Intervention de Philippe Bas

Réunion du 4 mai 2020 à 22h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Article 2, amendements 79 23

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Le Gouvernement a souhaité modifier le texte que nous avions adopté le 23 mars dernier sur le point de la réquisition des personnes ; je souhaiterais que le ministre nous en explique plus précisément les raisons. Notre texte conditionnait la réquisition de personnes à celle de biens et de services leur étant liés. Le Gouvernement veut pouvoir réquisitionner des personnes sans avoir à réquisitionner l’organisme dont ces personnes dépendent. Il s’est en effet heurté à des difficultés pour réquisitionner des médecins d’agences régionales de santé, se trouvant obligé de réquisitionner les ARS elles-mêmes, ce qui est évidemment un peu curieux…

Le point de départ me paraît donc assez mince et anecdotique. Pour tout le reste, nous avons déjà adopté la mesure que ces amendements tendent à modifier. Notre position peut bien sûr évoluer par rapport à notre vote d’il y a six semaines, mais je tenais tout de même à rappeler ces éléments afin de fixer le cadre de notre débat sur ce sujet important des réquisitions.

L’amendement n° 79 vise à rétablir le texte que nous avions adopté le 23 mars. Je n’ai pas de raison majeure de m’y opposer. Toutefois, ce matin, pour être agréable au Gouvernement et parce qu’elle a jugé son texte acceptable, la commission des lois a adopté la rédaction proposée. Je n’émettrai donc pas un avis favorable sur cet amendement.

L’amendement n° 75 vise à ce que la réquisition de personnes ne soit possible que pour la constitution des fameuses « brigades sanitaires », expression inspirée d’une formule du professeur Delfraissy, reprise par le Gouvernement pour expliquer qu’on allait mobiliser un certain nombre d’agents afin de remonter la filière des contaminations, depuis les porteurs du virus jusqu’aux personnes qu’elles ont rencontrées dans les jours précédant le test de dépistage. Je ne vois pas vraiment de raisons de restreindre à ces brigades sanitaires, qui n’ont pas de statut particulier, la réquisition de personnes. La commission a donc émis un avis défavorable.

L’amendement n° 10 rectifié tend à ce que l’on ne puisse réquisitionner que des personnes « qualifiées ». Nous pourrions certes retenir cet adjectif, mais cela n’est pas nécessaire. De fait, on ne va pas utiliser ce dispositif si particulier pour réquisitionner des gens qui n’ont pas de qualification. On a plutôt besoin de gens qualifiés pour lutter contre le Covid-19 ! L’avis est donc défavorable.

L’amendement n° 145 vise à permettre la réquisition des entreprises privées dont les productions seraient utiles à la lutte contre le fléau sanitaire du Covid-19. Or c’est déjà possible, la formule « biens et services » couvrant évidemment toutes les entreprises. Votre amendement me semble donc satisfait, monsieur Gay, et j’espère que vous accepterez de le retirer. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement n° 146 a trait à un sujet d’une particulière actualité. Beaucoup de nos concitoyens considèrent en effet que des stocks de masques ont probablement été constitués dans des entreprises de la grande distribution et se demandent pourquoi ils n’ont pas été réquisitionnés. Le Gouvernement s’est expliqué sur le sujet, mais cette question est parfaitement légitime. Ne sachant rien de la réalité de ce soupçon, tout ce que je peux dire, c’est que nous avons déjà conféré au Gouvernement le pouvoir de réquisitionner des stocks de masques par la loi du 23 mars dernier. Cet amendement me semble donc satisfait, c’est pourquoi je suggère son retrait.

L’amendement n° 76 prévoit que les décisions de réquisition doivent être rendues publiques. Or c’est déjà le cas, car elles sont prises par voie d’arrêtés, lesquels sont publiés. Là encore, je suggère le retrait de l’amendement, qui n’est pas nécessaire.

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