Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en ce début d’année 2023, notre parc nucléaire reprend des forces. Après une production historiquement faible en 2022 – autour de 280 térawattheures –, nous devrions atteindre cette année 330 térawattheures.
Deux facteurs principalement expliquent cette faible disponibilité du nucléaire : les opérations de maintenance classique et, surtout, un problème de fissuration, dit de corrosion sous contrainte, un mal mystérieux qui menace des tuyauteries de secours destinées au refroidissement et qui touche les tranches les plus récentes et les plus puissantes : Civaux, Penly et la centrale de Chooz.
Cette crise ponctuelle nous a permis de constater l’efficacité des autorités de contrôle et la diligence d’EDF pour garantir un niveau de sécurité optimal. Le problème générique sur les réacteurs a été pris très au sérieux et, sur les dix chantiers ouverts, six sont désormais terminés.
Ainsi, en ce milieu d’hiver, seuls douze réacteurs sont à l’arrêt, contre plus de trente au sortir de l’été. Le pire est donc passé, lorsque l’on sait que le pays a dû se résoudre, en 2022, à importer plus d’électricité qu’il n’en a exportée – une première en quarante ans. Cette année difficile pour le parc nucléaire doit nous conduire à nous interroger sur ce que nous souhaitons pour assurer notre indépendance énergétique.
Face au dérèglement climatique – l’année 2022 est la plus chaude jamais mesurée en France, je le rappelle –, et afin d’assurer une sécurité d’approvisionnement, ce gouvernement a choisi de construire sa stratégie énergétique autour de deux axes : les énergies renouvelables et l’énergie nucléaire.
Notre groupe se réjouit que le Gouvernement ait choisi de reprendre le fil de la grande aventure du nucléaire civil en France, avec la construction de six EPR 2 et le lancement d’études sur la construction de huit EPR 2 additionnels.
Pour autant, une fois ce cadre politique posé, vient le temps essentiel de la concertation, un moment démocratique indispensable pour recueillir l’avis des citoyens sur les orientations de la politique énergétique française et permettre à chacun de s’exprimer sur les mesures à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs de transition énergétique.
Cette concertation nationale a commencé le 20 octobre et prendra fin demain, le 18 janvier. À partir de ces contributions, le Parlement pourra débattre à son tour de la loi de programmation sur l’énergie et le climat. À cette occasion, notre groupe défendra une politique conforme à l’accord de Paris, c’est-à-dire fondée sur une réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre de 55 % en 2030 par rapport au niveau de 1990.
En attendant, plutôt que d’être dans la passivité, notre gouvernement a choisi d’agir et d’accélérer, et nous nous en félicitons.
Tel est l’objet de ce projet de loi, appuyé sur des mesures de simplification administrative, en matière tant d’urbanisme que de procédure et de planification, avec le seul but de gagner du temps, ou au moins de ne plus en perdre.
Ainsi, dès la promulgation de la loi de programmation, les dispositions dont nous allons débattre permettront d’être opérationnels en vue de la construction d’une première paire de réacteurs EPR 2 à Penly et de deux autres à Gravelines, dans le Nord.
En tant qu’élu drômois, rejoint en ce sens par mon ami le maire de Pierrelatte, Alain Gallu, je souhaite ardemment que le site du Tricastin puisse accueillir deux nouveaux réacteurs ; quelque 135 hectares y sont d’ores et déjà disponibles pour donner une nouvelle impulsion économique et industrielle à notre région.
Ce projet de loi, certes très technique, contient des mesures de simplification essentielles si nous entendons mettre en œuvre rapidement notre stratégie nucléaire.
Il propose ainsi de dispenser de permis de construire les installations et les travaux de création d’un réacteur nucléaire. La construction de réacteurs électronucléaires induit en effet des contraintes que le permis de construire ne permet pas d’appréhender dans leur intégralité.
Il permet aussi de démarrer certains travaux dès l’obtention d’une autorisation environnementale. Cela concerne des activités qui ne revêtent aucun caractère sensible, comme les travaux de terrassement ou de construction des bureaux, voire la construction de clôtures et de parkings nécessaires au chantier.
S’agissant de la centrale de Penly, il est proposé de construire de nouveaux réacteurs nucléaires en bord de mer. La particularité de cette centrale provenant de son site, au pied des hautes falaises de craie de la côte d’Albâtre, l’application de la loi Littoral doit être écartée pour ces travaux.
Enfin, le texte supprime, à juste titre, la mise à l’arrêt définitif de plein droit d’une installation nucléaire de base ayant cessé de fonctionner depuis plus de deux ans. L’actualité récente nous a montré que certaines centrales frappées par une longue mise à l’arrêt ont dû recourir à des dossiers de demande de dérogation chronophages et peu utiles.
Ces mesures de simplification ont globalement été approuvées par la commission des affaires économiques, dont je salue l’esprit de responsabilité.
Notre groupe proposera cependant quelques amendements de correction, visant à revenir sur des précisions qui ont été adoptées en commission et qui sont satisfaites par le code de l’environnement. Nous comptons modifier également l’article 3, qui apporte des précisions aux demandes d’autorisation environnementale et dont la rédaction actuelle risque d’alourdir le dispositif sans apporter de réelle plus-value.
Hormis ces quelques points, nous nous félicitons qu’une grande partie des groupes politiques soutienne ce texte fondateur, première pierre d’un immense chantier pour la relance du nucléaire en France. Bien évidemment, notre groupe le votera.