Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, c’est peu dire que ce texte était attendu ! Que ce soit pour l’aménagement du Rhône, pour les milliers de salariés qui y travaillent, pour les élus et les collectivités territoriales concernées, ainsi que, bien sûr, pour notre politique énergétique et les enjeux climatiques et de biodiversité.
Comme élu du Rhône et comme écologiste, je soutiens l’objectif principal de ce texte, à savoir le prolongement pour la CNR de la concession d’aménagement du Rhône jusqu’en 2041 et la validation d’un programme d’investissement. Ainsi, 500 millions d’euros seront consacrés à la production d’énergie hydraulique, au transport fluvial, à l’irrigation et à la protection de la biodiversité. Ce sont des axes forts pour l’avenir du Rhône et, donc, pour notre avenir commun.
Oui, il est indispensable de prolonger cette concession, et ce le plus rapidement possible, afin de donner à la CNR davantage de visibilité et de moyens pour relever les défis majeurs à venir.
La baisse de débit de 10 % à 40 % du Rhône à l’horizon 2050, prévue par les scientifiques, doit nous interpeller. Une telle perspective est loin d’être anodine pour le fleuve le plus nucléarisé de France, voire d’Europe, puisque quatre centrales y sont installées et doivent être refroidies. Mais je pense également à l’irrigation de nos cultures. L’avenir climatique de la vallée du Rhône aura un impact fort sur notre quotidien.
Nous aurions aimé renforcer un peu plus la mission de préservation de la biodiversité. C’est pour nous un critère majeur à prendre en compte, sans l’opposer au déploiement de l’hydroélectricité. Nous devons concilier ces deux enjeux.
La CNR doit poursuivre la réalisation des missions d’intérêt général qui participent au développement de la vallée du Rhône. Le maintien des emplois en dépend, comme la possibilité de nombreux recrutements.
Enfin, ce texte est aussi l’occasion de réaffirmer notre opposition à l’ouverture à la concurrence de nos barrages hydroélectriques.
Si cette proposition de loi met la CNR à l’abri du contentieux européen, quid des autres concessions ? Le Gouvernement n’a jamais proposé de solution globale et pérenne pour l’ensemble des concessions, notamment celles qui sont placées sous le régime des « délais glissants ». C’est pourquoi nous défendons un véritable service public des énergies renouvelables.
Ce grand acteur public aurait pour mission d’organiser la transition énergétique, d’atteindre nos objectifs de déploiement des énergies renouvelables, d’assurer la souveraineté énergétique du pays, de maintenir des prix abordables pour les consommateurs, ainsi que de coordonner et de réguler les initiatives privées, aujourd’hui souvent contestées.
La question du statut hybride mi-public, mi-privé de la CNR se posera d’ailleurs à terme.
La maîtrise des retenues d’eau pour produire de l’électricité ou pour tout autre usage doit répondre à des besoins d’intérêt général et non pas aux besoins de rentabilité du privé.
La situation actuelle, avec, en amont et en aval d’une même vallée, des barrages gérés par des compagnies différentes pose question.
Qui qu’il en soit, vous l’aurez compris, nous voterons pour ce texte. C’est un premier pas, qui fait écho à notre proposition de loi visant à maintenir les barrages hydroélectriques dans le domaine public, examinée voilà à peine trois mois et rejetée en bloc par le Sénat.
L’avenir du Rhône se joue dans l’immédiat au travers de ce bel outil qu’est la CNR. Mais je souhaiterais conclure en ouvrant un autre débat, qui doit nous permettre d’envisager un nouveau cadre juridique pour le Rhône.
Nous pensons qu’il deviendra important d’œuvrer à de nouveaux droits pour la nature. D’autres pays, comme la Nouvelle-Zélande, l’Équateur ou la Colombie, ont franchi le pas, en reconnaissant des personnalités juridiques à leurs rivières ou fleuves.
C’est en passant par ce cadre qu’on est arrivé à les protéger, en garantissant une gestion satisfaisant l’intérêt général, l’intérêt commun.
Plusieurs collectivités appellent à reconnaître une personnalité juridique au Rhône. Permettez-moi de profiter de cette tribune pour leur apporter mon soutien et formuler le vœu que la France s’engage dans cette conquête de nouveaux droits pour la nature, afin de préserver notre avenir commun.