Mouret et Perol-Dumont, est ainsi libellé :

Alinéa 2

1° Après les mots :

en outre

insérer les mots :

, sous la direction d’un médecin,

2° Supprimer les mots :

être autorisés par décret en Conseil d’État à

3° Supprimer la seconde occurrence du mot :

La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Nous évaluons depuis le début de nos travaux à quel point le système qui est en train de se mettre en place est dérogatoire, entre autres, d’un certain nombre de principes fondateurs du droit de la santé, en particulier le secret médical, lequel – je le rappelle – est non pas simplement une obligation déontologique pour les médecins, mais aussi, et avant tout, un droit des patients.

Il est nécessaire de lever le secret médical pour instaurer ce système. Pour autant, il nous semble utile de prévoir un certain nombre de contrôles, de verrous, et de conserver l’esprit du droit de la santé, en précisant qu’il doit être procédé au recueil des données et à leur exploitation sous l’autorité et la direction d’un médecin. C’est d’ailleurs déjà le cas au sein de la sécurité sociale ou des ARS, où des médecins inspecteurs pilotent ce type de dispositif. Cette précision nous paraît utile.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 185 rectifié n’est pas soutenu.

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 84, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

collectées

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

ou partagées par ces systèmes d’information créés ou adaptés à ces fins ne peuvent être conservées à l’issue de la durée définie au premier alinéa.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le présent amendement vise à étendre la durée limite de conservation des données collectées dans le nouveau système d’information aux données partagées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 48 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 188, présenté par Mme Joissains et M. Bonnecarrère, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Ces données ne peuvent en aucun cas être hébergées à l’extérieur de l’Union européenne.

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Cette idée s’inscrit dans la perspective indiquée par le président Retailleau à propos des risques pesant sur la souveraineté numérique. Mme Morin-Desailly serait beaucoup plus apte que moi à développer ce sujet, qu’elle traite depuis longtemps.

L’amendement, rédigé par Mme Joissains, se justifie par son texte même.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 182 rectifié, présenté par MM. Gremillet et de Legge, Mme Deromedi, MM. Perrin et Raison, Mmes Deroche, Chauvin et Noël, M. Priou, Mme Malet, MM. Cuypers, Pellevat et Pierre, Mmes Thomas et Chain-Larché, MM. Kennel, Bascher, Lefèvre, Charon et B. Fournier, Mme Lamure, MM. Houpert, Piednoir et Bonne, Mme Micouleau, MM. Bouchet, Vogel et Vaspart, Mme Ramond, M. Danesi, Mme Canayer, MM. Joyandet, de Montgolfier, Grosdidier, Sido, Leleux et Regnard, Mmes Garriaud-Maylam et Lassarade, M. Bonhomme, Mme Morhet-Richaud, M. Brisson et Mme Dumas, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il fixe également les conditions de protection des données recueillies dès l’installation des brigades sanitaires jusqu’au terme de leur mission et les conditions de leur hébergement en open data dans un data center situé sur le territoire national.

La parole est à M. Max Brisson.

Debut de section - PermalienPhoto de Max Brisson

Cet amendement, proposé par Daniel Gremillet, prévoit qu’un décret fixe les conditions de protection des données recueillies dès l’installation des brigades sanitaires et jusqu’au terme de la mission de celles-ci, ainsi que les conditions de l’hébergement de ces données en open data dans un data center situé sur le territoire national.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Max Brisson

Je retire l’amendement n° 182 rectifié, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 182 rectifié est retiré.

L’amendement n° 190, présenté par MM. Malhuret, Wattebled et Capus, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Dans l’hypothèse où une exploitation statistique à des fins de recherche scientifique se révèle nécessaire, celle-ci est réalisée uniquement sur des données anonymisées.

La parole est à M. Dany Wattebled.

Debut de section - PermalienPhoto de Dany Wattebled

La protection de la vie privée et la confiance dans le système d’information impliquent qu’y soient supprimées toutes les données à caractère personnel, dès lors que leur utilité n’est plus avérée. De la même manière, la finalité spécifique de ce dispositif ne doit pas permettre d’enrichir les systèmes d’information existants.

Cet amendement, proposé par Claude Malhuret, est issu d’un échange avec l’Assemblée des départements de France (ADF) portant sur la protection des données personnelles.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 205, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Cet amendement vise à supprimer la disposition, insérée par la commission, limitant le périmètre des données de santé qui pourront être renseignées dans les systèmes d’information mis en place.

Les catégories de données seront fixées par décret en Conseil d’État, pris après avis de la CNIL, et restreintes au strict nécessaire. Il n’est donc pas opportun d’inscrire cette disposition dans la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Monsieur le ministre, nous ne voulons pas vous donner un blanc-seing pour rédiger votre décret comme vous l’entendrez !

Toute donnée étrangère à la contamination ou non par le Covid-19 doit être écartée. À défaut, seraient mentionnés dans le fichier de santé, à côté de l’identité de la personne, les occurrences de diabète, les maladies cardiovasculaires et respiratoires, les précédents de cancer… Et cela ne servira à rien pour retrouver des personnes ayant été en contact avec un malade ! Or telle est la seule finalité qu’il convient de poursuivre, outre la finalité épidémiologique.

S’il vous plaît, monsieur le ministre, renoncez à cet amendement ! Cela augurera d’un bon accord entre nous en vue de l’aboutissement de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Monsieur le ministre, accédez-vous à ce souhait du président de la commission des lois ?

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Non, je maintiens mon amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

L’amendement proposé par le Gouvernement est passionnant, car il nous conduit au point essentiel dont nous discutons depuis le début de cette séance.

Nous avons un problème, que nous pouvons régler de deux façons.

Première possibilité : nous respectons l’anonymat, et il n’y a aucune difficulté à ce que figurent dans le système d’information générale toutes les données possibles et imaginables permettant de mener un travail normal de recherche.

Seconde possibilité : nous acceptons le principe de l’identification. À ce moment-là, comme l’a indiqué le président Bas, il faut réduire le nombre des données en le limitant à celles qui sont relatives à la diffusion du virus.

J’ai dit précédemment qu’il fallait laisser travailler les équipes épidémiologiques et être très prudent quant à la mise en place de ce système national d’information.

Si vous nous laissez entendre, monsieur le ministre, qu’au bout du bout le Gouvernement veut maintenir l’inscription dans le fichier des éléments relatifs à l’identification, des données personnelles et, en même temps, de l’ensemble des autres données, alors vous nous mettez dans une situation impossible ! Il est vrai que nous raisonnons à la manière de la majorité de la commission des lois ou, comme nous l’avons fait sur le modèle des cadets de Gascogne, c’est-à-dire en connaissant le résultat, mais en essayant tout de même de faire passer notre message.

Sans reprendre le débat sur les libertés publiques, j’ajoute qu’une telle disposition déséquilibrerait excessivement le système.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Il ne s’agit certainement pas de disposer d’une liste non exhaustive de données de santé ! Cela n’aurait aucun intérêt dans le cadre de la gestion urgente d’une crise épidémique liée à un virus donné.

Vous demandez que soit mentionné dans le dossier de chaque personne le seul résultat, positif ou négatif, du test. Pour vous répondre, je vais mettre ma casquette de médecin – je le fais rarement –, et je crois que les professionnels de santé qui siègent dans cet hémicycle ne me contrediront pas.

La PCR est un test biologique dont le résultat peut être positif ou négatif. Imaginons qu’un patient ait subi, dans le cadre de la démarche diagnostique, un scanner pulmonaire. De nombreux médecins prescrivent cet examen, que l’on appelle scanner low dose, pour rechercher d’éventuelles lésions sous- jacentes qui, en l’absence de test PCR positif, pourrait fournir un argument radiographique attestant de la présence du virus. La rédaction adoptée en commission ne permet pas de faire mention de cet examen dans le dossier.

Imaginons, par ailleurs, que je présente un signe clinique pathognomonique, comme une agueusie ou une anosmie, que l’on retrouve fréquemment dans les affections dues à un coronavirus. En cas de fièvre et d’anosmie, même si le résultat de la PCR est négatif – je rappelle qu’il y a 20 % de « faux négatifs » –, on est très probablement en présence d’un coronavirus. Là encore, la rédaction proposée par la commission ne permet pas de mentionner ces données.

Je ne suis pas certain que le fait d’empêcher des médecins d’indiquer des données qui leur semblent essentielles pour le suivi des malades soit d’un grand appui pour le diagnostic !

Je ne me battrai davantage, car il est tard et je ne suis pas sûr de parvenir à vous convaincre. Je souhaite que vous compreniez au moins l’esprit qui est le nôtre au moment où nous vous présentons ce texte. Notre objectif est d’aider autant que possible les médecins à soigner leurs patients. Je rappelle, par ailleurs, que la CNIL pourra donner un avis sur toutes les données contenues dans ce dossier.

Si tout est inscrit dans la loi sans rien garder pour le décret, il sera encore plus simple d’obtenir l’avis conforme de la CNIL, puisqu’elle n’aura plus rien à dire !

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 206, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer les mots :

garantit et

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Cet amendement vise à préciser la notion de droit d’opposition, sans supprimer celui-ci.

Je l’ai dit précédemment, on peut refuser d’apparaître en tant que cas contact initial ou patient zéro dans une chaîne de contamination. Il est impossible, en revanche, de refuser de figurer dans le système d’information, car cela entraînerait une perte de données essentielles empêchant de tracer la chaîne de contamination.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

M. le président de la commission comme M. le ministre ont un esprit sans doute plus rapide et agile que le mien : j’avoue ne pas avoir compris l’objet de cet amendement. Je saurais gré à l’un ou l’autre de nous l’expliquer, faute de quoi nous devrions prendre parti sans comprendre l’enjeu de notre vote.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Votre commission a voulu inscrire dans le dur de la loi que toute personne disposerait d’un droit d’opposition vis-à-vis du Sidep. Si l’on conservait cette notion très large, chacun pourrait tout simplement refuser de participer à ce système d’information, ce qui nuirait à notre volonté de suivi épidémique sur les territoires. Le droit d’opposition, tel qu’il découle de la rédaction actuelle, permet à chacun de décider qu’il ne figurera pas dans le tracing ou la recherche des chaînes de contamination.

Nous proposons pour notre part de conserver dans le texte le concept de droit d’opposition tout en le précisant de manière qu’il s’applique à tout, sauf à la participation de base au tracing des chaînes de contamination. Sans cette précision, si vous êtes malade demain – je ne vous le souhaite pas ! –, qu’on vous appelle et que vous répondez : « Je n’ai pas envie », c’est terminé ! Auquel cas, non seulement on vous perd, mais on perd aussi toutes les personnes que vous avez potentiellement contaminées, ce qui fragilise tout le dispositif.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 71 rectifié, présenté par Mmes Benbassa et Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 6 à 12

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Le dispositif proposé par le Gouvernement est flou ; la forme que ces « brigades » pourraient prendre n’est pour l’heure pas connue précisément.

Certaines caractéristiques se dégagent cependant. Afin de permettre la détection des chaînes sociales de contamination, le projet de loi prévoit la création d’un système d’information qui comporterait des données de santé et d’identification. La collecte de ces informations devrait ensuite servir à déterminer les personnes ayant été en contact avec les malades, afin de tuer dans l’œuf toute propagation du virus. Pour ce faire, ces données devront être accessibles à des agents agréés, notamment au sein des ministères.

À de nombreux égards, cet article 6 est problématique ; tout le monde l’a plus ou moins reconnu. Il l’est, tout d’abord, car il permet la collecte de données privées. La CNIL nous a d’ores et déjà alertés sur les dangers que pourrait entraîner la création d’une liste des personnes malades. Rien ne permet en effet de garantir que des mesures coercitives et discriminatoires ne seront pas prises à l’encontre de ces dernières dans le but de contenir la pandémie. De plus, le fait que ces données médicales soient transmises à des membres du personnel des ministères porte atteinte au principe général et absolu du secret médical, qui est un élément fondateur et primordial de notre droit de la santé. Enfin, rien dans la rédaction du projet de loi ne garantit l’anonymisation des personnes malades susceptibles de pâtir d’une utilisation ultérieure du fichier constitué.

Mes chers collègues, la santé publique est l’affaire de tous, elle est notre objectif commun, mais il ne saurait être atteint au prix de la diffusion de certaines de nos données personnelles, et certainement pas au détriment du secret médical.

Le présent amendement vise donc à expurger l’article 6 de sa substance la plus attentatoire à la vie privée de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 207, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Après le mot :

résultats

insérer les mots :

, y compris non positifs,

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Cet amendement, très important, vise à permettre la transmission de tous les résultats de tests, y compris non positifs, dans le cadre du Sidep, de manière que ce système puisse remplir son objectif. Si on laissait des cases vacantes, sans inscrire que le résultat du test n’est pas positif, on subirait de nouveau des pertes de données.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 85, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

III. – Outre les autorités mentionnées au I, tout organisme peut participer à la mise en œuvre de ces systèmes d’information que dans la mesure où il répond strictement aux finalités et pour les seules données de santé définis au II. L’accès et la consultation de ces données sont exercés par ou sous le contrôle d’un professionnel de santé.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Dans le but d’assurer le respect du secret médical, cet amendement vise à encadrer fortement la liste des organismes pouvant participer à la mise en œuvre des systèmes d’information, en soumettant leur participation aux finalités retenues ; leur accès aux données de santé devrait en outre être limité et la consultation de ces données ne pourrait être effectuée que par un professionnel de santé, ou sous son contrôle.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 208, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les organismes qui assurent l’accompagnement social des intéressés dans le cadre de la lutte contre l’épidémie peuvent recevoir les données nécessaires à l’exercice de leur mission.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Cet amendement vise à permettre la transmission à certains organismes de données nécessaires à l’accompagnement social des personnes vulnérables, dans le cadre des mesures prises pour lutter contre l’épidémie du Covid-19. Ces organismes peuvent en particulier être les services des collectivités territoriales, ceux de l’État dans les territoires, ou encore des associations. Il ne s’agira que de ceux qui sont spécifiquement chargés du suivi des intéressés dans le cadre de la crise sanitaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Sur l’amendement n° 71 rectifié, l’avis de la commission est défavorable. En effet, il tend à supprimer les finalités des systèmes d’information prévues dans le texte ; or, si cette précision n’était pas apportée, le dispositif pourrait être utilisé à n’importe quelle fin, ce qui, si je ne me trompe, irait à l’encontre des intentions des auteurs de cet amendement.

L’amendement n° 207 du Gouvernement reçoit pour sa part un avis favorable de la commission. Il est de fait important, dans le cadre du suivi des personnes qui ont été exposées à un risque de contamination, de savoir que leur premier test de dépistage a été négatif. Il faut cependant continuer de les suivre, parce que ce premier résultat pourrait être démenti par un second test ; pendant cette période, ces personnes sont invitées à rester en quatorzaine. Cet amendement vise à préciser expressément – cela était déjà implicitement prévu – que le fichier contiendra à la fois les résultats positifs et les résultats négatifs des tests. Nous sommes d’accord avec le Gouvernement sur ce point.

Sur l’amendement n° 85, la commission émet un avis défavorable. En effet, il tend à supprimer la liste des autorités qui pourront avoir accès aux données de santé et à exiger que cet accès soit soumis à un contrôle par un professionnel de santé. Or c’est précisément parce qu’on n’aura pas toujours sous la main un tel professionnel que ce projet de loi est nécessaire !

Enfin, sur l’amendement n° 208 du Gouvernement, je voudrais parvenir à une transaction avec M. le ministre : nous serions favorables à son adoption, à condition qu’il soit rectifié de manière à faire précéder le mot « nécessaires » du mot « strictement ». Il ne doit s’agir que des données strictement nécessaires. Le Gouvernement y consentirait-il ?

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Volontiers, monsieur le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je suis donc saisi d’un amendement n° 208 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

Alinéa 12

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les organismes qui assurent l’accompagnement social des intéressés dans le cadre de la lutte contre l’épidémie peuvent recevoir les données strictement nécessaires à l’exercice de leur mission.

Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements n° 71 rectifié et 85 ?

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Il est défavorable, à l’instar de celui de la commission.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement est adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 49 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 38 rectifié ter, présenté par M. Kerrouche, Mme Harribey, MM. Marie, Durain, Kanner et Sueur, Mme Ghali, M. Dagbert, Mmes Lubin et de la Gontrie, M. Antiste, Mme S. Robert, MM. Daudigny et Joël Bigot, Mme Monier et M. Duran, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Tout traitement automatique par un algorithme d’intelligence artificielle des données des systèmes d’information prévus au présent article est interdit.

La parole est à M. Jérôme Durain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Cet amendement, déposé par Éric Kerrouche, vise à interdire l’utilisation d’algorithmes pour le traitement automatique des données au sein des systèmes d’information prévus au présent article.

Le projet de loi relatif à la bioéthique, toujours en cours d’examen, prévoit d’ailleurs d’encadrer le recours à des traitements algorithmiques pour certains actes de santé et pose une obligation d’information préalable du patient que seule l’urgence pourrait rendre caduque.

Le présent amendement tend à réaffirmer cette interdiction, sur laquelle le Défenseur des droits a attiré notre attention.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Il est également défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 90, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 12

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

L’Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l’évaluation de ces systèmes d’information.

Chaque semestre à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport détaillé sur l’application des dispositions du présent article.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le présent amendement de réécriture vise à supprimer l’habilitation à légiférer par ordonnances demandée par le Gouvernement et inscrite à l’alinéa 11 de l’article 6 du projet de loi initial, et à la remplacer par des dispositions assurant le contrôle effectif de son action par le Parlement au cours de l’année d’application du présent article.

Cela est tout à fait conforme, me semble-t-il, à la position prise par la commission des lois, sur l’initiative de son président, en tout cas quant à la volonté de ne pas avoir recours à une ordonnance.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

C’est très intéressant, mon cher collègue. Lisons le dispositif de votre amendement : « L’Assemblée nationale et le Sénat peuvent requérir toute information complémentaire dans le cadre du contrôle et de l’évaluation de ces systèmes d’information.

« Chaque semestre à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport détaillé sur l’application des dispositions du présent article. »

Selon l’exposé des motifs, que vous avez lu, votre amendement vise plutôt à supprimer l’autorisation donnée au Gouvernement de prendre des ordonnances. Mais nous l’avons déjà supprimée dans le texte de la commission !

Il serait bon de réexaminer votre proposition à l’occasion de la commission mixte paritaire, ou d’en discuter avec nos collègues de l’Assemblée nationale : il y a en effet une telle contradiction entre l’objet de cet amendement et son dispositif que je ne sais plus ce que vous voulez. L’avis de la commission est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Effectivement, nous voulons obtenir les informations qui sont précisées dans le dispositif de l’amendement. Je donne acte, comme on dit dans les juridictions, à M. le président de la commission de sa très belle lecture de ce dispositif et j’avoue clairement que nous avons eu tort de rajouter cet exposé sur la suppression des ordonnances, qui était déjà acquise, ce dont je lui donne acte également.

Je retire donc cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 90 est retiré.

L’amendement n° 81, présenté par MM. Kerrouche, Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 12

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

.… – Le Défenseur des droits établit un rapport spécial et public relatif à l’impact, notamment social, du traitement des données des systèmes d’information prévus au présent article sur les droits et libertés individuelles.

La parole est à M. Jérôme Durain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Cet amendement, déposé par Éric Kerrouche, s’inscrit dans le droit fil de l’amendement n° 38 rectifié ter, que je viens de présenter. Il vise à affronter les risques de discrimination induits par les systèmes d’information, de manière générale, et en particulier par ceux qui sont prévus à cet article, sur lesquels le Défenseur des droits a attiré notre attention. Nous proposons que soit établi par le Défenseur des droits un rapport spécial et public relatif à l’impact, notamment social, du traitement des données au sein de ces systèmes d’information.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

J’ai pris connaissance du rapport que vient de faire le Défenseur des droits sur cette question : il ne nous a pas attendus, il n’a pas besoin de nous pour établir de tels rapports ! C’est la raison pour laquelle l’avis de la commission sur cet amendement est défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 99 est présenté par Mme de la Gontrie, MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 176 rectifié est présenté par M. Bonnecarrère et les membres du groupe Union Centriste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 13, première phrase

Après les mots :

avis public

insérer le mot :

conforme

La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour présenter l’amendement n° 99.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre de La Gontrie

L’objet de cet amendement a été rapidement évoqué par M. le président de la commission tout à l’heure. Il vise à modifier l’alinéa de l’article 6 qui prévoit que les modalités d’application seront fixées par décret en Conseil d’État, lequel décret sera pris après avis de la CNIL.

Ce que nous demandons au travers de cet amendement, c’est que cet avis soit nécessairement suivi. La présidente de la CNIL a été auditionnée aujourd’hui par la commission des lois de l’Assemblée nationale et a déjà pu exprimer à cette occasion un certain nombre d’exigences qui convergent avec ce que nous attendons, y compris sur des éléments précis comme la nature du questionnaire, ou encore la durée de conservation de certaines données, qui pourraient ne pas être les mêmes selon la catégorie des personnes concernées. Bref, nous avons confirmé ce que nous savions déjà : le travail de la CNIL est très utile !

C’est pourquoi cet amendement tend à ajouter à cet alinéa un seul mot, qui change beaucoup de choses : le terme « conforme ».

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour présenter l’amendement n° 176 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

Mes collègues et moi-même avons une appétence limitée pour ce double fichier, système de données ou d’information ; au regard de cette faible appétence, nous sommes attentifs à ce que le maximum de garanties puisse être apporté. À ce titre, exiger que le décret soit pris sur avis public et conforme de la CNIL nous paraît pertinent.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

La commission est favorable, avec des nuances, à la volonté de soumettre ce décret à l’avis conforme de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Je précise qu’on relève, dans l’exercice du pouvoir réglementaire, d’autres cas connus de lien entre l’avis conforme d’une autorité administrative indépendante et le contenu d’un décret. Nous sommes donc dans un cadre parfaitement balisé. Mentionnons notamment que, jusqu’en 2004, certains décrets ne pouvaient être pris qu’après avis conforme de la CNIL ; cette exigence s’est imposée pendant plusieurs décennies.

La commission émet donc un avis favorable sur ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Je n’ai aucun problème conceptuel avec l’idée d’un avis conforme de la CNIL – la publicité de cet avis figurait déjà dans le texte initial –, mais je tiens à exprimer ici – si je ne le faisais pas, je serais coupable – un doute constitutionnel. En effet, si l’on exigeait bien du Premier ministre, pendant une période, de se soumettre à un avis conforme, le Conseil constitutionnel a en revanche statué – si ma mémoire ne me fait pas défaut, cette décision portait justement sur un avis conforme de la CNIL – que le Premier ministre ne peut pas exercer son pouvoir réglementaire sous la contrainte d’une autorité administrative, contrainte exprimée sous la forme d’un avis conforme.

Je ne voudrais pas mettre de la sorte en péril un dispositif qui est extrêmement précieux, d’autant que l’avis de la CNIL sera rendu public. C’est pour cette raison que j’émets un avis défavorable sur ces amendements, même si j’en comprends la logique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je mets aux voix les amendements identiques n° 99 et 176 rectifié.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 209, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 13, seconde phrase

Après les mots :

aux finalités mentionnées au II

insérer les mots :

et rendues obligatoires à ce titre

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Cet amendement important, qui fait écho au débat que nous avons eu sur les maladies à déclaration obligatoire, vise à donner un caractère obligatoire aux interventions des différentes personnes et divers organismes autorisés à accéder aux systèmes d’information mis en place en vue de lutter contre l’épidémie de Covid-19. Cette obligation s’imposera notamment aux laboratoires et aux personnels de santé. Comme je l’ai répété plusieurs fois ce soir, le caractère exhaustif du système est un élément essentiel pour qu’il remplisse les objectifs qui lui sont assignés.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas, rapporteur. Cet amendement a été déposé très tard ; il n’a donc pas pu être examiné par la commission. Il vise à rappeler le caractère obligatoire de la transmission des informations collectées à chaque échelon de la chaîne de suivi des contacts. Nous avons du mal à interpréter cet amendement dans toute sa complexité. Peut-être M. le président de la commission des affaires sociales pourrait-il nous donner son sentiment à ce sujet.

M. Alain Milon fait signe que non.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Dans ces conditions, monsieur le ministre, et pour nous permettre de faire un travail sérieux, pourrais-je vous suggérer de discuter de ce point avec l’Assemblée nationale ? Si vous la convainquez, nous en discuterons avec elle.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 189 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 80, présenté par M. Leconte, Mmes Conway-Mouret et Lepage, MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mme Conconne, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Lalande, Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Rétablir le V dans la rédaction suivante :

V. – En vue du rétablissement progressif de la libre circulation dans l’espace Schengen et dans l’Union européenne, le système d’information est conçu pour pouvoir être interopérable avec les systèmes équivalents mis en place dans l’Union européenne, dès lors que leur finalité est commune et que les conditions posées à l’exploitation et à la conservation des données respectent les conditions posées au IV du présent article.

La parole est à M. Jérôme Durain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Cet amendement, déposé par Jean-Yves Leconte, tend à garantir l’interopérabilité des systèmes d’information à l’échelle européenne. Il vise à favoriser la mise en place d’un dispositif qui permettrait de rétablir progressivement la libre circulation dans un espace plus large que le territoire national, dès lors que la recherche des chaînes de contamination est possible à cette échelle, et ce dans le cadre de nos exigences relatives au traitement des données personnelles. Le présent système de traitement des données, qui a vocation à favoriser le déconfinement, devrait en réalité être instauré dans l’ensemble de l’Union européenne, afin de permettre le rétablissement le plus rapide possible de la liberté de circulation au sein de l’espace Schengen.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 170, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 19

Rédiger ainsi cet alinéa :

Sa composition, qui inclut un représentant de chaque groupe parlementaire, est fixée par décret.

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Cet amendement vise à garantir une représentation pluraliste au sein du comité de contrôle et de liaison que la commission propose d’instituer, en faisant en sorte que chaque groupe parlementaire y soit représenté.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il me semble que le pluralisme est déjà respecté dans la rédaction existante de cet alinéa. En effet, aux termes de l’article 3 de la loi du 3 août 2018, « l’Assemblée nationale et le Sénat s’efforcent de respecter leur configuration politique respective pour l’ensemble des nominations effectuées dans les organismes extérieurs au Parlement. » L’avis de la commission sur cet amendement est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Dans ces conditions, je retire cet amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 170 est retiré.

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Plutôt que d’expliquer mon vote, je souhaite poser une dernière question à M. le ministre. Un système d’information a été conçu ; peut-être sera-t-il adopté. Combien de personnes appartiendront aux « brigades » qui y ont accès ? Plusieurs chiffres ont été donnés, entre 5 000 et 30 000. D’après le professeur Delfraissy, il s’agirait de 15 000 personnes. Peut-être ces chiffres se rapportent-ils à des moments différents, si ces brigades devaient connaître une montée en puissance et une augmentation progressive de leurs effectifs. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer quel chiffre est le bon ?

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Je suis coutumier et friand des questions techniques, même, et surtout, quand elles sont tardives ! Comme le mot « brigades » peut inspirer une certaine crainte, j’ai préféré appeler les termes « brigades d’anges gardiens » : ce vocable montre bien qu’elles ont pour but de protéger et d’accompagner en permanence les patients.

Je ne peux pas vous donner en réponse un chiffre précis, monsieur le sénateur, parce que tout dépend du périmètre dont il est question. S’il s’agit de l’ensemble des professionnels de santé amenés à assurer le suivi épidémiologique – vous aurez noté que je bannis progressivement le mot « tracing » – des patients, on inclut potentiellement dans ce compte la totalité des médecins libéraux et hospitaliers, mais également les milliers de salariés de l’assurance maladie, ainsi que tous les salariés des agences régionales de santé, qui sont mobilisables ; on aboutit alors à un nombre bien au-delà de 100 000. Cela, c’est la théorie.

Plus précisément, comme vous le savez, nous avons organisé le suivi épidémiologique en trois niveaux. Le premier niveau est assuré par les médecins de terrain, de premier recours : le médecin généraliste, le pneumologue, le médecin infectiologue, l’urgentiste, ou encore le réanimateur. Ces médecins qui vont s’occuper du contact tracing de premier niveau sont extrêmement nombreux : potentiellement, il y en a autant que de professionnels de santé sur le terrain. Le deuxième niveau – l’organisation du tracing par l’assurance maladie – est organisé par la brigade propre à l’assurance maladie : 3 000 personnes ont été prévues pour ce faire, avec une portée départementale très puissante. Enfin, le troisième niveau, consacré au suivi des zones actives de contamination dans les territoires, va reposer sur les salariés des ARS : cela représente encore plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de personnes.

Par ailleurs, si l’on adopte la définition anglo-saxonne ou coréenne du tracing, on est amené à compter parmi les personnes mobilisées toutes celles qui vont porter des repas à domicile, ou encore y délivrer de l’aide aux personnes. Si l’on intègre ainsi tous ceux qui vont prendre soin des personnes placées en confinement ou en quatorzaine, on augmente d’autant d’acteurs le nombre de personnes mobilisées.

Ce qui est important, selon moi, c’est d’avoir retenu comme principe l’idée qu’au moins un salarié des brigades d’anges gardiens de l’assurance maladie serait mobilisé par jour pour assurer le suivi de quinze personnes environ, en incluant les cas contacts de chaque personne malade. Une personne peut consacrer sa journée à s’occuper du suivi épidémiologique d’un cas et de son proche entourage, en complément de ce qui aura été fait par les médecins et de ce qui sera encore réalisé par les agences régionales de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Loïc Hervé

Il me faut expliquer pourquoi je voterai en faveur de cet article 6, alors même que j’ai voté tout à l’heure pour les amendements de suppression de ce même article.

Je préciserai avant tout, monsieur le ministre, que mes inquiétudes demeurent, presque par construction. Pour autant, il me semble que les améliorations apportées tant par la commission que lors de notre examen de cet article en séance plénière représentent une évolution tout à fait significative. Il me paraît dès lors nécessaire de consolider cette mouture sénatoriale en vue de la navette parlementaire. Il s’agit non pas d’un chèque en blanc, mais d’un a priori de confiance sur la capacité de cette navette à apporter toutes les garanties nécessaires pour que cette infrastructure numérique, si elle est mise en œuvre, puisse protéger les libertés individuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Mon état d’esprit est peu ou prou le même que celui de Loïc Hervé : j’avais voté pour les amendements de suppression, mais je considère que la commission des lois et la commission des affaires sociales ont fait un excellent travail. J’hésitais entre m’abstenir et voter pour cet article, mais je veux faire confiance à M. le président de la commission des lois. Pour autant, j’attends de voir ce qui nous reviendra de l’Assemblée nationale ; je serai extrêmement intransigeante !

Je veux simplement attirer notre attention sur un point : je constate qu’il demeure tout de même une tension entre deux objectifs stratégiques. Le premier objectif est d’assurer la protection des libertés individuelles sur le long terme, ce qui impose de limiter les données collectées, en les rendant collectives, suivant un principe de minimisation, mais aussi en en limitant la durée de stockage ; nous y avons été attentifs ce soir. Le second objectif est de faciliter le travail de suivi ; je préfère ces termes au mot « traçage », de même que je préfère l’expression « anges gardiens » au mot « brigades », dont la connotation – pardonnez-moi, monsieur le ministre – est un peu policière. Ce travail d’intelligence artificielle doit utiliser énormément de données. Je ne crois pas, encore une fois, à leur anonymisation. On voit bien la tension qui demeure entre ces objectifs.

Nous ne disposons toujours pas de système souverain de collecte, de traitement et d’hébergement des données. Et ce sera de nouveau le cas pour cette plateforme, monsieur Bargeton.

Bruno Retailleau l’a souligné : les Gafam savent tout de nous, et c’est une raison supplémentaire pour ne pas leur confier nos marchés.

Pourquoi n’a-t-on pas choisi une entreprise française et européenne à dimension internationale, comme OVH ? Ces choix déterminent aussi la confiance que l’on peut avoir dans le traitement de données sensibles.

Je félicite au passage Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP, qui a refusé l’offre gratuite de traitement des données liées au Covid-19 de Palantir, dont on connaît la collusion avec la NSA et la CIA. C’est pourtant cette entreprise qui a été choisie pour traiter les données de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Quand nous écrivons la loi en matière de droit social ou de droit de la santé publique, nous devons faire la balance entre les libertés individuelles et les protections collectives. Nous devons constamment rechercher un équilibre entre la protection du plus faible et celle du plus grand nombre, tout en respectant les libertés fondamentales.

En ce qui concerne l’article 6, j’ai fait le choix, grâce à la rédaction exigeante de la commission des lois, d’adhérer à cette méthode d’éradication de l’épidémie en France. Pour autant, je n’ai pas convaincu l’ensemble de mes collègues, certains ayant fait le choix des libertés individuelles. Plus que la commission des lois ou moi-même, je crains d’ailleurs que ce ne soit le Gouvernement qui n’ait pas convaincu en l’espèce.

Par ailleurs, nous émettons ce soir un vote sous haute surveillance, monsieur le ministre. Vous avez dit que vous ne déposeriez pas d’amendement visant à rétablir l’habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnances au Sénat. Mais je n’ai pas entendu que vous vous engagiez également à ne pas en déposer à l’Assemblée nationale. Dans ce cas, évidemment, tout soutien à votre démarche serait immédiatement remis en cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je mets aux voix l’article 6, modifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRCE.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 102 :

Le Sénat a adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 37, présenté par MM. P. Joly et Durain, Mmes Lepage, Grelet-Certenais et Préville, MM. Antiste, Joël Bigot et Devinaz, Mme Conway-Mouret, MM. Mazuir et Tissot, Mme Perol-Dumont, M. Duran et Mme Jasmin, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’établissement d’une carte de classification des départements selon leur état sanitaire épidémique est élaboré sur la base de critères comprenant le taux de circulation du virus, les capacités hospitalières en réanimation, la capacité locale de tests de détection des porteurs du virus mais aussi sur la base d’un dialogue à l’échelon départemental entre l’État, ses services sur le terrain, les professionnels et les élus locaux.

La parole est à M. Jérôme Durain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Il s’agit d’un amendement d’appel par lequel Patrice Joly souhaite interpeller le Gouvernement sur les erreurs qui ont été commises dans la classification des départements – la fameuse carte rouge et verte qui a suscité tant d’émoi.

Il vise, premièrement, l’absence de pertinence de certains critères retenus et, deuxièmement, l’absence de dialogue préalable à l’établissement de cette carte entre les différents acteurs d’un même territoire.

Plusieurs départements se sont étonnés, le 30 avril au soir, d’être classés en zone rouge alors que les critères objectifs ne laissaient pas apparaître de risques supérieurs à ceux de départements similaires. C’était notamment le cas du Lot, du Cher et de la Haute-Corse, mais aussi de la Nièvre. S’agissant de ce dernier département, la surprise fut importante, car les chiffres du groupement hospitalier de territoire faisaient état de quatre patients seulement en réanimation, pour une capacité de quinze respirateurs, avec la possibilité d’accroître le nombre de lits.

Patrice Joly estime aussi que le critère de saturation des équipements sanitaires n’est pas forcément pertinent pour un département qui se situe à l’extrémité d’une région et qui peut envoyer des malades dans les régions voisines. L’intérêt d’une approche strictement régionale paraît dès lors limité au regard des facilités offertes par les moyens numériques pour gérer les moyens disponibles sur des périmètres élargis.

En revanche, ce dernier critère permet de mesurer le sous-équipement hospitalier lié aux politiques de santé menées ces dernières années.

Au-delà des aspects sanitaires, la publication de cette carte a contribué à ternir l’image du département, celle d’une campagne aux espaces ouverts et à la densité faible qui protège sa population des conséquences, notamment sanitaires, auxquelles sont confrontées les populations vivant dans les zones de fortes concentrations humaines.

Patrice Joly souhaite donc un dialogue transparent, serein et constructif entre tous les acteurs du département autour de la question du zonage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Sur la carte publiée, le département du Lot formait en effet un nez rouge au milieu d’un océan de vert et d’orange ! Nous avons été quelque peu surpris. Nous avions certes eu des cas de Covid-19, mais le classement en rouge était lié à une erreur d’interprétation d’un médecin urgentiste qui, dans un petit centre hospitalier, a comptabilisé tous les patients qui étaient venus se faire tester. Le Lot enregistrant environ 100 passages par jour aux urgences, il aura suffi d’en ajouter une trentaine de plus pour faire exploser le baromètre. Ce classement a suscité un certain émoi, d’autant que notre département a aussi vocation à accueillir des touristes.

Le lendemain, le préfet, qui n’avait pas été averti par l’ARS, est monté au créneau. Le Lot est désormais en vert et j’espère qu’il le restera longtemps !

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6.

L’amendement n° 121, présenté par Mme Rossignol, MM. Sueur, Daudigny, Kanner, Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les personnes définies à l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles et les personnes en situation de fragilité financière définies au deuxième alinéa de l’article L. 312-1-3 du code monétaire et financier sont exonérées des commissions perçues par un établissement de crédit à raison du traitement des irrégularités de fonctionnement d’un compte bancaire et des facturations de frais et de services bancaires durant toute la durée de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face l’épidémie de covid-19.

La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Cet amendement, s’il était adopté, permettrait que ce projet de loi ne soit pas simplement un texte d’urgence sanitaire, mais aussi un texte d’urgence sociale.

Je ne sais pas si nous disposons des mêmes remontées de terrain, mais il semblerait que toutes les banques n’aient pas encore compris quelle était la situation exacte des entreprises et des particuliers aujourd’hui.

Nous avons parlé des entreprises à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances rectificative. Cet amendement vise à indiquer de façon un peu directive aux banques que, pendant la durée de l’état d’urgence, les commissions perçues sur les personnes en situation de fragilité financière ne pouvaient être prélevées. Pour une famille durement frappée par l’état de la situation sociale, 500 euros, c’est beaucoup d’argent.

Le Président de la République et le Gouvernement ont à plusieurs reprises effectué des démarches pour inciter les banques à moduler les frais bancaires qu’elles perçoivent sur leurs clients les plus défavorisés, mais les banques n’ont pas totalement suivi ces incitations. Nous nous apprêtons à en discuter de nouveau au Sénat quand nous aurons repris le cours normal de nos travaux et que nous pourrons examiner une proposition de loi sur ce sujet.

Cet amendement se situe pour l’instant dans le cadre de l’urgence sanitaire et sociale. Il tend à préciser simplement que, durant cette période, aucuns frais ne peuvent être facturés par les services bancaires à l’égard des personnes en situation de fragilité financière, lesquelles sont par ailleurs déjà définies par le code monétaire et financier.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

J’apporte mon soutien à cet amendement, comme, je l’espère, une partie de mes collègues. Nous sommes dans une situation extrêmement difficile. Nous avons déjà abordé la problématique de l’achat des masques. Ce serait un signe important, qui ne vaudrait de surcroît que pour une période relativement courte.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je sais bien qu’il est tard, mais, chaque fois qu’un amendement à caractère social est proposé, les explications qui nous sont données sont extrêmement lapidaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Dany Wattebled, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dany Wattebled

Je voterai cet amendement à dimension sociale, sans problème.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6.

Chapitre III

Dispositions relatives à l’outre-mer

Le livre VIII de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 3821-11 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, la référence : « n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de Covid-19 » est remplacée par la référence : « n° … du … prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions » ;

b) Au 3°, après la référence : « deuxième alinéa », est insérée la référence : « second alinéa du I » ;

c) Au 4°, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « sixième » ;

2° Le chapitre Ier du titre IV est ainsi modifié :

a) L’article L. 3841-2 est ainsi modifié :

– au premier alinéa, après le mot : « française », sont insérés les mots : « dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions » ;

– au premier alinéa du 2°, après la référence : « premier alinéa », est insérée la référence : « du I » ;

– au troisième alinéa du 2°, les références : « 1° à 9° » sont remplacées par les références : « 1°, 2° et 5° à 9° » ;

b) L’article L. 3841-3 est ainsi modifié :

– au premier alinéa, la référence : « n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de Covid-19 » est remplacée par la référence : « n° … du … prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions » ;

– au 3°, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « sixième ».

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Même si je ne veux pas allonger les débats, je veux rappeler que mon groupe avait déposé un amendement, écarté au titre de l’article 45 de la Constitution, sur lequel je n’épiloguerai pas à cette heure. Nous avons considéré que tout sujet traité dans la loi du 23 mars dernier pouvait faire l’objet d’amendements dans le cadre du présent projet de loi.

Nous avions pris des engagements devant les associations d’élus pour que l’élection des maires et des adjoints dans les communes ayant un conseil municipal complet ait lieu avant la fin du mois de mai. Tel était l’objet de l’amendement en question.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 201 rectifié, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéas 5 et 13

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il s’agit d’un amendement de coordination.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 199, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Après la seconde occurrence de la référence :

insérer la référence :

du I

La parole est à M. le rapporteur.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’amendement n° 210, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. - Par dérogation au troisième alinéa du II de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique, le lieu où est effectuée la quarantaine par les personnes entrant dans l’une des collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution est décidé par le représentant de l’État.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Compte tenu de la situation spécifique des outre-mer, la lutte contre la propagation du virus passe de manière importante par les contrôles sanitaires aux frontières, en complément du confinement et de la montée en puissance des capacités sanitaires.

C’est pourquoi une quatorzaine stricte est mise en œuvre dans ces territoires en complément d’interdiction forte sur les mouvements de personnes vers ces territoires.

Dès lors, et afin de s’assurer de l’effectivité de la quatorzaine préventive, il est proposé que ce soit le représentant de l’État qui détermine le lieu de réalisation de la quarantaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Nous avons souhaité laisser une possibilité de choix, par exemple passer la période de quarantaine à son domicile. Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article 7 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Le bureau exécutif de La République En Marche s’est fendu hier d’une saillie peut-être habituelle dans cette formation politique en regrettant « la démarche irresponsable qui a conduit une majorité de sénateurs à ne pas voter en faveur de la déclaration du Premier ministre plaçant la logique politicienne avant l’intérêt supérieur du pays. »

Il est rare en politique de citer les propos de ses adversaires, mais c’est une telle caricature, tant sur le fond que sur la forme, à l’encontre de notre assemblée parlementaire que je voulais le faire.

En réalité, il est irresponsable dans notre démocratie, dans un État de droit, de considérer la contradiction démocratique comme un danger pour le bon fonctionnement de la Nation. Il s’agit d’une vision autoritaire d’un pouvoir qui un jour connaîtra l’opposition.

Oui, nous revendiquons nous être opposés hier en tant que lanceurs d’alerte sur la gestion globale de cette crise sanitaire et sur la stratégie de déconfinement. C’est notre droit, tout comme de déposer des amendements, dont certains ont obtenu des votes positifs, y compris encore ce soir, sur le texte initialement présenté par le Gouvernement.

Nous sommes globalement favorables à la prolongation de l’état d’urgence sanitaire, en responsabilité. Monsieur le ministre, la délégation de pouvoir que nous lui avons donnée par la loi du 23 mars dernier a permis au Gouvernement de prendre 55 ordonnances dans des domaines relevant logiquement du champ de l’article 34 de la Constitution. C’est du jamais vu sous la Ve République ! Nous avons donc pris nos responsabilités en vous accordant ce pouvoir qui pourrait être considéré dans d’autres Républiques comme exorbitant du droit commun.

Mais nous avons mis un point d’arrêt ce soir à ce qui aurait pu devenir une véritable dérive institutionnelle si nous vous avions donné une nouvelle fois une habilitation pour prendre par ordonnances, dans le cadre de l’article 6, de nouvelles mesures.

Nous avons apprécié l’adoption de l’amendement de Mme Rossignol relatif aux violences familiales, l’encadrement du suivi épidémiologique, même si certains membres de mon groupe, dont je suis, l’auraient voulu encore plus fort, l’étanchéité du système d’information avec l’éventuel StopCovid, monstre du Loch Ness, mais qui en train de montrer de plus en plus sa tête au-dessus du lac.

Nous avons aussi apprécié la protection des employeurs du secteur public résultant des travaux de la commission des lois à l’égard de démarches judiciaires à leur encontre, lesquels vont être surexposés dans les semaines à venir et méritaient donc une prise en considération spécifique. Et ce n’est pas du corporatisme ; c’est simplement du bon sens.

Nous avons également apprécié le rejet de l’amendement n° 206, présenté subrepticement par le Gouvernement.

Mais nous regrettons l’absence totale, dans le projet de loi initial comme dans le texte issu des travaux du Sénat, d’anticipation de l’urgence sociale qui va malheureusement suivre l’urgence sanitaire et qui va marquer le déconfinement de milliers, de dizaines de milliers, voire de millions de Français. Cela va mettre en péril la confiance des Français dans le cadre de ce déconfinement.

En responsabilité et avant le probable recours que nous porterons devant le Conseil constitutionnel, dans son immense majorité, le groupe socialiste et républicain s’abstiendra sur ce texte.

M. Jean-Pierre Sueur applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Max Brisson

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, malgré l’urgence qui nous est dictée par le contexte sanitaire, mais aussi par le calendrier du Gouvernement, le Sénat a accompli son travail avec sérieux et a examiné ce projet de loi de manière rigoureuse et distanciée, ce qui est la marque de fabrique de la Haute Assemblée. Je veux saluer, au nom de l’ensemble des sénatrices et sénateurs du groupe Les Républicains, les travaux de la commission des affaires sociales et de la commission des lois dirigés par leurs présidents, Alain Milon et Philippe Bas.

Durant ces deux jours, nous avons longuement débattu de la question de la responsabilité dans la mise en œuvre du déconfinement. Artisans, petits commerçants, chefs d’entreprise, notamment ceux des TPE et des PME, directeurs d’école, inspecteurs de l’éducation nationale, maires, en particulier ceux des petites communes, présidents de syndicat ou d’intercommunalité, tous ont et auront, avec le déconfinement, la lourde tâche de prendre des décisions capitales pour notre environnement sanitaire et ils doivent le faire dans l’urgence, urgence pour assimiler les normes et les protocoles, urgence pour les mettre en œuvre.

Chacun est prêt à prendre un risque, afin de permettre une reprise progressive et sécurisée de l’activité économique, scolaire, culturelle et sociale de notre pays – cette reprise est indispensable. Mais lorsque seront examinées devant le juge des plaintes de citoyens qui penseront que leur maire ou leur directeur d’école a pris un risque ayant entraîné leur contamination, quelle sera la protection de ceux-ci ?

Depuis deux jours, tout le monde dit que la confiance est la clé. Le Président de la République et le Gouvernement répètent quotidiennement qu’ils font confiance aux élus, aux maires en premier lieu, et à la société, mais faire confiance, c’est donner des garanties pour réassurer cette confiance. C’est pour cette raison que le Sénat a voulu clarifier le régime de responsabilité.

Il souhaite cette clarification, parce que dans une situation exceptionnelle c’est d’abord au législateur de dire le droit, de fixer la règle et de lever les incertitudes juridiques liées aux interprétations à venir des juges.

Il ne s’agit en aucun cas d’exonérer les maires, les directeurs d’école ou les chefs d’entreprise, puisqu’un régime de responsabilité demeure. Il s’agit encore moins d’exonérer le Gouvernement et la haute administration de leurs responsabilités.

Il s’agit, contrairement aux déclarations d’une cabale qui ne prospèrera pas, de protéger les petites mains opérationnelles du déconfinement, celles qui vont mettre en œuvre les protocoles qu’elles n’ont pas préparés, pour lesquels elles n’ont pas été consultées et qu’elles déclineront par sens du devoir.

Il ne s’agit pas de soustraire quelqu’un, quel qu’il soit, à ses responsabilités en cas de faute institutionnelle ou de violation manifestement délibérée des mesures prévues ou de l’obligation de prudence. Il s’agit de tenir compte d’une situation exceptionnelle et, dans un temps limité, d’encadrer et de préciser la responsabilité de chacun.

C’est la clé de l’engagement dans la confiance. Le texte consensuel de la commission, gravé dans le marbre par le vote unanime contre l’amendement de suppression, est un message fort du Sénat, toutes tendances politiques confondues.

Le deuxième apport essentiel de la commission concerne le dispositif de traçage. Nous l’avons dit sur ces travées, casser une chaîne de transmission au XXIe siècle passe par un dispositif de traçage de notre temps, mais sécurisé. C’est la clé d’une stratégie plus offensive pour casser les reins de cette épidémie. L’outil numérique est le plus simple et le plus efficace pour vaincre.

Monsieur le ministre, nous serons attentifs au sort qui sera réservé à l’ensemble des garanties apportées par la commission. Ces six garanties constituent le socle d’un subtil équilibre entre santé publique et libertés publiques, comme l’a dit Bruno Retailleau. Elles constituent des garde-fous essentiels.

En conclusion, le groupe Les Républicains votera pour ce texte largement amendé en première lecture. Nous demeurerons attentifs à ce que les apports du Sénat ne soient pas dénaturés lors de la navette parlementaire qui pourrait être source d’améliorations bienvenues, mais qui ne saurait être l’occasion de balayer les apports de notre assemblée. Notre bienveillance sera à la hauteur de la prise en compte de ce travail que nous avons voulu concret et précis et dont nous espérons que la navette parlementaire saura tirer le meilleur profit. Cela conditionnera la position future de mon groupe.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne sommes pas en guerre et, en fait, c’est peut-être pire, pour reprendre les mots de Régis Debray : « En fait, une catastrophe, c’est pire. Dans une guerre, on meurt pour quelque chose et il y a deux camps. Mais un virus est neutre et tout le monde est contre. Le Covid–19 n’a ni drapeau, ni haine, ni but de guerre. Le tragique, le douloureux, c’est l’absence de sens, et donc l’absurde. »

Nous avions bien conscience de la gravité de la situation et, avec le rejet hier dans cet hémicycle de votre plan de déconfinement, monsieur le ministre, le Sénat vous a adressé un message : bien sûr, nous ne pouvons pas rester confinés, mais le déconfinement annoncé, prévu ou improvisé, paraît – hélas – confus, et je dirais même incohérent.

Le désastre social et économique ne sera qu’aggravé – nous pouvons le craindre – dans les conditions qui nous sont proposées et qui seront de nouveau dictées par voie réglementaire. Ce qui nous était demandé au mois de mars et, plus encore, ce qui nous est demandé aujourd’hui est presque d’ordre anecdotique, tant le champ des décrets et des ordonnances ouvert au Gouvernement est large et tant les mesures réglementaires seront décisives dans la gestion de la crise.

Bien sûr, nous comprenons l’urgence à agir et les circonstances exceptionnelles dans lesquelles il nous est demandé de légiférer, mais comment ne pas s’interroger sur le peu de cas qui est fait du Parlement, sur nos conditions de travail et sur celles de nos collaboratrices et collaborateurs, ainsi que des fonctionnaires ces derniers jours ? Ces conditions sont – avouons-le ! – assez inédites, et en réalité inadmissibles.

Pour en revenir aux mesures concrètes proposées dans ce texte, elles peuvent se résumer à cette comparaison : alors que dans les transports espagnols les policiers distribuent des masques gratuitement, avec ce projet de loi, vous nous proposez d’étendre les pouvoirs de police aux agents des transports publics et vous retoquez notre proposition visant à rendre gratuits les masques qui seront pourtant obligatoires dans les transports.

D’autres mesures étaient possibles, mais les choix se sont portés sur une gestion de la crise sanitaire par des mesures de police administrative coercitive, les amendements déposés par le Gouvernement ayant confirmé nos craintes. Coercition à tout va, c’est donc une priorité du Gouvernement, alors que la vérité est ailleurs, oserais-je dire. Cette réalité, c’est le manque de masques, l’insuffisance de tests, l’impréparation des transports publics, les difficultés de l’école à reprendre après des années de disette budgétaire… La réalité, monsieur le ministre, c’est la crise sociale dramatique qui s’annonce, alors que déjà la faim gagne nombre de familles et que les files d’attente s’allongent devant les soupes populaires.

Nous avons fait un certain nombre de propositions, afin d’améliorer les conditions de vie largement dégradées de nos concitoyens : garantie du libre choix des parents pour ce qui concerne la reprise ou non de l’école par leurs enfants, interdiction des licenciements durant cette période de crise, interdiction des expulsions locatives, gratuité, je le répète, des masques dans les transports…

Nous avons également fait de nombreuses propositions pour rehausser le pouvoir de contrôle du Parlement dans cette situation d’exception et dans cet État de droit réduit à peau chagrin. Rien n’a été retenu !

S’agissant des autres mesures contenues dans ce texte de prorogation, le dispositif de mise en quarantaine n’est pas encadré dans le respect des droits fondamentaux ; il n’y a par exemple aucune précision concernant le lieu de placement en quarantaine ou à l’isolement. Tout ne peut pas être renvoyé au règlement, comme nous l’a indiqué le Défenseur des droits.

Il en est de même pour l’article 6 qui a été adopté. Il instaure, nous le redisons, un système d’information inédit pour enrayer la propagation de l’épidémie. Les apports de la commission, qui sont plutôt positifs, je le reconnais, seront largement insuffisants selon nous, car deux problèmes majeurs subsistent : d’abord, la notion de recueil volontaire des données, pourtant essentielle et exigée par le règlement européen de protection des données ; ensuite, l’anonymisation qui n’est pas garantie – au contraire, le fichier est nominatif.

Finalement, les garanties qui avaient été annoncées dans le cadre du projet StopCovid, projet bien contestable par d’autres aspects, sont donc absentes de ce projet final.

Enfin, sur les questions de responsabilité, nous l’affirmons clairement, les maires ne doivent pas subir les conséquences des défaillances graves de l’État dans la gestion de la crise sanitaire. Pour autant, nous refusons tout élargissement incontrôlé de la déresponsabilisation.

Nous l’avons expliqué, la lutte contre l’épidémie peut se poursuivre en dehors d’un état d’urgence ; cela permettrait de renforcer l’effort commun et la mobilisation générale. Le Parlement devrait voter son arrêt pour enfin permettre le déconfinement de la démocratie.

Pour toutes ces raisons, c’est nous aussi en toute responsabilité que nous voterons contre ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bonnecarrere

De nos jours, tout est système d’information et briques ajoutées les unes aux autres. Nous analyserons donc ce texte à partir de quatre briques.

La première brique est celle de la prorogation de l’état d’urgence, sujet qui a donné son titre au texte. Mon groupe comprend et soutient cette prorogation. Dans une situation de crise exceptionnelle, il est normal que l’exécutif dispose de moyens d’action. Ceux-ci sont considérables, puisqu’à travers la prorogation nous prorogeons également l’ensemble des habilitations accordées au Gouvernement, y compris celle de légiférer par ordonnances. Il a d’ailleurs été rappelé que le Gouvernement ne s’est pas privé d’utiliser cette faculté ; nous ne prenons donc pas une petite décision, en prorogeant l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet, date retenue par le Sénat.

La deuxième brique concerne la responsabilité pénale des décideurs, au sens large. Les différents groupes de notre assemblée se sont réjouis de la décision intervenue et nous serons attentifs à son devenir.

Je souhaite cependant appeler à une certaine prudence : si par extraordinaire – il ne faut pas totalement exclure cette possibilité… – l’Assemblée nationale était tentée d’obtenir un accord en commission mixte paritaire en demandant au Sénat de renoncer à une partie des importantes et fermes garanties apportées par la commission des lois à l’article 6 contre une certaine indulgence sur la responsabilité des décideurs, la question mériterait beaucoup d’attention. En effet, le risque constitutionnel n’est pas négligeable, puisque nous nous sommes aperçus avec étonnement que le Conseil constitutionnel n’avait pas eu à apprécier la loi Fauchon de 2000 et que la Cour de cassation avait très habilement refusé de lui transmettre une question prioritaire de constitutionnalité qui portait sur cette loi au motif du caractère non sérieux de la demande. C’est une manière, discrète, pour moi de vous demander d’être attentifs lors des discussions qui auront lieu au sein de la commission mixte paritaire.

La troisième brique concerne le débat que nous avons eu sur ce que l’on peut appeler une forme d’assignation à résidence pour un motif lié au Covid–19. Cette hypothèse n’a pas été retenue et l’équilibre trouvé nous paraît pertinent.

La quatrième brique a trait bien entendu à l’article 6 que mon groupe approuve pour l’essentiel, même si quelques-uns parmi nous auraient souhaité une dissociation entre le niveau local, c’est-à-dire l’action des équipes épidémiologiques pour rompre la chaîne de la contamination – c’est un aspect que nous apprécions tout particulièrement –, et le niveau national, c’est-à-dire la création d’un fichier.

Pour terminer, je dirai que cette journée ne comprend pas que des éléments favorables. En effet, si une partie de notre réponse à la crise vient de l’organisation des pouvoirs et de la solidité de notre Constitution, l’économie de notre pays tient largement grâce à la clé de voûte que représente aujourd’hui la Banque centrale européenne. Or la décision de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, qui revient sur la possibilité pour la BCE, du moins pour sa partie allemande, de racheter certaines créances, remet furieusement en cause la capacité de fournir des liquidités à l’économie.

Cet exemple nous montre que les sujets que nous avons à traiter sont extrêmement complexes et que la situation peut rebondir de manière inattendue. J’espère en tout cas que la pandémie, elle, ne rebondira pas !

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’issue de débats que je qualifierai de riches et d’extrêmement condensés, des incertitudes entourent toujours la mise en œuvre du déconfinement progressif. Mais quoi de plus normal, alors que nous traversons une situation aussi exceptionnelle que celle que nous vivons en ce moment ?

L’exercice était inédit pour le Parlement comme pour le Gouvernement, qui devaient répondre à des questionnements fondamentaux. Comment permettre un mode de vie le plus acceptable possible dans l’attente de solutions médicales pour éradiquer ce virus qui continue à nous menacer ? Comment arbitrer entre la préservation de nos libertés et le principe de précaution ?

Par exemple, la généralisation de l’obligation du port du masque peut être perçue comme une contrainte excessive ou comme la condition sine qua non pour permettre le déconfinement.

Le recours aux systèmes d’information est à notre sens utile et efficace pour casser les chaînes de contamination, mais il fait dans le même temps naître des craintes légitimes quant à l’intégrité du consentement du patient et à la préservation du secret médical.

La mise en quarantaine ou à l’isolement est une mesure certes protectrice, mais elle constitue dans le même temps, et de fait, une privation de liberté que nous estimons toutefois, pour notre part, correctement encadrée.

Plus globalement, nous considérons que le Sénat a fourni un travail important qui a sécurisé le texte dans le respect des libertés individuelles, par exemple sur l’encadrement du délai de prorogation de l’état d’urgence sanitaire, plus respectueux du rôle du Parlement, ou encore sur la reconnaissance de la responsabilité pénale, mais aussi morale, qui pèse sur les élus à la veille de la réouverture des classes.

Les garanties apportées à l’article 6 par nos commissions des lois et des affaires sociales permettront bien mieux d’encadrer le traitement des données personnelles, par nature très sensibles. Dans mon groupe, le consentement reste une question fondamentale qui explique les avis partagés des uns et des autres. Cependant, nous sommes globalement convaincus que le système de traçage tel qu’il a été décidé et adopté reste un outil efficace pour contrôler la circulation du virus.

Enfin, mon groupe se réjouit de l’adoption de plusieurs de ses amendements, visant notamment les modalités d’accès au territoire métropolitain pour nos concitoyens en provenance de Corse et d’outre-mer, mais également la transparence des prix du matériel médical qui, nous l’espérons, va permettre à nos concitoyens d’accéder à ce matériel, notamment les masques ou les thermomètres, à des tarifs acceptables et contrôlés.

Nous resterons bien sûr vigilants, durant les travaux de l’Assemblée nationale, sur le devenir de ces amendements et des avancées apportées par le Sénat au texte.

Pour conclure, la majorité du groupe du RDSE votera ce projet de loi et une minorité d’entre nous se partagera entre l’abstention et le vote contre.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Julien Bargeton, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Bargeton

Monsieur le président, mes chers collègues, je souhaite tout d’abord remercier les différents protagonistes de ce débat : le ministre qui a apporté profondeur et hauteur de vue à nos échanges, ce qui a participé à la qualité de nos débats ; Philippe Bas pour sa performance et le travail remarquable qu’il a fourni dans des délais extrêmement restreints ; Alain Milon, dont les prises de parole ont été extrêmement utiles ; et bien sûr, l’ensemble de mes collègues.

Je voudrais revenir sur l’état d’esprit qui a présidé à nos échanges sur ce texte relatif à l’état d’urgence sanitaire et à la manière de sortir du confinement, cette sortie étant évidemment nécessaire. Nos débats ont été riches et denses, ils ont évité les pièges du sectarisme et ont au contraire puisé dans les principes fondamentaux de notre République, ce dont je me félicite.

Quatre sujets restent finalement en débat : la durée de la prorogation de l’état d’urgence ; les différentes mesures liées au confinement, comme la quarantaine sur laquelle les approches sont parfois différentes ; la responsabilité des acteurs du déconfinement ; enfin, l’article 6 dont nous venons de discuter. Sur ce dernier point, la commission des lois a proposé un encadrement supplémentaire de l’utilisation des systèmes d’information ; nous verrons ce que cela donnera au final, mais ce sujet ne mérite, à mon sens, ni excès d’honneur ni soupçon d’indignité.

Dans ces débats, nous avons dû faire la balance entre différents principes : la proportionnalité, la liberté, la sécurité, le respect de la vie privée, etc. Quelles mesures sont justifiées et proportionnées au regard de la situation que nous traversons ? Quel équilibre trouver entre le respect de la vie privée et des données personnelles et la mise en place des restrictions que nous impose la situation ? Nous devons réussir à concilier ces différents principes pour répondre aux questions qui nous sont posées.

Je souhaite que l’état d’esprit qui nous a animés durant nos travaux prospère et permette d’aboutir à un accord en commission mixte paritaire. Bien sûr, nous devrons affiner certains points, mais je pense que les discussions que nous avons eues n’empêchent pas a priori que le débat aboutisse.

Pour conclure, je reprendrai cette citation de Camus, maintes fois évoquée : « Il y a sur cette terre des fléaux et des victimes et il faut, autant qu’il est possible, refuser d’être avec le fléau ». Il s’agit effectivement pour nous d’être contre le fléau. En ce sens, je pense que nous partageons les mêmes objectifs, même si nos approches sont parfois différentes. Grâce à l’état d’esprit qui nous a animés durant ces deux jours, je crois que nous pouvons converger pour trouver les bonnes solutions, tout en conciliant les différents principes que j’ai évoqués. Nous avons encore le temps d’y arriver.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Dany Wattebled, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dany Wattebled

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce que nous craignions tant a finalement pu être évité grâce aux efforts de chacun. Nos hôpitaux n’ont pas été débordés par la pandémie ; les chiffres relatifs aux contaminations et aux décès diminuent de jour en jour, et c’est heureux.

Dans peu de temps, cette mesure extraordinaire qu’est le confinement sera progressivement levée. L’épidémie ralentit, mais elle n’est pas vaincue. Il nous paraît donc nécessaire de maintenir l’état d’urgence sanitaire jusqu’en juillet prochain. Dans les mois à venir, il nous appartiendra de rester sur nos gardes pour continuer à faire reculer le virus. Nos concitoyens ont majoritairement fait preuve de responsabilité et scrupuleusement appliqué les mesures barrières : ils devront poursuivre leurs efforts.

Cependant, l’activité du pays doit reprendre son cours. Le confinement a été salutaire, mais cette mesure ne peut durer plus longtemps sans causer des dégâts de plus en plus irréversibles, sur la santé d’abord, car bon nombre de pathologies ne sont plus traitées, sur la liberté et la justice ensuite : après avoir rappelé à plusieurs reprises que l’activité de l’administration devrait impérativement se poursuivre pour ne pas mettre en péril le fonctionnement du pays, le groupe Les Indépendants – République et Territoires se réjouit que le Sénat ait mis un terme à l’extension des délais de la détention provisoire.

Le confinement a aussi de graves effets sur l’économie. Il est à ce titre indispensable de lever la suspension des délais d’instruction pour que la machine puisse redémarrer. J’insiste sur ce point, parce que cela fait plusieurs fois que ce dossier est évoqué et que nous sommes toujours en attente d’une réponse.

Cette reprise générale de l’activité doit néanmoins être encadrée pour s’effectuer dans les meilleures conditions. Le Gouvernement dispose à présent de moyens pour mettre en œuvre ces conditions. Le redémarrage de l’activité, nous le savons, s’accompagnera probablement d’une augmentation de la circulation du virus. L’outil numérique peut contribuer utilement à ce que celle-ci reste la plus faible possible. Nous ne devons pas nous priver de ce levier, mais il était nécessaire d’encadrer strictement l’utilisation des données en matière de santé, qui sont des données particulièrement sensibles.

L’isolement et la quarantaine sont également des outils précieux dans la lutte contre le virus. En préciser le régime était éminemment nécessaire pour limiter au maximum l’astreinte portée à nos libertés.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires se félicite aussi de la place faite au juge des libertés et de la détention. Le juge judiciaire est en effet l’indispensable gardien des libertés individuelles. Ses missions sont souvent accrues, il serait bon que ses moyens le soient également.

La quarantaine sera également nécessaire pour enrayer la progression de l’épidémie, notamment dans les outre-mer. L’enjeu à cet égard primordial est de veiller à protéger au mieux nos territoires, dont certains ont heureusement été épargnés par le virus. C’est ainsi que sera préservée la confiance nécessaire à la reprise.

Aussi centralisée que puisse être la France, la solution à cette crise ne saurait entièrement venir du Gouvernement. Beaucoup dépendra en effet de la contribution de chacun. Nous avons eu l’occasion de constater que nos concitoyens avaient su être à la hauteur de la situation. Nous leur faisons confiance pour maintenir leurs efforts.

Les débats ont aussi mis en lumière le caractère incontournable des élus locaux, au premier chef desquels on trouve les maires : ce sont eux qui, sur le terrain, apportent des solutions concrètes. Il est inadmissible de leur faire courir tous les risques. Contre l’avis du Gouvernement, le Sénat a maintenu avec sagesse des dispositions visant à protéger les élus contre le risque d’un engagement de leur responsabilité pénale.

Aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin de chacun pour réussir. C’est ensemble que nous pourrons vaincre la maladie. Nous devons à nos concitoyens des mesures fortes, à la hauteur des menaces que nous devons affronter. Rien ne saurait cependant justifier le sacrifice de nos principes : dans le présent projet de loi, amendé par le Sénat, nous avons su trouver des solutions d’équilibre satisfaisantes.

« Vivre sans espoir, c’est cesser de vivre » écrivait Dostoïevski. Nous, nous continuons à croire en des jours meilleurs pour la France et nous faisons confiance aux Français pour réussir le déconfinement. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Stéphane Ravier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, six semaines après le début du confinement et au moins 25 000 morts, le Gouvernement demande la prorogation de l’état d’urgence sanitaire. C’est tard, c’est même trop tard pour 25 000 Français !

Le peuple français est un grand peuple. Il a enduré les pires souffrances et réalisé les plus grands exploits. À travers l’histoire, il a accepté de verser son sang, sa sueur et tellement de larmes, mais à une condition : que ceux qui gouvernent soient sincères, francs et courageux, que leur chef leur dise la vérité et leur montre le cap. Quand Clemenceau visitait les tranchées des poilus, il fournissait les armes, les casques et les obus pour tenir sa promesse : « On les aura ! ». Et on les a eus !

Le gouvernement actuel promet lui aussi que l’on vaincra ce virus, mais il n’est pas dans les tranchées. Il est tout au plus dans les travées des assemblées et il n’a toujours pas fourni les armes. Selon sa porte-parole, les masques étaient trop techniques pour que les Français en portent. Selon son Premier ministre, ils ne servaient à rien pour la population générale. Et maintenant, il s’apprête à infliger des amendes aux Français qui n’en portent pas. Difficile de suivre des chefs qui ne savent pas où ils vont et qui ne sont pas convaincants dans ce qu’ils font !

On a bien vu l’empressement du préfet de police de Paris de verbaliser les Franciliens qui partaient en vacances. Tout le monde s’est étonné, et même scandalisé, de ces images de banlieue sur lesquelles on voit des centaines de racailles attaquer des policiers et des pompiers avec des cocktails Molotov, le tout dans une ambiance de capitulation médiatique et politique !

Vives protestations sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Je vous l’ai déjà dit il y a trois semaines, monsieur le ministre : vous avez menti et des Français sont morts ! Vous avez menti, et maintenant vous tremblez ! Vous avez peur de la réaction des Français que vous traitez comme des enfants. Vous avez peur de la justice et vous ouvrez grand votre parapluie pour vous protéger des conséquences de vos actes, en votant ici même ce nouveau concept en droit qu’est l’irresponsabilité politique.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Les Français jugeront…

Nous sommes prêts, avez-vous affirmé, monsieur le ministre. Les Français, eux, ne le sont plus : ils ne sont plus disposés à subir les conséquences de votre impréparation et de vos mensonges. Ils ne sont plus prêts à voir l’hôpital public subir des coupes budgétaires, leurs entreprises fermer et leurs emplois détruits, leurs proches mourir et leurs anciens abandonnés par votre faute.

Après nous avoir dit de rester chez nous, mais d’aller voter, vous nous dites de respecter les gestes barrières, mais de mettre nos enfants à l’école. La mort d’un adulte est une tragédie, celle d’un enfant serait un drame impardonnable ! Encore une fois, vous vous protégez en déclarant que la reprise se fera sur la base du volontariat, mais que feront tous ceux dont l’entreprise exige qu’ils se rendent sur leur lieu de travail ? Ils devront risquer soit la perte de leur emploi en pleine crise économique, soit la santé de leurs enfants.

En plus, vous vous défaussez sur les maires : quand il y a le feu à la maison, quand il y a le feu à la Nation, ce sont les maires que vous appelez à l’aide. Les Français vous qualifiaient déjà d’incompétents. Il suffira d’un enfant, d’un seul enfant qui meurt du coronavirus après son retour à l’école pour que la sentence du peuple de France tombe, implacable et irrévocable : vous serez reconnus responsables et coupables d’une politique criminelle !

Je voterai bien entendu contre ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Personne ne demande plus la parole ?…

Je vais mettre aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi.

Mes chers collègues, je me permets de souligner que je n’ai été saisi d’aucune demande de scrutin public, alors que des sensibilités différentes se sont exprimées au sein des groupes. N’y a-t-il vraiment aucune demande de scrutin public ? Je crois important de vous poser la question, car j’ai souvenir de l’examen d’un texte il y a fort longtemps lors duquel ce ne fut pas le cas…

M. Bruno Retailleau opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Mon groupe demande un scrutin public, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. D’une certaine façon, je vous ai tendu la perche, madame la présidente.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Je suis donc saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRCE.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 103 :

Le Sénat a adopté.

Mes chers collègues, avant de lever la séance, permettez-moi de remercier le président de la commission des lois, ainsi que celui de la commission des affaires sociales, parce que la tâche n’était pas facile. Je le dis très sincèrement, le président du Sénat que je suis estime que le fonctionnement actuel de notre assemblée n’est pas totalement satisfaisant.

Je remercie aussi les membres de ces deux commissions qui, malgré des conditions de travail nécessitant tantôt des réunions en visioconférence, tantôt leur présence dans nos murs, ont pu conduire un débat de qualité. Je tenais à rappeler et à souligner les conditions dans lesquelles nos travaux se sont tenus.

Je remercie également les présidentes et les présidents des groupes politiques qui nous ont permis de débattre et d’être à la hauteur des enjeux : nous avons parlé de liberté, de sécurité sanitaire, de sujets me semble-t-il majeurs.

Toutefois, nous ne pourrons naturellement pas toujours légiférer de cette manière. En effet, nous avons parfois besoin de prendre le temps et la hauteur indispensables, me semble-t-il, pour traiter de sujets aussi importants, notamment dans une assemblée comme la nôtre, qui a un rôle de balancier et de stabilisateur dans un moment où il nous faut un peu tenir le cap ensemble, si j’ose dire, même si chacun peut avoir une vision un peu différente de la navigation. C’est la démocratie.

Pour finir, je vous remercie, monsieur le ministre. J’expliquerai au président Sueur, mais en privé, ce qu’est la langue de bois, puisqu’il l’a évoquée ce soir. Vous le savez aussi bien que moi, monsieur le ministre, il s’agit d’une actinobacillose.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Je veux remercier le président Bas et le président Milon, ainsi que l’ensemble des sénatrices et des sénateurs présents depuis hier dans cet hémicycle. Nous avons réalisé ensemble un travail efficace dans un temps record et contraint et dans des conditions particulières. J’ai été très heureux d’être ici avec vous pour défendre pour la première fois en tant que ministre un texte de A à Z.

Je retiens des choses enrichissantes de nos débats. L’essentiel du projet de loi a été préservé, tandis que les commissions des affaires sociales et des lois du Sénat ont effectué un gros travail.

Vous aurez sûrement noté le peu de velléités gouvernementales de revenir sur les mesures adoptées dans ces commissions. Ces velléités ont rencontré plus ou moins de succès – souvent moins que plus mais, après tout, qui ne tente rien n’a rien ! §– et n’ont de toute façon jamais eu pour objet de déséquilibrer le travail fait par votre assemblée. Le Gouvernement a avant tout cherché à faire valoir des arguments différents, à l’instar de ce que vous avez fait, dans votre grande sagesse, au cours de ces quarante-huit dernières heures et des heures qui ont précédé en commission.

La navette va suivre son cours. Le texte sera examiné demain par la commission des lois de l’Assemblée nationale avant de l’être en séance publique. Vous aurez l’occasion d’ici à la fin de la semaine, je l’espère, de débattre des dispositions restant en discussion au cours d’une commission mixte paritaire.

Je veillerai avec une grande attention à ce que les conditions soient réunies pour que celle-ci soit conclusive. Je considère en effet que les délais d’examen contraints sont en fait des délais pour les Français, qui sont aujourd’hui contraints et qui ont très envie d’être déconfinés. J’ai bien compris que le Conseil constitutionnel serait saisi, ce qui rallongera d’autant l’examen de ce texte et raccourcira d’autant le temps nécessaire pour le mener à son terme. Encore une fois, merci à tous et bonne nuit !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 6 mai 2020 :

À quinze heures :

Questions d’actualité au Gouvernement.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mercredi 6 mai 2020, à une heure cinq.