Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 4 juillet 2005 à 15h00
Modification de la loi organique relative aux lois de finances — Adoption définitive d'un projet de loi organique en deuxième lecture

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, rapporteur :

... s'il le souhaite, des dispositions de la loi organique relative aux lois de finances, afin que ses membres puissent envisager dans l'allégresse l'examen du prochain projet de loi de finances.

Il revient au Parlement, disais-je, de contrôler l'exécution du budget et la réalisation des performances annoncées dans le cadre du projet de loi de règlement, dont l'importance devra être renforcée. Ce contrôle viendra à l'appui de ses décisions relatives au projet de loi de finances suivant. Comment le Parlement pourrait-il contrôler l'exécution budgétaire après avoir « copiloté » les mesures de régulation ? Voilà qui justifie que ces dernières soient une prérogative exclusive du Gouvernement.

Par ailleurs, il est indispensable, en opportunité, que le Gouvernement dispose de toute la souplesse nécessaire en cours d'exercice pour adapter son action aux évolutions de la conjoncture, ce qui ne le dispense pas d'un contrôle parlementaire sur la sincérité de l'exécution.

En outre, la rédaction proposée présente l'avantage de relier les mesures de gel à ce qui devrait être leur finalité, à savoir « assurer en exécution le respect du plafond global des dépenses du budget général voté par le Parlement ».

Dans un objectif de simplicité et pour favoriser un débat général sur le sujet, la solution qui consiste à prévoir des taux différents selon les programmes a été écartée. Il a donc été retenu deux taux distincts : le premier pour le titre II, relatif aux dépenses de personnel, le second pour les autres titres.

Le dispositif présenté paraît de nature à responsabiliser les gestionnaires, en leur permettant de distinguer, au sein des crédits de leur programme, entre une « tranche ferme » et une « tranche conditionnelle », ayant ensuite vocation soit à être « dégelée », soit à être annulée.

La commission des finances propose donc au Sénat d'adopter l'article 9 du projet de loi organique.

L'article 10, pour sa part, a pour finalité de permettre la mesure, au stade du projet de loi de règlement, de l'incidence sur la dette de l'Etat des opérations réalisées dans le cadre des partenariats public-privé. De ce point de vue, il s'inscrit exactement dans l'objectif que s'était fixé le Sénat à l'article 8.

Désormais, le compte général de l'Etat comportera, parmi les annexes du bilan, une présentation du traitement comptable des opérations conduites en partenariat entre le public et le privé.

La commission des finances vous propose, mes chers collègues, d'adopter l'article 10.

L'article 11 n'est pas sans lien, comme je le disais tout à l'heure, avec l'article 6 du projet de loi organique, inséré par l'Assemblée nationale puis supprimé par le Sénat en première lecture, même si les dispositions ne sont pas tout à fait identiques.

Par rapport au précédent, le nouveau texte présenté comporte deux différences : il « limite » la possibilité de débat parlementaire au seul rapport annuel de la Cour des comptes, sans plus faire référence aux « autres rapports publics » ; il ne reprend pas la charge de « préparation » des débats qui aurait été assignée à la Cour des comptes dans le cadre de sa mission d'assistance au Parlement.

Le présent article se borne à compléter l'article 58 de la loi organique relative aux lois de finances, pour énoncer que « le rapport annuel de la Cour des comptes peut faire l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat », ce débat gardant donc un caractère facultatif.

Tout en enregistrant positivement « l'atténuation », par l'Assemblée nationale, de son texte initial et tout en partageant les objectifs visés, la commission des finances du Sénat continue d'estimer que les dispositions votées par nos collègues députés sont superfétatoires. L'organisation, chaque année, d'un débat en séance publique sur le rapport de la Cour des comptes est permise par les textes en vigueur, plus précisément dans le cadre de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution, concernant les séances mensuelles réservées par priorité à l'ordre du jour fixé par chaque assemblée.

Il n'est donc pas besoin, pour atteindre l'objectif louable de nos collègues de l'Assemblée nationale, de « charger » une loi organique, en l'occurrence la LOLF, de dispositions juridiquement inutiles, avant même sa complète mise en oeuvre, au risque d'en faire une loi « bavarde ».

Au demeurant, comme l'a relevé notre collègue député Didier Migaud, il n'est pas totalement certain que la formule retenue soit la plus efficace pour atteindre l'objectif visé : « L'efficacité du contrôle procède non de textes, mais d'une volonté. Une audition en commission d'un président de chambre peut avoir une audience réelle si elle est ouverte à la presse. Un certain formalisme bride la parole des parlementaires en séance publique, sans permettre d'y dégager toujours des indications ou des orientations précises. L'enceinte de la commission peut être plus appropriée pour organiser un débat efficace. »

Les pratiques récemment développées par la commission des finances témoignent de la pertinence de cette observation. Ainsi, l'audition contradictoire, ouverte à la presse, qu'elle a organisée le 22 mars 2005 à la suite du rapport établi par la Cour des comptes sur Météo France dans le cadre de l'article 58, alinéa 2, de la loi organique relative aux lois de finances, a permis une véritable confrontation entre ses membres et les responsables de l'établissement public, ainsi que le ministère de tutelle.

Ce débat, qui a bénéficié d'un retour médiatique incontestable, pourrait, aussi bien qu'une discussion en séance publique, permettre de favoriser le suivi des recommandations de la Cour des comptes, du moins de certaines d'entre elles.

Néanmoins, tenant compte de l'effort de rapprochement accompli par l'Assemblée nationale, la commission des finances pense qu'il est possible, dans un esprit de conciliation, de mettre un terme à la navette du présent projet de loi organique.

Il est temps, monsieur le ministre, de refermer la boite de Pandore, et de vous donner le temps dont vous avez besoin pour réformer aussi le système d'information budgétaire, comptable et financière de l'Etat. Sans un système complet se substituant aux nombreux systèmes actuels, nous aurons quelque peine à faire vivre dans sa pleine efficacité notre nouvelle constitution financière.

Ainsi, mes chers collègues, la commission des finances vous propose d'adopter sans modification l'article 11, ainsi que l'ensemble du projet de loi organique, levier de réforme de l'Etat, instrument de la lucidité politique.

Si le courage et la volonté sont au rendez-vous de nos devoirs, alors, oui, nous devons cesser de douter de nous-mêmes, de notre capacité à maîtriser la dépense publique, et nous convaincre qu'il est justifié d'entrer dans une ère nouvelle avec confiance. Ce qui est en cause, c'est bien la bonne gouvernance de l'Etat.

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