Intervention de Philippe Bas

Réunion du 20 juillet 2022 à 15h00
Veille et sécurité sanitaire en matière de lutte contre la covid-19 — Discussion générale

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Monsieur le président, mes chers collègues, je veux tout d’abord saluer et remercier M. le ministre de la santé et de la prévention, qui nous a donné des indications sur ses orientations politiques générales et qui a reconnu la pertinence d’un certain nombre d’apports introduits dans le projet de loi par la commission des lois du Sénat.

M. le ministre a également rappelé que la situation actuelle se caractérisait par une nette amélioration sur le front du covid, tout en soulignant la nécessité pour nos concitoyens de rester vigilants, de respecter les gestes barrières et de porter le masque dans le métro. Ce n’est pas parce qu’il n’y a plus d’obligation qu’il faut faire preuve de négligence et baisser la garde.

Nous partageons ce point de vue sur toutes les travées, ce qui ne nous empêche pas de nous réjouir d’entrer dans une période où le retour de la liberté sera acté par le Parlement, sans retour possible aux pouvoirs d’exception que nous avions consentis tout en les proportionnant strictement aux exigences de la situation sanitaire.

L’épidémie n’est pas terminée. Hier encore, il y a eu 130 000 cas de contamination avérés, et certainement beaucoup d’autres qui n’ont pas fait l’objet de test. Une fraction de plus en plus limitée de ces cas donne lieu à des hospitalisations, notamment en soins critiques, et une fraction heureusement encore plus limitée – mais il y en a encore ! – débouche sur des formes longues de covid ou des décès. Nous devons donc rester attentifs quant à l’évolution de la situation et ne pas banaliser le covid.

Néanmoins, la courbe d’évolution de l’épidémie évoque de manière assez nette, selon les épidémiologistes, celle de toutes les épidémies virales : des variants de plus en plus contagieux et de moins en moins dangereux. Espérons qu’une telle tendance se poursuivra. Nous ne pouvons évidemment pas préjuger des nouveaux variants qui pourraient apparaître.

L’heure est aux premiers bilans. Ayons une pensée pour les familles : en France, il y a eu 150 000 décès, contre 143 000 en Allemagne et un million aux États-Unis. Si on rapporte le nombre de décès à la population, nous ne sommes pas un pays spécialement performant en matière de lutte contre le covid. Alors que la population de la France est de 20 % inférieure à celle de l’Allemagne, le nombre de décès y a été supérieur de 5 %. Ce sont des données ; il ne m’appartient pas de les expliquer.

Nous nous souvenons tous du démarrage chaotique de la lutte contre le covid-19. Je pense notamment à l’absence de masques, aux discours démontrant l’inutilité de ces derniers, à l’absence de gel hydroalcoolique et à la nécessité, faute de moyens de lutter efficacement contre l’épidémie, d’un confinement qui, lui, a été extrêmement efficace pour donner un coup d’arrêt aux contaminations par le premier variant du virus.

En songeant à toutes les victimes de cette maladie extrêmement dangereuse, il n’y a pas de quoi pavoiser ni de quoi estimer, à l’instar du président des États-Unis de l’époque, que nous aurions été spécialement mauvais dans la lutte contre le covid. La réalité se situe quelque part entre les deux. Au Sénat, nous aurions aimé que la France fût plus performante, car le bilan se compte naturellement en vies humaines et en compatriotes souffrant durablement des séquelles de la maladie.

Venons-en au texte. La commission des lois n’a pas fait grand-chose. Elle a simplement voulu établir un texte simple et clair, en sortant d’un entre-deux qui nourrissait le soupçon. Elle a souhaité poser des règles ne laissant pas des pouvoirs excessifs à la discrétion du Gouvernement.

Le peu que nous avons fait tient en trois points. Premièrement, nous avons souhaité abroger l’état d’urgence sanitaire. Deuxièmement, nous avons cherché à protéger à la fois les Français aux frontières contre l’arrivée de variants éventuellement très dangereux – on ne peut pas l’exclure, même si ce n’est pas le sens de l’évolution épidémique – et la population d’outre-mer, les territoires ultramarins pouvant à bon droit être considérés comme particulièrement vulnérables. Troisièmement, nous avons tracé un chemin pour la réintégration des personnels suspendus – je dis bien « suspendus », et non pas « licenciés » – parce qu’ils ne voulaient pas respecter l’obligation vaccinale qui leur était imposée dans l’intérêt des malades ou des personnes prises en charge dans les établissements médico-sociaux pour personnes âgées ou pour personnes handicapées.

Ces trois choses toutes simples sont bien dans l’esprit du Sénat. Elles sont en cohérence avec ce que nous avons toujours fait. En responsabilité, nous sommes prêts à accepter de prendre des mesures de protection, mais celles-ci doivent être strictement proportionnées aux exigences de la situation et ne peuvent être mises en œuvre que sous le contrôle du Parlement.

J’évoquerai tout d’abord l’abrogation. Les pouvoirs exceptionnels que nous avions consentis au Gouvernement en faveur de la protection des Français – nombre d’entre eux nous l’avons signalé – survivaient à la date du 31 juillet 2022. Certes, ils n’étaient plus activables par le Gouvernement sans une disposition législative, qui aurait d’ailleurs pu tenir en une seule ligne.

Monsieur le ministre, nous disons qu’il faut être clair ! Nous voulons abroger l’état d’urgence sanitaire pour que l’on ne puisse plus y revenir. Nous voulons abroger le régime de gestion de la crise sanitaire, qui s’est ajouté à l’état d’urgence sanitaire. Vous pensez que les choses vont sans le dire. Nous vous répondons, selon l’usage, qu’elles vont encore mieux en le disant et, en l’occurrence, en l’écrivant pour le graver dans le marbre de la loi. En effet, il est trop facile d’ouvrir le code de la santé publique au mois d’août et de constater que l’état d’urgence y figure encore.

Si, un jour, nous avons une nouvelle épidémie, nous voulons que vous reveniez ici et que vous discutiez pied à pied tous les pouvoirs que vous réclamerez au Parlement. §Nous ne voulons pas que vous vous contentiez d’une ligne visant à rétablir l’état d’urgence sanitaire.

J’en viens à la protection aux frontières. Nul ne peut prévoir les mutations du virus. Si l’on ne fait rien, vous disposez des pouvoirs de police administrative générale. Vous pourrez donc soit interdire le décollage de tout avion en provenance d’un pays où serait apparu la veille un variant très dangereux, forçant ainsi les passagers à rester sur place, soit placer ces derniers en quarantaine à leur arrivée. Est-ce cela que nous voulons, notamment pour nos compatriotes Français de l’étranger souhaitant rentrer chez nous ? Non ! Nous ne voulons pas qu’ils soient retenus dans leur pays de provenance. Nous voulons qu’en cas de test négatif, ils puissent embarquer, rejoindre leur famille et poursuivre leur activité professionnelle.

Il s’agit d’une mesure de souplesse par rapport aux moyens brutaux que l’État pourrait mettre en œuvre. Certes, elle est virtuelle. Il est improbable qu’elle soit mise en œuvre. Mais, si tel était le cas, il faudrait le faire de toute urgence. C’est la raison pour laquelle un tel dispositif doit figurer dans le texte.

Enfin, nous devons trouver un chemin non pas pour réintégrer demain ou après-demain les personnels soignants ou les sapeurs-pompiers éloignés de leur activité en raison de l’obligation vaccinale, …

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