Cet amendement vise à instaurer une « taxe de précarité » pour encourager les entreprises citoyennes, c’est-à-dire celles qui ont recours massivement aux CDI, et dissuader celles qui ont recours massivement aux emplois précaires.
L’accord du 11 janvier 2008 prévoit : « Le contrat à durée indéterminée est la forme normale et générale du contrat de travail. » Partant, a contrario, tout autre contrat, notamment le contrat précaire, ne relève pas de la forme normale et générale du contrat de travail.
Je réitère par le biais de cet amendement les nombreuses propositions des Verts, formulées notamment par ma collègue députée Martine Billard, qui visent à limiter le recours au travail précaire. Même s’il a été rétorqué à l’Assemblée nationale qu’une telle mesure n’a pas de rapport avec l’ANI, je tiens à défendre cet amendement, car il me paraît essentiel dans le contexte du marché du travail à deux vitesses que nous connaissons aujourd’hui dans notre pays.
Nous souhaitons ainsi que les entreprises employant au moins onze salariés soient soumises à une taxe de précarité, qui serait perçue dès lors qu’elles emploient de manière permanente des salariés sous contrats autres que les CDI à temps plein. Sont exclus bien sûr de ce dispositif les CDD signés à l’occasion d’un remplacement en cas d’un arrêt maternité, d’un arrêt longue maladie ou d’un travail momentanément supplémentaire.
Pour le reste, on sait très bien que, dans certains secteurs, on emploie systématiquement des salariés en CDD. Ainsi utilise-t-on un salarié pendant six mois ou un an, puis on le met à la porte au terme de son contrat, sans que cela ait un quelconque rapport avec la qualité de son travail, et l’on embauche un nouveau salarié pour réaliser le même travail.
Ce n’est ni plus ni moins qu’un dévoiement de la philosophie du CDD, dévoiement implicitement encouragé puisque les entreprises qui ont massivement recours aux CDD sont avantagées en matière de paiement de cotisations et de divers assujettissements.
Le présent amendement vise donc à rétablir l’équilibre, en assujettissant à une taxe de précarité, perçue au profit du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, les entreprises qui ne méritent pas le titre d’entreprises citoyennes, car elles se développent sur le dos de celles qui respectent le code du travail.
Je souligne que cette proposition ne relève pas de la volonté du « tout-impôt » et je rappelle à cet effet que, lors des débats à l’Assemblée nationale, M. Francis Vercamer, député du Nouveau centre, a considéré qu’il s’agissait d’une bonne mesure : « Cette idée de bonus-malus n’est tout de même pas à rejeter ; elle est même bonne si elle implique que plus on a recours aux contrats précaires, plus on doit participer à l’effort de solidarité nationale et que, inversement, plus les entreprises utilisent des CDI, moins elles ont à participer à la solidarité nationale. »
À l’instar de mon collègue, j’invite la Haute Assemblée à faire la preuve de sa volonté de dépasser les clivages politiques en votant ce dispositif constructif, qui vise à protéger le CDI et à lutter contre une forme de dumping social pratiquée de manière déloyale par de trop nombreuses entreprises.