Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, porter « amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé » : voilà un objectif ambitieux, que nous partageons sans doute tous.
Oui, l’accès aux soins doit être renforcé dans notre pays, où beaucoup de territoires sont considérés comme des déserts médicaux et où 6 millions de personnes n’ont pas de médecin traitant. Oui, il faut redonner du temps médical aux médecins. Oui, il faut renforcer l’attractivité des métiers de la santé et former davantage d’infirmières, notamment d’IPA.
Si nous partageons le constat et l’objectif affiché dans la proposition de loi, les moyens pour l’atteindre ne font en revanche pas l’unanimité. Au contraire, le texte a largement divisé, au sein même des professionnels de santé. Je remercie Mme la rapporteure Corinne Imbert d’avoir essayé de l’améliorer.
La proposition de loi vise à élargir les compétences de certaines professions de santé et à permettre l’accès direct à trois d’entre elles. Certains articles remettant en question l’organisation du parcours de soins du patient, nous devons nous montrer prudents, afin que réorganisation ne rime pas avec désorganisation.
L’article 1er, notamment, tend à autoriser l’accès direct aux infirmiers en pratique avancée.
Les IPA devraient aujourd’hui apporter un appui précieux aux équipes de soins, en assurant le suivi de patients chroniques qui leur sont confiés par les médecins, ce qui permet à ceux-ci d’augmenter leur temps médical. Nous ne souhaitons remettre en cause ni les compétences ni la légitimité des IPA. Vous l’avez dit, madame la ministre, c’est une chance d’avoir ces professionnels, à condition qu’ils soient bien utilisés par délégation des médecins.
Les IPA sont formés à la prise en soins des pathologies chroniques stabilisées. Ces formations ne peuvent pas remplacer les dix ans d’études des médecins en sémiologie, physiologie et pathologie, assorties d’une expérience de plusieurs années en internat dans les services hospitaliers.
Le médecin doit donc garder la compétence du diagnostic. Nous pensons que médecins et IPA doivent travailler ensemble, en synergie et par délégation, et ce afin de sécuriser tant la prise en charge du patient que l’activité de l’IPA elle-même. Les travaux portant sur ces professions dans d’autres pays montrent d’ailleurs des preuves d’efficacité uniquement lorsqu’il existe une collaboration réelle entre médecin traitant et infirmier.
J’en viens à l’article 2, relatif aux kinésithérapeutes. Si nous pensons que les médecins doivent conserver la prescription, nous avions déposé un amendement tendant à autoriser les kinésithérapeutes à renouveler des séances, avec l’avis du médecin, en cas d’exercice en Ehpad.
L’accès direct aux orthophonistes mérite d’être soutenu, compte tenu du type de prise en charge très ciblée que ces professionnels sont amenés à assurer.
Les nouvelles compétences octroyées aux assistants médicaux dits de niveau II, aux orthoprothésistes et aux opticiens semblent constituer des solutions pratiques.
Dans l’article 1er bis, relatif à la prise en charge par les infirmiers de la prévention et du traitement des plaies chroniques, il serait important de préciser que le renouvellement pourra se faire par l’infirmier diplômé d’État, après avis du médecin. En effet, si une plaie chronique ne guérit pas, cela peut révéler une mauvaise prise en charge par non-détection d’un trouble artéritique ou une mauvaise contention effectuée sur une insuffisance veineuse et, dans ce cas, l’intervention du médecin est nécessaire.
L’article 4 septies fait bénéficier les pédicures-podologues d’une consultation tous les trois mois par prescription pour les patients diabétiques. Pourquoi ne pas l’autoriser en accès direct ? Si un patient diabétique a besoin d’une consultation plus fréquente qu’une fois par trimestre, cela peut traduire un risque d’artérite et révéler la nécessité de consulter un médecin.
Je soutiens enfin l’extension de la possibilité de faire renouveler une prescription par le pharmacien et je regrette qu’aucun de mes amendements élargissant les compétences en question n’ait été accepté. Je suis aussi favorable à l’extension de la vaccination aux infirmiers.
La place du médecin traitant doit rester centrale, tout simplement, car c’est le professionnel qui détient aujourd’hui, du fait de sa formation, les meilleures compétences pour assurer la coordination du parcours de soins du patient.
L’ensemble des amendements que j’ai déposés ou que je soutiendrai vont dans ce sens, pour les patients et pour sécuriser les professions paramédicales. Madame la ministre déléguée, nous devons plus écouter les médecins et les professionnels de santé !