Je ne reviendrai pas sur la problématique de la concurrence aux frontières, mais j'évoquerai celle des différences de concurrence à l'intérieur même de l'Europe. En France, nous avons une étonnante façon de ne pas regarder nos bêtises en face. Prenez le plan de relance, par exemple, à la suite de la crise du coronavirus. Pour l'horticulture, il pèse 23 millions d'euros, contre 600 millions d'euros aux Pays-Bas. Pourquoi ? Parce que nous sommes fauchés, à cause de notre addiction à l'impôt et à la dette. Nous ne pouvons pas reprocher aux autres pays d'être meilleurs que nous... Les Pays-Bas ont compris que, dans deux ou trois ans, la disparition de toutes les entreprises françaises leur laissera la capacité de produire davantage dans leur pays.
Les différences de compétitivité sont incroyables : notre main-d'oeuvre dans le maraîchage coûte 1,5 fois plus cher qu'en Allemagne, 1,7 fois plus cher qu'en Espagne et de deux à trois fois plus cher qu'en Pologne. Nous sommes incapables de faire travailler les Français : pour ramasser des fruits ou des légumes, nous avons exclusivement recours à des salariés étrangers. Comment voulez-vous que nous soyons compétitifs ? Nous pourrions employer les Français qui ne travaillent pas, pour les faire travailler et diminuer le coût de l'indemnisation du chômage. Mais non, nous les laissons au chômage et nous faisons entrer des salariés étrangers pour travailler à leur place !
Concernant les charges, nous pouvons nous-mêmes, parlementaires, nous en prendre à nous même, puisque nous en avons ajouté pour les agriculteurs français, dans la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (Egalim), en leur faisant croire qu'on allait améliorer leurs revenus. Même remarque sur les normes. En interdisant les néonicotinoïdes, nous tuons la filière betterave, quand la Belgique a pris une dérogation avant le 1er juillet, ce qui lui permettra d'utiliser les produits interdits en France. Résultat : les Belges vont construire la plus grande sucrerie d'Europe, et nous ne pourrons que les regarder nous spolier la totalité de notre production de betteraves. Et nous allons continuer dans cette voie avec le glyphosate et d'autres molécules. Bref, nous organisons nous-mêmes le déménagement de la production agricole et industrielle.