Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 27 janvier 2021 à 15h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Discussion générale

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà presque un an que le monde traverse une crise sanitaire qu’il n’attendait pas et qui met à l’épreuve et en tension les systèmes de santé, les économies, les populations.

Cette crise nous conduit à nous réunir à intervalles réguliers dans cet hémicycle pour autoriser le Gouvernement à prendre des mesures adaptées pour lutter contre l’épidémie. Dans le contexte, cette régularité est paradoxalement une bonne chose, nous nous accorderons sur ce point, monsieur le rapporteur.

Cela a été rappelé : la situation reste préoccupante et pleine d’incertitudes. Je ne serai pas long sur les chiffres, nous pouvons nous accorder sur le constat qui en découle.

Alors qu’il était stable en décembre, le nombre de nouvelles contaminations augmente progressivement depuis le début du mois de janvier. Hier étaient enregistrées 22 000 nouvelles contaminations, et 1 769 nouvelles admissions en réanimation sur une semaine, portant à plus de 3 000 le nombre de patients en réanimation.

Cette situation est incertaine, aussi, au regard de la dynamique épidémique que connaissent certains pays voisins, sous l’effet de variants, laquelle a pu conduire les autorités compétentes à prendre des mesures plus strictes, comme au Royaume-Uni.

Une autre incertitude dans les prochaines semaines tient à l’effet du vaccin sur la transmission du virus, ou encore au nombre de doses qui pourront effectivement être livrées, au regard des capacités des laboratoires et des autorisations de mise sur le marché.

Ces points d’incertitude imposent à mon sens d’évacuer dès à présent toute tentation de corrélation entre la stratégie vaccinale et la position que le législateur doit adopter sur le présent texte.

Sur le fondement de cette situation complexe, le conseil scientifique ainsi que le Conseil d’État ont en tout cas considéré comme justifiées l’ensemble des dispositions suivantes : la prorogation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin 2021, le report de la caducité de son régime juridique au 31 décembre 2021, ainsi que le report de la caducité de la mise en œuvre des systèmes d’information, et même du régime transitoire de sortie de l’état d’urgence.

Ce dernier point m’amène à m’arrêter un instant sur les points qui nous rassemblent.

La commission des lois de l’Assemblée nationale a fait le choix, sur amendement de son rapporteur et de la majorité, de supprimer l’article 3 afin que la clause de revoyure soit fixée au 1er juin 2021, c’est-à-dire à la fin de l’état d’urgence sanitaire prorogé.

Or c’est bien la superposition de la prolongation de ce régime avec celle de l’état d’urgence qui avait cristallisé, sur nos travées, les oppositions à deux précédents textes. Le Gouvernement a consenti à cette suppression ; c’est une position qui doit être saluée, ainsi que vous l’avez d’ailleurs fait, monsieur le rapporteur. Vous n’avez pas modifié, ensuite, le report de la caducité du régime de l’état d’urgence sanitaire au 31 décembre 2021, cela peut également être salué.

Ce report permettra de conférer plus de recul pour construire un cadre pérenne de gestion des crises sanitaires à l’issue de l’épidémie, dont la nécessité a été soulignée à plusieurs reprises dans cet hémicycle.

Alors même que ces points auraient pu constituer des bases solides dans la perspective d’un accord entre les deux chambres, la commission a fait le choix de réduire d’un peu moins d’un mois la prolongation de l’état d’urgence sanitaire, de prévoir l’intervention du législateur pour la prolongation d’un confinement au-delà d’un mois ou encore d’inscrire au sein même de la loi des dispositifs de contrôle qui ne semblent pas relever de ce rang.

La vigilance exprimée à travers ces dispositions ne doit pas faire oublier le cadre strict qui s’applique aux mesures prises sur le fondement du régime de l’état d’urgence sanitaire, comme les prérogatives de contrôle dont dispose le Parlement, ainsi que le contrôle du juge, lequel peut suspendre en référé l’application des mesures prises, dans le cas où celles-ci ne seraient pas adaptées ou proportionnées à l’état de la situation sanitaire.

Les délais proposés dans le texte transmis par l’Assemblée nationale nous paraissaient justifiés pour la gestion d’une crise marquée par la dynamique précédemment évoquée.

Mes chers collègues, le groupe RDPI votera le présent texte en ce qu’il reporte la caducité du régime juridique de l’état d’urgence sanitaire et qu’il consent à sa prorogation. Nous attendons toutefois de la navette qu’elle aboutisse à des dispositions et à des délais permettant une gestion agile et pleinement efficace de la crise.

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