Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d'aborder le contenu de cette proposition de loi modifiant certaines dispositions relatives au fonctionnement de la collectivité territoriale de Corse, je ferai quelques remarques préliminaires.
Première remarque préliminaire, le texte dont nous sommes saisis est une proposition de loi, et non un projet de loi, ce qui implique un certain nombre de conséquences.
Ainsi, l'Assemblée de Corse n'a pas été préalablement saisie de ce texte, ce qui aurait été obligatoire s'il s'était agi d'un projet de loi.
Par ailleurs, cette proposition de loi est le résultat des amendements que notre collègue Nicolas Alfonsi avait déposés sur deux textes, le projet de loi relatif à la parité entre hommes et femmes sur les listes de candidats à l'élection des membres de l'Assemblée de Corse et le projet de loi tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. Il les avait alors retirés et avait accepté l'invitation qui lui avait été faite de déposer une proposition de loi.
Enfin, s'agissant d'une proposition de loi, le Gouvernement n'est pas engagé dans cette procédure.
Deuxième remarque préliminaire, il ne s'agit naturellement pas de porter atteinte aux droits des Corses. C'est la raison pour laquelle je souhaite que, entre l'adoption de cette proposition de loi par le Sénat et son inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, l'Assemblée de Corse soit saisie du texte pour qu'elle puisse donner son avis.
J'en viens à ma troisième remarque préliminaire. J'ai sollicité l'avis soit oralement, soit par écrit, des députés et des sénateurs de Corse, ainsi que du président de l'Assemblée de Corse. Leur point de vue est très proche de celui de notre collègue Nicolas Alfonsi. Tout au plus convient-il de mentionner qu'un certain nombre de parlementaires souhaitent que le statut de la Corse se rapproche progressivement du statut régional. D'autres ont trouvé que les propositions de notre collègue n'allaient pas suffisamment loin. D'autres encore considèrent que le moment n'est pas propice à une telle proposition de loi et qu'il conviendrait peut-être d'attendre la fin de la période électorale.
En conséquence, après avoir écouté les uns et les autres, j'estime que la proposition de loi de notre collègue est bienvenue. Elle permettra de mettre fin aux anomalies qui affectent le fonctionnement de l'Assemblée de Corse en entraînant la multiplication du nombre des forces politiques qui se présentent aux élections et en empêchant pour l'instant la formation de véritables majorités.
Par ailleurs, cette proposition de loi ne porte atteinte à personne. Au contraire, elle permet d'ouvrir un débat qui pourra utilement se poursuivre le jour où l'Assemblée nationale l'inscrira à son ordre du jour ou celui où le Gouvernement acceptera de l'inscrire à l'ordre du jour prioritaire.
Quant au contenu même de la proposition de loi, celle-ci ne comprend que deux articles.
Tout d'abord, l'article 1er augmente la prime majoritaire, en la portant de trois à six sièges pour les membres du conseil de l'Assemblée de Corse, ce qui d'ailleurs ne permet pas, dans la situation actuelle, de dégager une véritable majorité.
Ensuite, cet article porte de 5 % à 7 % des suffrages exprimés le seuil permettant à une liste de se présenter au second tour ; M. Alfonsi avait proposé de fixer ce seuil à 7, 5 % dans sa proposition de loi, mais il a été ramené à 7 %, les décimales ne paraissant pas souhaitables dans une loi. C'est tout de même le seuil le plus bas pour toutes nos élections ! À cet égard, peut-être faudra-t-il, monsieur le ministre, que l'on se penche un jour sur l'harmonisation de ces seuils, tant les différences sont nombreuses selon les modes de scrutin ? C'est le cas en particulier à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, où les seuils sont encore différents de ceux qui sont prévus pour les autres collectivités territoriales.
Enfin, l'article 1er concerne la fusion des listes. À l'heure actuelle, il n'existe aucun seuil, ce qui permet naturellement la multiplication des listes au premier tour. La proposition de loi de Nicolas Alfonsi fixe à 5 % des suffrages exprimés le seuil à partir duquel la fusion sera possible au second tour, ce qui est à peu près la norme pour toutes les élections.
L'article 2 procède à une harmonisation avec les élections régionales : en cas d'incompatibilité pour cause de cumul de mandats, l'intéressé dispose d'un mois pour choisir l'un ou l'autre des mandats.
Comme vous le savez, le mandat de conseiller à l'Assemblée de Corse est incompatible avec la fonction de membre du conseil exécutif de Corse. Ainsi, après que l'Assemblée territoriale a élu le conseil exécutif, toute une série de ses membres se retire pour laisser la place aux « suivants de liste », ce qui n'est pas tout à fait souhaitable. Je crois donc qu'il convient de suivre, sur ce point, notre collègue Alfonsi.
Cette dernière remarque étant faite, je vous demande, au nom de la commission des lois, de voter en faveur de cette proposition de loi.