Intervention de Jean-Baptiste Lemoyne

Réunion du 26 janvier 2022 à 15h00
Marché de l'assurance emprunteur — Discussion générale

Photo de Jean-Baptiste LemoyneJean-Baptiste Lemoyne :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici réunis pour examiner la proposition de loi pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l’assurance emprunteur, laquelle a été adoptée à l’unanimité à l’Assemblée nationale, car elle offrira à nos compatriotes un véritable gain en matière de pouvoir d’achat.

La proposition de loi, telle qu’elle a été déposée, puis enrichie à l’Assemblée nationale, répond à deux objectifs essentiels, que le Gouvernement soutient.

D’une part, elle vise à garantir un libre choix aux Français et à leur permettre de changer à tout moment d’assurance, afin qu’ils bénéficient des meilleures garanties au meilleur tarif. Aujourd’hui, seuls 12 % des assurés sont couverts par un autre assureur que celui de leur banque prêteuse. Ce taux est parlant !

D’autre part, cette proposition de loi vise à réduire les discriminations d’accès des personnes atteintes ou ayant été atteintes d’une maladie de longue durée. C’est une question de justice sociale au regard des enjeux d’accès à la propriété.

Le marché de l’assurance emprunteur compte entre 20 millions et 25 millions de contrats actifs. Au cours de la dernière décennie, le législateur s’est penché à plusieurs reprises sur le sujet, afin que l’assurance emprunteur protège les assurés à un coût compétitif.

Les réformes qui se sont succédé depuis 2010 ont permis des avancées significatives. Le marché de l’assurance emprunteur pour le crédit immobilier s’est progressivement ouvert à la concurrence.

Je rappelle que, avant 2010, chacun devait adhérer au contrat de groupe qui pouvait lui être imposé par sa banque. Les emprunteurs ont depuis lors la possibilité de retenir l’assureur de leur choix, et ce choix n’est plus irrévocable. De plus, la possibilité de résilier son contrat est possible à tout moment jusqu’à douze mois après la signature de l’offre de prêt, puis à chaque échéance annuelle.

Ces réformes ont facilité le changement d’emprunteur et ont déjà offert des bénéfices substantiels aux consommateurs. Un bilan des précédentes réformes met en évidence un renforcement de la concurrence et ainsi une baisse de la tarification des contrats d’assurance emprunteur pour le plus grand nombre. Les chiffres sont là aussi éloquents : le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) fait état d’une baisse tarifaire de 20 % à 41 % pour tous les assurés depuis 2010.

Nous ne pouvons que nous en féliciter. Nous devons toutefois améliorer encore le dynamisme de ce marché et la protection du consommateur, au bénéfice de tous.

De nombreux acteurs, dont les associations de consommateurs, se font l’écho de difficultés concrètes rencontrées par nos concitoyens pour substituer le contrat proposé par la banque par un contrat alternatif, au travers d’une délégation d’assurance.

La possibilité de changer à tout moment son contrat d’assurance, qui, je le rappelle, fut soutenue par tous à l’Assemblée nationale, s’inscrit dans le prolongement de réformes précédentes et constitue l’aboutissement cohérent d’une tendance de fond, poursuivie indépendamment des majorités.

Lors des dernières discussions, le Gouvernement avait rappelé la nécessité de traiter le sujet de la résiliation infra-annuelle de manière consensuelle au sein du CCSF, et je regrette qu’aucun consensus de place n’ait émergé.

Cette proposition de loi vient à point nommé. Elle est juste et protectrice du pouvoir d’achat des Français, un sujet qui est à l’ordre du jour. Comme nous l’avons fait dans d’autres domaines, nous entendons être au rendez-vous des attentes.

Le Gouvernement soutient donc les mesures permettant de rendre le dispositif de résiliation pleinement opérationnel : la transparence des décisions de refus de substitution d’assurance, la meilleure information des assurés, l’introduction d’un délai de production de l’avenant au contrat de crédit lors d’une substitution d’assurance, ou encore le renforcement des sanctions administratives à l’encontre des prêteurs et des assureurs aux pratiques dilatoires. Tout cela permettra de rapprocher le régime de ce type d’assurance de celui qui régit les autres contrats, comme les assurances auto et habitation, ou les complémentaires de santé.

J’évoquais le pouvoir d’achat ; pour un primo-accédant ayant emprunté, en moyenne, 234 000 euros à l’âge de 35 ans sur vingt-cinq ans, une telle mesure pourrait faire économiser sur la durée de son prêt entre 3 500 et 4 000 euros. Ce n’est pas rien.

Veillons à ce que cette mesure profite au plus grand nombre, sans porter atteinte aux mécanismes de mutualisation et de solidarité existant, au soutien des assurés les plus fragiles.

Le Gouvernement veille enfin, tout particulièrement, à l’effectivité de ces réformes menées au bénéfice de nos concitoyens. Il sera nécessaire de prévoir un bilan de la mise en œuvre de la résiliation infra-annuelle, par exemple un an ou deux ans après l’entrée en vigueur de la mesure.

J’ai naturellement examiné de près les travaux de la commission et je m’interroge : pourquoi avoir vidé de sa substance cette avancée ? En effet, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez supprimé la possibilité de changer à tout moment de contrat d’assurance, alors même que vos collègues députés du groupe Les Républicains y étaient favorables.

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