Intervention de Philippe Bas

Réunion du 5 novembre 2020 à 19h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Adoption en nouvelle lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voici enfin parvenus au terme de cette discussion législative à rebondissements qui a commencé par des débats sur la prolongation du régime de sortie de l’état d’urgence sanitaire, avant que ceux-ci ne soient interrompus par la rentrée dans l’état d’urgence sanitaire puis par le passage du couvre-feu au confinement. Ces débats, qui ont enfin repris, vont finir par aboutir, malheureusement dans des conditions regrettables si le Gouvernement doit donner le dernier mot à l’Assemblée nationale sans tenir davantage compte de notre travail.

Monsieur le secrétaire d’État, le désaccord fait partie du débat démocratique. Il peut être fécond en démocratie s’il se double de l’esprit de dialogue et si les points de vue des uns et des autres sont pris en compte.

Le malentendu, en revanche, est toxique pour la démocratie. Il ne signifie pas désaccord ; il survient quand, au désaccord, s’ajoute le procès d’intention. Je remercie, à ce propos, le président de la commission des lois de sa mise au point très claire et indispensable en début de séance.

Je dois vous dire, monsieur le secrétaire d’État, que le Sénat n’a jamais marchandé l’autorisation qui lui était demandée de conférer au Gouvernement des pouvoirs exceptionnels pour faire face à cette crise exceptionnelle.

Il a toujours cantonné l’exercice de ses pouvoirs, en prenant soin de limiter au strict nécessaire les restrictions aux libertés individuelles et aux libertés publiques, à une période de temps limitée.

Le Gouvernement, jusqu’à maintenant, avait constamment été en accord avec le Parlement pour que ces pouvoirs d’exception fassent l’objet d’une reconduction éventuelle par le Parlement. Nous avons voté quatre fois en sept mois pour autoriser le Gouvernement à agir contre la crise !

Nous ne nous posons pas, dans nos débats, la question de l’efficacité de l’action du Gouvernement, mais s’il est besoin, compte tenu de la situation de l’épidémie, de lui conférer des pouvoirs exceptionnels. Nous souhaitons bien sûr qu’il les exerce efficacement – ce n’est peut-être pas toujours le cas, la tâche étant difficile. Quoique déjà en cours au sein de nos commissions d’enquête, l’évaluation des stratégies de lutte contre l’épidémie viendra en son temps. Toutefois, dans le travail législatif, la question qui nous est posée est la suivante : faut-il continuer ou non à restreindre les libertés pour ralentir, voire casser, la contamination de nos concitoyens par cet affreux virus ?

Monsieur le secrétaire d’État, puisque nous n’avons jamais marchandé ces pouvoirs, il nous est insupportable d’entendre dire que nous ne serions pas responsables. Car, pour nous, la responsabilité ne va pas sans la vigilance et la vigilance ne va pas sans le contrôle. Comment se fait-il que ce que vous avez fait pendant sept mois, qui ne vous a donc pas paru retarder insupportablement l’action des pouvoirs publics, ne soit plus possible pour les six mois à venir ?

Évitons toute ambiguïté entre nous pour dissiper tout malentendu : nous pouvons être en désaccord, mais, au moins, sachons le circonscrire à la réalité de son contenu. Nous n’avons jamais dit que nous ne voulions pas un prolongement du confinement au-delà du 8 décembre ; nous avons seulement dit que, dans ce cas, il faudrait que le Parlement l’autorise.

C’est une décision importante à prendre, les Français attendant de se préparer aux fêtes de fin d’année.

Nous n’avons pas non plus refusé que l’état d’urgence se prolonge au-delà du 31 janvier ; nous avons seulement dit que, s’il devait se prolonger au-delà de cette date, il faudrait que le Parlement le vote.

La mise en accusation du Parlement parce qu’il aurait décidé de dates butoirs au-delà desquelles les pouvoirs exceptionnels ne pourraient plus s’exercer est tout simplement une imposture dans le débat public.

Ce dernier doit reposer sur des réalités et non sur des accusations complètement dénuées de fondement !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion