rapporteur pour avis des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ». - Les 200 millions d'euros supplémentaires que vous nous présentez pourraient laisser penser qu'enfin, les agriculteurs seraient entendus, mais, en réalité, ces crédits sont bien l'arbre qui cache la forêt de tout ce qui ne change pas.
L'assurance récolte requiert de la confiance, mais pour que les agriculteurs aient confiance, il faut leur en donner les moyens, donc commencer par un texte partagé. Or, ce texte, il est passé un peu au forceps et on attend toujours les décrets qui doivent traduire les engagements oraux pris dans l'hémicycle... Il y a certes la commission départementale d'expertise pour évaluer les calamités, mais le fait de n'inscrire aucun montant précis à la politique que vous prétendez conduire, n'aide pas à la confiance des agriculteurs. Vous demandez 120 millions d'euros d'effort aux agriculteurs mais vous n'inscrivez pas les 680 millions d'euros qui couvriraient les quatre taux que vous avez fini par accepter, c'est-à-dire les 20 % de franchise, les 70 % de subvention, et les 30 et 50 % de subvention de l'État. Pourquoi ne pas le faire ? Cela traduirait les engagements de l'État, même si la totalité de ces crédits devaient, finalement, ne pas être consommés.
Le TO-DE, ensuite. Le Président de la République en annonce la pérennisation, mais il faut faire attention aux mots, au sens qu'on leur donne, qui peut varier ici et là. Il est vrai que le Président de la République a dit qu'il voulait pérenniser le TO-DE, qu'il estime être un bon système ; mais alors, pourquoi le Gouvernement ne l'a-t-il pas fait ? Les 430 millions d'euros figurent désormais au budget de l'agriculture, mais pourquoi a-t-il fallu attendre l'amendement d'un député Les Républicains pour pérenniser le TO-DE pendant trois ans, puis le passage au Sénat pour lever cette durée ? Même chose, pour la police alimentaire : j'y suis favorable, en particulier parce que c'est le moyen de faire respecter les clauses miroirs ; mais vous mettez les agents dans les départements, ce n'est pas là qu'ils vont régler le problème des produits importés qui ne respectent pas nos normes, c'est à Rungis et sur les frontières qu'il faut avoir des agents de la police alimentaire, plutôt que de leur demander d'embêter et contrôler toujours plus les agriculteurs qui s'arrachent à la tâche tous les jours !
En réalité, nous souffrons d'une sur-administration et d'une sur-transposition, au point que si, après des années on est parvenu à faire baisser la pénibilité physique du travail agricole, on en a considérablement augmenté la pénibilité psychologique. Je vais vous citer l'exemple de Cyril Testud, agriculteur en Ardèche : parce qu'une année, il a oublié de cocher une case dans le formulaire d'une indemnité qu'il touche sans discontinuer depuis des années, il a perdu 13 950 euros d'aide, sans possibilité de rattrapage : vous trouvez cela normal ?
Alors j'ai une proposition, monsieur le ministre. Les représentants de la restauration hors domicile me disent que l'inflation dépasserait 15 % pour leurs produits à compter d'avril prochain, ce qui augmenterait de 40 centimes le coût d'un repas de cantine ; ils me disent aussi que toutes les contraintes que nous leur avons ajoutées depuis quatre ans, en particulier dans les lois « Egalim », représenteraient 20 centimes de plus pour un repas de cantine. Alors, monsieur le ministre, quand on est, comme le dit le Président de la République, dans une économie de guerre, arrêtez de multiplier les injonctions contradictoires aux agriculteurs et donnez à la liberté d'entreprendre la possibilité de s'exprimer - ou bien nous serons dans une situation où il sera trop tard, les dégâts seront faits...