Cet amendement mérite quelques explications.
Dans un contexte budgétaire tendu, la péréquation prend une importance particulière. L’État, le Parlement et le Comité des finances locales y ont été sensibles. Il faut en effet rappeler, monsieur Sueur, que les dotations de péréquation ont augmenté de près de 45 % entre 2004 et 2009.
Il n’en demeure pas moins que la part des volumes financiers consacrée à la péréquation ne conduit pas toujours à réduire les écarts de richesse entre les différentes collectivités. Le rapport de 2006 des professeurs Guy Gilbert et Alain Guengant est très éclairant sur ce sujet. Il montre en effet que, sur la période 2000-2006, les régions ont vu leur inégalité de pouvoir d’achat s’atténuer, ce qui n’a pas été le cas pour les communes et pour les départements.
Encore faut-il que les régions les plus fragiles puissent bénéficier de cette péréquation. C’est tout l’objet de cet amendement.
En effet, les critères actuels d’éligibilité des régions à cette dotation ne prennent pas en compte la spécificité des territoires régionaux et pénalisent les régions dont la démographie augmente le moins.
Ce mode de calcul conduit peu à peu à des incohérences qui se manifestent par le risque d’exclusion de certaines régions fragiles, ce qui est déjà le cas pour l’Auvergne et qui pourrait aussi concerner d’autres régions si de nouvelles règles ne sont pas mises en place.
Le débat n’est pas nouveau puisqu’il a déjà été évoqué ici même, l’année dernière, lors de la discussion de loi de finances pour 2009.
Un groupe de travail constitué au sein du Comité des finances locales n’a pu aboutir à un consensus. L’exercice est en effet difficile, car la répartition s’entend à enveloppe fermée. Or, nous le savons, plus on est nombreux autour de la table, moins les parts de gâteau sont généreuses...
Cette situation m’a donc conduit à mener, durant l’année 2009, une mission de contrôle, au nom de la commission des finances, sur l’efficacité de la péréquation régionale. C’est sur la base des conclusions de ce rapport que la commission des finances vous propose un amendement visant à faire un pas vers une péréquation plus juste, en modifiant les critères d’éligibilité à la dotation de péréquation des régions sans affecter les critères de la répartition.
En effet, actuellement, les critères d’éligibilité sont fondés uniquement sur la comparaison des potentiels fiscaux par habitant, alors que, paradoxalement, ceux de la répartition entre régions prennent en compte les spécificités du territoire régional comme le potentiel fiscal superficiaire.
En d’autres termes, la notion de territoire est absente dans les critères de sélection des régions et, de surcroît, une région peut être exclue de la dotation de péréquation du fait d’une évolution démographique plus faible que celle des autres régions.
En effet, une croissance démographique moins rapide induit une augmentation du potentiel fiscal par habitant plus importante que la moyenne de référence qui sert de base au seuil d’éligibilité à la dotation.
Une région peut ainsi se trouver exclue du dispositif de péréquation, alors même qu’elle aura à supporter des charges fixes par habitant plus fortes. C’est alors le régime de la double peine qu’elle subit.
Nous proposons donc de rapprocher les critères de l’éligibilité de ceux de la répartition, en intégrant un nouvel élément fondé sur le potentiel fiscal superficiaire des régions. Au critère de potentiel fiscal moyen par habitant on ajouterait ainsi un critère ouvrant l’éligibilité aux régions dont le potentiel fiscal par kilomètre carré est inférieur au potentiel fiscal par kilomètre carré de l’ensemble des régions.
La commission a estimé qu’il revenait au Comité des finances locales et au Gouvernement de déterminer la place du curseur pour ce critère, en fonction des informations et des simulations qu’ils seront à même de réaliser. Il leur reviendra de déterminer la bonne mesure permettant de retenir un nombre raisonnable de régions pour l’éligibilité, en limitant les effets à la marge sur les dotations des régions déjà éligibles.
Par le vote de cet amendement, nous vous invitons à poser le principe de la prise en compte de la diversité des territoires dans les critères de l’éligibilité à la dotation de péréquation régionale pour évoluer vers une péréquation plus juste.