Le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui nous est présenté comme une loi de programmation. Dans votre propos liminaire, monsieur le ministre, vous vous êtes félicité de l’adoption de ce texte, à l’unanimité, à l’Assemblée nationale.
Quelle n’a donc pas été notre surprise lorsque le projet de loi a été déposé sur le bureau du Sénat : en fait de programmation, l’ambition est plus que limitée ! En effet, si l’objectif tant vanté de consacrer 0, 7 % du RNB à l’aide publique au développement est inscrit à l’article 1er, on n’en trouve aucune traduction concrète dans le texte.
De plus, vous parlez d’une augmentation « significative », monsieur le ministre, en galvaudant certains chiffres. Selon une dépêche de l’Agence France Presse aujourd’hui, la France n’aurait consacré que 0, 37 % de son RNB à l’APD en 2017, année de l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron. J’ignore d’où proviennent ces calculs, mais l’OCDE considère pour sa part que ce taux s’était établi à 0, 43 % en 2017…
À la lumière de ces chiffres, force est de constater que la hausse tant vantée est plus un effet d’annonce qu’une augmentation significative.
Telle n’est pas notre conception d’une loi de programmation. Un texte de programmation doit être clair, lisible ; ses objectifs financiers doivent être prévisibles.
C’est d’autant plus regrettable que ce projet de loi, qui nous est annoncé depuis deux ans, est censé traduire en actions concrètes un effort financier considérable en faveur de l’aide publique au développement portée par la France. Nous nous attendions à des perspectives, mais les alinéas consacrés aux objectifs financiers relèvent plus du bilan.
L’article 1er constitue le nœud gordien de ce projet de loi de programmation, après l’article 1er A, qui définit en quelque sorte la philosophie de l’aide publique au développement. À la lecture de cet article, nous avons l’impression que le travail a été fait à moitié et la sensation désagréable que vous vous êtes arrêté au milieu du chemin, monsieur le ministre.
Peut-être l’aile progressiste de la majorité présidentielle n’a-t-elle pas eu, une fois de plus, le poids suffisant pour faire fléchir Bercy, dont chacun connaît l’orthodoxie budgétaire, mais le résultat est là.
On peut bien évidemment discuter des objectifs de l’APD, de ses modalités et des moyens de l’évaluer, et c’est très important. Néanmoins, pour porter toutes les ambitions figurant dans ce projet de loi, que nous nous apprêtons à nourrir encore, il faut un solide nerf de la guerre. Tel n’est malheureusement pas le cas, le texte prévoyant que la France consacrera 0, 5 % de son revenu national brut à l’APD. Le nerf nous semble bien mollasson !
L’argent est primordial, car il permet aux acteurs du développement d’avoir de la prévisibilité et de mener à bien avec efficacité tous les projets qu’ils souhaitent entreprendre.