Intervention de Laurent Duplomb

Réunion du 27 octobre 2020 à 22h15
Mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques — Article 1er

Photo de Laurent DuplombLaurent Duplomb :

Je voudrais revenir sur les propos de Fabien Gay : il est trop facile de dire que les problèmes de la filière betterave découlent de la suppression des quotas. Je l’ai déjà expliqué, on pourrait faire le raisonnement inverse pour une culture que je connais bien. Quand vous dites que le problème, ce sont les quotas, mon cher collègue, cela laisse supposer que le prix n’est plus en adéquation avec la culture et que, par définition, on aurait besoin d’avoir un rendement énorme pour bénéficier d’un prix garanti ou équilibrer coûts et production.

Je vais vous donner un exemple complètement différent. Mon beau-père a arrêté de cultiver des lentilles vertes du Puy il y a trente ans. Leur prix était monté à 500 ou 600 euros la tonne. Il a stoppé, parce qu’il avait besoin de développer son activité de producteur laitier. Par définition, la terre n’étant pas extensible, il a dû basculer de cette culture vers une autre culture lorsqu’il manquait de surface agricole.

Pour ma part, je me suis tenu pendant vingt-cinq ans à cultiver des lentilles vertes du Puy, parce que j’estimais que c’était une valeur pour mon territoire, mais aussi parce qu’il s’agit d’une valeur ajoutée importante pour notre agriculture, pour mon exploitation. Aujourd’hui, le prix de la lentille verte du Puy est de 2 000 euros la tonne ! J’en ai cultivé plus de vingt hectares pendant vingt ans. L’année prochaine, je n’en cultiverai que sept. Mon fils me dit aujourd’hui – à juste titre – que cela ne sert plus à rien de poursuivre la culture d’un produit qu’on est sûr de ne plus pouvoir récolter bientôt, compte tenu de l’impasse technique dans laquelle on est.

Voilà la réalité ! Vous pouvez toujours l’ignorer, vous aveugler, être dans l’incantation, imaginer tout un tas de solutions qui pourraient être mises en place. Je n’ai rien à y redire, vous avez le droit de le faire, mais la réalité concernant la lentille verte du Puy aujourd’hui, c’est que nous avions encore 4 500 hectares en production il y a quelques années et qu’il en restera – je vous le garantis – moins de 2 500 hectares cette année.

Les agriculteurs ne peuvent pas continuer à travailler et à dépenser pour ne rien récolter. De plus, je rappelle que nous travaillons sur un terrain volcanique : je ramasse entre dix et quinze tonnes de pierres pour deux à trois hectares de culture. Croyez-vous que les agriculteurs peuvent continuer ainsi, accepter une évolution de la société qui fait qu’ils se baissent pour ramasser des pierres en sachant que les produits qu’ils cultivent ne leur rapporteront rien ? Voilà la réalité !

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