Intervention de Philippe Bas

Réunion du 4 mai 2020 à 14h30
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Exception d'irrecevabilité

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Je me retrouve avec Mme Assassi sur beaucoup de valeurs, parce que ce sont celles de la République. Pourtant, je ne les interprète pas au point d’approuver sa motion, ce dont elle ne sera pas surprise.

Ma chère collègue, je refuse moi aussi toute évolution qui aurait pour effet de réduire notre démocratie au dialogue singulier entre un homme – le Président de la République – et le peuple français. Cette vision n’est pas la nôtre ! Nous sommes les représentants de la Nation au Parlement, au Sénat de la République, et jamais nous ne pourrons l’accepter.

Nous ne sommes pas non plus les apôtres d’un système dans lequel il n’y aurait plus les garanties de l’État de droit pour s’opposer aux excès de pouvoir. Quand nous nous prononçons en faveur de l’état d’urgence sanitaire, cela ne signifie pas que nous renoncions à l’État de droit, car nous prévoyons des garanties.

Dans notre démocratie, le Parlement est là – il vote la loi – et les restrictions à l’exercice de libertés fondamentales doivent être justifiées, sous le contrôle, possible et souhaitable, du Conseil constitutionnel et, pour ce qui concerne leur mise en œuvre, des juridictions.

Ne cédons pas à la tentation d’une vision trop réductrice de l’état de notre démocratie, même s’il existe de véritables sources de préoccupation, que vous avez exprimées et que je partage s’agissant de l’équilibre des pouvoirs dans la République et d’un certain nombre d’évolutions qui ne me paraissent pas favorables à la vie d’une démocratie équilibrée dans laquelle tous les points de vue peuvent être entendus avant la décision.

Reste que nous sommes là et que nous ne pouvons pas, sans nier notre propre mission, considérer que le Parlement n’aurait pas d’importance. Nous voterons – ou pas – le projet de loi qui nous est proposé pour proroger l’état d’urgence, mais nous y inscrirons des garanties essentielles qui n’y figurent pas. C’est la différence entre votre position, qui consiste à refuser la discussion, et notre position, qui est favorable à la discussion, afin d’inscrire des garanties dans le texte, conformément au rôle du Sénat dans le cadre du processus législatif.

Telles sont les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, la commission, après avoir longuement délibéré – près de dix minutes –, a décidé d’émettre un avis défavorable sur cette motion.

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