La séance, suspendue à vingt heures vingt, est reprise à vingt-deux heures.
La séance est reprise.
Mes chers collègues, j’invite chacun à veiller au respect des règles sanitaires, comme lors de chaque séance.
Monsieur le président, lors du scrutin public n° 100, M. Robert del Picchia souhaitait voter pour.
Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
Nous reprenons la discussion du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions.
Je rappelle que la discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
Chapitre Ier
Dispositions prorogeant l’état d’urgence sanitaire et modifiant certaines dispositions relatives à son régime
I. – L’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 est prorogé jusqu’au 10 juillet 2020 inclus.
II
1° Intentionnellement ;
2° Par imprudence ou négligence dans l’exercice des pouvoirs de police administrative prévus au chapitre Ier bis du titre III du livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique ;
3° Ou en violation manifestement délibérée d’une mesure de police administrative prise en application du même chapitre ou d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement.
Dans le cas prévu au 2° du présent II, les troisième et quatrième alinéas de l’article 121-3 du code pénal sont applicables.
III
Les familles sont inquiètes pour les mariages prévus cet été. Elles ne savent comment procéder pour leur organisation et veulent obtenir des informations précises sur ces questions.
Si l’état d’urgence sanitaire est prorogé jusqu’au 23 juillet 2020 inclus, elles rencontreront des difficultés, notamment financières. Des craintes s’expriment, car certains prestataires souhaitent tout de même organiser les événements prévus cet été et n’envisagent pas de rembourser les acomptes déjà versés aux familles qui souhaiteraient un report du mariage en 2021. Je pense notamment à une famille de ma commune qui m’a contactée ce week-end : elle souhaiterait reporter un mariage, initialement prévu le 18 juillet prochain, mais le prestataire leur a indiqué qu’une demande de report serait considérée comme une annulation et qu’il n’y aurait pas de remboursement d’acompte.
Il semble toutefois compliqué d’envisager un mariage dans un tel cadre sanitaire avec gestes barrières et mesures de distanciation sociale. Pouvez-vous apporter des précisions à ces familles, en particulier sur la question du remboursement par le prestataire ?
D’autres questions se posent : les réunions de personnes qui peuvent être limitées ou interdites par décret seront-elles autorisées ? Les citoyens venant d’autres départements ou d’autres pays pourront-ils se déplacer pour assister à un mariage ? Autant d’interrogations qui angoissent de nombreux futurs mariés, qui ne peuvent être informés à la dernière minute.
Je voudrais revenir quelques instants sur le problème de la responsabilité.
La grande majorité de notre groupe a exprimé hier, dans une tribune que nous avons cosignée, son souhait que le cadre juridique de la responsabilité des personnes ayant un rôle à jouer durant l’état d’urgence sanitaire, aussi bien les maires, les élus que les chefs d’entreprise, par exemple, soit posé le plus clairement possible. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé, ce matin, un amendement visant à introduire une telle disposition.
La commission a finalement retenu l’amendement du rapporteur, dont les dispositions figurent désormais dans le texte. Cette rédaction est perfectible. Elle sera sans doute améliorée et aménagée à l’Assemblée nationale, puis en commission mixte paritaire. C’est tout le rôle de la navette parlementaire et de l’exercice de notre office en pleine responsabilité. Notre objectif à tous doit être d’aboutir à une solution claire qui rassure les maires, dont l’action est déterminante.
Cet article a également trait à la responsabilité des chefs d’entreprise. Il nous semble difficile de voter une telle disposition dans la précipitation. C’est une question complexe.
Il ne s’agit pas de la principale préoccupation des chefs d’entreprise. Sur le terrain, ils sont confrontés à d’autres problèmes, à commencer par celui de la main-d’œuvre. Beaucoup de leurs employés doivent garder leurs enfants, certains sont malades… Il manque beaucoup d’hommes et de femmes pour travailler.
Autre problème : l’interconnexion des entreprises. Aujourd’hui, si l’une d’entre elles ne reprend pas le travail, il est difficile pour les autres d’avancer.
Enfin, se pose la question de l’approvisionnement en matériaux.
Il nous paraît inopportun de légiférer sur la question de la responsabilité des entreprises au détour d’un amendement. Il faut un vrai débat.
L’article L. 41-21 du code du travail prévoit une obligation de moyens, mais la jurisprudence a tranché, par deux fois, pour une obligation de résultat. Allons-nous passer au-dessus de cette jurisprudence par un simple amendement ?
En ce moment précis, l’inspection du travail étudie l’obligation de moyens renforcée, notamment à travers les guides. Il faut un large débat et une concertation entre les organisations patronales et syndicales et le Gouvernement pour élaborer des guides applicables sur le terrain. De la trentaine de guides dont il est question aujourd’hui, celui du bâtiment, par exemple, est inapplicable dans les faits.
Faute d’une vraie concertation, on est en train de bâcler ces guides pour reprendre le travail dès le 11 mai. Beaucoup de questions restent en suspens avec cette obligation de moyens renforcée. Rien n’est prévu pour le trajet entre le domicile et le lieu de travail. En Île-de-France, par exemple, l’usage du RER B pose question.
Tout cela ne peut se mettre en place dans la précipitation ni à l’encontre des droits des salariés. L’inspection du travail doit pouvoir remplir son rôle. Il faut élargir le débat et reconnaître le Covid-19 comme maladie professionnelle.
La loi d’urgence du 23 mars dernier a conféré à l’exécutif le pouvoir de limiter les libertés individuelles et publiques. On peut comprendre que cette pandémie, en raison de son ampleur, de son caractère anxiogène et du nombre de contaminations et de décès ait justifié des mesures exceptionnelles. Encore faut-il que ces mesures soient effectivement exceptionnelles et, bien sûr, temporaires. Encore faut-il être sûr qu’elles disparaissent avec l’état d’urgence lui-même. Nul n’a oublié ces dispositions de l’état d’urgence de 2015 entrées finalement dans le droit commun.
L’état d’urgence est un outil, ne nous y installons pas. Il ne pallie pas les manquements que la pandémie a rendus plus criants encore, à commencer par ces choix austéritaires et libéraux successifs en matière de santé publique qui ont mis nos hôpitaux dans l’état où ils sont aujourd’hui. Le confinement a été mis en place d’abord pour éviter leur possible engorgement.
Ce sont aussi les choix économiques de nos dirigeants qui ont fragilisé notre industrie. Nous sommes dépendants notamment de la Chine pour ces masques, qui n’arrivent pas, pour ces tests, qui ne sont pas prêts, pour ces respirateurs, qui ne sont pas aux normes ; sans compter le manque de médicaments et de blouses pour nos soignants.
Cette pandémie a été affrontée dans la confusion, avec des contradictions multiples et pas mal d’amateurisme. Le déconfinement semble prendre le même chemin. Nous voulons plus de masques, plus de tests, plus de lits. L’état d’urgence n’est pas la priorité, il sert juste de bouclier à l’exécutif.
Je suis saisi de seize amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 135, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 1 à 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Comme nous l’avons souligné en défendant notre motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité, nous refusons la prolongation de l’état d’urgence sanitaire. Cela ne revient pas à nier la crise sanitaire qui sévit dans notre pays. Le Défenseur des droits a lui-même indiqué que « garantir la sécurité sanitaire du plus grand nombre ne doit pas conduire à insérer de façon durable des mesures exceptionnelles dans le droit commun à l’issue du déconfinement ».
Parfois, l’expérience fait foi. L’état d’urgence prévu par la loi du 3 avril 1955, maintes fois prorogé, a montré que le risque de « contamination » de notre droit commun par des dispositifs d’exception était avéré. Le choix du Gouvernement de proroger de deux mois cet état d’exception sans durée finale ouvre incontestablement la voie au même écueil.
Madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, permettez-moi de vous alerter, car nous allons avoir ce débat récurrent sur un certain nombre d’articles. Oui, la France a peur ! Peur de ce que va être ce 11 mai ; peur des conditions dans lesquelles ce déconfinement tant attendu par nos concitoyens va se dérouler et peur de la façon dont la sécurité sanitaire des familles, notamment des aînés, sera garantie.
Le 13 avril dernier, le Président de la République a fixé l’objectif du 11 mai pour le déconfinement. À J-7, nous avons le sentiment – élus locaux, chefs d’entreprise, salariés… – que rien ne s’est passé en quatre semaines, que cette date a été choisie au doigt mouillé et qu’elle n’offre aucune garantie de sécurité sanitaire.
Nous doutons que la prorogation de l’état d’urgence sanitaire constitue une garantie pour assurer la sécurité des Françaises et des Français.
L’amendement n° 5 rectifié bis, présenté par M. Labbé, Mmes M. Carrère, Costes, N. Delattre et Laborde, M. Vall, Mme Jouve et MM. Dantec et Cabanel, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Rédiger ainsi cet alinéa :
L’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 est prorogé jusqu’au 23 juin 2020 inclus. Au-delà du 23 juin 2020 inclus, les mesures mentionnées aux 3°, 4°, 7°, 8° et 9° de l’article L. 3131-15 du code de santé publique peuvent être prorogées hors de l’état d’urgence sanitaire, de manière strictement proportionnée aux risques sanitaires.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Cet amendement de notre collègue Joël Labbé constitue une innovation législative intéressante. Il vise à préparer dès aujourd’hui une sortie dégressive de l’état d’urgence sanitaire sans repousser le débat au 10 juillet, ce que nous saluons.
Depuis l’expérience de l’état d’urgence déclenché après les attentats de 2015, nous savons à quel point il est difficile de sortir de ces régimes dérogatoires du droit commun. Il se produit une sorte d’effet cliquet d’accoutumance aux latitudes permises par ces régimes.
Afin de ne pas reproduire cette expérience et de faire émerger plus rapidement la question de l’adaptation structurelle du droit existant, notre collègue propose un dispositif en deux temps : dans un premier temps, l’état d’urgence sanitaire serait maintenu de façon intégrale ; dans un second temps, le Gouvernement pourrait seulement avoir recours aux mesures prévues aux 3°, 4°, 7°, 8° et 9° de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique, les plus opérationnels du point de vue de la gestion de crise.
De façon générale, cet amendement invite à repenser les régimes d’urgence pour l’avenir, dès lors que des sas de sortie pourraient être aménagés dès leur conception législative. C’est la raison pour laquelle je le défends aujourd’hui. Il vise ainsi à retrouver plus rapidement un exercice normal des libertés auxquelles le groupe du RDSE est par tradition très attaché. En outre, il tient compte de la facilité avec laquelle l’état d’urgence sanitaire pourrait être établi en cas de seconde vague, tel que le prévoit le régime adopté le 23 mars dernier.
L’amendement n° 62, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer la date :
10 juillet
par la date :
10 juin
II. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le Parlement est convoqué avant cette date pour décider de mettre un terme à l’état d’urgence sanitaire ou de le proroger à nouveau. »
La parole est à M. Stéphane Ravier.
Un état d’urgence doit rester une mesure d’exception, à utiliser dans un cadre précis. C’est le seul moyen d’en faire une arme efficace de notre droit et donc d’en consacrer le caractère exceptionnel.
Rappelons que, si nous sommes confinés depuis bientôt deux mois, c’est en raison de l’impréparation du Gouvernement et de son incapacité à gérer dans l’urgence notre approvisionnement en masques de protection et la mise en place d’un dispositif de dépistage qui aurait permis de ne pas ajouter au chaos sanitaire un chaos économique et social.
C’est l’anticipation qui a manqué hier pour sauver des vies. C’est le temps qui manque aujourd’hui pour faire parvenir à chacun le nécessaire pour reprendre une activité professionnelle normale. On gagne du temps quand on prévoit. On gagne du temps quand on gouverne. Mais quand le temps est perdu, il ne se rattrape jamais. Le temps, c’est des vies sauvées ou des vies perdues. Les hésitations, les mauvaises décisions et, trop souvent, les mensonges nous ont fait perdre beaucoup de temps et donc beaucoup de vies.
Aujourd’hui, il nous semble disproportionné de proroger pour deux mois, sans visibilité. Je propose de proroger d’un mois et de revenir, le cas échéant, sur le terme prévu. L’urgence est de rendre à la société et à nos compatriotes leurs libertés publiques et aux entreprises leur travail dès le mois de juin, à condition, bien évidemment, de s’en donner les moyens.
Les dispositions de cet amendement prévoient également un contrôle du Parlement d’ici à un mois pour juger des suites à donner à cet état d’urgence. En effet, si le Gouvernement profite de l’actualité pour amnistier ses proches ou enterrer la commission d’enquête du Sénat sur l’affaire Benalla, il ne doit pas oublier que l’union nationale ne peut se faire sans le peuple ni sans les territoires.
L’amendement n° 74, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville et MM. Todeschini, Vallini et Vaugrenard, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer la date :
10 juillet
par la date :
23 juin
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
Nous sommes profondément attachés aux droits du Parlement. C’est la raison pour laquelle nous proposons de proroger d’un mois la loi du 23 mars dernier et le régime d’urgence sanitaire.
Pourquoi ? Parce que nous travaillons dans des conditions exorbitantes jamais vues. Parce que, depuis un mois, voire davantage, les injonctions du Gouvernement sont tellement contradictoires, tellement changeantes, la situation tellement variable qu’il nous paraît nécessaire d’instaurer un véritable suivi du Parlement. Nous ne pensons pas qu’il soit bon de donner carte blanche pour deux mois.
C’est dans cet esprit que nous avons déposé cet amendement, qui vise simplement à restaurer les droits du Parlement.
L’amendement n° 3 rectifié ter, présenté par MM. Decool, Wattebled, Menonville et Longeot, Mme Mélot, MM. Lagourgue et Bonne, Mmes Garriaud-Maylam et Goy-Chavent et MM. Malhuret et Kern, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer la date :
10 juillet
par la date :
15 juillet
La parole est à M. Dany Wattebled.
Je prends la parole au nom de notre collègue Jean-Pierre Decool.
Dans le projet de loi initial, le Gouvernement souhaitait proroger l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 23 juillet. La commission, en adoptant un amendement du rapporteur, a avancé cette date au 10 juillet, souhaitant ainsi pouvoir se prononcer, si besoin était, dans un délai plus court que celui proposé par le Gouvernement.
Cette demande tout à fait légitime semble satisfaite par les dispositions de notre amendement, qui tend à inclure dans la période d’état d’urgence sanitaire le week-end précédent et le jour de la fête nationale, ce qui permet de faire correspondre l’état d’urgence sanitaire avec l’échéance de la mi-juillet évoquée par le Président de la République.
La levée de l’état d’urgence sanitaire juste avant le 14 juillet pourrait laisser penser que les restrictions imposées d’ici là seraient abandonnées, ce qui entraîne une incertitude prolongée et une imprévisibilité pour les Français, notamment pour les élus locaux organisateurs des festivités durant ce week-end.
L’amendement n° 164, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
, date à laquelle il prend fin
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Comme je l’ai souligné à l’instant, il existe un risque de contamination du droit commun par les mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire.
Alors que le texte initial prévoyait une reconduction de l’état d’urgence de mois en mois, après examen par le Parlement, le Gouvernement a proposé une prorogation de deux mois que la commission des lois du Sénat a largement raccourcie.
Permettez-moi de relever l’incohérence du projet de loi instaurant cet état d’urgence sanitaire : l’article 2 prévoit que le texte prorogeant l’état d’urgence de plus d’un mois fixe sa durée, alors que l’article 4 prévoit un régime de deux mois pouvant être prorogé indéfiniment, peut-être jusqu’en avril 2021.
Suivant la logique de cet article 2, nous proposons que la présente prorogation fixe la durée finale de l’état d’urgence.
L’amendement n° 7 rectifié bis, présenté par Mmes Guillotin, M. Carrère, Costes, N. Delattre et Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec et Gold, Mme Jouve, MM. Roux et Vall, Mme Pantel et M. Guérini, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Pour toute la durée de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire, à des strictes fins de préservation de la santé publique, les usagers des espaces publics et des lieux recevant du public observent les règles de protection des voies bucco-nasales et de distanciation sociale prévues par décret, appropriées aux circonstances de temps et de lieu.
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Cet amendement vise à établir des règles claires et opposables en termes de précautions individuelles pour chacun de nos concitoyens en période d’épidémie. Il s’agit de sortir d’un droit mou de simples recommandations particulièrement inadaptées en matière de santé publique.
Cet après-midi, j’ai posé une question sur l’extension du port du masque dans l’espace public. Face à une simple recommandation, un individu confiant aura tendance à respecter les règles de manière minimale quand un individu plus précautionneux s’appliquera des exigences plus sévères. Or la vie en société fait que les individus plus précautionneux croiseront les individus confiants, les uns avec des masques et les autres sans, et que la distanciation sociale ne sera pas toujours respectée.
Samedi dernier, les grandes surfaces étant ouvertes, j’ai pu voir de très longues files d’attente, de plusieurs dizaines de mètres, les personnes se suivant à cinquante centimètres de distance les unes des autres, et de petits attroupements de gens ne portant pas toujours de masque. Selon moi, ce sont autant de mini-clusters.
Je ne comprends pas votre obstination à ne pas vouloir rendre obligatoire le port du masque dans l’espace public. Il s’agit d’un amendement précautionneux, d’un amendement de prudence dont l’adoption permettrait peut-être d’éviter de nouvelles hospitalisations et nous aiderait à sortir plus rapidement de ce confinement.
L’amendement n° 144 rectifié, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
À compter de la promulgation de la loi n° … du … prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions, il est instauré un comité national de suivi de l’état d’urgence sanitaire, composé du Premier ministre, des ministres compétents, du directeur général de la santé, de deux représentants du comité de scientifiques, d’un représentant par formation politique représentée au Parlement et d’un représentant par association nationale d’élus locaux.
Le comité se réunit deux fois par semaine pour prendre connaissance des propositions de décision du gouvernement. Le compte rendu de ces réunions est rendu public.
Les membres de ce comité ne sont pas rémunérés et aucun frais lié au fonctionnement de ce comité ne peut être pris en charge par une personne publique.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Nous reprenons ici un amendement que nous avions déposé lors de l’examen du projet de loi instaurant l’état d’urgence sanitaire, le 19 mars dernier, également défendu par nos collègues députés. Peut-être gênait-il, mais force est de constater qu’il avait été balayé d’un revers de main par le Gouvernement et par les majorités parlementaires du Sénat et de l’Assemblée nationale.
Pourtant, comme nous l’avons tous constaté, la gestion de l’état d’urgence ne peut reposer entre les mains d’un seul homme, fût-il Président de la République. Nous proposions donc de mettre en place un conseil pluraliste, à l’écoute de toutes les remontées du terrain. Nous sommes en effet convaincus qu’il nous faudra, dans les prochaines semaines et les prochains mois, être à l’écoute de toutes les opinions et de toutes les propositions.
Dire cela n’est pas nier la démocratie ni le respect dû aux différents rapports de force. Certains ont parlé d’unité nationale, je ne sais pas si nous en sommes là. Depuis plusieurs semaines, vous avez géré une crise sans précédent et à laquelle personne ne détient l’ensemble des réponses. Toutefois, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, les groupes et partis politiques qui font vivre la démocratie ne sont pas seulement là pour écouter. Si nous voulons réellement parvenir à une sortie de crise réussie, nous devons construire les réponses ensemble.
Cet après-midi, le Sénat, à quelques voix près, ne vous a pas accordé la confiance. C’est que la confiance se construit, elle ne s’impose pas. La confiance suppose d’apporter des réponses avec l’ensemble des partis. Au regard de ces dernières semaines, il ne s’agit manifestement pas de la méthode choisie par le Gouvernement, raison pour laquelle nous proposons une nouvelle fois la mise en place d’un groupe de suivi.
L’amendement n° 194 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la garde des sceaux.
Cet amendement vise à supprimer les dispositions introduites en commission sur la responsabilité pénale des personnes physiques pour des faits commis pendant l’état d’urgence sanitaire.
J’ai eu l’occasion de souligner à quel point le Gouvernement est tout à fait sensible aux inquiétudes des acteurs publics, des élus locaux et des acteurs privés sur le risque pénal encouru durant le déconfinement. M. le Premier ministre et moi-même avons également indiqué que nous ne voulions pas atténuer la responsabilité des décideurs publics, mais prendre en compte la spécificité du moment que nous vivons. Je suis certaine que vous partagez tous cette préoccupation.
Notre droit prévoit déjà des règles permettant de limiter la responsabilité pénale des acteurs publics et privés en cas d’infraction non intentionnelle. Vous connaissez bien ce dispositif, puisqu’il s’agit de la loi Fauchon : lorsque le lien de causalité avec le dommage est indirect, la responsabilité pénale ne peut être engagée que si le décideur public a délibérément violé une obligation prévue par la loi ou commis une faute caractérisée en l’absence de normes. Ce dispositif, adopté voilà vingt ans, fonctionne bien, et je crois qu’il est protecteur.
Je relève bien évidemment la volonté de la commission des lois et de son président de clarifier le cadre juridique de cette responsabilité dans le contexte de crise du Covid-19, mais l’amendement adopté en commission me semble soulever trois questions.
En premier lieu, la lecture des dispositions de cet amendement laisse penser qu’il tend à supprimer la faute caractérisée de l’article 121-3 du code pénal. Il faut bien évidemment permettre aux acteurs publics ou privés d’agir sans blocage en cette période particulière, mais il ne faut pas non plus donner l’impression que les décideurs publics seraient irresponsables.
En deuxième lieu, la commission entend modifier le régime de la responsabilité pénale pour les seuls faits liés à l’état d’urgence sanitaire. J’ai peur que cette mesure ne crée un risque constitutionnel au regard du principe d’égalité devant la loi pénale, une différence de traitement pouvant en résulter entre des faits commis avant ou après l’instauration de l’état d’urgence sanitaire, alors qu’ils sont tous liés aux effets du Covid-19. Par exemple, un directeur d’hôpital pourrait se voir condamné pour faute caractérisée du fait d’une décision prise avant le déclenchement de l’état d’urgence sanitaire, alors qu’un de ses collègues, ayant pris une décision similaire mais après ce déclenchement, ne le serait pas.
En troisième lieu, je ne suis pas certaine qu’on puisse opérer une distinction entre les responsables de la police administrative – pour l’essentiel, les préfets – et les autres acteurs publics agissant dans le cadre de cette police. D’ailleurs, le Premier ministre a mis l’accent devant vous sur l’importance du couple maire-préfet dans la sortie du confinement. Or le dispositif de la commission, tel qu’il est formulé, donne l’impression que le premier pourra être poursuivi pour imprudence ou négligence, alors que le second ne pourra l’être qu’en cas de violation manifestement délibérée d’une mesure de police administrative.
Telles sont, brièvement exposées, les raisons pour lesquelles je considère que la rédaction du dispositif adopté par la commission n’est pas appropriée.
Le Gouvernement, je le répète, est disposé à ce que la loi soit précisée ; mais il me semble qu’il faut encore travailler la réponse à apporter. Le temps de la navette doit nous permettre de trouver le dispositif le plus adéquat.
L’amendement n° 42, présenté par MM. Sueur, Marie, Jacques Bigot, Montaugé, Kerrouche, Durain et Kanner, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Sutour et Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes Féret, M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais et Guillemot, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier, Monier, Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mmes Rossignol et Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 6
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
II. – À compter de la déclaration de l’état d’urgence sanitaire et jusqu’à trois mois après sa cessation, tout acte accompli par un élu local ou un agent public ayant reçu délégation, visant à mettre en œuvre une décision prise par l’État dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, ne peut engager sa responsabilité pénale et civile que s’il est établi qu’il a violé de façon manifestement délibérée et en connaissance des risques, compte tenu de ses compétences, du pouvoir et des moyens dont il disposait ainsi que des difficultés propres aux missions que la loi lui confie, une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
Le Sénat représente les collectivités territoriales de la République, et tous ses membres sont en contact quotidien avec de très nombreux maires.
J’entends bien, madame la garde des sceaux, que vous souhaitez voir retiré le dispositif que le président-rapporteur, Philippe Bas, a proposé en matière de responsabilité pénale des maires et de tous les élus locaux. La position de notre groupe est différente : nous souhaitons, au contraire, préciser les choses.
Tous les acteurs, bien sûr, doivent être responsables. Mais comment ne pas entendre ce que nous disent les élus locaux tous les jours ? Ils n’ont pas été associés à la définition des règles relatives à l’ouverture des écoles, non plus que de celles relatives au fonctionnement des transports en commun dans quelques jours et à l’organisation des élections, entre autres sujets. Pourtant, ils doivent agir, en quelque sorte, au nom de l’État, en tout cas en vertu de décisions de l’État.
Je vais être très pragmatique : si vous voulez que les dispositions prévues s’appliquent dans quelques jours, s’agissant en particulier des écoles, il est très important d’apporter des garanties aux élus locaux, qui seront en première ligne – avec, bien sûr, les enseignants.
Notre proposition, tout à fait cohérente avec ce que souhaitent l’Association des maires de France et toutes les associations d’élus, avec lesquelles nous avons travaillé, consiste à prévoir qu’un élu local, dès lors qu’il mettra en œuvre ce qui lui est demandé par l’État, ne pourra pas voir sa responsabilité, pénale ou civile, engagée à ce titre. Ce qui n’exclut pas que, s’il commet intentionnellement des actes contestables, s’il ne respecte pas les lois et règlements, sa responsabilité puisse, bien sûr, être engagée.
Prévoir une telle garantie dans ce cas précis est une exigence très forte de notre groupe, parce que c’est une exigence très forte par rapport aux élus locaux de notre République.
L’amendement n° 154, présenté par Mmes Assassi et Gréaume, M. Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 6
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
II. – Un maire, ou un élu municipal le suppléant ou ayant reçu une délégation, ne peut voir sa responsabilité pénale engagée du fait d’avoir, par la mise en œuvre des décisions prises par le Gouvernement pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire déclaré à l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, soit exposé autrui à un risque de contamination par le coronavirus SARS-CoV-2, soit causé ou contribué à une telle contamination, à moins que les faits n’aient été commis intentionnellement.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Ayant entendu le Premier ministre et vous-même, madame la garde des sceaux, il me semble que vous voulez bien préciser la loi – en l’occurrence, la loi Fauchon –, dès lors que cela va dans votre sens…
Or notre réalité, aujourd’hui, est différente. S’il faut préciser la loi, ce n’est pas pour la rendre bavarde, formule souvent reprise dans cet hémicycle, ni simplement pour faire bon effet auprès des élus locaux : c’est parce qu’il y a urgence ! Urgence, oui, si nous voulons réunir les conditions de la réussite du déconfinement, non pas seulement pour rassurer les élus, mais pour sécuriser réellement les décisions que prendront les maires et ceux qui auront reçu délégation de ceux-ci.
Ne mélangeons pas tout : personne ici ne soutiendrait qu’un élu devrait être irresponsable et absous par avance de toute faute. En revanche, comme il vient d’être expliqué, on ne peut pas rendre les élus responsables de décisions qu’ils n’ont ni le pouvoir ni les moyens financiers et administratifs d’appliquer et à la définition desquelles, de surcroît, ils n’ont été que très, très partiellement associés.
Cet amendement, comme d’autres de la même série, vise donc à sécuriser réellement les élus locaux au regard de la responsabilité qui pèsera sur eux demain, quand ils auront des comptes à rendre à leur population sur la garantie de la sécurité sanitaire.
L’amendement n° 179 rectifié, présenté par MM. Gremillet et de Legge, Mme Deromedi, MM. Perrin et Raison, Mmes Deroche, Berthet, Chauvin et Noël, M. Priou, Mme Malet, MM. Cuypers, Pellevat et Pierre, Mmes Thomas et Chain-Larché, MM. Kennel, Bascher, Lefèvre, Charon, B. Fournier, Houpert, Piednoir et Bonne, Mme Micouleau, MM. Bouchet, Vogel et Vaspart, Mme Ramond, M. Danesi, Mme Canayer, MM. Joyandet, de Montgolfier, Grosdidier, Sido, Leleux et Regnard, Mmes Garriaud-Maylam et Lassarade, M. Bonhomme, Mme Morhet-Richaud, M. Brisson et Mme Dumas, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le maire ne peut être tenu responsable pénalement et administrativement pour les arrêtés pris, dans le cadre de l’application de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, au titre de son pouvoir de police générale que si les mesures prises dans lesdits arrêtés répondent à trois critères cumulatifs : limitation dans la durée ; limitation dans leur amplitude géographique, limitation dans leur contenu en adoptant des mesures proportionnées à un danger identifié.
La parole est à Mme Catherine Deroche.
Notre collègue Gremillet propose de restreindre la responsabilité des maires à des mesures prises par voie d’arrêté triplement limitées : dans la durée, dans leur amplitude géographique et à un contenu proportionné à un danger identifié. Il s’agit de limiter l’exposition des maires à une responsabilité pénale ou administrative accrue.
L’amendement n° 58 rectifié, présenté par MM. Jacques Bigot, Sueur, Marie, Montaugé, Kerrouche, Durain et Kanner, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Sutour et Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes Féret, M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais et Guillemot, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier, Monier, Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mmes Rossignol et Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – La réouverture des établissements scolaires en période de crise sanitaire ne peut engager la responsabilité des collectivités territoriales.
La parole est à M. Jérôme Durain.
Cet amendement, dont notre collègue Jacques Bigot est à l’origine, vise, dans le droit fil des amendements précédemment présentés, à limiter la responsabilité des élus locaux lors de la réouverture des établissements scolaires.
Le Premier ministre a expliqué cet après-midi qu’il souhaitait l’adhésion au déconfinement la plus large possible. Mais l’adhésion ne va pas sans un juste partage de la responsabilité. Or, actuellement, ce partage est en défaveur des élus locaux, qui se voient imposer la réouverture des établissements scolaires avec des moyens souvent défaillants et dans des conditions particulièrement complexes.
Ainsi, le protocole sanitaire de cinquante-quatre pages – on a gagné neuf pages par rapport à la première version… – ne rend pas justice aux difficultés concrètes rencontrées au quotidien par les élus, qui ne disposent pas tous de groupes scolaires modernes et récemment rénovés : les locaux sont parfois vétustes, les corridors étriqués, les classes trop petites, ce qui rend impossible l’application du protocole proposé.
Les doutes qui remontent du terrain sont ceux d’élus qui veulent bien faire ; ils veulent tellement bien faire que, parfois, ils ne feront pas, s’ils considèrent qu’ils ne sont pas en mesure de mettre en œuvre dans de bonnes conditions le protocole qu’on leur demande d’appliquer. Ce matin même, un maire me disait : on érige le couple maire-préfet en garant de la bonne mise en œuvre du déconfinement, mais, si l’un d’entre nous doit aller en prison, ce sera le maire – le préfet, lui, enverra les oranges…
L’amendement n° 180 rectifié, présenté par MM. Gremillet et de Legge, Mmes Deromedi et Deroche, MM. Perrin et Raison, Mmes Chauvin et Noël, M. Priou, Mme Malet, MM. Cuypers, Pellevat et Pierre, Mmes Thomas et Chain-Larché, MM. Kennel, Bascher, Lefèvre, Charon, B. Fournier, Houpert, Piednoir et Bonne, Mme Micouleau, MM. Bouchet, Vogel et Vaspart, Mme Ramond, M. Danesi, Mme Canayer, MM. Joyandet, de Montgolfier, Grosdidier, Sido, Leleux et Regnard, Mmes Garriaud-Maylam et Lassarade, M. Bonhomme, Mme Morhet-Richaud, M. Brisson et Mme Dumas, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
La responsabilité pénale du maire et des directeurs d’école ne peut être engagée lorsqu’ils sont amenés, dans un temps très court, à évaluer la capacité d’accueil des élèves dans l’établissement scolaire.
La responsabilité pénale du maire ne peut être engagée dès lors que face à l’incapacité à respecter le protocole sanitaire des écoles élaboré conjointement par le ministre de l’éducation nationale et de la santé, le maire se retrouve dans l’incapacité de rouvrir son ou ses établissements scolaires.
La responsabilité pénale du maire ne peut être engagée en matière de restauration scolaire lorsqu’il ne peut pas réunir les conditions adéquates pour assurer la restauration des élèves dans le respect des mesures sanitaires.
La parole est à Mme Catherine Deroche.
Le protocole sanitaire des établissements scolaires a connu des modifications assez importantes depuis la version du 30 avril. C’est pourquoi nous proposons, sur l’initiative de M. Gremillet, que la responsabilité pénale du maire et des directeurs d’école ne puisse pas être engagée dans trois situations : lorsqu’ils sont amenés à évaluer dans un temps très court la capacité d’accueil des élèves dans un établissement scolaire ; dès lors que, face à l’impossibilité de respecter le protocole sanitaire, le maire se retrouve dans l’incapacité de rouvrir un établissement scolaire ou plusieurs ; enfin, lorsqu’il ne peut réunir les conditions adéquates pour assurer la restauration des élèves.
L’amendement n° 137 rectifié, présenté par M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. - Le dernier alinéa de l’article 121-3 du code pénal est complété par les mots : « ou en cas de décision prise par des maires ou des élus municipaux délégués dans le cadre de la mise en œuvre de directives prises par le Gouvernement en lien avec un état d’urgence sanitaire tel que défini à l’article L. 3131-12 du code de la santé publique ».
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Puisqu’on parle beaucoup d’école et que la pédagogie est l’art de la répétition, vous me permettrez d’insister… D’ailleurs, si redondance il y a dans cette série d’amendements, elle témoigne du véritable malaise qui s’exprime dans notre pays autour des difficultés auxquelles sont confrontés de nombreux élus du fait de la date prévue pour la réouverture des écoles.
Oui, il est essentiel de traiter spécifiquement la question de la responsabilité des élus, tout spécialement des maires, par rapport aux autres intervenants dans la lutte contre la pandémie ! Car les élus ne sont pas des acteurs comme les autres : ces derniers mois, ils ont montré que, en cas de catastrophe, c’est à eux qu’incombent le plus de responsabilités, et dans des domaines très divers.
Nous pourrions considérer que le problème a été en partie réglé par le dispositif adopté en commission des lois. Toutefois, nous souhaitons insister pour que l’exonération de responsabilité pénale pour les actes pris ou non pris par les maires dans le cadre de l’urgence sanitaire soit inscrite dans le code pénal, car c’est du code pénal que les juges tiennent prioritairement compte, d’ailleurs de plus en plus largement.
La situation a fortement évolué depuis le 15 mars. À l’époque, tout le monde dénonçait une immense pénurie de masques dans notre pays. Si, aujourd’hui, dans un certain nombre de territoires, les Français peuvent compter avoir au moins un masque ou deux le 11 mai, c’est parce que leur commune, leur intercommunalité ou leur région en a passé commande.
Marques d ’ approbation sur des travées du groupe Les Républicains.
Mme Cécile Cukierman. C’est la réalité, mon cher collègue : ce sont les élus locaux qui ont suppléé à la défaillance de l’État ! Situation d’ailleurs inacceptable : il faudra, demain, réfléchir à une réorganisation de l’État. En attendant, traitons comme il convient la question de la responsabilité des élus locaux, car, ces dernières semaines, ils ont démontré qu’ils sont avant tout, justement, des élus responsables.
Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.
L’amendement n° 134 rectifié, présenté par Mmes Noël et Duranton, MM. Bascher, Lefèvre, Pellevat et Houpert, Mmes Bruguière et Raimond-Pavero, MM. Paccaud, Charon, Perrin, Raison, de Legge et Pemezec, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Karoutchi, Duplomb, J.M. Boyer, Cuypers, Gilles, Pierre et Regnard, Mme Micouleau, M. Frassa, Mmes Dumas, Troendlé, Chain-Larché et Thomas, M. Reichardt, Mme Deroche et MM. D. Laurent, Panunzi, Morisset, Bouchet, Bonne, Genest, Savary et B. Fournier, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. - Après le premier alinéa de l’article L. 2123-24 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Une décision prise et mise en œuvre dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire déclaré par la loi 2020-290 du 23 mars 2020, en lien avec l’État ou toute autre collectivité territoriale, ne peut engager la responsabilité civile ou pénale d’un maire ou d’un élu municipal suppléant ou ayant reçu une délégation, que si une faute est totalement caractérisée avec une intention délibérée de la réaliser et que s’il est clairement établi qu’il disposait des moyens de la mettre en œuvre entièrement. »
La parole est à M. Olivier Paccaud.
Cet amendement, dont ma collègue Sylviane Noël est l’initiatrice, concerne la responsabilité pénale des maires.
M. le Premier ministre, cet après-midi, puis Mme la garde des sceaux, voilà quelques instants, se sont appuyés sur la solidité de la loi du 10 juillet 2000. La loi Fauchon a certainement fait ses preuves, mais dans des circonstances ordinaires. Or, depuis la loi du 23 mars dernier, nous sommes dans des circonstances extraordinaires : un état d’urgence sanitaire.
Comme M. Sueur l’a bien expliqué, quasiment tous les maires de France veulent bien faire, mais sont inquiets quant à leur propre responsabilité, s’agissant notamment de la réouverture des écoles.
On parle sans arrêt des maires comme des fantassins de la République. À la vérité, ils sont même davantage : ils sont la République, ils incarnent la République. Seulement cette République, bien incarnée, doit aussi protéger ceux qui la servent au quotidien. Tel est le sens des précisions que la commission des lois a déjà introduites et que nous sommes nombreux à réclamer à travers ces amendements : ces précisions, nous en avons tout simplement besoin !
Habituellement, quand un grand nombre d’amendements sont en discussion commune, j’en trouve toujours certains tellement intéressants que je parviens, au nom de la commission, à leur donner un avis favorable. Ce n’est pas le cas cette fois-ci.
Je pourrais me dispenser de toute autre explication en vous renvoyant simplement au texte que la commission a adopté ce matin et en tentant devant vous de le justifier. C’est d’ailleurs ce que je vais faire dans un premier temps.
Ce matin, nous avons fait deux choses.
D’abord, nous avons considéré que, si le Gouvernement voulait reconduire une nouvelle fois l’état d’urgence, il faudrait qu’il revienne devant le Parlement avant le 23 juillet prochain. Nous avons pensé que ce serait la bonne mesure de lui laisser deux mois après le commencement du déconfinement, lundi prochain, avant de procéder avec lui à l’évaluation de l’efficacité des mesures prises, si aucun événement ne survient d’ici là qui justifie que ce bilan doive être fait plus tôt.
Nous avons donc adopté la limite du 10 juillet prochain, avant laquelle le Gouvernement devra s’être, en quelque sorte, réassuré devant la représentation nationale, dans toute sa diversité, sur la prolongation de l’état d’urgence. Je n’exclus pas qu’il soit amené à le faire avant. Au reste, nous préférons, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, que vous le fassiez tôt plutôt que tard – tout en vous laissant suffisamment de temps pour que l’évaluation puisse être pertinente.
Ensuite, nous avons constaté que nous entrerions, lundi prochain, dans une période très particulière. Jusqu’ici, une règle simple s’impose à tous les Français : le confinement, avec possibilité de sortir de chez soi pour des raisons dûment justifiées, au moyen d’une attestation remplie par chacun ; ce n’est pas facile, mais c’est simple. À partir de la semaine prochaine, il faudra prendre de multiples décisions d’organisation sur le fonctionnement des écoles, des entreprises, des administrations. Le Gouvernement demandera à chacun de prendre ses responsabilités, comme il est juste.
Reste que, dans des circonstances aussi exceptionnelles, les personnes qui seront amenées à prendre leurs responsabilités doivent être protégées. Elles prendront, bien sûr, un risque : nous ne pouvons jamais écarter la mise en cause de la responsabilité pénale d’une personne qui aurait intentionnellement provoqué une contamination, ni admettre qu’on exonère de sa responsabilité pénale une personne qui aurait commis, par violation délibérée d’une obligation particulière de prudence imposée par les lois et les règlements, un acte ayant entraîné une contamination.
La règle que nous avons fixée est, somme toute, assez simple : ce n’est pas une exonération totale de responsabilité pénale, mais le moyen d’éviter que le juge pénal puisse trouver dans la loi du 10 juillet 2000, d’initiative sénatoriale, un fondement pour attraire la responsabilité pénale d’une personne – par exemple, un maire –, pour le motif qu’elle aurait commis une faute caractérisée parfaitement indéfinie dans le code pénal, mais que le juge invoquerait pour rechercher la responsabilité pénale de cette personne qui, du fait de la politique du Gouvernement, aurait pris un risque.
Nous estimons qu’il suffit largement, pour préserver la possibilité de l’action pénale, de considérer que l’intention délibérée de provoquer une contamination ou la violation de règles de prudence particulières prévues par la loi et les règlements permettrait évidemment de condamner une personne ayant commis ce type de délits. C’est un dispositif équilibré !
Par égard pour nos collègues, j’aimerais à présent entrer dans le détail des amendements.
Notre travail de ce matin s’est inspiré des réflexions menées par les uns et les autres, les unes et les autres. Je rends hommage particulièrement à notre collègue Hervé Maurey : inspiré par de nombreuses remarques des maires du département de l’Eure, qu’il a à cœur de défendre, il a pris très tôt des initiatives pour faire avancer la réflexion. C’est en tenant compte de ses réflexions, mais aussi d’autres, que nous sommes arrivés à un équilibre qui me paraît bon.
C’est pourquoi, mes chers collègues, vous ne serez pas étonnés que je ne sois pas favorable aux amendements n° 135 et 143 rectifié, déposés par Mme Assassi au nom du groupe qu’elle préside. Le premier s’oppose à la prolongation de l’état d’urgence et à un régime définissant de manière plus précise l’engagement de la responsabilité pénale pendant l’état d’urgence, à rebours de la position de la commission. Quant au second, très bien présenté par Mme Cukierman, il est trop restrictif, car il se limite au régime de responsabilité des maires, qui ne sont pas les seuls à rencontrer des difficultés.
Les amendements n° 5 rectifié bis, 62, 74, 3 rectifié ter et 164 portent tous sur les délais. Sur cette question, cent fleurs se sont épanouies… Chacun, bien sûr, peut avoir son idée. Pour ma part, j’ai trouvé que le 10 mai comme point de départ d’un délai de deux mois était une bonne formule ; je ne vais pas vous dire ce soir que j’ai changé d’avis parce que certains proposent le 30 juin plutôt que le 10 juillet, ou autre chose encore. Mes chers collègues, vous aurez à trancher ce grave débat, mais la position de la commission, si elle n’est peut-être pas idéale, est assez pratique et repose sur des arguments.
Mme Guillotin, à travers son amendement n° 7 rectifié bis, souhaite inscrire dans la loi les règles de distanciation sociale. Si nous devions le faire, combien d’autres dispositions ne devrions-nous pas aussi introduire dans la loi ? Il y a un moment où c’est trop… D’autant qu’on nous reproche, à juste titre, de faire des lois trop bavardes. Laissons à chaque échelon de responsabilité ses propres attributions.
Le plus important, c’est nous qui l’écrivons. Les règles dont il s’agit sont très importantes, mais nous ne sommes pas médecins, et le Gouvernement peut fort bien, dans le cadre des pouvoirs que nous lui attribuons, régler ces problèmes d’organisation de la vie pendant le déconfinement, en particulier de respect des règles, très importantes, de distanciation.
Je découvre un amendement n° 194 rectifié du Gouvernement… Madame la garde des sceaux, je vous dirai – mais vous y verrez peut-être de l’ironie – que cet amendement m’a peiné. Oui, peiné, parce que voilà plusieurs semaines que nous travaillons sur cette question, très importante, car nous ne pouvons pas déconfiner sans protéger l’exercice des responsabilités qui seront prises par de nombreux Français, alors qu’elles les dépassent. Le Gouvernement le sait très bien, et depuis longtemps – en vérité, depuis plus longtemps que nous ne connaissons ses intentions de créer un système d’information, qui fait l’objet de l’article 6 du présent projet de loi.
Vous écrivez dans l’objet de cet amendement qu’il serait difficile de mesurer dans l’urgence les conséquences d’une telle restriction de la responsabilité pénale. Mettez-vous donc un peu à notre place… Nous avons découvert samedi après-midi un projet de loi dont je ne veux pas exagérer l’importance, mais qui, tout de même, comporte des dispositions mettant en cause le respect de la vie privée, le secret médical et un certain nombre d’autres garanties et libertés. Or vous ne nous avez pas entendus dire qu’il nous était difficile de nous prononcer, parce que nous faisons notre devoir. Nous préférons, bien sûr, avoir du temps, comme vous préférez en avoir. Ne disqualifiez donc pas notre travail au motif que vous n’auriez pas eu le temps de réfléchir, alors que l’exécutif, jusqu’au plus haut niveau de l’État, est prévenu de notre intention depuis plusieurs semaines.
Vous dites aussi que vous avez de l’inquiétude. Remarquez, je comprends : moi aussi, en ce moment, j’ai beaucoup d’inquiétudes… §Nous limitons, dites-vous, cette disposition pénale aux faits commis pendant l’état d’urgence sanitaire. Mais, madame la garde des sceaux, nous l’avons fait exprès ! C’est justement parce qu’il y a l’état d’urgence sanitaire, une situation exceptionnelle, qu’il nous faut, pour la traiter, prendre des mesures exceptionnelles – et d’ailleurs temporaires.
Vous nous expliquez ensuite qu’il y aurait un risque de rupture d’égalité, parce que la responsabilité pénale de quelqu’un ne serait pas engagée en application des dispositions que nous prenons dans les mêmes conditions qu’en application des dispositions de droit commun. Madame la garde des sceaux, il n’y a pas d’inégalité à traiter différemment des situations différentes ! Et si l’état d’urgence sanitaire n’est pas une situation différente justifiant l’application d’un droit différent – à condition qu’il ne porte atteinte à aucun principe fondamental… En réalité, nous appliquons le principe d’égalité en mettant en œuvre des règles différentes dans des situations différentes.
Voilà pourquoi j’ai eu de la peine en lisant non seulement le dispositif de votre amendement, mais aussi son objet. Je n’émettrai pas un avis défavorable ; cet amendement, je vous demanderai, tout simplement, de le retirer.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Emmanuel Capus applaudit également.
Nous pourrons ainsi poursuivre le travail que nous avons commencé sur les bases que nous avons définies, des bases dont j’ai la faiblesse de croire qu’elles ont été précédées d’une réflexion approfondie et qu’elles ont abouti à un résultat équilibré.
Marques d ’ approbation sur les mêmes travées.
Il me reste à éclairer nos collègues sur les amendements n° 42, 154, 179 rectifié, 58 rectifié, 180 rectifié, 137 rectifié et 134 rectifié. J’émets un avis défavorable sur tous ces amendements, relatifs à la responsabilité.
Certains visent à traiter le cas particulier de la responsabilité des décisions prises à l’égard des écoles. À ce propos, au-delà de la disposition que nous prenons sur la responsabilité pénale, notamment des maires, il faut dire à nos élus, pour les rassurer, qu’ils n’ont, d’après la loi, aucune décision à prendre pour l’ouverture des écoles, car l’article L. 411-1 du code de l’éducation nationale prévoit que cette responsabilité incombe aux directeurs et directrices d’école, sous l’autorité des inspectrices et inspecteurs d’académie.
Le maire, bien sûr, fait partie du conseil d’école et fournit des moyens. Si ces moyens n’étaient pas suffisants pour assurer la sécurité sanitaire de la communauté éducative au moment de la réouverture de l’école, ce serait au directeur d’école, pas au maire, de décider de ne pas rouvrir dans ces conditions. Mesdames, messieurs les maires de France, vous qui nous écoutez ce soir, sachez-le bien : votre responsabilité ne peut pas être engagée à raison des décisions prises pour les ouvertures d’école !
Du coup, tous les amendements visant à protéger les maires au regard des décisions d’ouverture d’école sont inutiles, les maires n’étant pas exposés par ces décisions, ce qu’il est très important de leur rappeler.
De même, il est important de leur dire que nous avons confiance en eux et que nous savons qu’ils prendront toutes les dispositions utiles pour mettre à la disposition des écoles de la République les moyens nécessaires à la reprise du travail scolaire.
Telles sont les raisons pour lesquelles je suis contraint, à mon corps défendant, d’émettre un avis défavorable sur ces amendements, un avis qui, comme vous l’aurez constaté, n’est pas systématique, mais repose sur un examen particulier de chacune des mesures proposées.
Il y a deux catégories d’amendements : ceux qui visent la durée de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et ceux qui ont trait à la question de la responsabilité. Ma collègue ministre de la justice s’exprimera sur la seconde catégorie. Pour ma part, je rejoins Philippe Bas, en émettant un avis défavorable sur l’ensemble des autres amendements.
Dans le texte initial, le Gouvernement avait proposé de proroger de deux mois l’état d’urgence sanitaire à compter de sa date d’expiration et de revenir devant le Parlement le 23 juillet au plus tard en cas de nécessité de le proroger une nouvelle fois. J’entends que les commissaires aux lois, dans leur grande sagesse, ont fait une autre proposition, qui consiste à limiter cette prorogation à la date du 11 juillet prochain, soit deux mois après la levée du confinement. Cet argumentaire peut s’entendre.
Le débat suivra son cours à l’Assemblée nationale. Nous verrons ce que proposeront les députés sur cette question. À titre personnel, je dois dire que ma religion n’est pas faite et que je peux parfaitement entendre les arguments avancés par M. le rapporteur, que je remercie pour la qualité de son travail. Cependant, par cohérence, j’émettrai un avis défavorable sur l’ensemble des amendements qui visent à changer cette date.
Je veux juste rappeler que l’état d’urgence sanitaire reste temporaire et que nous n’avons pas vocation à le prolonger ad vitam aeternam. Il doit être prorogé le temps nécessaire pour continuer à lutter contre l’épidémie et à repousser le virus. Il est vrai qu’il nous faudra rester encore un moment dans un nouveau cadre de vie, tout en demeurant dans le cadre de la loi, raison pour laquelle nous débattons ce soir, comme nous nous étions engagés à le faire, les membres du comité de scientifiques estimant, à l’unanimité, que l’état d’urgence devra être prolongé. De fait, il n’aura échappé à personne que nous n’avons gagné la bataille contre le virus ni en France ni dans aucun pays au monde.
Un certain nombre de pays ont pris des dispositions de long terme sans que leur Parlement ait pu se prononcer. En France, nous avons fait le choix, que je revendique, de venir devant la représentation nationale chaque fois que ce sera nécessaire, pour vous expliquer les raisons pour lesquelles nous sollicitons la prolongation de cet état d’urgence assez extraordinaire, caractérisé par une restriction des libertés liée à la volonté de protéger la santé des Français.
J’y insiste, nous appuyons nos décisions sur l’avis des scientifiques. Indépendamment de cet avis, je crois que nous avons tous conscience ici que le combat n’est pas terminé et qu’il nous faudra vivre avec le virus encore quelque temps et donc consentir de nouveaux efforts collectifs, à l’instar de ceux, extraordinaires, que les Français ont déjà réalisés depuis bientôt huit semaines et qui auront déjà permis de sauver plusieurs dizaines de milliers de vies.
Le confinement a fonctionné. Les courbes en témoignent : nous sommes aujourd’hui au même niveau qu’aux alentours du 10 mars. Cependant, il s’est passé depuis des choses extrêmement éprouvantes, avec plus de 20 000 morts dans notre pays, des hôpitaux encore très chargés, qui ont frôlé la sursaturation, mais qui ont tenu et qui ont besoin d’un peu plus de temps. Il faut que le pays reprenne doucement, avec beaucoup de précautions et de prudence, pour vérifier que la levée du confinement ne conduit pas à déconfiner le virus lui-même. Ce sera là tout l’objectif des prochaines semaines.
Monsieur le rapporteur, je regrette de vous avoir peiné. Cependant, il me semble que, compte tenu des circonstances, le législateur et l’exécutif ne doivent pas être dans l’affect. Ils doivent être dans la réflexion sur la décision juste.
Je vous reconnais cette qualité, que vous partagez avec vos collègues ici présents. À cet égard, je reconnais que l’amendement que vous avez porté est le fruit d’une réflexion menée de longue date dans cette enceinte.
Concevez que la réflexion du Gouvernement soit d’une nature quelque peu différente. J’ai tenté d’expliquer les trois raisons pour lesquelles votre rédaction ne me semblait pas correspondre à ce qui était attendu, ainsi que les raisons pour lesquelles nous pourrions, dans la navette parlementaire, réfléchir à une écriture un peu différente.
Je ne nie pas l’intérêt de la question que vous avez soulevée sur l’égalité. Je sais bien qu’il n’y a pas de rupture d’égalité quand on traite différemment des situations différentes, mais je veux dire ici que nous ne sommes pas nécessairement dans une situation différente au regard du Covid-19, en lien avec l’état d’urgence sanitaire. Les situations de Covid-19 qui ont précédé l’état d’urgence sanitaire ont pu donner lieu à des actions identiques à celles qui ont été prises pendant cet état d’urgence. Il ne me semble pas que les unes et les autres doivent nécessairement être traitées différemment en termes de responsabilités.
L’ensemble des autres amendements visent essentiellement le cas des seuls élus locaux, dans leurs fonctions de décideurs publics. Or les décideurs publics sont, en l’occurrence, très nombreux : outre les élus locaux, les responsables des hôpitaux et d’autres acteurs publics ont été conduits à prendre des décisions et se trouvent confrontés à des difficultés comparables. Une telle différence de traitement dans l’application de la loi pénale entre les élus locaux, qui sont expressément visés par l’ensemble de ces amendements, et des personnes confrontées aux mêmes difficultés – ce n’est pas le cas du dispositif dont j’ai demandé la suppression préalablement – ne me paraît pas envisageable.
Par ailleurs, j’entends parfaitement ce qui est demandé en termes de « réassurance » – l’un d’entre vous a, je crois, utilisé ce terme. J’estime qu’il est très important de prendre en compte la nécessité des circonstances spécifiques liées à la crise sanitaire. Il est possible de le faire, mais dans un dispositif global, valable pour l’ensemble des décideurs publics et rédigé de manière quelque peu différente de ce que M. le rapporteur a proposé.
C’est la raison pour laquelle je ne retirerai pas mon amendement de suppression. Je répète que je comprends parfaitement et que le Gouvernement partage l’intérêt que vous portez aux questions de responsabilité des décideurs publics et privés.
Je me tourne vers les auteurs des amendements en discussion commune pour savoir si ces amendements sont maintenus…
Convaincu par la mécanique implacable et, comme toujours, talentueuse de Philippe Bas, je retire mon amendement !
Les amendements n° 3 rectifié ter, 7 rectifié bis, 179 rectifié, 180 rectifié et 134 rectifié sont retirés.
Permettez-moi de poser une question, monsieur le président : M. le rapporteur a évoqué le fameux article L. 411-1 du code de l’éducation, qui donne aux directeurs d’école, et non aux maires, le droit d’ouvrir ou de fermer les écoles. Les innombrables arrêtés relatifs à la non-ouverture des écoles pris ces derniers jours par de très nombreux maires de France sont-ils illégaux ?
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote sur l’amendement n° 135.
Mon explication de vote vaudra pour l’ensemble des amendements.
Nous maintenons nos amendements, parce que, contrairement à ce que j’ai entendu, il n’y a aucun amendement inintéressant, monsieur le président de la commission des lois. Je crois que tout amendement a son intérêt, en ce qu’il permet de contribuer au débat et de le faire avancer.
Madame la garde des sceaux, je veux bien entendre vos considérations juridiques. Certes, un maire est très certainement un agent local au même titre qu’un directeur d’hôpital dans la prise de décisions et du point de vue de la responsabilité pénale, mais vous ne pouvez pas les comparer. Aujourd’hui, des maires de notre pays sont issus du suffrage universel. Ce n’est pas le cas des directeurs d’hôpital, avec tout le respect que j’ai pour eux.
Dans un certain nombre de départements, des maires qui ont, de fait, perdu leur légitimité démocratique, l’installation des conseils municipaux n’ayant pas encore eu lieu, décident, par arrêté, que les écoles seront ou non ouvertes le 11 mai. Aujourd’hui, des milliers d’élus locaux sont confrontés à la nécessité de prendre une décision, alors même que leur légitimité démocratique est fragilisée par la non-installation, au nom de la crise sanitaire, des conseils municipaux et que l’on trouve, dans un certain nombre de communes – il ne faut pas le nier –, des situations quelque peu ubuesques. Et je ne fais même pas état de la situation des communes pour lesquelles le scrutin du 15 mars n’a tranché l’avenir démocratique ni dans un sens ni dans un autre…
Vraiment, je veux bien entendre vos arguments, même si je ne les partage pas. En revanche, je ne peux accepter que vous compariez les élus locaux, qui détiennent leur pouvoir du processus démocratique, avec d’autres acteurs locaux, qui sont en place pour d’autres raisons.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour explication de vote sur l’amendement n° 74.
Pour nous faire gagner du temps, je veux expliquer la position de mon groupe sur l’ensemble des amendements déposés à l’article 1er. J’ai travaillé à la rédaction qui a été proposée par la commission des lois.
Je veux revenir sur les propos de la garde des sceaux, que j’ai écoutés avec attention.
Au fond, cette situation est le résultat d’un flou extraordinaire dans les propos du Gouvernement. Madame la garde des sceaux, je me souviens de ce que vous avez déclaré dans cet hémicycle à l’occasion des questions d’actualité au Gouvernement. Mme Gourault a elle-même reconnu qu’il fallait un traitement spécifique pour les maires. Depuis des jours, nous entendons le Président de la République, le Premier ministre et chacun des membres du Gouvernement parler du couple que forment le préfet et le maire, du rôle premier des maires… Les maires, qui, par nature et par vocation, s’investissent dans ce rôle de défense du collectif, ont donc pris ce sujet à bras-le-corps. Notre collègue Cécile Cukierman a extrêmement bien illustré cette situation précédemment. J’ai noté avec plaisir qu’elle avait été applaudie sur l’ensemble des travées de cet hémicycle.
Lorsque nous parlons de réassurance, peut-être de manière un peu maladroite, c’est de cela que nous parlons.
Comme je l’ai dit, monsieur le président, nous ne nous exprimerons pas sur les autres amendements déposés à cet article.
Madame la garde des sceaux, je veux revenir sur ce qui est prévu concernant les responsables publics. Le même procès d’intention avait été fait au moment de l’examen de la loi Fauchon, dont le dispositif a pu s’appliquer à d’autres responsables – directeurs d’hôpital, responsables de centre sportif, etc. –, voire à de simples particuliers. C’est tout l’intérêt de « l’amendement Bas » qui a été adopté par la commission.
Le groupe socialiste votera, naturellement, ses propres amendements, s’abstiendra sur les autres, à l’exception de l’amendement du Gouvernement, auquel il s’opposera, en notant cependant avec une satisfaction certaine que le Gouvernement, dont j’ai noté qu’il avait parfois besoin d’un peu plus de temps, renonce au régime totalement exorbitant du droit commun des délais de procédure en matière pénale, notamment concernant la détention provisoire. Je me réjouis qu’il ne souhaite pas revenir sur cette disposition.
Nous soutiendrons la rédaction issue des travaux de la commission des lois.
Vous ne m’entendrez plus avant l’article 2, monsieur le président !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote sur l’amendement n° 194 rectifié.
Depuis plusieurs jours, les maires de ce pays ont mal à la tête. Jeudi, déjà, ils ont dû digérer un protocole sanitaire apocryphe arrivé par des voies assez surprenantes et dont on leur a dit, quelques jours plus tard, qu’il n’avait aucune valeur.
Ce week-end, ils ont dû digérer un autre protocole, mesurer la différence et s’apercevoir qu’il était très souvent à peu près aussi irréalisable que le premier. Bruno Retailleau a déclaré tout à l’heure qu’il s’agissait d’une usine à gaz, dont la dimension surprenante, irréalisable, s’accroît à mesure que la taille des communes diminue.
Par conséquent, aujourd’hui, les maires s’inquiètent. Ils éprouvent de l’angoisse, parce que les moyens humains et matériels qui leur sont demandés ne peuvent tout simplement pas être déployés. Je dirais même qu’ils n’imaginent même pas que ces moyens puissent exister dans les écoles maternelles et élémentaires. Ils n’ont jamais existé. Nettoyer, tous les jours, les stylos utilisés par les enfants répond à un protocole totalement hors sol, qui ne représente en rien la vie réelle des petites écoles de la plupart des communes de France.
Il est vrai que, ce soir, M. le rapporteur a rassuré les maires de ce pays. En ce qui me concerne, j’inviterai les maires de la vallée d’Aspe aux bords de l’Adour à regarder les débats du Sénat pour qu’ils puissent l’entendre dire que c’est le directeur qui est responsable.
Chère collègue Françoise Laborde, c’est ce directeur, qui n’a même pas de statut, qui est tout seul, qui aura la responsabilité de décider, alors qu’il occupe un emploi fonctionnel, avec, parfois, une demi-décharge toutes les quatre ou cinq semaines. Avec quels moyens, quelle capacité de discernement pourra-t-il prendre cette décision ? C’est totalement irréaliste.
Monsieur le rapporteur, vous avez affirmé que les maires ne seraient pas responsables. Quid de la restauration scolaire ? N’est-elle pas de la responsabilité des maires ?
Entre le protocole apocryphe où le repas devait être distribué dans les classes et le protocole authentifié, on a changé dix fois de mode d’organisation. Or la responsabilité des maires est engagée, …
… comme elle l’est pour le nettoyage des classes.
Je vous demande donc, monsieur le rapporteur, de reprendre la parole, pour que je puisse rassurer encore davantage les maires des bords de l’Adour et de la vallée d’Aspe.
Ainsi donc, mes chers collègues, le Gouvernement n’a déposé qu’un seul amendement, tendant à supprimer un dispositif qui a été mûrement réfléchi par la commission des lois et voté dans un assez large consensus, pour éclaircir notamment le régime de responsabilité des maires.
Madame la garde des sceaux, je voudrais vous expliquer les raisons pour lesquelles nous allons nous battre pour nous y opposer – ce n’est pas seulement parce que vous avez causé de la peine à notre très estimé président de la commission des lois…
Sourires.
Premièrement, il n’est absolument pas question de placer les élus au-dessus de la loi. Il n’est absolument pas question de préparer une sorte d’amnistie pour des responsables publics, parce que le texte de la commission des lois prévoit bien – vous l’avez rappelé – la faute intentionnelle ainsi que la faute manifestement délibérée, pour le cas où un élu ou un chef d’entreprise violerait une disposition législative qui lui donne une obligation de prudence ou de sécurité. En outre, dans le texte judicieusement préparé par la commission des lois, nous n’exonérons pas ceux qui sont investis des prérogatives prévues par le code de la santé publique, notamment dans le cadre de l’état d’urgence. Les choses sont donc parfaitement claires.
Deuxièmement, nous soutenons l’amendement de la commission, qui est désormais intégré dans le texte, tout simplement parce que nous sommes sur une matière qui est évolutive. Vous savez, parce que vous êtes juriste, qu’aucune matière n’a sans doute été autant construite par le juge que la responsabilité civile ou pénale. Aujourd’hui, nous voulons dire que c’est au législateur de faire la loi et que celle-ci ne doit pas résulter d’une construction prétorienne.
D’ailleurs, vous nous avez vous-même rappelé, cet après-midi, les revirements de la jurisprudence. Si la jurisprudence a changé en 2015, pourquoi ne changerait-elle pas demain, dans des circonstances exceptionnelles ? Nous ne voulons tout simplement pas d’une jurisprudence exceptionnelle. C’est là notre objectif.
Troisièmement, …
… vous ne créerez pas de confiance si vous ne réassurez pas les maires, si vous n’éclaircissez pas le régime de leur responsabilité.
Pour conclure, je veux citer le Premier ministre, Édouard Philippe, qui, voilà quelques heures, déclarait que c’est au Parlement de décider si le sujet doit être traité à l’occasion d’un amendement ou d’un texte spécifique.
C’est une faute caractérisée ! Quelle valeur accorder à la parole publique quand le Gouvernement dépose un amendement visant à supprimer un dispositif quelques heures après que le Premier ministre a dit…
M. Bruno Retailleau. … qu’il ne posait pas de problème et qu’il y était ouvert ? Nous ne céderons pas sur ce point.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.
Une fois n’est pas coutume peut-être, la position du groupe La République En Marche ne sera pas systématiquement favorable au Gouvernement.
D’abord, personne ici, pas plus à droite qu’à gauche, n’a le monopole du cœur à l’égard des élus. Nous sommes tous conscients de l’inquiétude de ces derniers. Elle remonte de chacun de nos départements, de la Loire-Atlantique comme du Bas-Rhin, du Var comme du Nord, de la Côte-d’Or, département durement touché par le Covid, …
… comme, bien entendu, de la Manche.
J’ai bien entendu Philippe Bas, qui, dans une brillante allocution – il en est coutumier –, a fait la démonstration de ce que pouvait être la responsabilité selon lui. Par deux fois, il nous a rappelé qu’il était plus difficile de déconfiner que de confiner. Nous l’avions déjà un peu compris…
Madame la garde des sceaux, nous avions déposé un amendement qui a été déclaré irrecevable pour des raisons de procédure. Au reste, nous pensions que nous pouvions nous rallier au présent dispositif, dont il était proche et qui est de nature à évoluer dans le cadre de la navette parlementaire. De fait, nous ne pouvons pas rester insensibles à la demande des élus locaux, mais aussi de l’ensemble des personnes chargées d’une responsabilité aujourd’hui. Nous n’avons pas redéposé notre amendement ce soir, parce que nous pensons que le dispositif de l’amendement de Philippe Bas, qui a été intégré dans le texte de la commission, est un premier pas qui servira de discussion dans le débat à l’Assemblée nationale et dans la navette, avant la réunion de la commission mixte paritaire.
C’est la raison pour laquelle, à mon grand regret, mais aussi en cohérence avec la tribune que nous avons signée hier et la position que nous avons défendue dans les questions qui vous ont été posées aussi bien aujourd’hui que les jours précédents, le groupe La République En Marche ne votera pas l’amendement du Gouvernement.
Applaudissements sur les travées du groupe LaREM, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.
Mme Françoise Laborde. En écoutant M. Patriat, je buvais du petit-lait. J’ai du mal à me remettre de ce qu’il vient de dire, lui qui, habituellement, nous gronde lorsque nous ne suivons pas son gouvernement. Je vais tâcher de reprendre mes esprits !
Rires et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Les élus locaux, pierre angulaire de notre République, ont toujours su s’adapter et, surtout, adapter leurs services municipaux pour appliquer les décisions de l’État dont ils sont les délégataires.
Aujourd’hui, il convient non seulement de reconnaître l’importance de leur investissement d’élus dans l’application de la directive du ministère, mais aussi, et surtout, de reconnaître leur responsabilité morale. Qu’adviendra-t-il de l’esprit d’un maire si un cas de contagion était reconnu dans l’école communale dont il a la charge ? Avant de penser à sa responsabilité pénale et civile, j’ai envie d’évoquer sa responsabilité morale. Un maire pense avant tout à la dette morale qu’il contracte à l’égard des familles qui confient leur enfant à l’école.
Bien sûr, nous pouvons aujourd’hui, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, parler de pénal, de civil et de la loi Fauchon, qui, paraît-il, réglerait tous les problèmes. Vous connaissez mon goût pour le droit, mais je pense aussi, de temps en temps, avec mon cœur et avec mes tripes. En cette situation exceptionnelle, dans cet état d’urgence exceptionnel, il faut un soutien clair et affiché à nos élus. On ne peut pas leur en demander autant et leur en donner si peu.
Je suis absolument stupéfait par cet amendement du Gouvernement.
Comme chacune et chacun d’entre nous, j’ai entendu le Premier ministre indiquer qu’il n’était pas du tout hostile à un amendement de clarification dès lors qu’il ne s’agirait pas d’une mesure catégorielle ou tendant à instituer un régime d’irresponsabilité des élus. Or la rédaction proposée par la commission des lois et désormais intégrée dans le texte répond parfaitement à ces exigences.
La volonté de supprimer un tel dispositif témoigne d’une totale méconnaissance de la réalité du terrain. Sans reprendre certains termes habituellement utilisés, force est de constater que la démarche renforce le sentiment d’avoir des décideurs « hors sol ». Il faut vraiment n’avoir jamais rencontré d’élus au cours des dernières semaines pour ne pas se rendre compte de la nécessité de leur apporter une sécurisation.
Si le mécanisme conçu par la commission des lois vous paraît perfectible, déposez donc des amendements pour l’améliorer ! Mais supprimer des mesures introduites dans le texte tout en arguant que la discussion pourra se poursuivre dans le cadre de la navette parlementaire relève tout de même d’une bien curieuse conception de celle-ci !
Pour ma part, je me reconnais tout à fait dans le texte élaboré par la commission des lois. Il est parfaitement dans l’esprit de la proposition de loi que j’avais déposée le 26 avril et que le groupe Union Centriste reprend aujourd’hui sous forme d’amendements au présent projet de loi. La rédaction retenue répond totalement aux attentes des élus et, plus généralement, de l’ensemble des acteurs, puisqu’elle étend le dispositif. Chacun est protégé, mais l’approche est équilibrée. Il ne s’agit pas de créer un régime d’exonération de la faute. D’une part, c’est limité dans le temps. D’autre part, la responsabilité des acteurs et des élus peut tout de même être engagée dans un certain nombre de cas.
Pour toutes ces raisons, je ne comprends pas cet amendement de suppression, et je ne le voterai évidemment pas.
Comme je l’ai indiqué cet après-midi, le maire est l’acteur indispensable de la sortie de crise. Lui et le préfet constituent le binôme crucial pour réussir le déconfinement.
Madame la garde des sceaux, j’entends vos arguments sur l’utilité de la loi Fauchon depuis 2000 et le caractère en grande partie injustifié des inquiétudes des maires. D’ailleurs, M. le rapporteur de la commission des lois ne dit pas autre chose lorsqu’il souligne que leur responsabilité ne peut pas être engagée pour la réouverture des écoles.
Le problème est que cela est vrai en temps normal ; depuis vingt ans, il n’y a effectivement jamais eu de difficulté. Mais, là, nous sommes confrontés à une situation totalement exceptionnelle. Or qui dit situation exceptionnelle dit aussi inquiétudes exceptionnelles, notamment, mais pas seulement, de la part des maires.
Certes, nous sommes tous ici, je le crois, des personnes de bonne volonté et de bonne intelligence. Nul parmi nous ne pense que la responsabilité d’un maire ou d’un élu devrait être engagée pour la réouverture d’une école, d’une cantine ou d’un centre de loisirs. Mais tout le monde n’est visiblement pas de cet avis. Des plaintes au pénal ont déjà été déposées contre le Premier ministre ; d’autres sont déjà annoncées contre tel ou tel décideur. Il y a donc des raisons objectives de s’inquiéter.
À une circonstance exceptionnelle, il faut des réponses exceptionnelles ! Nous sommes, cela a été rappelé, des élus locaux. Nous avons un baromètre : en ce moment, nos téléphones vibrent beaucoup ! Comme me l’expliquait un maire ce matin, le problème ne concerne pas seulement les maires : les associations qui gèrent les centres de loisirs ou les accueils périscolaires ne reprendront pas leurs activités sans garantie pour leurs dirigeants de ne pas faire l’objet de poursuites pénales pour des décisions dont ils ne sont pas responsables.
Pour toutes ces raisons, je pense, comme l’a d’ailleurs indiqué M. le Premier ministre, que c’est au Parlement de fixer la doctrine.
Je voudrais d’abord évoquer la mémoire de Pierre Fauchon, qui était un sénateur du groupe UC. Je l’ai connu, même si nous n’avons pas siégé au sein de la Haute Assemblée en même temps. Il était attaché à mon département.
J’ai eu l’occasion de discuter avec lui des conditions dans lesquelles la loi qui porte son nom a été élaborée. Comme l’a souligné notre collègue Bruno Retailleau, c’est la jurisprudence qui a dicté à Pierre Fauchon la décision de rédiger un tel texte et de le défendre devant le Parlement. La loi Fauchon donne un cadre à la responsabilité des élus locaux pour les infractions non intentionnelles. Pour les vingt ans du texte, quel drôle d’anniversaire !
L’inquiétude est immense chez nos collègues élus locaux : c’est un euphémisme. En ce moment, beaucoup de maires suivent nos débats. Nous avons un certain nombre d’échanges avec eux. À mon sens, c’est vraiment le rôle constitutionnel du Sénat de faire ce travail.
Ainsi que notre collègue Emmanuel Capus vient de le rappeler, les maires ne sont pas les seuls à nous interpeller. Des présidents d’association, des directeurs d’école et de nombreux autres acteurs s’inquiètent des décisions qu’ils seront amenés à prendre dans les jours à venir et des conditions dans lesquelles celles-ci seront mises en œuvre. Je ne comprends donc pas un tel amendement. Sous couvert de contribuer au débat, on l’anéantit, en nous expliquant qu’il y a bien un problème mais que ce n’est pas le moment de l’aborder. Pourtant, il y a eu des tribunes d’élus dans la presse. Les associations nationales d’élus ont pris la parole. Des parlementaires de toutes tendances ont déposé des amendements. Au nom de notre groupe, Hervé Maurey avait pris la plume pour proposer une solution. Puis, la commission des lois s’est saisie du problème ; nous avons eu un débat passionnant ce matin.
À l’instar de notre collègue, je m’étonne de la conception de la navette législative consistant à anéantir d’emblée le travail du Sénat en considérant que l’amélioration viendra nécessairement de la majorité à l’Assemblée nationale et que le dispositif voté là-bas sera forcément meilleur. Cela ne correspond pas du tout à la raison d’être du Sénat, voire, tout simplement, à la présence d’un certain nombre d’entre nous ce soir.
En adoptant votre amendement, nous supprimerions la seule amarre législative qui permettrait aux députés de continuer le débat.
MM. Patrick Kanner et Hervé Maurey applaudissent.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Je souhaite également exprimer ma grande surprise et ma grande déception quant à la démarche gouvernementale. J’avais cru comprendre qu’un dialogue fructueux s’était instauré entre le Gouvernement et le Sénat et que, la même question se posant à l’Assemblée nationale, nous allions pouvoir aboutir à une solution partagée.
Je tiens vraiment à remercier Hervé Maurey d’avoir mis le sujet sur la table. Au sein de la commission de la culture et de l’éducation, nous savons combien la question est prégnante ; cela a été rappelé par Max Brisson et Françoise Laborde. Nous le voyons d’autant plus dans le cadre des travaux du groupe spécifique que j’ai mentionné en interrogeant le ministre de l’éducation nationale.
Les maires ne se cachent pas derrière leur petit doigt. Ils veulent prendre leurs responsabilités. Certains ouvriront, malgré tout, les écoles. Mais il y a cette zone d’ombre qui a été évoquée.
En guise de témoignage, permettez-moi de vous lire le message que m’a adressé voilà deux ou trois jours la présidente d’une communauté de communes : « Juste une remarque sur la responsabilité des maires. Pour ma part, je prépare la réouverture de mon école. J’ai les masques. Nous travaillons avec l’école sur l’organisation à mettre en place. Quelques maires se préparaient aussi à cette réouverture. Mais la lecture ce week-end du protocole sanitaire les interroge davantage quant à leur responsabilité. Certains sont prêts à faire machine arrière s’ils n’ont pas de réponse quant à leur responsabilité. » Je crois que, dans la simplicité de ce message, tout est dit, madame la garde des sceaux.
Le dispositif auquel la commission des lois avait abouti sur proposition de Philippe Bas nous satisfaisait tous. En tout cas, il y avait là matière à dialoguer et à poursuivre la réflexion avec l’Assemblée nationale. Nous ne comprenons ni ce revirement ni cette volonté brutale de suppression.
Ici, nous sommes dans l’assemblée des territoires. Nous n’avons pas le « monopole du cœur des territoires », mais presque…
L’appréhension gagne de nombreux maires, des femmes et des hommes chargés de mettre en musique la sortie du confinement. Cela concerne notamment le protocole sanitaire pour la réouverture des écoles. Tous les préfets sont interrogés. Aujourd’hui, le Premier ministre nous a indiqué que cela pouvait être un frein à la décision et que ce n’était pas un petit sujet.
Les maires ne veulent pas être des kamikazes s’agissant d’une responsabilité qui ne leur appartient pas au départ. Comme l’a rappelé Philippe Bas, dans une période difficile, où il y a tant de décisions à prendre, tous ceux qui veulent en prendre doivent être préservés. Il ne s’agit nullement d’exonérer de sa responsabilité pénale quelqu’un qui aurait causé une contamination ou n’aurait pas respecté le droit. Il s’agit simplement de tenir compte du fait que le déconfinement est une opération de très grand risque pour la France.
Dites oui à l’équilibre prôné par la commission des lois !
Nous avons beaucoup évoqué les maires et les élus locaux, ce qui est logique au Sénat, puisque nous sommes leurs représentants. Mais le texte que nous avons soutenu en commission des lois va beaucoup plus loin : « Nul ne peut voir sa responsabilité pénale engagée. » Nous avons pensé non seulement aux élus locaux, mais également à tous les décideurs, publics et privés.
Il est naturel ici de penser aux maires et aux élus locaux. Pour beaucoup d’entre nous, nous en sommes et nous avons exercé de telles responsabilités. Nous comprenons combien les concernés sont inquiets aujourd’hui.
Le Premier ministre l’a reconnu cet après-midi en soulignant que la question se posait. Il a souhaité que l’on ne se préoccupe pas que d’une seule catégorie. Le texte proposé par la commission des lois répond à cet objectif. Nous avons pris en compte l’ensemble des décideurs : les élus, mais aussi les chefs d’entreprise, les dirigeants associatifs, les responsables administratifs, c’est-à-dire toutes celles et tous ceux qui mettent en œuvre sur le terrain les décisions prises au plus haut niveau. Nous disons depuis des semaines au Gouvernement, en vain – c’est la raison pour laquelle nous avons été obligés d’agir ; il n’y avait rien dans le texte –, qu’il faut leur adresser un signal, leur redonner confiance et accompagner leur action.
Le texte que nous avons adopté en commission des lois me semble couvrir l’ensemble des responsabilités des décideurs publics et privés. C’est pourquoi mon groupe le soutient.
Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.
Je souhaite apporter quelques précisions.
Cher Max Brisson, le directeur d’école, s’il lui appartient de prendre la décision, sera protégé par la disposition que notre commission a adoptée. Vous avez souligné combien il allait être seul, certes avec l’aide de sa hiérarchie, pour prendre des décisions aussi lourdes de conséquences.
Si le maire n’est pas responsable de la décision d’ouvrir l’école, ce qui signifie qu’il ne doit pas prendre d’arrêté pour en interdire l’ouverture, il est néanmoins exposé par d’autres décisions. D’une part, c’est lui qui va décider d’organiser, par exemple, des activités périscolaires. D’autre part, comme le rappelait Max Brisson, il faut prévoir la restauration scolaire ; à défaut de fournir, comme cela se faisait habituellement, les repas dans la cantine, il va falloir alimenter les enfants qui viendront à l’école. Ce n’est pas le directeur de l’école qui s’en occupe.
Il me faut, me semble-t-il, être très précis dans la définition de ce qui peut faire l’objet de la mise en jeu de la responsabilité des uns et des autres.
Je mets aux voix l’amendement n° 194 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 101 :
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 54, présenté par M. Duran, Mme Bonnefoy, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat, Jacques Bigot et Joël Bigot, Mme Blondin, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny et Daunis, Mme de la Gontrie, MM. Devinaz, Durain et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais, Guillemot et Harribey, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, MM. Kanner, Kerrouche, Lalande et Leconte, Mme Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Magner, Manable, Marie et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Sueur et Sutour, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Avant toute réouverture d’école communale, le maire demande aux services de l’État de valider formellement la conformité au protocole sanitaire relatif à la réouverture des écoles maternelles et primaires prescrit par le ministère de l’éducation nationale. De la même manière, les conditions d’accueil et les mesures sanitaires appliquées dans chaque établissement font l’objet d’une discussion et d’un accord formel entre les services de l’éducation nationale et les maires.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
L’amendement n° 54 est retiré.
L’amendement n° 181, présenté par MM. Gremillet et de Legge, Mme Deromedi, MM. Perrin et Raison, Mmes Deroche, Chauvin et Noël, M. Priou, Mme Malet, MM. Cuypers, Pellevat et Pierre, Mmes Thomas et Chain-Larché, MM. Kennel, Bascher, Lefèvre, Charon et B. Fournier, Mme Lamure, MM. Houpert, Piednoir et Bonne, Mme Micouleau, MM. Bouchet, Vogel et Vaspart, Mme Ramond, M. Danesi, Mme Canayer, MM. Joyandet, de Montgolfier, Grosdidier, Sido, Leleux et Regnard, Mmes Garriaud-Maylam et Lassarade, M. Bonhomme, Mme Morhet-Richaud, M. Brisson et Mme Dumas, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
En complément du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, il convient de définir la portée normative que peuvent avoir l’ensemble des obligations incombant à la fois à l’employeur et au salarié afin de limiter la propagation du virus.
Il s’agit de pouvoir identifier les responsabilités respectives, dans le respect du code du travail tout en sachant qu’à l’heure actuelle aucune disposition relative à une quelconque obligation liée à l’épidémie covid-19 n’y est retranscrite. En droit pénal, s’agissant de la situation de risque de mise en danger d’autrui, la reconnaissance d’une quelconque méconnaissance présente un caractère trop général. En conséquence, il convient de pouvoir identifier les responsabilités de chacun étant donné que la période d’incubation du covid-19 demeure, à ce stade, de quatorze jours et qu’il reste difficile de pouvoir isoler le lieu où la maladie a pu être contractée.
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
D’une manière générale, les entreprises ont une obligation de sécurité, aux termes du code du travail. Dans le cadre de la lutte contre le coronavirus, elles doivent signaler et interdire les zones à risques, écarter les salariés, recourir au télétravail si c’est possible et fournir des masques et des gels. Face à ces obligations, l’employeur court des risques d’être assigné devant le conseil des prud’hommes pour manquement à la sécurité.
Actuellement, le code du travail ne prévoit pas d’obligation particulière liée à l’épidémie de Covid-19. En revanche, les dispositions du décret du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire prévoient qu’afin de ralentir la propagation du virus « les mesures d’hygiène et de distanciation sociale, dites “barrières”, définies au niveau national, doivent être observées en tout lieu et en toute circonstance ».
Indiscutablement, ce décret est un règlement au sens précité et impose à tout un chacun, salariés comme employeurs, une obligation qui consiste à respecter des gestes barrières. Toutefois, il ne définit pas les mesures d’hygiène, ni le principe de distanciation sociale. Ainsi, la formulation des dispositions relatives à la mise en danger d’autrui, les prévisions du décret ne sont à l’évidence pas suffisamment précises pour permettre à l’employeur de connaître les mesures qu’il doit mettre en œuvre pour protéger les salariés et, partant, de savoir à quel moment il s’écarte de façon « manifestement délibérée » de ses obligations et met volontairement ses salariés dans une situation de danger.
Cela étant, les salariés aussi ont une obligation quasi juridique : protéger leur santé et celle d’autrui. La non-pratique des gestes barrières, se laver les mains, prendre du gel hydroalcoolique et porter un masque quand c’est obligatoire, peut entraîner des plaintes à leur encontre venant de l’employeur ou d’autrui qui peut en être victime.
C’est un problème que nous avons déjà réglé, soit par des dispositions renvoyant à un décret prises dans la loi du 23 mars d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, soit par le régime de responsabilité que nous venons d’adopter.
Je voudrais donc dire à mon excellent collègue qu’il me serait désagréable d’émettre un avis défavorable et que je préférerais, à la différence de ce que la garde des sceaux a fait tout à l’heure, qu’il retire son amendement.
Sourires.
L’amendement n° 181 est retiré.
L’amendement n° 6 rectifié, présenté par Mmes Guillotin, M. Carrère, Costes et N. Delattre, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty et Gold, Mme Jouve, MM. Roux et Vall, Mme Pantel et M. Guérini, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.… - Le Gouvernement remet un rapport au Parlement faisant état des mesures prises pour renforcer les capacités d’accueil en service de réanimation, des moyens affectés à la recherche médicale, des moyens affectés à l’équipement des Français nécessaires à la prévention de la propagation du virus covid-19, mais également du nombre de décisions individuelles prises au titre de l’état d’urgence, et le nombre de recours portant contre ces décisions individuelles et les interdictions de manifestations.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
Initié par Véronique Guillotin, cet amendement vise à rappeler de manière symbolique que l’état d’urgence sanitaire a vocation à demeurer temporaire et qu’il doit permettre de prendre des mesures structurelles pour favoriser le retour à la normale dans la vie en société.
L’épidémie de Covid-19 a révélé la fragilité de notre système hospitalier, mettant en lumière des carences dans les capacités d’accueil en services de réanimation. L’amendement est donc destiné à encourager le Gouvernement à prendre des engagements forts en faveur des hôpitaux, mais également de la recherche. Il lui est ainsi demandé de présenter un rapport au Parlement.
Dans chacune de nos commissions, nous effectuons un très gros travail de suivi de la mise en œuvre de l’urgence sanitaire. Nous considérons que, dans ce cadre, nous obtenons beaucoup d’explications du Gouvernement, soit oralement lors des auditions, soit en écrivant aux ministres, qui répondent en général très rapidement ; d’ailleurs, nous ne manquons pas de les relancer quand ce n’est pas le cas. Ainsi, le Premier ministre a répondu à la commission des lois sur son premier rapport d’étape. Je lui ai de nouveau écrit la semaine dernière, et il ne manquera pas, j’en suis certain, de me répondre.
Renvoyer le contrôle parlementaire à la présentation d’un rapport alors même que ce type de disposition dans la loi n’a pas de valeur obligatoire ne me semble pas le meilleur moyen de l’assurer.
Au demeurant, il y a aussi la perspective d’une commission d’enquête à l’Assemblée nationale comme au Sénat, quand il s’agira d’avoir une vue d’ensemble des mesures qui auront été prises pour préparer le pays à l’épidémie et pour combattre le virus.
Par conséquent, je pense que ce serait mieux si vous acceptiez de retirer cet amendement, mon cher collègue.
L ’ article 1 er est adopté.
L’amendement n° 57, présenté par M. Kerrouche, Mme Lubin, MM. Durain, Marie et Duran, Mme Bonnefoy, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat, Jacques Bigot et Joël Bigot, Mme Blondin, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny et Daunis, Mme de la Gontrie, MM. Devinaz et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais, Guillemot et Harribey, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, MM. Kanner, Lalande et Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Sueur et Sutour, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 2121-41, il est inséré un article L. 2121-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2121 -…. – Lorsque l’état d’urgence sanitaire prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, un protocole établit les modalités de coopération de gestion de la crise sanitaire, entre le maire et le représentant de l’État territorialement compétent.
« Le maire et le représentant de l’État peuvent décider conjointement d’y associer le président de l’établissement public de coopération intercommunale dont est membre la commune.
« Un protocole-type est défini par décret. » ;
2° Après l’article L. 3121-26, il est inséré un article L. 3121-… ainsi rédigé :
« Art. L. 3121 -…. – Lorsque l’état d’urgence sanitaire prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, un protocole établit les modalités de coopération de gestion de la crise sanitaire entre le président du conseil départemental et le représentant de l’État territorialement compétent.
« Un protocole-type est défini par décret. »
La parole est à M. Jérôme Durain.
La gestion de la crise sanitaire dans les territoires est une affaire de couple. On nous a beaucoup présenté le couple maire-préfet comme le garant des bonnes conditions du déconfinement. Mais il est un autre couple qui compte : le couple président du conseil départemental-préfet.
Nous sommes tous conviés à des réunions, souvent informelles, qui se tiennent selon des configurations variées, avec les parlementaires, le préfet, les maires, les représentants des associations d’élus. Pourtant, rien ne vient formaliser cette coopération. Cela fait peser sur les maires une responsabilité qui peut dépasser leurs compétences et qui ne correspond pas à la part qu’ils ont prise dans les décisions venant de l’État.
Par conséquent, cet amendement vise à mettre en place un protocole particulier entre le maire et le préfet, ce qui est une demande de l’Association des maires de France. Pour clarifier, encadrer et rendre plus efficace la coopération que j’évoquais, nous ajoutons un protocole particulier entre le préfet et le président du conseil départemental. Enfin, nous souhaitons que les groupements de communes, dont le rôle est essentiel dans la gestion de la crise sanitaire, soient associés à ces deux protocoles particuliers.
Dans la gestion de crise, on ne doit pas consacrer trop de temps à remplir des documents pour déterminer comment collaborer : il faut agir vite. Il aurait été intéressant d’envisager une telle mesure à froid, avant la crise sanitaire, plutôt qu’à chaud. Étant donné le grand nombre de communes, les préfets auraient à négocier beaucoup de conventions, si celles-ci doivent être adaptées à la situation spécifique de chaque commune.
Par conséquent, la commission a estimé qu’il valait mieux réserver cette proposition à l’organisation de la Nation en temps de crise sanitaire ; j’ai d’ailleurs suggéré que nous préparions, le moment venu, une grande loi sur ce sujet. Nous verrons alors s’il est utile de répartir les responsabilités de manière très définie entre les différents acteurs, en tirant les leçons de la crise actuelle.
Je partage l’avis du président Bas, il ne faut pas consacrer trop de temps à la rédaction de textes et de protocoles. Si le binôme maire-préfet joue un rôle absolument indispensable dans la gestion de crise, il ne faudrait pas oublier pour autant les agences régionales de santé (ARS), qui exercent leur mission depuis le premier jour.
On pourra sans doute écrire beaucoup de choses sur la gestion d’une crise sanitaire et sur la façon dont la France peut s’y préparer, mais des règles très claires sont d’ores et déjà prévues, en matière de répartition des rôles, dans la loi HPST portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires : en période de crise sanitaire, le préfet prend la main et travaille en coopération étroite avec l’ARS.
Le Gouvernement a fait le choix très fort et parfaitement compréhensible, qui l’honore, de mettre en place, avant même le lancement du plan de déconfinement, une concertation dans les territoires au travers du binôme maire-préfet. En effet, comme vous l’avez largement souligné au cours de l’examen de l’article 1er, les maires ont un rôle absolument essentiel à jouer dans l’application, la mise en forme et l’adaptation des divers processus relatifs à la levée du confinement.
Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 162, présenté par Mmes Assassi, Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La décision d’accueillir des usagers dans un établissement scolaire est conditionnée à l’accord express des conseils d’école pour le premier degré et des conseils d’administration des établissements pour le second degré.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Cet amendement vise à ce que les conseils d’école, pour l’enseignement du premier degré, et les conseils d’administration des établissements scolaires, pour le secondaire, soient consultés et associés à la prise de décision de reprise des cours.
Nous avons eu un débat très intéressant et parfaitement légitime sur la responsabilité des élus locaux, en particulier des maires, et sur la nécessité de les sécuriser dans le contexte de la gestion de la crise actuelle. Cet amendement va dans ce sens.
Les conseils d’école et les conseils d’administration des établissements scolaires réunissent des élus, qui représentent les collectivités compétentes – les communes pour l’école primaire et la maternelle, les départements pour les collèges, les régions pour les lycées –, les chefs d’établissement, dont le niveau de responsabilité est différent, des représentants du corps enseignant et des parents d’élèves. Nous souhaitons qu’ils décident ensemble, au regard de la situation sanitaire et de la possibilité ou non de mettre en œuvre les protocoles définis, dont le caractère souvent « hors-sol » a été évoqué. Un certain nombre de décisions relèvent en effet de ce que l’on appelle la « communauté éducative ».
Une telle disposition permettrait de mettre en œuvre la concertation, laquelle a par trop fait défaut sur le terrain jusqu’à présent, et serait aussi de nature à sécuriser les élus locaux. La reprise de l’école, y compris à plus long terme, nécessite un travail qui est trop peu mené aujourd’hui. Il convient de mobiliser l’ensemble de la communauté éducative.
Il est défavorable. Le fait de demander l’accord du conseil d’école constituerait un transfert de la décision à une instance collective comprenant des parents d’élèves, des représentants des élèves et le maire. Dès lors, on ne saurait plus qui prend la décision et, en cas de problème, toutes ces personnes pourraient voir leur responsabilité engagée. Je trouverais légitime que l’on prenne la précaution de réunir le conseil d’école pour solliciter son avis, mais ce n’est pas à lui de décider.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 56, présenté par M. Kerrouche, Mme Lubin, MM. Durain, Marie et Duran, Mme Bonnefoy, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat, Jacques Bigot et Joël Bigot, Mme Blondin, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny et Daunis, Mme de la Gontrie, MM. Devinaz et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais, Guillemot et Harribey, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, MM. Kanner, Lalande et Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier et Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Sueur et Sutour, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 212-15, il est inséré un article L. 212-… ainsi rédigé :
« Art. L. 212-… – Lorsque l’état d’urgence prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, les mesures spécifiques et exceptionnelles d’hygiène et de sécurité prévues sont inscrites au règlement intérieur de l’école.
« Aux heures ou périodes au cours desquelles les locaux scolaires ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue, une convention entre le maire et le directeur de l’école définissant les conditions d’accueil et les mesures sanitaires est établie, après avis du conseil d’école.
« La conformité du règlement et de la convention précités au protocole sanitaire prescrit par le ministère en charge de l’éducation nationale est validée par le directeur académique des services de l’éducation nationale ou son représentant. » ;
2° Après l’article L. 213-10, il est inséré un article L. 213-… ainsi rédigé :
« Art. L. 213-… – Lorsque l’état d’urgence prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, les mesures spécifiques et exceptionnelles d’hygiène et de sécurité prévues sont inscrites au règlement intérieur du collège.
« Aux heures ou périodes au cours desquelles les locaux scolaires ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue, une convention entre le président du conseil départemental et le directeur de l’établissement définissant les conditions d’accueil et les mesures sanitaires est établie, après avis du conseil d’administration.
« La conformité du règlement et de la convention précités au protocole sanitaire prescrit par le ministère en charge de l’éducation nationale est validée par le directeur académique des services de l’éducation nationale ou son représentant. » ;
3° Après l’article L. 214-11, il est inséré un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – Lorsque l’état d’urgence prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, les mesures spécifiques et exceptionnelles d’hygiène et de sécurité prévues sont inscrites au règlement intérieur du lycée.
« Aux heures ou périodes au cours desquelles les locaux scolaires ne sont pas utilisés pour les besoins de la formation initiale et continue, une convention entre le président du conseil régional et le directeur de l’établissement définissant les conditions d’accueil et les mesures sanitaires est établie, après avis du conseil d’administration.
« La conformité du règlement et de la convention précités au protocole sanitaire prescrit par le ministère en charge de l’éducation nationale est validée par le directeur académique des services de l’éducation nationale ou son représentant. »
II. – Après l’article L. 3111-25 du code des transports, est insérée une section ainsi rédigée :
« Section …
« Organisation du transport scolaire pendant l’état d’urgence sanitaire
« Art. L. 3111-… – Lorsque l’état d’urgence prévu à l’article L. 3131-15 du code de la santé publique est déclaré, les mesures exceptionnelles d’hygiène et de sécurité prévues pour le transport scolaire sont inscrites au règlement du transport scolaire par l’autorité organisatrice compétente et après validation conjointe par le représentant territorialement compétent du ministre en charge de la santé et du ministre en charge des transports. »
La parole est à M. Jérôme Durain.
Nous l’avons longuement souligné au cours du débat, une responsabilité disproportionnée pèse sur les élus locaux au titre de la mise en œuvre du déconfinement, notamment sur la base du protocole extrêmement lourd qui a été prévu, alors même qu’ils ont été assez peu associés aux décisions prises par l’État.
Cet amendement vise, en réponse à une demande de l’Association des maires de France, à ce que les services de l’État valident formellement la conformité au protocole prescrit par le ministère de l’éducation nationale des conditions d’accueil et des mesures sanitaires mises en place dans chaque école. La responsabilité qui incombe au maire s’en trouverait ainsi allégée.
Sont prévues l’inscription dans le règlement de l’établissement des modalités d’organisation de la reprise, qui seraient validées par le représentant du ministère concerné, et la consultation a minima du conseil d’école, de façon, par exemple, que la question de la fourniture de masques aux enfants par les parents puisse être évoquée avec l’ensemble de la communauté éducative. Enfin, le transport scolaire, indispensable à la réouverture des classes, devant être sécurisé, il est également proposé qu’un règlement y afférent soit validé par les représentants du ministère de la santé et de celui des transports.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 187, présenté par Mmes Assassi, Brulin, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire prévu par la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, les salariés au sens de l’article L. 1111-1 du code du travail ayant fait le choix de garder leurs enfants scolarisés à leur domicile pour en assurer la garde et la surveillance ne peuvent faire l’objet à raison de leur absence de l’entreprise pour ce motif, d’un retrait sur salaire, d’une sanction, quelle qu’en soit la nature, d’un licenciement ou de toute autre mesure discriminatoire en matière de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat.
Il en de même pour les fonctionnaires et agents contractuels de droit public de la fonction publique de l’État, de la fonction publique territoriale, des établissements publics, de l’éducation nationale et fonctionnaires à statut spécial ainsi que les personnels ouvriers de l’État.
La parole est à Mme Céline Brulin.
Cet amendement vise à permettre aux familles de choisir, sur la base de ce que le Gouvernement appelle du « volontariat », de remettre ou non leur enfant à l’école.
Chacun le sait, les parents qui ont été contraints de garder leurs enfants à domicile ont d’abord relevé du régime du congé maladie pour garde d’enfants, avec une rémunération maintenue à hauteur de 90 % du salaire, puis, à partir du 1ermai, de celui du chômage partiel, rémunéré à hauteur de 84 %. On ne sait trop ce qu’il en sera après le 1er juin : le Premier ministre a simplement parlé d’« aménagements », sans autres précisions.
Remettre ou non leurs enfants à l’école est évidemment une question essentielle pour les parents. Il nous paraît nécessaire de garantir leurs revenus s’ils font le choix de garder leurs enfants à domicile, sauf à créer des inégalités profondes entre ceux qui pourront assumer financièrement ce choix et les autres, dont certains seront par exemple obligés de prendre sur leurs congés annuels.
Il faut apporter dès aujourd’hui un éclairage sur l’ensemble de ces éléments, car c’est en ce moment que les parents sont interrogés sur leurs intentions. Pour pouvoir faire un choix, il faut en connaître tous les tenants et les aboutissants. Or, pour l’heure, les familles méconnaissent, et l’on ne peut pas leur en faire reproche, les dispositifs sur lesquels elles pourront s’appuyer.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 149, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les quatrième et cinquième alinéas du b du 1° du I de l’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 sont supprimés.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
La loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, instaurant un état d’urgence sanitaire, attribue des pouvoirs exceptionnels aux employeurs pour déroger au droit du travail et déconstruire le code du travail.
Dans la continuité des lois et ordonnances précédentes qui ont rogné le droit du travail, l’état d’urgence sanitaire a servi d’excuse au Gouvernement pour affaiblir encore davantage les protections collectives, en remettant en cause les durées maximales de travail ainsi que les durées minimales de repos.
Ces règles protectrices sont des acquis importants, essentiels pour la santé et la sécurité des salariés. L’inspection du travail, dont les moyens sont de plus en plus réduits, se heurte à une forte augmentation des cas de non-respect, par les employeurs, des règles de sécurité, mais surtout de celles qui sont relatives aux temps de repos et au temps de travail. Les choses vont encore s’aggraver.
L’objectif sanitaire, que nous sommes censés partager, est la protection de l’ensemble de la population, en particulier des salariés qui ont repris ou vont reprendre leur activité professionnelle. Dérégler les temps de travail et faire exploser le seuil des 40 heures expose la santé des salariés à des conséquences extrêmement négatives, comme en attestent toutes les études.
Quand les conditions de travail sont bonnes, tout le monde y gagne, le salarié comme l’employeur. Les détériorer gravement aura des effets néfastes pour les salariés et pour l’entreprise, et nuira à la reprise de l’activité et de l’économie. Cette mesure contre-productive risque d’entraîner des cas d’épuisement professionnel, et donc une recrudescence des arrêts de travail.
Madame la sénatrice, il est tout à fait normal d’émettre des critiques à l’encontre du Gouvernement, mais je supporte mal d’entendre dire que l’état d’urgence sanitaire nous aurait « servi d’excuse »…
L’état d’urgence sanitaire n’a servi d’excuse à rien ! Il a en revanche permis de protéger la vie des Français, de mettre en place des mesures qui s’appliquent à la moitié des habitants de la planète, avec cette spécificité, concernant la France, que le nombre de chômeurs n’y a pas augmenté de 4 millions en deux jours, comme cela a été le cas dans d’autres pays. L’état d’urgence sanitaire s’est en effet accompagné de la mise au chômage partiel de plus de 11 millions de Français, ce qui leur a garanti de percevoir 84 % de leur salaire net, et même 100 % lorsqu’ils touchent le SMIC.
Les salaires de 11 millions de Français sont ainsi aujourd’hui réglés par l’État, ce qui a entraîné une perte de cotisations très importante. J’imagine que, lors des prochaines discussions budgétaires, vous ne serez pas la dernière, madame la sénatrice, à nous faire remarquer qu’il y a un trou dans les finances de la sécurité sociale. Ce trou, nous l’assumerons, car les mesures prises ont permis d’éviter l’explosion de la pauvreté dans notre pays à l’occasion de cette crise.
Je le répète, l’état d’urgence sanitaire n’a servi d’excuse ni à la casse du code du travail ni à quoi que ce soit d’autre : il a permis de protéger la santé des Français ! Faisons attention à ce que nous disons ! La période a été éprouvante pour nos concitoyens, qui subissent le confinement depuis près de deux mois et sont sensibles à ce qui se dit dans cette assemblée.
Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et Les Indépendants, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE.
Je suis d’accord avec vous, monsieur le ministre, il faut faire attention à ce que l’on dit. Je pense notamment à ceux qui déclarent que, lors de la reprise de l’activité professionnelle, les Françaises et les Français devront faire des efforts, travailler plus longtemps, renoncer à leurs congés payés ainsi qu’au repos dominical… Qui en aurait envie parmi ceux qui siègent sur ces travées ? Il faut raison garder !
Par ailleurs, monsieur le ministre, le chômage partiel n’est pas un cadeau que vous faites aux salariés ; c’est un droit, pour lequel les salariés cotisent ! Nous parlons ici d’acquis, de conquis qu’il faut préserver et qui font la spécificité de notre pays. Je vous en prie, pas de leçons !
Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 150, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le sixième alinéa du b du 1° du I de l’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 est supprimé.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Selon Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT des cadres et techniciens (UGICT-CGT), des salariés témoignent chaque semaine que leur employeur leur demande de prendre des congés payés pendant la durée du confinement. D’autres salariés, qui sont censés être au chômage partiel, apprennent au bout de quatre jours que leur employeur considère, sans le leur dire, qu’ils utilisent leurs congés payés. À d’autres encore, qui pensaient être en télétravail, leur employeur a signalé après coup qu’ils étaient en fait en période de congés payés. De nombreux patrons font pression pour reporter ce temps de confinement sur les congés payés ou les jours de RTT.
Nous avions alerté sur les dangers des dispositions adoptées lors de l’instauration de l’état d’urgence sanitaire, et nous ne nous étions malheureusement pas trompés. Telle est la réalité des conditions de travail et des relations dans les entreprises ! Nous ne pouvons que nous inquiéter lorsque le patronat, relayé par une partie de la droite, demande le maintien des dérogations aux règles relatives au temps de travail et des congés imposés au-delà de la crise sanitaire, prétendument pour relancer l’économie.
Alors qu’il faudrait rassurer et rassembler les salariés, leur donner confiance dans leur hiérarchie, vous avez fait tout l’inverse. Ce n’est pas en diminuant le nombre de leurs jours de congés que les entreprises réussiront à motiver les salariés en vue de relancer l’économie, bien au contraire ! Il convient de supprimer cette mesure contre-productive.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 8 rectifié, présenté par Mmes Guillotin, M. Carrère, Costes et N. Delattre, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Corbisez, Dantec, Gabouty et Gold, Mme Jouve, MM. Roux et Vall, Mme Pantel et M. Guérini, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3131-12 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « La maladie à l’origine de la déclaration d’état d’urgence sanitaire est inscrite sans délai à la liste des maladies mentionnées au 1° de l’article L. 3113-1 du présent code. »
Cet amendement a été retiré.
L’amendement n° 142, présenté par Mmes Assassi, Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le mot : « ministres », la fin du dernier alinéa de l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 est ainsi rédigée : « ou par le vote du Parlement avant l’expiration du délai fixé par la loi le prorogeant. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Au travers de cet amendement, nous tentons une nouvelle fois de rétablir les prérogatives du Parlement dans cette période d’état d’urgence sanitaire.
Actuellement, la possibilité pour le Parlement d’interrompre par un vote l’état d’urgence sanitaire n’est pas prévue. Inscrire cette possibilité dans la loi est d’autant plus nécessaire que l’état d’exception en vigueur ne prévoit pas d’obligation pour le Gouvernement de fixer une date butoir. Rappelons que les catégories d’état d’urgence déjà appliquées de 1955 à 2015 prévoyaient que toute prorogation devait s’accompagner de la détermination d’une date de fin de l’état de crise.
L’article 4 de la loi du 23 mars 2020, tel qu’issu de la navette parlementaire, permet au Gouvernement de reconduire autant de fois qu’il le veut, avec l’assentiment de sa majorité, l’état d’urgence. Cela pose un problème démocratique assez évident. Si les lois précédentes instaurant l’état d’urgence sanitaire prévoyaient l’obligation, lors de la première prorogation, de fixer une date butoir, c’était justement pour éviter tout abus de pouvoir d’un exécutif s’appuyant sur une majorité qui ne prendrait pas en compte cet élément essentiel pour la démocratie, du fait même, d’ailleurs, de la nature des institutions de la Ve République !
Notre amendement vise, modestement, à restaurer la possibilité, pour le Parlement, de mettre fin à l’état d’urgence. Son adoption constituerait, me semble-t-il, un signal important.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 165, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire, une proposition de loi ou de résolution ou un débat relatifs à l’état d’urgence sont inscrits par priorité à l’ordre du jour à l’initiative de la conférence des présidents de chaque assemblée pendant la session ordinaire ou une session extraordinaire ou, le cas échéant, pendant une réunion de plein droit du Parlement.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Cet amendement prévoit que, pendant la durée de l’état d’urgence, une proposition de loi ou de résolution ou un débat relatif à l’état d’urgence soit inscrit par priorité à l’ordre du jour, sur l’initiative de la conférence des présidents de chaque assemblée, pendant la session ordinaire ou une session extraordinaire ou bien encore, le cas échéant, pendant une réunion de plein droit du Parlement.
Je viens de donner lecture, monsieur le président de la commission des lois, d’un extrait de l’objet de notre amendement n° 9 examiné le 9 mars 2016, lors de la discussion du projet de loi constitutionnelle de protection de la Nation. À l’époque, votre préoccupation était claire : il s’agissait de permettre au Parlement de mettre un terme à l’état d’urgence. Vous complétiez même cette proposition par une autre relative à tous les états de crise relevant des articles 16 et 36 de la Constitution. Je ne comprends donc ni votre réticence aujourd’hui à permettre une telle intervention du Parlement ni votre acceptation de la mise en œuvre de cet état d’urgence d’exception dépourvu de date butoir.
Nous insistons, une fois encore, sur l’impérieuse nécessité de limiter clairement la durée de l’état d’urgence, sanitaire ou pas. Nous vous proposons d’armer le Parlement pour imposer la cessation d’une forme de pleins pouvoirs, dangereuse pour la démocratie.
Justement, ma chère collègue, nous avons voté ce régime d’exception pour une durée d’un an, pendant laquelle le Gouvernement pourra décider d’interrompre la mise en œuvre des mesures de l’état d’urgence ou de les reprendre par décret, ce qui devra alors donner lieu, au bout d’un mois, à un vote du Parlement.
Le régime d’état d’urgence que nous avons mis en place est donc bien assorti d’une date butoir. Le Gouvernement n’a d’ailleurs aucune obligation d’utiliser les moyens que nous lui avons donnés : la mise en œuvre de cette mesure peut être intermittente et, en tout cas, elle ne dépassera pas un an.
L’avis est défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Le deuxième alinéa de l’article L. 3131-14 du code de la santé publique est complété par les mots : « après un avis du comité de scientifiques prévu à l’article L. 3131-19 ».
L’amendement n° 141, présenté par Mmes Assassi, Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par les mots :
ou par le vote du Parlement avant l’expiration de ce délai
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Cet amendement a déjà été défendu à l’occasion de la présentation de l’amendement n° 142.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 1 er bis est adopté.
L’amendement n° 87, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 3131-13 du code de la santé publique, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Le Gouvernement ainsi que les autorités administratives concernées leur transmettent sans délai copie de tous les actes qu’ils prennent en application de ces dispositions. »
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
Cet amendement prévoit que le Gouvernement ainsi que les autorités administratives concernées transmettent au Parlement, dans cette période très sensible, copie de tous les actes qu’ils prennent en application du présent texte.
Il s’agit de reprendre des dispositions qui figurent déjà dans la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme et à l’article L. 22-10-1 du code de la sécurité intérieure, en les adaptant à l’objet du présent texte.
M. le président Bas me dira peut-être que cela va de soi. Je lui réponds par avance que c’est une raison de plus pour adopter cet amendement !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’article L. 3131-15 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° A
1° Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° Réglementer ou interdire la circulation des personnes et des véhicules et réglementer l’accès aux moyens de transport et les conditions de leur usage ; »
2° Le 5° est ainsi rédigé :
« 5° Ordonner la fermeture provisoire et réglementer l’ouverture, y compris les conditions d’accès et de présence, d’une ou plusieurs catégories d’établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, en garantissant l’accès des personnes aux biens et services de première nécessité ; »
3° La première phrase du 7° est ainsi rédigée : « Ordonner la réquisition de toute personne et de tous biens et services nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire. » ;
3° bis
4° Après le 10°, il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. – Les mesures prévues aux 3° et 4° du présent article ayant pour objet la mise en quarantaine, le placement et le maintien en isolement ne peuvent viser que les personnes qui, ayant séjourné au cours du mois précédent dans une zone de circulation de l’infection, entrent sur le territoire national, arrivent en Corse ou dans l’une des collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution ou arrivent sur le territoire hexagonal en provenance de l’une de ces mêmes collectivités. La liste des zones de circulation de l’infection est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé. Elle fait l’objet d’une information publique régulière pendant toute la durée de l’état d’urgence sanitaire.
« Aux seules fins d’assurer la mise en œuvre des mesures mentionnées au premier alinéa du présent II, les entreprises de transport ferroviaire, maritime ou aérien communiquent au représentant de l’État dans le département qui en fait la demande les données de réservation concernant les déplacements visés au même premier alinéa.
« Les mesures de quarantaine, le placement et le maintien en isolement peuvent se dérouler, au choix des personnes qui en font l’objet, à leur domicile ou dans les lieux d’hébergement dont la liste est fixée par décret.
« Leur durée initiale ne peut excéder quatorze jours. Elles peuvent être renouvelées, dans les conditions prévues au III de l’article L. 3131-17, dans la limite d’une durée maximale d’un mois. Il y est mis fin avant leur terme lorsque l’état de santé de l’intéressé le permet.
« Dans le cadre des mesures de quarantaine, de placement et de maintien en isolement, il peut être fait obligation à la personne qui en fait l’objet de :
« 1° Ne pas sortir de son domicile ou du lieu d’hébergement où elle exécute la mesure, sous réserve des déplacements qui lui sont spécifiquement autorisés par l’autorité administrative. Dans le cas où un isolement complet de la personne est prononcé, il lui est garanti un accès aux biens et services de première nécessité ainsi qu’à des moyens de communication téléphonique ou électronique lui permettant de communiquer librement avec l’extérieur ;
« 2° Ne pas fréquenter certains lieux ou catégories de lieux.
« Les conditions d’application du présent II sont fixées par le décret prévu au premier alinéa du I, en fonction de la nature et des modes de propagation du virus, après avis du conseil de scientifiques mentionné à l’article L. 3131-19. Ce décret précise également les conditions dans lesquelles sont assurés la poursuite de la vie familiale, la prise en compte de la situation des mineurs ainsi que le suivi médical qui accompagne ces mesures.
5° Le dernier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « III. – » ;
b) Les mots : « des 1° à 10° » sont supprimés.
À la demande de notre collègue Robert Laufoaulu, je souhaite appeler attention du Gouvernement sur la situation spécifique de Wallis-et-Futuna, où la sortie du confinement suscite de grandes inquiétudes.
Ce territoire était, grâce à la fermeture des liaisons extérieures, épargné par la pandémie, fort heureusement car le système sanitaire et hospitalier y est peu développé et de nombreux habitants souffrent déjà de lourds problèmes de santé, comme le diabète. Le Covid-19 y ferait des ravages, avec un taux de mortalité sans doute bien supérieur à celui que connaissent les autres collectivités ou départements français.
Le retour sur le territoire des habitants actuellement bloqués en Nouvelle-Calédonie, qui doit se faire à bord d’un navire de croisière, ainsi que l’application éventuelle de la quatorzaine après la fin du mois de mai suscitent des interrogations. La question est tout autant politique que juridique, eu égard à la crainte de recours administratifs.
Nous avons bien entendu ce qu’a dit le Premier ministre concernant l’outre-mer en général. Pourriez-vous cependant, monsieur le ministre, rassurer les populations de Wallis-et-Futuna et nous donner des précisions sur la volonté de l’exécutif d’apporter toutes garanties pour protéger les habitants et faire en sorte que ce territoire demeure épargné par la pandémie ?
Dimanche, le Gouvernement a indiqué qu’il n’entendait pas soumettre les ressortissants de l’espace Schengen aux dispositions de l’article 2 du présent projet de loi.
Cette déclaration est surprenante à deux titres. D’une part, le virus circule énormément dans un certain nombre de pays de l’espace Schengen. À quel titre les ressortissants de ces pays se verraient-ils attribuer un statut particulier ? D’autre part, et surtout, nous avons été contactés par de très nombreux Français résidant à l’étranger qui considèrent qu’il s’agit là d’une rupture d’égalité insupportable.
Monsieur le ministre, si cette déclaration est erronée, pouvez-vous la rectifier ? Si tel n’est pas le cas, pouvez-vous nous expliquer ce qui peut justifier le traitement différencié réservé à des ressortissants étrangers par rapport à des nationaux ? Quel raisonnement sanitaire peut conduire à exonérer du dispositif de l’article 2 des ressortissants de pays de l’espace Schengen où le virus circule fortement ?
Je remercie Bruno Retailleau de ses propos. Je souhaite également intervenir sur ce sujet.
Les Français établis hors de France ont été d’abord extrêmement émus, même catastrophés, d’apprendre qu’ils allaient devoir subir une quarantaine à leur retour en France, puis très surpris en prenant connaissance des dispositions annoncées par le Gouvernement. N’oublions pas en effet que le pays du monde qui compte, en proportion de sa population, le plus grand nombre de victimes du Covid-19, c’est la Belgique. En revanche, au Vietnam, il n’y a eu aucun mort alors que la population est très importante. Où est la logique ?
Je veux appeler l’attention sur la situation des 3, 5 millions de Français de l’étranger, nos compatriotes, qui se sentent totalement oubliés par les pouvoirs publics et en voie de devenir des citoyens de troisième zone. Il n’y avait ainsi pas un mot les concernant dans le discours du Premier ministre, alors qu’ils subissent, eux aussi, la pandémie de Covid-19. Aucune mesure n’est prévue pour aider les petits entrepreneurs, qui ne bénéficient pas des dispositifs mis en place en France. Il n’y a pas de chômage partiel à l’étranger ! On exige d’eux qu’ils paient l’intégralité des salaires de leurs employés alors qu’aucun argent ne rentre dans leurs caisses.
Ces Français de l’étranger ne bénéficient généralement pas de vacances aussi longues que les nôtres ; elles durent souvent quinze jours par an au maximum, comme aux États-Unis. Et on leur demanderait de passer leurs quinze jours de congés en quarantaine en France, sans pouvoir voir leur famille, alors même qu’ils viennent parfois de pays qui ne sont pas très contaminés ?
Encore une fois, c’est une question de cohérence. On peut vivre dans une zone fortement contaminée et ne pas être forcément porteur du Covid-19 ! À l’inverse, on peut être infecté bien que résidant dans une zone où le risque de contamination est faible.
Les résidents français à l’étranger ne comprennent pas cette décision. Ils ont l’impression d’un véritable cafouillage et sont désespérés. Cette situation est vraiment anxiogène. J’aimerais, monsieur le ministre, que vous puissiez les rassurer. Il s’agit non pas de prévoir pour eux un traitement particulier, mais de tenir compte de leur situation et de les considérer comme des Français comme les autres !
Je souhaite d’abord répondre à M. Wattebled au sujet de Wallis-et-Futuna.
Je mesure pleinement l’inquiétude de nos compatriotes de ce territoire. Aucun cas de Covid-19 n’y a été détecté, fort heureusement, depuis le début de la pandémie. Il est incontestable que le contrôle sanitaire le plus strict doit être assuré à ses frontières afin de conserver cette situation. Comme le Premier ministre l’a indiqué, le principe d’interdiction d’entrée dans les territoires ultramarins sera maintenu après le 11 mai : seules les personnes pouvant justifier de motifs familiaux ou professionnels impérieux pourront s’y rendre ; elles devront alors se soumettre à une quatorzaine stricte. Je salue à ce propos l’initiative de mettre en œuvre cette quatorzaine, dans les prochains jours, dans l’un des bateaux de la compagnie du Ponant, immatriculé à Wallis-et-Futuna. Nous devons, pour l’avenir, réfléchir à des mesures qui apporteront des garanties équivalentes en matière de santé publique tout en étant moins contraignantes pour les déplacements de personnes comme de fret. Cela devra évidemment se faire en lien avec les parties prenantes. Soyez assuré en tout cas, monsieur le sénateur, de l’attention que porte le Gouvernement à la situation de Wallis-et-Futuna.
Je ne saurais ne pas répondre aux interpellations de M. Retailleau et Mme Garriaud-Maylam sur les Français de l’étranger et les ressortissants de l’espace Schengen.
Comme vous le savez, à la sortie du dernier conseil des ministres, j’ai été amené à indiquer que les dispositions du présent texte prévoyaient que toute personne entrant sur le territoire national, y compris les territoires ultramarins et la Corse, devrait observer une quatorzaine. Plusieurs cas de figure doivent être envisagés.
Madame Garriaud-Maylam, puisque vous évoquez les Français de l’étranger, rappelons d’abord que la France a assuré ou accompagné le rapatriement d’un très grand nombre de nos ressortissants qui souhaitaient revenir en France : si ma mémoire est bonne, plus de 130 000 personnes ont ainsi été rapatriées, dans des conditions qui ont été reconnues optimales. Pour avoir suivi certaines situations de près, je peux vous assurer que tout le monde a fait le maximum pour permettre à toute personne qui le souhaitait de rentrer en France.
La situation des Français de l’étranger peut être très complexe. Un certain nombre d’entre eux, qui vivent depuis longtemps hors de notre pays et n’y disposent plus d’un logement, expriment le souhait de revenir sur le territoire national à partir du 11 mai. Observer une quatorzaine s’impose dans un tel cas.
Par ailleurs, monsieur Retailleau, je considère qu’il faudra savoir agir avec intelligence et s’adapter aux situations. L’objectif n’est pas de contraindre telle ou telle personne de se plier à une quatorzaine au prétexte qu’elle entrerait en France ; ce n’est pas l’esprit de la France, ce ne l’était pas hier, ce ne le sera pas demain. Chacun comprend que l’objectif de la quatorzaine, ou de la mise à l’isolement pour le temps nécessaire en cas de symptômes et de maladie avérée, est d’empêcher l’entrée du virus tout en offrant une protection à la personne concernée. Les choses pourront évoluer en fonction de la situation épidémique dans les pays de provenance des personnes souhaitant entrer sur le territoire national.
Cette problématique concernera nettement moins les frontaliers. Pour eux, les choses sont très claires : on peut parcourir jusqu’à une centaine de kilomètres de part et d’autre de la frontière, y compris entre la France et l’Allemagne, sans présenter plus de risques d’un côté comme de l’autre.
Quant aux ressortissants de pays étrangers appartenant à l’espace Schengen, je veux rester prudent sur cette question, mais si des personnes en provenance d’un pays où la situation épidémique s’avérerait absolument hors de contrôle – à l’heure actuelle, elle est plutôt en voie d’être contrôlée dans la totalité des pays qui nous entourent, grâce aux mesures de confinement – souhaitaient entrer en France, alors le bon sens scientifique, le bon sens médical, le bon sens français imposerait probablement certaines adaptations.
C’est pourquoi nous vous présentons aujourd’hui un dispositif législatif assez générique : il prévoit que, dans un cadre exceptionnel, des mesures exceptionnelles puissent être prises à tout moment pour protéger les Français et prévenir une reprise de l’épidémie. Il ne s’agit pas de privilégier un tel par rapport à un tel. J’entends certains se plaindre que l’on interdise les déplacements de plus de 100 kilomètres au sein du territoire national et que l’on permette, en même temps, de passer les frontières. Clairement, ce n’est pas l’enjeu ! Encore une fois, l’enjeu est que toute situation à risque épidémique puisse faire l’objet des mesures de prévention et de précaution nécessaires pour éviter l’entrée du virus ou sa propagation sur notre territoire. C’est un objectif de sécurité.
L’amendement n° 156, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
afin de garantir la sécurité des usagers et des personnels
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Au travers de cet amendement de précision, nous souhaitons rappeler que toute mesure de réglementation des transports prévue au titre de cet article doit tendre à assurer la sécurité des usagers et des personnels. On l’aura compris, il s’agit surtout d’un amendement d’appel visant à exprimer notre étonnement – c’est un euphémisme ! – devant le manque d’ambition des dispositions du plan de déconfinement relatives aux transports. Cela reste, selon nous, l’un des défis majeurs à relever.
Ainsi, comment se satisfaire d’une obligation de port de masque qui ne serait pas adossée à un réel droit au masque gratuit, pour les usagers comme pour le personnel ? Comment se contenter d’un appel à la bonne volonté des entreprises pour limiter l’engorgement des transports collectifs, a fortiori dans les régions les plus denses, notamment l’Île-de-France ?
Certes, un projet de charte entre les autorités organisatrices, les entreprises et les organisations syndicales est en discussion, mais cette charte n’aurait rien d’obligatoire. Les entreprises resteront donc seul maître à bord ; aucune disposition concrète n’est prévue pour limiter effectivement la demande de mobilité. Il s’agit pourtant d’une condition incontournable pour permettre le respect des gestes barrières.
Comment garantir la sécurité du personnel dans ces conditions ? Quels droits pouvons-nous donner aux salariés quand les wagons, à n’en pas douter, vont rester trop fréquentés pour limiter la propagation du virus ? Ce flou entretenu témoigne d’une difficulté à faire réellement primer les enjeux de santé sur les enjeux économiques de reprise de l’activité « quoi qu’il en coûte », comme dirait le Président de la République…
À défaut de réglementation concrète, les transports vont devenir, demain, le principal foyer de propagation de l’épidémie, mettant en danger les usagers comme le personnel.
Nous estimons également que cette crise devrait nous conduire à remettre en cause le dogme de la concurrence libre dans les transports urbains. On voit bien que la multiplication des acteurs rend plus difficile et complexe la réaction en temps de crise. Autant de pistes de travail, mes chers collègues, que nous avons devant nous !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 158, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, ordonner l’adaptation du plan de mobilité des entreprises pour cette période d’urgence sanitaire afin d’éviter la saturation des transports collectifs
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Au travers de cet amendement, nous souhaitons une nouvelle fois en appeler à l’esprit de responsabilité.
Aujourd’hui, le Gouvernement demande aux entreprises de poursuivre le télétravail et d’adapter les horaires des salariés devant se déplacer, afin de limiter l’encombrement des réseaux. Pour autant, ce n’est rien de plus et rien de moins qu’un simple appel à la bonne volonté et à l’esprit civique, sans incitation ni sanction.
De l’autre côté, les usagers des transports sont soumis à de réelles obligations, notamment celle de porter un masque durant leurs trajets. Par ailleurs, les entreprises et les autorités organisatrices devront faire respecter aux usagers des règles permettant de garantir la distanciation sociale et les gestes barrières, en limitant les possibilités d’occupation des véhicules, en particulier par des marquages au sol. En tant qu’usagère quotidienne du RER B, je leur souhaite bien du courage !
Sourires.
Sachant que l’offre de transport ne reprendra pas à 100 %, mais plutôt à 70 % dans un premier temps, on voit bien se dessiner les termes d’une équation insoluble : comment croire que la demande de mobilité sera compatible avec le taux d’occupation proposé, alors que celui-ci devra être inférieur à 25 % dans les bus, RER et autres métros ?
Pour cette raison, de manière que les entreprises prennent toutes leurs responsabilités, nous proposons que le plan de mobilité pour les salariés soit adapté, afin de garantir un développement maximal du télétravail et un aménagement des plages horaires, dispositifs qui devront être discutés avec les organisations syndicales pour établir des obligations clairement détaillées.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 45 rectifié, présenté par MM. Karoutchi, Daubresse, Bascher et Marseille, Mme Micouleau, M. Cuypers, Mmes Bonfanti-Dossat et Lavarde, M. de Nicolaÿ, Mme Eustache-Brinio, MM. Menonville, Bizet, Regnard, Canevet, Husson et Frassa, Mme Chauvin, M. Pierre, Mme M. Mercier, M. Lefèvre, Mmes Chain-Larché et Raimond-Pavero, M. Babary, Mme Imbert, M. Hugonet, Mme L. Darcos, M. Kennel, Mmes Procaccia, Duranton, Gruny et Lassarade, M. Bonhomme, Mmes Deroche et Deromedi, MM. Vogel et Dallier et Mme Dumas, est ainsi libellé :
Alinéa 4, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Les particularités de la situation en région Île-de-France, compte tenu de la très forte proportion de déplacements en transports en commun, nécessitent des mesures spécifiques et notamment l’obligation pour les usagers de présenter une attestation de déplacement dans les transports collectifs dans des conditions fixées par décret.
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
En Île-de-France, les transports en commun, empruntés avant la crise sanitaire par 5 millions de voyageurs chaque jour, sont susceptibles de constituer un goulet d’étranglement lors du déconfinement. Afin de ne pas saturer le système de transport, ce qui contribuerait à relancer une nouvelle vague épidémique, il est nécessaire de limiter les déplacements au moyen de la mise en place d’une attestation de déplacement dont le principe serait calqué sur l’attestation de déplacement dérogatoire aujourd’hui en vigueur en période de confinement.
Le décret d’application de la disposition que nous proposons ici d’insérer dans le texte pourra notamment préciser que les attestations délivrées par les employeurs viseront à lisser les déplacements sur plusieurs plages horaires.
J’ai posé cette question, cet après-midi, au Premier ministre. En effet, les transports en commun, notamment dans la région parisienne, risquent d’être saturés. Je comprends donc fort bien l’inspiration de cet amendement.
Néanmoins, la commission des lois n’a pas souhaité le retenir. Elle considère en effet qu’il faut soumettre les transports collectifs à une règle homogène sur l’ensemble du territoire national. Par ailleurs, la gestion du dispositif proposé serait sans doute très difficile.
C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Il est lui aussi défavorable.
Certes, la question sous-jacente et la réflexion des auteurs de cet amendement sont évidemment pertinentes. Pour autant, inscrire dans la loi une disposition spécifique aux transports en commun d’Île-de-France ne me semblerait pas très cohérent. En revanche, des accords spécifiques seront conclus avec les organisateurs des réseaux de transport en commun afin de déterminer, si attestation il doit y avoir, quelle règle générale pourra s’appliquer, à une échelle beaucoup plus large que celle de la seule Île-de-France.
L’amendement n° 45 rectifié est retiré.
L’amendement n° 128 rectifié, présenté par MM. de Legge, Cuypers, Meurant, Vaspart et Paccaud, Mme Ramond, M. Reichardt, Mme Lavarde, MM. Bonne et Retailleau, Mmes L. Darcos et Gruny, MM. Charon, Courtial et Chevrollier, Mme Deseyne, MM. Mandelli, Piednoir, Mouiller, de Nicolaÿ, de Montgolfier, Bonhomme, Bouchet, Sol, Lefèvre et B. Fournier, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Bizet, Bascher et Allizard, Mmes Estrosi Sassone, Chain-Larché et Thomas, M. Pellevat, Mme Imbert, MM. Savary et Sido, Mme Deroche, M. Danesi, Mmes Chauvin et Lamure, MM. del Picchia, Leleux, Vogel et Longuet, Mmes Gatel et Garriaud-Maylam, M. Duplomb et Mmes Micouleau et Lopez, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
et aux lieux de culte, sauf si la situation particulière d’un département venait à justifier le maintien de la fermeture de ces derniers
La parole est à M. Michel Vaspart.
Je présente cet amendement au nom de M. de Legge. Il s’inscrit dans l’esprit de la loi de 1905, dont l’article 1er dispose : « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes. »
Le plan de déconfinement, tel qu’il nous est présenté, semble reposer sur des priorités qui méconnaissent, en l’état, l’importance de ce principe et du droit fondamental de la personne qu’est la liberté religieuse. Pour tous les pratiquants, quelle que soit leur religion, cette pratique n’est pas accessoire, mais essentielle, au sens étymologique du terme. La liberté religieuse ne peut être assimilée à un loisir superflu.
C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, qui vise à rétablir l’accès aux lieux de culte là où c’est possible. Ce serait d’autant plus pertinent que ces lieux présentent moins de risques que les salles de classe, les transports en commun ou les magasins.
Voilà une question importante pour nos concitoyens croyants, quelle que soit leur religion.
Rappelons d’abord que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen fait de la liberté religieuse un droit fondamental pour chacun de nos concitoyens. Il est vrai que la période actuelle a entraîné, pour beaucoup de croyants, une très grande difficulté, qu’ils ont acceptée parce que l’impératif de sécurité sanitaire l’emportait à l’évidence sur toute autre considération. Toutefois, cela devient plus difficile alors que le déconfinement va commencer.
C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, vous avez posé cet après-midi des questions au Premier ministre à ce sujet. Il a accepté de faire évoluer sa position, qui renvoyait à l’origine la réouverture des lieux de culte au mois de juin : il nous a indiqué que la date du 28 mai était désormais à l’étude. On se rapproche donc de l’échéance.
Je voudrais, avant que nous prenions nous-mêmes position sur cette question en tant que législateur, que nous puissions procéder à un dialogue approfondi avec les représentants des cultes. C’est pourquoi j’ai pris l’initiative de leur demander d’être auditionnés par la commission des lois.
Je sais que les positions des représentants des différents cultes peuvent varier, du fait déjà de la nature spécifique de chaque culte. Ainsi, la participation à la messe a, dans la religion catholique, une valeur sacrée qui ne se retrouve pas forcément au même degré dans d’autres cultes.
Il apparaît, au travers des déclarations faites tout à l’heure par le Premier ministre devant le Sénat, que la position du Gouvernement a commencé à évoluer. Après les auditions que nous mènerons la semaine prochaine, j’espère que nous serons en mesure de transmettre à celui-ci une demande plus précise quant à la date et aux modalités de la reprise de l’exercice des cultes. Il faut notamment déterminer les précautions qui devront être prises pour garantir que la réouverture des lieux de culte ne constituera pas un risque de relance de la contamination.
C’est pourquoi, en dépit de toute la compréhension que j’ai pour les motivations de cet amendement, je préférerais qu’il fût retiré pour nous permettre d’aller au terme de ce dialogue et de cette réflexion ; ainsi, les cultes pourraient rouvrir le plus vite possible, par une décision non pas d’autorité, mais venant en quelque sorte consolider les propositions d’organisation que chaque culte serait amené à faire de manière que le déroulement des cérémonies soit tout à fait compatible avec les exigences de sécurité sanitaire.
Je souhaite vous relater, monsieur le ministre, une anecdote qui m’a beaucoup touché.
Il y a quelques semaines, dans ma petite commune rurale, j’ai croisé un monsieur âgé ayant perdu son épouse quelques mois auparavant. Je lui ai demandé comment il allait ; il m’a regardé dans les yeux et, d’un air très agressif que je ne lui connaissais pas du tout, il m’a répondu : « Très mal ! » En effet, comme il me l’a appris, le cimetière de cette petite commune avait été fermé. Or ce cimetière était pour lui un lieu symbolique : il y allait chaque jour mener un dialogue très singulier, au-delà de la mort, en se recueillant sur la tombe de son épouse.
J’ai trouvé cette fermeture absolument idiote. J’imagine qu’elle a été dictée par une mesure nationale. Évidemment, je comprends bien qu’il faille fermer le cimetière du Père-Lachaise, qui est mentionné dans tous les documents diffusés par l’office de tourisme de Paris et accueille des touristes souhaitant voir les tombes de Chopin, d’Apollinaire, de Balzac, de Jim Morrison ou d’Édith Piaf, mais le petit cimetière d’une commune rurale qui reçoit peut-être deux ou trois personnes par jour ?
En matière de déconfinement, pour l’exercice des cultes comme dans bien d’autres domaines, la bonne mesure serait de différencier, de territorialiser la décision. Il faudrait, par exemple, charger le préfet de déterminer avec le maire, l’évêque, l’imam ou le rabbin les conditions de reprise de l’exercice des cultes.
J’estime que la liberté de culte n’est pas moins importante que la liberté de consommer ou de produire. Les pratiquants, quelle que soit leur religion, ne sont pas des citoyens de seconde zone ; entrer dans une église, une synagogue ou une mosquée n’est pas plus dangereux que d’entrer dans une salle de classe, dans une voiture du métro ou dans une grande surface.
Pour autant, je juge excellente la proposition du président Bas et je suis sûr que d’autres signataires de l’amendement y seront aussi sensibles que moi.
Je comprends parfaitement la logique de cet amendement. Cela étant, à entendre l’intervention de M. Retailleau, j’ai eu le sentiment qu’il pensait que les lieux de culte étaient fermés. Or ils sont ouverts !
En revanche, les cérémonies sont interdites, parce qu’elles regroupent un certain nombre de personnes et constituent donc une situation à risque pour la transmission de la maladie.
Si certains cimetières ont été fermés, cela résulte peut-être d’une décision préfectorale ou municipale.
Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.
Quoi qu’il en soit, ce que vous dites à propos de la fermeture d’un petit cimetière communal a du sens. On aurait aimé pouvoir établir une liste de dérogations permettant de répondre à chaque situation, mais l’accumulation de dérogations à la fois territorialisées et spécifiques à tel ou tel type de lieux peut vite conduire à des situations complexes du point de vue de la gestion du profil épidémique. Vous vous souvenez de la polémique au sujet des marchés : nous avions d’abord souhaité permettre à certains d’entre eux de rester ouverts, mais, dès le premier week-end, les images de foules déambulant parmi les étals avaient donné lieu à commentaires.
Quoi qu’il en soit, à partir du 11 mai, les cimetières seront de nouveau accessibles. Quant aux cérémonies religieuses, le Premier ministre s’est exprimé, comme l’a très bien rappelé le président Bas. L’idée est de travailler avec les représentants des cultes. De toute façon, de telles dispositions relèvent du domaine réglementaire ; il ne convient certainement pas de les inscrire dans la loi. Si l’on devait légiférer sur la réouverture de chaque catégorie d’établissements, on n’en aurait pas fini le 11 mai ! Cela dit, le message est passé ; le Premier ministre vous a même déjà répondu.
Je suis extrêmement étonnée que l’on parle avec tant de légèreté de la réouverture des lieux de culte.
Ils sont ouverts, je le répète : on parle plutôt de la reprise des cérémonies.
Rappelons tout de même ce qui s’est passé à Mulhouse : une réunion évangélique y a créé un foyer épidémique qui a entraîné une grande vague de contaminations. En Israël, on a dû fermer les synagogues dans les hauts lieux de l’orthodoxie juive, que ce soit à Bnei Brak, à Tel-Aviv ou à Jérusalem. À New York, la proportion de morts est plus élevée au sein d’une communauté juive orthodoxe qui a continué à prier collectivement ou à étudier les Écritures au sein des académies religieuses pendant l’épidémie.
Enfin, mes chers collègues, on est en pleine pandémie !
(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Les lieux de culte rassemblent plutôt des adultes et même, dans certaines communautés, plutôt des personnes âgées.
Protestations sur les mêmes travées.
Les enfants sont asymptomatiques. §Peut-être faudrait-il réfléchir davantage à cette question.
L’amendement n° 128 rectifié est retiré.
L’amendement n° 132, présenté par Mmes Laborde et M. Carrère, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Au-delà du délai prévu au troisième alinéa de l’article L. 3131-13 du présent code, des dérogations à ces fermetures et réglementations peuvent être admises par le représentant de l’État dans le département à la demande du maire en tenant compte des solutions sanitaires particulières pouvant être mises en œuvre.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Le présent amendement vise à répondre à la crise qui frappe aujourd’hui le secteur culturel en France. M. le Premier ministre a eu une très belle expression en évoquant l’urgence, pour nombre de nos concitoyens, de retrouver « la liberté d’être bouleversés par une œuvre d’art ». Pendant le confinement, beaucoup d’artistes ont joué et jouent encore un rôle précieux auprès de nos concitoyens, en leur permettant de s’évader par la pensée.
Toutefois, nombre de ces artistes – comédiens, musiciens, danseurs… – connaissent aujourd’hui de grandes difficultés financières, alors même que la diversité de leurs régimes sociaux rend plus compliquée encore la mise en place des aides qui leur sont destinées. L’intermittence ne couvre en effet qu’une partie des contrats de toutes les professions du secteur culturel.
Ainsi, pour l’ensemble du secteur, la réouverture paraît être l’aide la plus efficace. Dans tous les territoires où nos concitoyens passeront leurs vacances, la fermeture prolongée de nombreux lieux culturels est une préoccupation majeure. Non seulement ces lieux procurent une expérience esthétique, mais ils accueillent aussi une vie sociale.
Pour toutes ces raisons, nous proposons d’intégrer à l’état d’urgence sanitaire cette disposition équilibrée ; une fois passée la phase initiale, on pourrait ainsi permettre aux maires et aux préfets d’envisager ensemble les modalités sanitaires nécessaires pour la réouverture de certains lieux culturels.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Je comprends ce qu’a voulu exprimer Mme Laborde. Aujourd’hui, au lieu d’offrir à ce secteur de la visibilité et de lui permettre d’anticiper, de s’organiser pour proposer au public de nouvelles formes de participation culturelle ou de passer des commandes, on le laisse au milieu du gué.
Pourtant, il s’agit d’un secteur où l’anticipation est primordiale. Rappelons que c’est normalement à cette époque de l’année que les abonnements se prennent et que les programmations se finalisent. Or les acteurs de la culture ne savent pas ce qui se passera en septembre.
Cet amendement fournit l’occasion d’appeler le Gouvernement à donner des réponses précises et de la visibilité à ce secteur, qui en a autant besoin que les autres. Il est prêt, en responsabilité, à se soumettre à certaines conditions en vue d’assurer la sécurité sanitaire. En Allemagne, par exemple, on a explicitement annoncé que ce serait peut-être une année blanche et que les salles de concert ou de spectacle n’ouvriraient pas pendant une année entière. Au moins, les acteurs peuvent s’organiser, ce qui pour l’heure n’est pas le cas chez nous. Ce chantier doit être très rapidement ouvert : je l’ai dit à M. le ministre de la culture, qui a conscience de l’urgence.
Madame Laborde, je n’ai exprimé, en réponse à votre amendement, qu’un machinal avis défavorable ; j’aurais dû préciser que cet amendement me semble satisfait. En effet, à partir du 11 mai, les lieux culturels recevant du public pourront être rouverts, du moins ceux de petite taille, qui reçoivent un public réduit, pour les raisons que vous imaginez. Il appartiendra aux préfets de déterminer la liste des lieux culturels qui pourront rouvrir, mais elle sera assez longue ! Cela permettra d’ailleurs de redécouvrir certains petits musées, peut-être moins visités que d’autres d’ordinaire. Cela aussi participera de la relance de l’activité culturelle : vous avez raison de souligner, mesdames les sénatrices, que ce milieu souffre beaucoup en cette période de confinement.
Il s’agissait bien sûr d’un amendement d’appel ; je le retire, monsieur le président.
L’amendement n° 132 est retiré.
Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 79, présenté par MM. Jomier, Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
La rédaction actuelle du code de la santé publique autorise la réquisition, par décret réglementaire, de toute personne nécessaire au fonctionnement des services et à l’usage des biens nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire. Le projet de loi tend à supprimer cette exigence de l’utilité à la lutte contre la catastrophe sanitaire. Il pourrait donc désormais être procédé à la réquisition de toute personne.
On ne comprend pas très bien ce que recherche le Gouvernement en élargissant ainsi le champ de la réquisition. Nous proposons donc de revenir à la rédaction actuelle du code de la santé publique et de ne pas ouvrir la possibilité de réquisition de « toute personne » par les préfets. Nous aimerions savoir pourquoi le Gouvernement souhaite supprimer la restriction aujourd’hui inscrite dans le code de la santé publique.
L’amendement n° 75, présenté par MM. Daudigny, Sueur et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
1° Remplacer les mots :
La première phrase du 7° est
par les mots :
Après la première phrase du 7° est insérée une phrase
2° Remplacer les mots :
à la lutte contre la catastrophe sanitaire
par les mots :
à l’identification, l’orientation et l’accompagnement des personnes infectées et des personnes susceptibles de l’être, à la surveillance épidémiologique aux niveaux national et local
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Cet amendement vise à adapter le régime des réquisitions à la constitution de brigades départementales, dans la perspective du déconfinement. Il s’agit de préciser que les personnes concernées sont nécessaires à l’identification, à l’orientation et à l’accompagnement des personnes infectées ou des personnes susceptibles de l’être, ainsi qu’à la surveillance épidémiologique aux niveaux national et local. Les opérations d’enquête et de suivi des individus ne doivent pas se faire uniquement par téléphone. Il convient que ce travail soit effectué également par prises de contact sur le terrain.
L’amendement n° 10 rectifié, présenté par Mmes Guillotin, M. Carrère, Costes et N. Delattre, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty et Gold, Mme Jouve, MM. Roux et Vall et Mme Pantel, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Après le mot :
personne
insérer le mot :
qualifiée
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Le présent amendement vise à préciser davantage le cadre des réquisitions de personnes destinées à former les brigades médicales. Il paraît en effet nécessaire de prévoir dans la loi que ces personnes qui auront à collecter des données médicales sensibles soient bien qualifiées pour le faire.
L’amendement n° 145, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Après le mot :
services
insérer les mots :
et entreprises privées
La parole est à M. Fabien Gay.
Cet amendement nous donne l’occasion d’engager un débat sur les nationalisations.
Je constate un certain mépris du Gouvernement à l’égard du Parlement. Ainsi, s’agissant des 20 milliards d’euros alloués aux entreprises stratégiques, les ministres de Bercy qui se sont succédé ici ont affirmé qu’il n’était pas possible de débattre de ce sujet et de nous communiquer la liste des entreprises concernées. Vingt-quatre heures après les conclusions de la CMP, le ministre de l’économie et des finances annonçait sur TF1 qu’il mettait sur la table 7 milliards d’euros pour Air France et 5 milliards d’euros pour Renault. Aujourd’hui, nous apprenons que l’on refuse 2 milliards d’euros à la SNCF. Nous devons débattre collectivement de cette question des entreprises stratégiques.
Le sujet des nationalisations fait débat, y compris au sein du Gouvernement. Bruno Le Maire a indiqué envisager soit une montée au capital, soit une nationalisation partielle ou totale, et précisé que l’État n’avait de toute façon pas vocation à administrer l’économie. En revanche, le Président de la République a affirmé, lors de son intervention télévisée du 12 mars dernier, que cette pandémie révélait qu’il est des biens et des services devant être placés en dehors des lois du marché.
Sur cette question des nationalisations, monsieur le ministre, partagez-vous plutôt la conception de Bruno Le Maire ou celle du Président de la République ? Quels critères sociaux et environnementaux faut-il retenir ?
La question de notre souveraineté en matière de production de matériels médicaux vous intéresse au premier chef, monsieur le ministre. Par exemple, on a beaucoup parlé de Luxfer ces dernières semaines. On nous a dit qu’il serait trop long de remettre en route cette entreprise, à l’arrêt depuis huit mois. Eh bien prenons le temps nécessaire, investissons, nationalisons Luxfer, car le problème de notre approvisionnement en bouteilles d’oxygène continuera de se poser après l’épidémie. Nous avons besoin d’avoir un débat politique au Parlement, et non sur TF1 !
L’amendement n° 146, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Après le mot :
services
insérer les mots :
et la préemption de tous les masques disponibles par les sociétés commerciales
La parole est à M. Fabien Gay.
Je n’entrerai pas dans la polémique de ces derniers jours sur la vente de masques par la grande distribution. Je ne sais pas s’il existe des stocks cachés et, à vrai dire, ce n’est pas mon problème. En revanche, je constate que des hôpitaux de proximité, notamment en Seine-Saint-Denis, manquent encore de matériel, en particulier de masques.
Dans quelques jours, avec le déconfinement, on va demander aux Françaises et aux Français de reprendre le chemin du travail et d’emprunter les transports en commun. Or nos compatriotes ne sont toujours pas pourvus de masques. Dans ces conditions, la réquisition des 400 millions de masques dont dispose la grande distribution ne doit pas être un tabou. La réquisition n’est pas une spoliation. Dans un second temps, il faudra se demander comment la grande distribution a pu se procurer en quelques jours autant de masques, quand l’État n’est toujours pas en mesure de répondre aux besoins dans de nombreux territoires.
Se pose également la question du prix. Avant la crise, les masques coûtaient moins de 7 centimes pièce. Voilà quinze jours, Mme Pannier-Runacher nous disait ne pas envisager de fixer un prix, pour ne pas freiner l’innovation. Aujourd’hui, on établit un plafond à 95 centimes ! Si nous sommes en temps de guerre, alors il y a des profiteurs ! Pour une famille française de quatre personnes, le coût des masques n’est pas négligeable, surtout dans le contexte actuel de chômage partiel et d’aggravation de la précarité : à 29, 50 euros la boîte de cinquante masques dans la grande distribution, sachant qu’il faut deux masques par jour, cela fait 118 euros par mois. Si les masques sont absolument nécessaires, ils doivent être remboursés par la sécurité sociale, en premier lieu pour les familles les plus précaires ! Si des stocks existent, ils doivent être réquisitionnés.
L’amendement n° 76, présenté par MM. Daudigny, Sueur et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ces décisions de réquisition sont rendues publiques.
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
L’amendement n° 11 rectifié, présenté par Mmes Guillotin, M. Carrère, Costes et N. Delattre, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty et Gold, Mme Jouve, MM. Roux et Vall, Mme Pantel et M. Guérini, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Un décret fixe les qualifications et les conditions de rémunération des personnes réquisitionnées et fonction de la mission justifiant la réquisition.
La parole est à Mme Véronique Guillotin.
Le présent amendement vise à clarifier par décret les conditions de réquisition du personnel des brigades médicales. L’article L. 3131-15 du code de la santé publique prévoyant un régime des tarifs de réquisition pour les biens et services, il est ici proposé de préciser par décret les règles de rémunération des personnes réquisitionnées.
L’amendement n° 133, présenté par Mme Laborde, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Au-delà du délai prévu au troisième alinéa de l’article L. 3131-13 du présent code, le représentant de l’État dans le département peut procéder sur sollicitation du maire à des réquisitions destinées à garantir la continuité des services publics locaux.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Cet amendement vise à renforcer la concertation entre maires et préfets, dans les phases de prorogation d’un état d’urgence, en matière de réquisitions.
Lors de son audition devant la commission des lois du Sénat, le Défenseur des droits, Jacques Toubon, a exprimé sa préoccupation quant à la situation des enfants de familles très modestes, pour qui la privation de cantine signifie aussi parfois, malheureusement, la fin de la possibilité de faire un vrai repas par jour. Il recommande la réquisition de services de restauration pour trouver des solutions d’aide alimentaire à destination de ces enfants. Cet amendement vise donc à permettre aux maires de solliciter le préfet pour envisager de telles réquisitions.
Le Gouvernement a souhaité modifier le texte que nous avions adopté le 23 mars dernier sur le point de la réquisition des personnes ; je souhaiterais que le ministre nous en explique plus précisément les raisons. Notre texte conditionnait la réquisition de personnes à celle de biens et de services leur étant liés. Le Gouvernement veut pouvoir réquisitionner des personnes sans avoir à réquisitionner l’organisme dont ces personnes dépendent. Il s’est en effet heurté à des difficultés pour réquisitionner des médecins d’agences régionales de santé, se trouvant obligé de réquisitionner les ARS elles-mêmes, ce qui est évidemment un peu curieux…
Le point de départ me paraît donc assez mince et anecdotique. Pour tout le reste, nous avons déjà adopté la mesure que ces amendements tendent à modifier. Notre position peut bien sûr évoluer par rapport à notre vote d’il y a six semaines, mais je tenais tout de même à rappeler ces éléments afin de fixer le cadre de notre débat sur ce sujet important des réquisitions.
L’amendement n° 79 vise à rétablir le texte que nous avions adopté le 23 mars. Je n’ai pas de raison majeure de m’y opposer. Toutefois, ce matin, pour être agréable au Gouvernement et parce qu’elle a jugé son texte acceptable, la commission des lois a adopté la rédaction proposée. Je n’émettrai donc pas un avis favorable sur cet amendement.
L’amendement n° 75 vise à ce que la réquisition de personnes ne soit possible que pour la constitution des fameuses « brigades sanitaires », expression inspirée d’une formule du professeur Delfraissy, reprise par le Gouvernement pour expliquer qu’on allait mobiliser un certain nombre d’agents afin de remonter la filière des contaminations, depuis les porteurs du virus jusqu’aux personnes qu’elles ont rencontrées dans les jours précédant le test de dépistage. Je ne vois pas vraiment de raisons de restreindre à ces brigades sanitaires, qui n’ont pas de statut particulier, la réquisition de personnes. La commission a donc émis un avis défavorable.
L’amendement n° 10 rectifié tend à ce que l’on ne puisse réquisitionner que des personnes « qualifiées ». Nous pourrions certes retenir cet adjectif, mais cela n’est pas nécessaire. De fait, on ne va pas utiliser ce dispositif si particulier pour réquisitionner des gens qui n’ont pas de qualification. On a plutôt besoin de gens qualifiés pour lutter contre le Covid-19 ! L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° 145 vise à permettre la réquisition des entreprises privées dont les productions seraient utiles à la lutte contre le fléau sanitaire du Covid-19. Or c’est déjà possible, la formule « biens et services » couvrant évidemment toutes les entreprises. Votre amendement me semble donc satisfait, monsieur Gay, et j’espère que vous accepterez de le retirer. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
L’amendement n° 146 a trait à un sujet d’une particulière actualité. Beaucoup de nos concitoyens considèrent en effet que des stocks de masques ont probablement été constitués dans des entreprises de la grande distribution et se demandent pourquoi ils n’ont pas été réquisitionnés. Le Gouvernement s’est expliqué sur le sujet, mais cette question est parfaitement légitime. Ne sachant rien de la réalité de ce soupçon, tout ce que je peux dire, c’est que nous avons déjà conféré au Gouvernement le pouvoir de réquisitionner des stocks de masques par la loi du 23 mars dernier. Cet amendement me semble donc satisfait, c’est pourquoi je suggère son retrait.
L’amendement n° 76 prévoit que les décisions de réquisition doivent être rendues publiques. Or c’est déjà le cas, car elles sont prises par voie d’arrêtés, lesquels sont publiés. Là encore, je suggère le retrait de l’amendement, qui n’est pas nécessaire.
L’amendement n° 76 est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
L’amendement n° 11 rectifié part d’une intention très louable : ses auteurs souhaiteraient que le régime d’indemnisation des personnes réquisitionnées soit précisé par décret. Cependant, la loi, qui renvoie au code de la défense, permet au Gouvernement de prendre par décret des mesures d’indemnisation des personnes réquisitionnées – s’il n’en était pas ainsi, ce serait grave, et même inconstitutionnel de mon point de vue –, et je n’ai pas entendu dire que celles-ci ont exprimé un quelconque mécontentement à l’égard des rémunérations qui leur ont été accordées. Par conséquent, là encore, je demanderai le retrait de cet amendement : la question est en principe réglée, j’espère que le ministre nous le confirmera.
Enfin, l’amendement n° 133 vise à autoriser le préfet à procéder à des réquisitions pour assurer la continuité des services publics locaux. Vous avez prévu, madame Laborde, que cela serait possible au bénéfice des communes, mais pas des départements et des régions. Cela suscite une première réserve de la part de la commission des lois. Par ailleurs, je ne comprends pas pourquoi cette possibilité ne vaudrait pas pour le premier mois de l’état d’urgence sanitaire. L’avis est défavorable.
Le président Bas m’a soufflé toutes mes réponses, ce qui est plutôt bon signe…
Le texte initial était effectivement sans doute mal rédigé. En effet, comme vous l’avez très bien expliqué, monsieur le président Bas, pour pouvoir réquisitionner un médecin, il fallait aussi réquisitionner son hôpital ou son ARS de rattachement…
Comme M. Bas, je relève que la moitié des amendements au moins sont déjà satisfaits, s’agissant notamment de la publication des réquisitions ou de leurs modalités.
Je ne relancerai pas le débat sur les masques à cette heure, mais nous appliquons le droit de réquisition à l’échelle nationale, depuis le 3 mars, et parfois au niveau territorial, ce qui a pu nous être reproché, quelquefois pour de bonnes raisons.
On peut critiquer la logistique, qui pourrait être plus fluide, mais je crois profondément en l’État, comme les sénateurs communistes, me semble-t-il.
« Nous aussi ! » sur diverses travées.
On peut certainement considérer que les choses ne sont pas allées assez vite, mais ce n’est pas la faute de l’État : les usines chinoises étaient fermées ! Rendez-vous compte de la situation en février et au début du mois de mars : aucun pays en Europe n’arrivait à faire face aux besoins, et je ne vous parle même pas de la situation outre-Atlantique ! L’État français a passé des commandes massives, jusqu’à 2 milliards de masques. Une fois les usines chinoises rouvertes, elles ont commencé à tourner à plein régime pour produire massivement des masques. Nous avons mis en place un pont aérien : jusqu’à dix Antonov par semaine ramènent chacun de Chine des millions de masques, qui sont ensuite répartis entre les pharmacies ou les hôpitaux et distribués gratuitement aux soignants. Croyez-vous vraiment qu’au même moment des groupes privés constituent des stocks de 300 millions ou 400 millions de masques en vue de les vendre au public avec profit ? On ne peut pas décemment penser une chose pareille !
Je ne sais pas depuis combien de temps la grande distribution fait venir des masques ni de quels stocks elle dispose. Elle me dit que de nombreuses commandes restent à livrer. Comme l’a dit le Premier ministre, nous faisons la différence entre commandes et stocks ! La situation a changé depuis deux ou trois semaines. L’État a fait rentrer plus de 400 millions de masques et en distribuera 100 millions la semaine prochaine. Tant mieux si la Chine produit plus de masques, tant mieux si le secteur public, le secteur privé, les collectivités et les hôpitaux parviennent maintenant à faire rentrer des masques de protection pour les soignants et, demain, pour la population ! C’est une bonne nouvelle, mais si nous ne pouvions pas nous procurer de masques hier, ce n’est pas parce que nous étions mauvais, c’est parce que la situation était plus grave.
Nous avons mis à disposition des Français, jour après jour, semaine après semaine, la liste des carnets de commandes. Je l’ai dit au secteur de la grande distribution, le décret de réquisition m’autorise à réquisitionner tous les masques au-delà de 5 millions par trimestre et par société. D’ailleurs, la grande distribution elle-même et de nombreux groupes privés et collectivités ont mis à la disposition des hôpitaux et des soignants des masques qu’ils avaient en stock.
J’ai bien compris que l’on cherchait des responsables face à une situation qui nous dépasse et qui est invivable pour les Français. C’est le réflexe habituel, dont acte. Nous avons débattu pendant plus d’une heure de la responsabilité des élus. Le contrôle et l’évaluation font partie des règles de la vie publique. Personne ne cherche à se dédouaner au niveau de l’État, mais rendons grâce à toutes les équipes qui se sont démenées au sein de mon ministère, des agences régionales de santé ou des compagnies aériennes pour éviter une pénurie de masques dans nos hôpitaux. Dans certains pays, il est arrivé que l’on manque de masques. En France, nous avons connu des tensions, les soignants de ville ont été confrontés à de grandes difficultés, mais reconnaissons ce qui a été fait pendant cette période.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je retire les amendements n° 10 rectifié et 11 rectifié, monsieur le président.
Les amendements n° 10 rectifié et 11 rectifié sont retirés.
Je mets aux voix l’amendement n° 145.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 133 est retiré.
L’amendement n° 50, présenté par MM. Durain, Sueur, Jacques Bigot, Marie, Montaugé, Kerrouche et Kanner, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Leconte, Sutour et Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes Féret, M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mmes Grelet-Certenais et Guillemot, MM. Houllegatte et Jacquin, Mme Jasmin, MM. P. Joly et Jomier, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mmes Meunier, Monier, Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mmes Rossignol et Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Tourenne et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le 7° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il est interdit d’utiliser les biens nécessaires à la lutte contre la catastrophe sanitaire à des fins de communication institutionnelle ou électorale. » ;
La parole est à M. Jérôme Durain.
Le ministre l’a rappelé à plusieurs reprises, le Covid-19 a causé la mort de 25 000 personnes dans notre pays. À propos des masques, on a pu parler de défaut de coordination ou d’organisation. Le masque est devenu, dans l’espace public, un objet symbolisant tant nos succès que nos insuffisances. À la faveur de cette guerre des masques, certains présidents d’exécutif de diverses sensibilités ont voulu signifier bruyamment l’efficacité de leur action pour se procurer ce bien qui revêt une importance toute particulière dans cette crise sanitaire. Les membres du groupe socialiste et républicain considèrent qu’il est assez déplacé et mal venu, voire indécent, de distribuer des masques d’une façon tapageuse, à la limite de la communication électorale. Certains exécutifs locaux n’ont pas hésité à communiquer par lettres sur ce sujet. Par égard pour les personnes qui ont été malades ou qui ont perdu des proches, il conviendrait que les distributions de masques soient plus discrètes et ne donnent pas lieu à une récupération politique.
La commission des lois a donné un avis défavorable à cet amendement pour deux raisons.
Tout d’abord, il est d’ores et déjà interdit de faire de la communication électorale aux frais d’une collectivité. Procéder ainsi donnerait lieu à une réintégration des dépenses correspondantes dans le compte de campagne du candidat concerné et aurait des conséquences graves en cas d’élection de celui-ci.
Ensuite, je vous invite à la prudence, mon cher collègue, quant au recours à la notion de communication institutionnelle. Une institution, une entreprise, une collectivité peut très bien être mue par un objectif qui n’est pas complètement altruiste, mais vouloir montrer qu’elle sert l’intérêt général, en assumant son geste et en le rendant public au lieu d’agir avec discrétion. Ce n’est sans doute pas idéal dans une perspective morale, mais devons-nous pour autant prendre le risque de la dissuader de faire ce geste, parce qu’il nous déplaît qu’elle le fasse de manière intéressée ? Si nous avons réellement besoin de masques, il n’y a pas de raison de pénaliser, en leur reprochant de mauvaises intentions, les institutions qui souhaitent en distribuer. Je préfère de beaucoup, à titre personnel, que l’on fasse montre d’une parfaite discrétion lorsque l’on veut faire acte de générosité aux frais du contribuable ou de l’entreprise, mais, si ce n’est pas le cas, cela ne justifie pas à mes yeux que l’on prive nos concitoyens de masques, alors que l’on en a tant manqué.
Monsieur le sénateur Durain, personnellement, il ne me viendrait pas à l’idée de floquer des masques ou du matériel de protection du logo d’un ministère, d’une collectivité ou même d’un pays. Je rejoins donc tout à fait le président Bas : décidément, nous sommes souvent d’accord ce soir ; tant mieux ! Apposer sa marque personnelle sur du matériel destiné à protéger les autres est, à mon sens, déplacé. Pour autant, comme vient de l’indiquer le président Bas, une telle précision n’a rien à faire dans la loi sur l’état d’urgence sanitaire. Vous vouliez sans doute faire passer un message, monsieur le sénateur ; vous voyez qu’il est partagé au-delà de votre groupe ! Avis défavorable.
Jérôme Durain a très bien fait de soulever ce problème de méthode politique et de comportement, mais instaurer une interdiction législative me paraît disproportionné.
Pour autant, avec un zeste de malignité, je ferai remarquer au président Bas que, si une personne en campagne électorale aujourd’hui sera effectivement rattrapée par la patrouille si elle a l’imprudence de faire figurer son nom sur des masques, en revanche un président d’exécutif départemental ou régional est plus à l’aise de ce point de vue, l’élection le concernant ne devant avoir lieu que dans dix mois et demi ; cela n’a pas échappé à certains…
Je salue les propos de M. Bas –c’est beau comme l’antique ! –, ainsi que la pureté de M. le ministre, mais je partage pleinement la préoccupation de M. Durain. Regardons la réalité des choses ! De nombreux exemples nous montrent qu’il n’a pas échappé à certains candidats aux élections municipales que distribuer des masques ou du gel hydroalcoolique pouvait permettre de se faire valoir. Je vous assure que je n’invente rien ! En particulier, des maires en situation difficile ne manquent pas de promouvoir ainsi tous les jours leur action, cependant que leurs concurrents sont très démunis, n’ayant pas le même poids institutionnel.
Il me semble tout à fait positif que le signal d’alarme ait été tiré au Sénat et qu’un débat ait pu se tenir sur ce sujet, parce qu’il est particulièrement odieux d’utiliser la catastrophe en cours à des fins électorales. Pour certains, malheureusement, la tentation existe !
Pour être tout à fait honnête, je me suis abstenu de procéder sur ce sujet à des investigations trop poussées, de peur de découvrir que certains de mes amis ou moi-même aurions procédé ainsi à l’occasion de campagnes assez récentes… Cet amendement ne vise donc personne en particulier ; tout le monde peut être concerné. Les propos tenus par les uns et les autres répondent au souhait qui était le mien d’appeler l’attention sur la nécessité de faire profil bas en la matière.
Dans ces conditions, je retire l’amendement.
L’amendement n° 50 est retiré.
L’amendement n° 93, présenté par Mme Lubin, MM. Kerrouche, Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mme Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après le 7°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Prendre toute mesure pour assurer la sécurité alimentaire des personnes en situation de fragilité sociale ; »
La parole est à Mme Corinne Féret.
Cet amendement, dont la première signataire est notre collègue Monique Lubin, vise à compléter le champ d’application du texte, en permettant au Gouvernement de prendre toute mesure pour assurer la sécurité alimentaire des personnes en situation de fragilité sociale.
L’état d’urgence sanitaire ne peut avoir pour conséquence d’affamer les plus vulnérables de notre société. Assurer que nos concitoyens qu’ils ne souffriront pas de la faim durant l’épidémie doit faire partie de l’arsenal des mesures visant à garantir la santé publique pendant l’état d’urgence sanitaire.
Nous le savons, le nombre des demandeurs d’une aide d’urgence augmente très fortement et les associations caritatives nous alertent sur l’apparition de nouveaux profils, notamment des familles et des personnes plus jeunes. Le secrétaire national du Secours populaire parle d’un véritable tsunami de précarité s’abattant sur la France confinée. Cette recrudescence des besoins en matière d’aide alimentaire démontre que l’état d’urgence sanitaire est aussi un état d’urgence sociale ; le Gouvernement se doit d’y répondre.
La commission est tout à fait sensible à la nécessité de garantir l’aide alimentaire pendant l’état d’urgence, mais cela ne relève pas de ce texte. L’avis est donc défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 161, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Le même 8° est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le prix des masques de type chirurgical à usage unique répondant à la définition de dispositifs médicaux, quelle que soit leur dénomination commerciale, des gels et des solutions hydroalcooliques ne pourront être supérieurs à ceux constatés au 1er décembre 2019, et ce quel que soit le mode de distribution, y compris en cas de vente en ligne.
« Les prix des masques réutilisables en tissu sont encadrés ; »
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Cet amendement qui vise à plafonner le prix des masques et du gel hydroalcoolique a déjà été excellemment défendu par mon collègue Fabien Gay.
Cet amendement est satisfait par le droit existant. Le Gouvernement en demande donc le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 160, présenté par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après le même 8°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Mettre en œuvre, en tant que de besoin, les mesures définies par le code de commerce aux fins d’assurer la régularité et la sécurité des opérations commerciales relatives aux produits alimentaires ainsi qu’aux produits de première nécessité ; »
La parole est à M. Pierre Laurent.
Cet amendement vise à renforcer le contrôle de certains prix, à défaut de pouvoir les bloquer. Il n’a échappé à personne que, depuis le début du confinement, les prix se sont envolés, singulièrement ceux des produits alimentaires. L’UFC-Que choisir a publié un tableau extrêmement éloquent qui fait état d’augmentations allant de 4 % à 25 % sur un mois, alors que des millions de familles connaissent des difficultés croissantes, notamment pour se nourrir correctement. Il est donc nécessaire de prendre des mesures supplémentaires et plus vigoureuses en matière de contrôle des prix.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 183 rectifié, présenté par MM. Magras et Darnaud, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après le 10°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Subordonner à des examens de dépistage l’entrée sur le territoire des collectivités énumérées à l’article 72-3 de la Constitution. Ces examens sont à la charge des personnes entrantes. »
La parole est à M. Mathieu Darnaud.
Nous avons évoqué la situation de Wallis-et-Futuna et touché ainsi du doigt les différences qui existent entre territoires ultramarins au regard de la crise sanitaire. Certains de nos compatriotes, en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie, ont déjà été déconfinés. À Saint-Barthélemy, le virus ne circule plus depuis le 21 avril.
Cet amendement, dont notre collègue Michel Magras est à l’initiative, vise à proposer une base légale pour la mise en place de dépistages systématiques à l’entrée sur certains territoires ultramarins qui souhaitent s’engager dans cette stratégie.
Cet amendement, comme d’autres présentés par des collègues représentant les Français de l’étranger, soulève un problème très intéressant : peut-on faire l’économie de la mise en quarantaine si un test de dépistage est réalisé à l’arrivée sur le territoire ?
Il serait évidemment satisfaisant de pouvoir répondre par l’affirmative, mais nous devons toujours garder à l’esprit qu’un test négatif n’est pas une garantie absolue que la personne n’est pas porteuse du virus et qu’elle ne va pas contaminer d’autres individus.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous allons demander à tous nos concitoyens qui auront été des « cas contacts », comme l’on dit dans le jargon des épidémiologistes, de rester chez eux pendant quatorze jours sur prescription médicale, même si le test de dépistage a donné un résultat négatif. En effet, la personne testée peut tout à fait être en période d’incubation – période dont nous ne connaissons pas la durée – ou le test peut être défaillant et ne pas avoir donné un résultat correct.
Comme le disent régulièrement aux Français le ministre, les médecins et les responsables de la santé publique, il faut agir très rapidement si nous voulons juguler le fléau. Or, si nous laissons une personne dans la nature pendant quelques jours au motif que son test est négatif, elle peut très bien contaminer beaucoup d’autres gens jusqu’à ce que la maladie se révèle ou qu’un nouveau test montre qu’elle est porteuse du virus.
C’est pourquoi la commission des lois comme la commission des affaires sociales ont donné un avis défavorable à l’ensemble des amendements qui prévoient d’exonérer de toute contrainte une personne dont le test de dépistage serait négatif. Il serait beaucoup plus simple de régler le problème de cette manière à l’aéroport, lors de l’arrivée des passagers, mais on ne peut malheureusement pas procéder ainsi.
Comme l’a très bien expliqué le président Bas à l’instant, un test négatif réduit la probabilité que la personne soit malade, mais ne l’annule pas complètement. Si vous avez été contaminé la veille de prendre l’avion, il n’y a aucune chance que le test soit positif, mais vous pourrez transmettre le virus les jours suivants, que vous ayez des symptômes ou non. De ce fait, lorsque vous arrivez sur un territoire comme Wallis-et-Futuna qui n’a jamais connu aucun cas, vous pouvez déclencher une épidémie si vous n’avez pas observé une quatorzaine. La quatorzaine n’est pas un moment agréable, mais elle est absolument indispensable pour protéger les populations.
Le test n’est qu’un moyen diagnostique parmi d’autres, il n’est pas l’alpha et l’oméga d’une politique de santé publique et ne peut remplacer le confinement, la quarantaine ou l’isolement. Nous réaliserons dans les semaines à venir davantage de tests, comme nous y invite l’OMS, afin notamment de confirmer biologiquement des diagnostics qui ne le sont jusqu’à présent que cliniquement, mais cela ne changera pas fondamentalement la politique à suivre en matière de quatorzaine, de quarantaine ou d’isolement.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je ne suis pas complètement d’accord avec ce que vous venez de dire. Pourquoi ne pas autoriser les autorités locales d’un territoire comme Saint-Barthélemy, où le virus ne circule plus, à mettre en place un dépistage systématique ?
Je ne suis pas totalement convaincu par les réponses que vous venez d’apporter, mais je retire l’amendement.
L’amendement n° 183 rectifié est retiré.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous propose de poursuivre la séance durant environ trois quarts d’heure. Nous serons amenés à siéger mardi après-midi, et éventuellement le soir, afin de pouvoir débattre de manière approfondie de ces sujets importants.
Je suis saisi de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 13 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère, Costes et N. Delattre, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty et Gold, Mme Jouve et MM. Roux, Vall et Guérini, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« II. – Les mesures ayant pour objet la mise en quarantaine, le placement et le maintien en isolement, ne peuvent intervenir que lors de l’entrée sur le territoire national ou lors de l’arrivée dans l’une des collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution ou dans la collectivité de Corse, ou en provenance de l’une de ces collectivités, après la constatation médicale de l’infection de la personne concernée. En l’absence de disponibilité de moyens médicaux destinés à établir cette contestation dûment notifiée, les personnes ayant séjourné dans une zone de circulation de l’infection listée par décret peuvent être soumises à cette mesure à titre préventif.
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps l’amendement n° 12 rectifié bis.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° 12 rectifié bis, qui fait l’objet d’une discussion commune avec huit autres amendements.
L’amendement n° 12 rectifié bis, présenté par Mmes M. Carrère, Costes, N. Delattre et Guillotin, M. Labbé, Mme Laborde, MM. Requier, Cabanel, Collin, Dantec, Gabouty et Gold, Mme Jouve et MM. Roux, Vall et Guérini, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« II. – Les mesures ayant pour objet la mise en quarantaine, le placement et le maintien en isolement, ne peuvent intervenir que lors de l’entrée sur le territoire national ou lors de l’arrivée dans l’une des collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution ou dans la collectivité de Corse, ou en provenance de l’une de ces collectivités, après la constatation médicale de l’infection de la personne concernée.
Veuillez poursuivre, monsieur Requier.
Nous considérons que les tests devraient toujours être préférés à une mesure privative de liberté. Nous sommes donc opposés à ce que des personnes en provenance de l’étranger, a fortiori nos concitoyens des outre-mer, soient soumises à des mesures de mise en quarantaine ou à l’isolement, alors même qu’elles pourraient être testées à leur arrivée sur le territoire national. La préservation de la liberté justifie d’engager des dépenses pour disposer de tests en nombre suffisant.
L’amendement n° 12 rectifié bis prévoit donc que les décisions en la matière ne peuvent intervenir sans constatation médicale, tandis que l’amendement de repli n° 13 rectifié bis prévoit une solution intermédiaire : la possibilité de quarantaine ou d’isolement en l’absence de test, donc uniquement en dernier recours.
L’amendement n° 195, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Après la référence :
insérer la référence :
du I
La parole est à M. le rapporteur.
L’amendement n° 111, présenté par MM. Sueur, Daudigny et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Après les mots :
en isolement
insérer les mots :
dont la durée totale ne peut excéder un mois
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
L’amendement n° 40, présenté par M. Rapin, Mmes Di Folco et C. Fournier, M. Bascher, Mme Gruny, MM. Paccaud et Lefèvre, Mme Lherbier, MM. Vanlerenberghe et Daubresse, Mme Duranton, MM. de Nicolaÿ et Regnard, Mmes Deroche et Lamure, MM. Husson, Mandelli, Bouchet, Savary, Gremillet, Courtial, Brisson et J.M. Boyer, Mme Deromedi, MM. Bonhomme, Duplomb, H. Leroy, Cuypers et Piednoir, Mme Imbert, MM. Meurant, Pierre, Danesi et Charon et Mme Lassarade, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Après les mots :
viser que
insérer les mots :
les personnes en situation irrégulière, d’ores et déjà présentes sur le territoire national, ou
La parole est à Mme Catherine Di Folco.
Cet amendement, dont le premier signataire est Jean-François Rapin et qui reprend une préoccupation exprimée par Mme Bouchart, maire de Calais, vise à étendre aux personnes en situation irrégulière, mais d’ores et déjà présentes sur le territoire national, la mesure de placement en quarantaine prévue à l’article 2 du projet de loi.
Depuis un mois, une opération de mise à l’abri de la population migrante a été déployée dans le Pas-de-Calais, mais cette mesure repose sur le volontariat, ce qui ne permet pas d’atteindre les objectifs sanitaires visés. Seulement 400 logements d’accueil ont été proposés, et uniquement dans le département du Pas-de-Calais, pour quelque 800 migrants. Un grand nombre de personnes en situation irrégulière continuent de se déplacer sur le territoire du Calaisis sans respecter les gestes barrières et les mesures de distanciation physique imposés à l’ensemble de la population.
Il semble donc urgent d’imposer un placement en quarantaine de cette population migrante afin de réduire au maximum la circulation du virus. De plus, la solidarité nationale doit jouer pour que l’accueil de ces personnes ne soit pas concentré sur le territoire d’un unique département.
L’amendement n° 129 rectifié, présenté par Mmes M. Carrère, Costes et Laborde, MM. Requier, Collin, Roux et Gabouty, Mme Jouve, M. Vall et Mme Pantel, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Supprimer les mots :
ou arrivent sur le territoire hexagonal en provenance de l’une de ces mêmes collectivités
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Cet amendement vise, d’une part, à supprimer la notion de territoire hexagonal, qui ne renvoie à aucune notion juridique précise, et, d’autre part, à permettre à nos concitoyens d’outre-mer de bénéficier des mêmes possibilités d’accès à l’ensemble du territoire que les résidents de Corse. Nous pensons notamment aux habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui sont contraints de transiter par le Canada pour rejoindre la métropole faute d’offre de transport aérien direct. Introduire une différence entre les territoires d’outre-mer, souvent insulaires, nous paraît totalement injustifié.
L’amendement n° 101, présenté par M. Lurel, Mme Jasmin, MM. Daudigny, Sueur et Kanner, Mme Rossignol, MM. Jacques Bigot, Durain et Fichet, Mmes de la Gontrie et Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et Sutour, Mmes Féret et Grelet-Certenais, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mme Van Heghe, M. Antiste, Mme Artigalas, MM. Assouline, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, M. Bourquin, Boutant et Carcenac, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Courteau, Dagbert, Daunis, Devinaz, Duran et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mmes M. Filleul et Ghali, M. Gillé, Mme Guillemot, MM. Houllegatte, Jacquin et P. Joly, Mme G. Jourda, M. Lalande, Mme Lepage, MM. Lozach, Magner, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes Perol-Dumont et Préville, M. Raynal, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Taillé-Polian, MM. Temal et Tissot, Mme Tocqueville, MM. Todeschini, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
qu’à la suite de l’organisation des examens de biologie médicale de dépistage et la collecte de leurs résultats sur les personnes concernées
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Cet amendement va dans le même sens que celui de M. Magras : il s’agit de subordonner la mise en quarantaine à la réalisation de tests.
Dans un monde idéal, on pourrait imaginer que l’on teste la personne à son arrivée sur le territoire national, avant de lui imposer une période d’isolement de cinq jours, soit la durée moyenne d’incubation, puis de réaliser un second test à la fin de cette période. Si les deux tests sont négatifs, on pourra considérer la période d’incubation comme passée et réduire la quarantaine à cinq jours. Pour autant, nous avons conscience qu’une telle procédure serait lourde, et j’imagine que la réponse du rapporteur et du ministre sera la même que tout à l’heure…
L’amendement n° 2 rectifié bis, présenté par MM. Decool, Wattebled, Menonville, Longeot et Chasseing, Mme Mélot, M. Lagourgue, Mme Loisier, MM. Bonne et Kern et Mmes Garriaud-Maylam et Goy-Chavent, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les mesures ayant pour objet la mise en quarantaine, le placement et le maintien en isolement peuvent également intervenir pour les personnes en situation irrégulière déjà présentes sur le territoire national.
La parole est à M. Dany Wattebled.
Cet amendement vise à étendre les mesures de confinement aux personnes en situation irrégulière déjà présentes sur le territoire national. Cette disposition trouverait une application toute particulière dans les territoires touchés par la crise sanitaire et connaissant un afflux important de personnes en situation irrégulière, dont la mise à l’abri sur la base du volontariat n’a pas été efficace.
Ainsi, dans les Hauts-de-France, le Calaisis connaît un regain de tensions dû à la pression migratoire dans un contexte de crise sanitaire. Les déplacements de personnes en situation irrégulière qui ne peuvent pas respecter les consignes sanitaires – mesures de distanciation sociale et gestes barrières – laissent craindre une propagation plus rapide de l’épidémie, malgré le respect des mesures par l’ensemble de la population. Il semble indispensable que l’État prenne ses responsabilités afin de faire respecter les consignes sanitaires à des populations démunies et de rassurer les habitants du Calaisis.
L’amendement n° 123, présenté par Mmes Garriaud-Maylam et Deromedi et MM. Regnard et Frassa, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La durée de la mise en quarantaine des Français établis à l’étranger qui se rendent sur le territoire national est limitée au temps strictement nécessaire à la réalisation d’un examen de biologie médicale de dépistage du covid-19 et à l’obtention de son résultat ; la mise en quarantaine de la personne concernée ne peut excéder cette durée que si elle a expressément renoncé à l’examen de dépistage.
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Cet amendement porte également sur les conditions de la quarantaine. J’ai parlé des Français expatriés ; je pense aussi aux étrangers qui viennent en France. Nous devons absolument réussir le déconfinement pour préserver notre économie, et j’avoue être très inquiète pour le secteur du tourisme, qui représente, je le rappelle, 7, 5 % de notre PIB.
Dans cette perspective, nous devons vraiment essayer de trouver les moyens de réduire la période de quarantaine en recourant à des tests, sinon l’effet dissuasif sera trop important pour les étrangers qui souhaitent visiter notre pays et les Français de l’étranger qui veulent revenir.
L’amendement n° 124, présenté par Mmes Garriaud-Maylam et Deromedi et MM. Regnard et Frassa, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le fait, pour une personne résidant à l’étranger de se rendre sur son lieu habituel de travail situé en France ou, pour une personne résidant en France, de revenir de son lieu habituel de travail situé à l’étranger n’est pas considéré comme une entrée sur le territoire national au sens du présent alinéa.
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Cet amendement concerne les frontaliers, mais le problème semble résolu : le président Bas m’a indiqué qu’ils n’auront pas à subir de quarantaine. Je retire donc l’amendement.
L’amendement n° 13 rectifié bis pose le même problème que celui que Mathieu Darnaud a bien voulu retirer : il repose sur une foi excessive dans la valeur des tests de dépistage pour protéger la population contre les risques de contamination. C’est la raison pour laquelle je demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer.
L’amendement n° 12 rectifié bis tend à limiter les mesures de quarantaine aux personnes chez lesquelles l’infection a été constatée. Or la quarantaine est une mesure de prudence qui vise surtout les personnes n’étant pas dans ce cas. Quand l’infection a été constatée, on recourt plutôt au placement à l’isolement, qui n’obéit pas aux mêmes règles que la quarantaine. C’est pourquoi je demande aussi le retrait de cet amendement.
L’amendement n° 111 est satisfait par le texte de la commission, qui prévoit déjà une durée maximale d’un mois. Il me semble par conséquent que vous pourriez retirer votre amendement, monsieur Sueur.
L’amendement n° 40 soulève le problème des migrants en situation irrégulière circulant dans le Calaisis. Ces migrants vivant dans des conditions de grande précarité, les risques de contamination s’en trouvent accrus, pour eux-mêmes et pour leur entourage. Pour autant, le Gouvernement dispose d’autres moyens que la mise en quarantaine.
J’ajoute que si nous adoptions cette disposition, le Gouvernement ne serait nullement contraint de la mettre en œuvre, pas plus qu’il ne met en œuvre les mesures d’assignation à résidence qui sont à sa disposition. C’est une question de volonté politique : le Gouvernement est-il prêt, monsieur le ministre, à traiter, en recourant aux dispositifs déjà existants, le cas des étrangers en situation irrégulière ? Si vous me répondez par la négative, il est clair que le vote par le Parlement d’une disposition prévoyant la mise en quarantaine des migrants en situation irrégulière resterait de toute façon sans effet.
En conclusion, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Pour autant, le Gouvernement ne doit pas s’en tirer à si bon compte ! Nos collègues ont parfaitement identifié un véritable problème, même si la solution qu’ils proposent ne me paraît pas adaptée à la situation spécifique de personnes qui sont souvent présentes depuis un certain temps sur le territoire national.
Sur l’amendement n° 129 rectifié, je demande à connaître l’avis du Gouvernement.
S’agissant de l’amendement n° 101, qui tend à limiter la mise en quarantaine aux personnes infectées, j’ai déjà eu l’occasion d’expliquer pourquoi je suis défavorable à une telle mesure : la quarantaine est moins destinée aux personnes dont on est sûr qu’elles sont infectées qu’à celles dont on craint qu’elles le soient, sans en être certain. Je souhaiterais que le groupe socialiste et républicain accepte de retirer cet amendement.
L’amendement n° 2 rectifié bis, qui prévoit la mise en quarantaine des personnes en situation irrégulière, soulève le même problème que l’amendement n° 40. Je demande là encore au Gouvernement de nous dire ce qu’il entend faire pour ces populations et pour celles du territoire où elles s’agglutinent.
L’amendement n° 123 a pour objet de réduire la période de quarantaine à la seule durée nécessaire à la réalisation d’un test pour les Français établis hors de France revenant sur le territoire national. Nous y sommes défavorables, madame Garriaud-Maylam. Comme j’ai tenté de l’expliquer à plusieurs reprises, les tests présentent trop d’incertitudes pour que l’on puisse se reposer sur eux seuls. En revanche, les autorités administratives doivent faire preuve de discernement et tenir compte du pays de provenance des personnes entrant en France. C’est pourquoi nous avons exigé, alors que cela n’était pas initialement prévu, qu’un arrêté en fixe la liste. Je veux également rappeler que la quarantaine ne saurait être systématique ; il existe des alternatives. Enfin, nous avons voulu que l’on laisse aux Français revenant de l’étranger qui seraient placés en quarantaine la liberté de passer cette période dans leur résidence en France s’ils en ont une. Dans une telle hypothèse, en effet, il n’y a absolument aucune raison de leur imposer d’accomplir leur quarantaine ailleurs.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 195 et demande le retrait des autres.
Monsieur le président Bas, je ne suis pas sûr d’avoir bien compris le sens de votre interpellation : vous n’entendez pas demander au Gouvernement de placer en quarantaine des personnes en situation irrégulière pour ce seul motif, n’est-ce pas ? En situation d’épidémie, il n’y a pas de mesures différenciées selon que l’on est en situation régulière ou pas : tout le monde doit être protégé dans les mêmes conditions et les mêmes règles – quarantaine ou isolement selon les cas – s’appliquent à tous.
La réponse du Gouvernement s’agissant de populations particulièrement précarisées comme les personnes migrantes, qu’elles soient en situation régulière ou pas, a plutôt consisté à multiplier les places d’hébergement d’urgence – de mémoire, près de 17 000 ont été ouvertes, sous l’autorité de Julien Denormandie – et à faire intervenir des travailleurs sociaux, en interaction très étroite avec des ONG et des associations telles que la Croix-Rouge, Médecins du monde ou Médecins sans frontières, de manière à écarter le risque d’une diffusion à bas bruit de l’épidémie au sein d’une population déjà précarisée sur le plan sanitaire. Tout est mis en œuvre pour protéger ces personnes et vérifier qu’aucun foyer épidémique ne se développera à partir de leurs campements ou de leurs abris de fortune, mais en aucun cas des dispositions spécifiques de placement en quarantaine ne sauraient leur être appliquées.
Monsieur Requier, les amendements n° 13 rectifié bis et 12 rectifié bis sont-ils maintenus ?
Les amendements n° 13 rectifié bis et 12 rectifié bis sont retirés.
Je mets aux voix l’amendement n° 195.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 111 est retiré.
Madame Di Folco, l’amendement n° 40 est-il maintenu ?
J’ai bien entendu l’interpellation de M. Bas et la réponse de M. le ministre.
Mme Bouchart, maire de Calais, a dû vous sensibiliser à plusieurs reprises, monsieur le ministre, au fait que la mise à l’abri des migrants est fondée sur le volontariat. Là est précisément le problème : on ne peut pas obtenir de résultats satisfaisants s’il n’y a pas d’obligation en termes de mise à l’abri de ces personnes, car elles sont probablement souvent atteintes par la maladie et peuvent contribuer à la répandre.
D’après Mme Bouchart, il faudrait donc que cette mise à l’abri soit imposée, avec mise à disposition, évidemment, de logements d’accueil. Elle insiste aussi sur le fait que le Pas-de-Calais ne doit pas être le seul territoire mobilisé pour accueillir ces personnes.
L’alerte étant lancée, je retire l’amendement.
L’amendement n° 40 est retiré.
Madame Carrère, l’amendement n° 129 rectifié est-il maintenu ?
Oui, je le maintiens, monsieur le président, n’ayant pas obtenu de réponse à la problématique de l’application de la quarantaine pour nos compatriotes d’outre-mer – j’ai cité l’exemple de Saint-Pierre-et-Miquelon –entrant sur le territoire métropolitain. J’aimerais avoir l’assurance qu’ils seront traités comme les autres Français.
Le projet de loi tel que le Gouvernement l’a élaboré et le texte que nous avons adopté ce matin en commission des lois prévoient les mêmes règles pour tous, ma chère collègue, mais les situations ne sont pas les mêmes.
En effet, certaines collectivités d’outre-mer sont exemptes de contamination ou très faiblement touchées. Elles doivent être protégées. La situation n’est pas la même quand il s’agit d’accueillir sur le territoire métropolitain des Français revenant de l’étranger ou des étrangers. En fait, le texte prévoit le placement en quarantaine pour l’arrivée sur le territoire métropolitain et pour l’arrivée sur un territoire ultramarin, y compris quand il s’agit d’une personne en provenance de la métropole.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 101 est retiré.
Monsieur Wattebled, l’amendement n° 2 rectifié bis est-il maintenu ?
L’amendement n° 2 rectifié bis est retiré.
Madame Garriaud-Maylam, l’amendement n° 123 est-il maintenu ?
L’amendement n° 123 est retiré.
L’amendement n° 66, présenté par M. Milon, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les mesures prévues aux 3° et 4° du présent article peuvent, en outre, intervenir, dans le cas d’une maladie transmissible hautement contagieuse, lorsqu’une personne infectée ou présentant un risque d’infection crée, par son refus de respecter une prescription médicale et individuelle d’isolement prophylactique, un risque grave pour la santé de la population.
La parole est à M. Alain Milon.
La réussite de la levée du confinement est conditionnée, entre autres choses, au respect scrupuleux et potentiellement contraignant, par les personnes atteintes et les personnes contacts, d’un isolement prophylactique à domicile ou à l’hôtel, selon le risque de reconstitution de foyer. Limiter l’isolement prophylactique à une simple recommandation médicale dénuée de tout effet contraignant ne prémunit absolument pas le pays contre le surgissement d’une seconde vague épidémique, à laquelle notre système hospitalier ne manquerait pas de succomber.
Mon amendement a pour objet d’étendre les cas dans lesquels le préfet se verra habilité, par décret du Premier ministre instrumentant l’état d’urgence sanitaire, à arrêter des mesures individuelles de mise en quarantaine et d’isolement, en ajoutant celui d’un refus réitéré d’une mesure médicale et individuelle d’isolement prophylactique.
Je rappelle que je ne fais ici que rétablir dans le projet de loi un paragraphe concernant l’isolement qui figurait dans le texte soumis par le Gouvernement à l’examen du Conseil d’État et sur lequel ce dernier n’avait pas émis de réserves particulières. Samedi, en conseil des ministres, ledit paragraphe a disparu, probablement pour des raisons d’équilibre majoritaire à l’Assemblée nationale.
Nous avons eu sur ce sujet avec la commission des affaires sociales et son président un débat très intéressant, qui a même partagé la commission des lois et qui mérite à coup sûr d’être porté devant notre assemblée.
À l’origine, le Gouvernement avait prévu d’autoriser la mise en œuvre de mesures de quarantaine ou d’isolement non pas pour des personnes arrivant en France, mais pour des personnes qui ne respecteraient pas les prescriptions qui leur auraient été faites de rester chez elles pendant une quatorzaine pour éviter de faire courir à autrui le risque d’une contamination, sans que leur statut de porteurs du virus soit établi. Le Gouvernement a renoncé à cette mesure.
La commission des affaires sociales, sur la proposition de son président Alain Milon, a souhaité rétablir cette faculté, pour le Gouvernement, d’imposer une mesure de quarantaine ou d’isolement à des personnes récalcitrantes. Le régime de base serait celui d’une recommandation, dont le respect est attendu en raison du civisme de nos compatriotes, de leur esprit de responsabilité, de leur sens du devoir à l’égard d’autrui.
Qu’est-ce qui sera le plus efficace ? Poser une contrainte ultime pour les récalcitrants, ce qui, en réalité, revient à rendre le régime obligatoire, ou faire reposer celui-ci sur la confiance ? Le débat mérite d’avoir lieu.
La proposition de nos collègues de la commission des affaires sociales a pour inconvénient, du point de vue de la commission des lois, qu’un régime de contrainte suscitera de nombreuses stratégies d’évitement et de contournement de la part de personnes qui voudront dissimuler le fait qu’ils sont porteurs du virus. Nous voulons tenir en échec ces stratégies, car elles sont probablement plus dangereuses que le risque marginal qui serait pris en faisant confiance à tous ceux que l’on invite à rester chez eux pour ne pas contaminer d’autres personnes.
À cet argument important, j’en ajouterai un deuxième qui ne l’est pas moins. On pense souvent qu’il suffit d’édicter une obligation pour avoir les moyens de la faire respecter, mais il n’en est pas ainsi dans la réalité : pour faire respecter une obligation, encore faut-il qu’il existe une organisation le permettant. Pendant la période de confinement, il y a eu plusieurs millions de contrôles et près d’un million de procès-verbaux. Dans toute la France, la police et la gendarmerie étaient présentes sur les lieux de circulation pour vérifier que les Français confinés qui sortaient de chez eux avaient une raison légitime de le faire. Mais, avec le déconfinement, ces contrôles généralisés cesseront. Si un préfet de département prend, par arrêté, des mesures de quarantaine s’adressant, par hypothèse, à des individus récalcitrants, aucun contrôle ne permettra de vérifier que ceux-ci ne sortent pas de chez eux : on ne postera pas un gendarme devant la porte de leur domicile ! C’est seulement si ces personnes commettent un excès de vitesse, par exemple, que l’on pourra s’apercevoir qu’elles ne respectent pas la quarantaine, à la condition toutefois qu’elles aient été préalablement inscrites au fichier des personnes recherchées…
C’est donc une fiction que de penser qu’un tel régime de contrainte sera appliqué : il ne le sera pas, faute de moyens de contrôle. Le meilleur choix à faire, pour que les mesures de quatorzaine soient respectées, c’est celui de la confiance. Chacun a pu remarquer que les mesures de protection actuelles sont spontanément respectées par la plupart des gens, qui sont soucieux de préserver leur famille, leurs proches et leurs collègues de travail, comme nous le sommes ici. Pardon de me répéter, mais si le régime repose sur la contrainte, nous verrons se multiplier les stratégies d’évitement. Cela étant, le débat est parfaitement justifié. À vrai dire, si j’avais la conviction que la contrainte ultime peut réellement s’appliquer et n’est pas une simple vue de l’esprit, ma réponse serait peut-être moins ferme…
Monsieur le sénateur Milon, nous nous sommes posé la même question que vous : de quels moyens se doter pour empêcher une personne potentiellement contagieuse qui refuserait la mise en quarantaine de sortir et, le cas échéant, contaminer d’autres personnes ?
Outre les raisons pratiques évoquées par le président Bas, des considérations plus idéologiques, qui tiennent aux libertés individuelles, nous ont amenés à écarter la mesure que vous proposez. Soumettre une personne potentiellement atteinte d’une maladie infectieuse à un régime d’internement pose un certain nombre de questions.
Par conséquent, contrairement à ce qu’a pu avancer la presse, nous n’avons introduit cette mesure dans aucune version du texte, ce qui ne veut pas dire que la réflexion n’a pas été engagée.
Je ne crois pas que l’on ait soumis au Conseil d’État une version « bêta » contenant une telle disposition. Quoi qu’il en soit, ces questions méritent d’être soulevées. Comme vous l’avez très bien dit, monsieur le président Bas, la confiance et l’explication réitérée des consignes sont indispensables. Vous le savez, monsieur le sénateur Milon, il faut parfois s’y reprendre à plusieurs fois pour faire comprendre les risques et l’intérêt de rester chez soi pour protéger les autres quand on est malade.
D’autres maladies infectieuses hautement contagieuses comme la tuberculose, par exemple, conduisent les personnes atteintes, souvent issues de pays dans lesquels il existe de très fortes inégalités sociales, à rester confinées trois mois. Or même pour ce type de pathologies, il n’existe pas de dispositif juridique précis contraignant au confinement ou à l’isolement.
Je vous suggère, monsieur Milon, de retirer votre amendement, le Gouvernement ayant fait un autre choix pour traiter cette question complexe.
Je voudrais rappeler le contexte dans lequel la commission des affaires sociales a voté l’amendement présenté par le président Milon.
Les chiffres relatifs à l’épidémie sont communiqués tous les soirs. Personnellement, je ne les trouve pas excellents. Vous l’avez dit vous-même, monsieur le ministre, l’épidémie est toujours là. Actuellement, les services de réanimation ne sont plus en tension comme ils ont pu l’être, mais il suffirait de peu de choses pour qu’ils le redeviennent, avec bien sûr des disparités géographiques.
On sait très bien que la contagion peut se poursuivre et que la période du déconfinement est à risque. Au travers de cet amendement, nous ne cherchons pas à rendre la mise en quarantaine ou à l’isolement obligatoire pour tout le monde, mais pourquoi l’imposer aux personnes en provenance de l’étranger et pas aux personnes à risque récalcitrantes ? A-t-on davantage les moyens de contrôler les unes que les autres ? J’avoue que la cohérence de la position de la commission des lois et du Gouvernement m’échappe. En définitive, nous sommes toujours confrontés au problème de l’insuffisance des moyens d’application des dispositions adoptées.
Si les médecins constatent que certaines personnes ne respectent aucune des règles prescrites et peuvent en contaminer d’autres, ce qui ferait courir le risque d’un rebond important de l’épidémie et d’une nouvelle saturation des services hospitaliers, je ne vois pas pourquoi nous ne prendrions pas de telles dispositions.
Je voterai l’amendement présenté par Alain Milon.
Je ne suis pas une grande liberticide, mais, comme Catherine Deroche vient de le dire, il faut prendre en compte la saturation de nos services de réanimation et la gravité de la crise. Si les chiffres n’ont pas suffisamment baissé d’ici là, le déconfinement n’aura peut-être pas lieu le 11 mai. On craint une probable deuxième vague de l’épidémie, alors que le quart nord-est de la France apparaît encore en rouge sur la carte.
Pour ma part, je n’oppose pas la confiance à la contrainte. Il faudra bien sûr avant tout faire œuvre de pédagogie, mais, comme cela a été expliqué, pourquoi ne pas appliquer aux individus récalcitrants les mesures de quarantaine qui s’imposeront aux personnes entrant sur le territoire français ? Cela a du sens dans le contexte de la prorogation de l’état d’urgence sanitaire – il n’est bien sûr pas question d’imposer une telle contrainte dans un autre cadre. J’ajoute que des dispositions similaires figuraient dans la loi sur la sécurité sanitaire qui a été votée dans cet hémicycle en décembre dernier.
Mme Laurence Rossignol. Pour la bonne compréhension des débats, je voudrais rappeler à M. le ministre… Monsieur le ministre, j’essaie en vain de capter votre attention : peut-être pourriez-vous de temps en temps écouter les parlementaires, au lieu de discuter avec les membres de votre cabinet ou le président Bas !
M. le ministre se récrie.
Sourires.
Mme Laurence Rossignol. Si je vous fais la remarque chaque fois, monsieur le ministre, c’est peut-être parce que vous ne m’écoutez jamais ! C’est dommage, parce que je voudrais vous apprendre ce qu’apparemment vous ignorez, à savoir le contenu de l’avant-projet de loi que vous avez transmis au Conseil d’État. Je vous donne lecture d’un passage qui montre que le président Milon n’a pas totalement inventé l’amendement qu’il a défendu « Afin de lutter contre la propagation de l’infection, la mise en quarantaine peut intervenir lorsqu’une personne est infectée… »
M. le ministre proteste.
Veuillez laisser parler Mme Rossignol, monsieur le ministre. Vous pourrez ensuite lui répondre.
Vous nous avez expliqué il y a quelques instants, monsieur le ministre, que jamais, au grand jamais, la disposition proposée par Alain Milon n’avait figuré dans quelque version du texte que ce soit. Or l’avant-projet de loi transmis au Conseil d’État contient une telle mesure. Je le tiens à votre disposition, monsieur le ministre ! Il y est écrit que « la mise en quarantaine et le placement à l’isolement sont prononcés sur proposition du directeur général de l’Agence régionale de santé (DGARS), du représentant de l’État dans le département, par décision individuelle motivée ».
Cela dit, je ne me rallie pas pour autant à la position du président Milon, car il me semble que le dispositif de l’amendement ne peut fonctionner. Il n’y a pas de fichier des récalcitrants. Aucun médecin ne pourra constater qu’un individu ne suit pas ses prescriptions, car celui-ci ne reviendra pas le voir pour lui dire qu’il ne respecte pas la quarantaine ! En outre, en cas de contrôle de police, comment savoir si la personne circulant dans l’espace public devrait être en quarantaine ?
Je crains en fait surtout que cet amendement ne crée le trouble dans la perspective de notre débat de demain sur l’article 6. Pour pouvoir identifier les récalcitrants, il faut qu’ils figurent dans un fichier auquel les forces de police peuvent avoir accès, celui des personnes conduisant sans permis, par exemple, et qu’il soit possible de croiser des fichiers, ce qui serait inacceptable. C’est pourquoi, en ce qui nous concerne, nous ne pouvons soutenir l’amendement du président Milon.
Oui, je le maintiens, monsieur le président.
Le ministre a évoqué l’exemple de la tuberculose, mais il s’agit d’une maladie à déclaration obligatoire, contre laquelle il existe des traitements efficaces et que l’on peut prévenir par la vaccination.
Je répète ce que j’ai déjà dit : les mesures proposées au travers de cet amendement figuraient dans l’avant-projet de loi qui nous a été soumis et dans le texte qui a ensuite été transmis au Conseil d’État, lequel n’a émis aucune réserve sur ce point.
Je soutiens cet amendement.
En général, les malades font confiance à leur médecin. De plus, les médecins généralistes connaissent bien leurs patients et savent à qui ils ont affaire. Le contournement n’est généralement pas l’intention première. Très majoritairement, au contraire, les gens ont envie d’être protégés, de se mettre à l’abri et ils écoutent leur médecin. Cependant, tous ceux qui ont exercé la médecine savent bien qu’il existe des fortes têtes. Sans mesures permettant de contraindre ceux qui ne veulent rien entendre, la vie des autres peut se trouver mise en jeu ! Que proposez-vous d’autre, monsieur le ministre, pour ces récalcitrants ? J’ai l’impression qu’il n’y a pas d’autre moyen que d’en passer par une mesure coercitive pour ramener les récalcitrants à la raison. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles !
Malgré des motifs réels d’hésitation, je défends la proposition du président Milon et je n’adhère pas à une partie du raisonnement présenté par Philippe Bas.
Il n’y a pas d’opposition entre la confiance que nous éprouvons à l’égard de la très grande majorité de nos concitoyens et l’utilité de rappeler à l’ordre nécessaire les personnes qui choisissent délibérément de s’opposer aux mesures d’isolement.
L’argument du président Bas est de dire qu’il y aura des difficultés d’application. C’est indéniable, comme pour tous les systèmes de contrôle. Mais la démonstration qu’il a avancée est trop systématique.
Le réflexe de tout individu normal, lorsqu’il sent arriver les symptômes, est d’aller consulter son médecin. Il sera alors averti des contraintes. S’il décide de ne pas s’y soumettre, le médecin sera alerté : il existe en effet dans la vie locale, comme l’a souligné René-Paul Savary, de multiples façons pour un médecin d’être informé ! Les moyens dont dispose la police suffiront alors à jouer un rôle dissuasif !
Comme je l’ai souligné ce matin en commission, nous avons passé une grande partie du débat – bien entendu avec la meilleure foi du monde – à nous critiquer les uns les autres en fonction de ce que nous avions dit il y a un mois ou deux. Je ne voudrais pas qu’en constatant les difficultés d’application de certaines mesures du déconfinement nous soyons obligés de nous poser de nouveau cette question dans un mois et demi.
De telles dispositions existent déjà dans le code de la santé publique, ainsi que l’a rappelé un de mes collègues. Nous n’inventons rien !
Mieux vaut donc avancer maintenant sur ce dispositif, quitte à l’améliorer ensuite, plutôt que de regretter dans un mois et demi de ne pas l’avoir fait !
L’amendement de notre collègue Milon est intéressant. Il s’agit tout de même d’actes de délinquance ! Quand quelqu’un se sait porteur d’un virus et ne fait rien pour prévenir la contagion, il met en péril la vie des autres. Pourquoi laisserions-nous faire ? On nous dit depuis le début de cette crise que nous sommes en guerre ; cette guerre, il faut se donner les moyens de la gagner. On a le droit de mettre sa vie en jeu, mais il n’est pas admissible que l’on joue avec celle des autres.
Quand quelqu’un se voit recommander, par un médecin ou par la plateforme de l’assurance maladie, de rester chez lui, ni la police ni la gendarmerie n’en sont évidemment informées. Personne donc ne le sait, à part l’intéressé et la personne qui a prescrit l’isolement.
De surcroît, dans la plupart des cas, la personne concernée ne sera pas un malade : elle aura simplement approché un individu porteur du virus. Si elle ne respecte pas la consigne de quatorzaine, qui le saura, puisque seuls un correspondant téléphonique de l’assurance maladie ou, éventuellement, le médecin de famille sont informés de l’existence de cette consigne ? Pour identifier un récalcitrant, encore faut-il que quelqu’un puisse le dénoncer. Mme Deroche nous dit que ce sera le médecin, mais comment saurait-il que son patient ne respecte pas la consigne, sauf à le croiser chez le boulanger ? Les médecins sont très occupés !
Cela peut procurer une satisfaction morale de se dire que l’on a créé une obligation, mais cette obligation restera lettre morte s’il n’existe pas la moindre procédure permettant d’identifier ceux qui ne respecteraient pas une consigne de quatorzaine dont personne n’est informé ! Vous aurez voté un système de contrainte, mais il sera impossible de le mettre en œuvre. Les prescriptions de quatorzaine seront généralement données par une plateforme de l’assurance maladie qui aura mené à distance des investigations sur les vingt-cinq personnes ayant été en contact avec un individu testé positif : force est de reconnaître qu’il n’existe pas de moyen de contraindre à les respecter. J’ajoute qu’il n’est nullement prévu que l’assurance maladie ouvre ses fichiers à la gendarmerie ou à la police. Si vous faisiez une telle proposition pour assurer le bouclage de votre dispositif, la majeure partie de nos collègues sénateurs et des députés la rejetterait.
Le dispositif de cet amendement est juste sur le plan moral, mais inefficace sur le plan de l’organisation pratique. Eu égard à l’impossibilité de le mettre en œuvre, mieux vaut s’en tenir à ce que le Gouvernement et la commission des lois proposent. À défaut, nous n’irons nulle part. Je tenais à le dire.
Le même problème se pose pour le contrôle des arrêts de travail. La caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) effectue des contrôles aléatoires via des appels téléphoniques au domicile des personnes en arrêt de travail. Il existe plusieurs moyens de vérifier que ces personnes sont chez elles sans qu’il soit besoin, pour cela, de recourir aux forces de l’ordre.
Il me semble primordial de prévoir des mesures coercitives. À défaut, ce sera trop facile pour les contrevenants et les mesures de quarantaine ne fonctionneront pas.
Il n’est pas fréquent que le président de la commission saisie au fond s’oppose à une mesure proposée par le président de la commission saisie pour avis…
Monsieur le ministre, quelles mesures coercitives envisagez-vous de prendre pour que la quatorzaine puisse être appliquée aux ressortissants étrangers qui entrent sur le territoire national ?
Souvenez-vous : lorsqu’un certain nombre de Français ont été rapatriés de Wuhan, ils se sont vu imposer une quatorzaine collective dans un village de vacances, à Carry-le-Rouet. Il n’y avait pas de mesure coercitive destinée à les empêcher, le cas échéant, de quitter cet endroit.
Le président Bas a tout à fait raison de dire qu’il est impossible, ou à tout le moins très difficile, de mettre en place un système de contrôle et de sanction opérationnel pour les personnes faisant l’objet d’une prescription de quatorzaine déjà présentes sur le territoire national. Il faudrait d’abord pouvoir repérer les contrevenants, puis vérifier qu’ils ne quittent plus leur domicile. On ne peut tout de même pas poster un policier devant leur porte !
Il existe des systèmes de contrôle et de sanctions pour les personnes entrant sur le territoire national qui ne respectent pas les mesures de confinement ou d’isolement prises par le préfet sur demande du directeur général de l’ARS, mais il n’est pas prévu de placement dans un centre fermé.
L’expérience des épidémies en France montre qu’il peut arriver que quelques personnes ne respectent pas les mesures de confinement ou d’isolement. Ainsi, un certain nombre de contraventions ont été établies par les forces de l’ordre pour sanctionner des gens qui ne respectaient pas les règles en matière de limitation des sorties. Il n’empêche que l’immense majorité de la population française a respecté scrupuleusement le confinement, jusqu’à faire baisser le taux de transmission du virus à 0, 5, soit le plus bas taux d’Europe.
Encore une fois, toute notre stratégie repose sur la confiance, l’explication, la pédagogie, le soin, l’attention portée à l’autre. Je crois sincèrement que cela suffit. Ce n’est pas un individu qui sort de chez lui alors qu’il ne devrait pas qui fait flamber une épidémie. De toute façon, même avec le meilleur traçage du monde et un dépistage massif, nous ne pourrions pas être certains que 100 % des personnes contaminées font l’objet d’une prescription de confinement ou d’isolement, car il existe des faux négatifs et des cas totalement asymptomatiques.
En conclusion, je ne suis pas favorable à cet amendement, tout simplement parce qu’il ne me paraît pas utile. En outre, je rejoins Mme Rossignol : il ne faudrait pas que l’adoption de la mesure proposée amène à nous faire un mauvais procès lors de l’examen de l’article 6, relatif au traçage des personnes contacts, en nous soupçonnant de vouloir croiser des fichiers. Sans traçage, de nombreuses personnes contaminées risquent de nous échapper. Je tiens aux articles 2 et 6 !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons examiné 58 amendements au cours de la journée ; il en reste 97.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mardi 5 mai 2020 :
À quatorze heures trente :
Suite et fin du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions (procédure accélérée ; texte de la commission n° 417, 2019-2020).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le mardi 5 mai 2020, à deux heure s quarante-cinq.
La liste des candidats désignés par la commission des lois pour faire partie de l ’ éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi prorogeant l ’ état d ’ urgence sanitaire et complétant ses dispositions a été publiée conformément à l ’ article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s ’ étant manifestée dans le délai d ’ une heure prévu par l ’ article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire sont :
Titulaires : MM. Philippe Bas, François-Noël Buffet, Alain Milon, Philippe Bonnecarrère, Mme Laurence Rossignol, MM. Jean-Pierre Sueur et Alain Richard ;
Suppléants : M. Mathieu Darnaud, Mme Jacqueline Eustache-Brinio, MM. Vincent Segouin, Hervé Marseille, Jean-Luc Fichet, Mmes Maryse Carrère et Esther Benbassa.