Intervention de Jacques Muller

Réunion du 6 mai 2008 à 16h00
Modernisation du marché du travail — Discussion générale

Photo de Jacques MullerJacques Muller :

La garantie de retour à l’emploi est assurée, le cas échéant via une formation qualifiante bien rémunérée. Enfin, la suspension de l’indemnisation en cas de refus de proposition d’emploi ou de formation, systématiquement mise en exergue par les promoteurs de la flexibilité à tout crin, est pour l’essentiel confiée aux syndicats… qui sont également très présents dans le fonctionnement des agences pour l’emploi.

Ce sont là autant de dispositions qui évitent la multiplication des emplois de mauvaise qualité et contribuent à la consolidation effective des droits des salariés en termes de parcours professionnel.

Cependant, un tel système ne fonctionne que si deux conditions impératives sont réunies. D’une part, l’État et les entreprises doivent accepter d’y consacrer les moyens nécessaires, notamment en termes de formation et d’indemnisation des chômeurs : 5% du PIB, soit la moitié de plus qu’en France ! D’autre part, le syndicalisme doit être fort et gestionnaire, capable de négocier des accords équilibrés et de participer activement à leur application sur le terrain. Notre pays en est aujourd’hui très loin !

Monsieur le ministre, en nous invitant à valider en l’état un texte profondément déséquilibré, au sein duquel les quelques prétendues avancées au bénéfice des salariés pèsent très peu par rapport au « détricotage » du droit du travail auquel vous nous demandez de participer, vous affirmez instituer une flexisécurité à la française. En réalité, il s’agit tout simplement d’une nouvelle forme de flexibilité pour les employeurs… sans sécurité pour les salariés !

Cessons de nous payer de mots : avec des syndicats de salariés affaiblis, dans un contexte de taux de chômage élevé, le fameux « dialogue social » ne peut en aucun cas aboutir à des « compromis sociaux » équilibrés.

Dans une telle situation, il revient au législateur de protéger le faible et de faire prévaloir la logique du droit du travail, qui reconnaît dès son origine le déséquilibre structurel entre l’employeur et l’employé.

Abdiquer ses responsabilités pour « laisser faire » les partenaires sociaux, c’est nier ce déséquilibre structurel porteur d’insécurité sociale ! Dans ce contexte, parler de flexisécurité relève de l’imposture !

Est-ce une nouvelle dérive atlantiste du Président de la République ? Une nouvelle traduction de sa fascination avérée pour le modèle libéral anglo-saxon ? Des salariés, qui ont vu des leaders syndicaux finir par se résoudre sous la contrainte à signer l’ANI, en passant par nos concitoyens, plus personne n’est dupe !

Les Verts ne participeront pas à ce détricotage historique du droit du travail sous couvert de je ne sais quelle modernité.

Nous ne cautionnerons pas non plus ce qui risque de devenir un fâcheux précédent : le Parlement devrait-il désormais valider servilement n’importe quel accord entre les partenaires sociaux, quel que soit son contenu, au motif qu’il résulte de « négociations » ?

C’est pourquoi nous voterons contre ce mauvais texte, tout en proposant des amendements destinés à en limiter les dégâts pour les salariés.

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