Séance en hémicycle du 13 février 2007 à 16h10

Résumé de la séance

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La séance

Source

La séance, suspendue à midi, est reprise à seize heures dix, sous la présidence de M. Christian Poncelet.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'ai reçu de M. le Premier ministre une lettre en date du 13 février 2007 par laquelle il fait part au Sénat de sa décision de placer en mission temporaire auprès du ministre de l'outre-mer Mme Lucette Michaux-Chevry, sénateur de la Guadeloupe.

Cette mission portera sur l'organisation et les priorités d'une coopération régionale à partir des départements français d'Amérique en direction de l'espace caraïbe.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

(Ordre du jour réservé)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux modalités de dissolution de la mutuelle dénommée Société nationale « Les Médaillés militaires » (nos 184, 216).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi nous arrive directement de l'Assemblée nationale, où elle a été présentée par M. le député Charles Cova, et nous offre l'occasion de rendre un hommage mérité aux médaillés militaires.

Chacun connaît, dans cet hémicycle, la valeur des cadres de notre armée. Au cours des siècles, ils se sont magnifiquement illustrés sur tous les théâtres d'opérations. Il est donc juste et légitime que notre pays leur manifeste sa reconnaissance par cette décoration spécifique et exceptionnelle, la médaille militaire, qui exprime, depuis le second Empire, la gratitude de la patrie envers tous ceux qui l'ont servie avec abnégation et dignité, parfois jusqu'au sacrifice suprême.

Je veux aussi saisir l'occasion de ce débat pour saluer la mémoire de M. Orlowski, qui a présidé la Société nationale « Les Médaillés militaires » pendant des années avec dynamisme, sagesse et compétence. Sa disparition soudaine a endeuillé le monde combattant.

La proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui vise à répondre à la situation particulière de la mutuelle des titulaires de la médaille militaire. Les responsables de cette mutuelle ont constaté que l'évolution des règles de la mutualité rend difficile la gestion de la maison de retraite dont elle a la charge. Une décision de son assemblée générale a donc demandé la dissolution de la mutuelle et l'affectation de son actif à une association reconnue d'utilité publique.

Pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, êtes-vous appelés à vous prononcer sur une telle décision ? Tout simplement parce que cette solution, qui nous paraît à tous égards la meilleure, suppose une dérogation aux dispositions de l'article L. 113-4 du code de la mutualité. Par conséquent, nous sommes obligés de vous demander de vous prononcer sur la dissolution de cette mutuelle.

Ce type de dérogation doit rester exceptionnel.

M. Fischer manifeste son scepticisme.

Debut de section - Permalien
Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille

En effet, il ne faudrait pas fragiliser le fonds national de garantie des mutuelles, dont la finalité est d'assurer, en cas de défaillance d'une mutuelle, la couverture des droits de ses adhérents. S'agissant de ce cas très particulier, le Gouvernement a donné un avis favorable à cette réforme. Vous ayant dit l'essentiel, il ne me paraît pas utile de développer davantage la motivation de ce texte.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Janine Rozier

Comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, la proposition de loi que nous allons examiner a été déposée à l'Assemblée nationale par notre collègue député Charles Cova. M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, avait lui aussi l'intention de présenter une proposition de loi similaire. Elle a été inscrite à l'ordre du jour réservé de notre assemblée par le groupe de l'UMP.

Le texte qui nous est soumis aujourd'hui ne comporte qu'un seul article et a un objet très simple : permettre la transformation de la Société nationale « Les Médaillés militaires », qui a aujourd'hui le statut de mutuelle, en association. Je reviendrai dans un instant sur ce dispositif.

Auparavant, je voudrais en effet profiter de cette occasion qui nous est donnée pour rappeler ce qu'est la Médaille militaire, qui sont les médaillés militaires et pourquoi nous devons affirmer notre reconnaissance à leur égard.

La Médaille militaire a été instituée par un décret du 22 janvier 1852, signé de Louis-Napoléon Bonaparte, futur Napoléon III, qui tenait absolument à récompenser la bravoure des soldats et des sous-officiers.

En effet, surnommée « le bijou de l'armée », cette décoration a ceci d'original qu'elle est réservée à la fois au bas de la hiérarchie militaire, c'est-à-dire aux soldats et aux sous-officiers, et aux plus hautes autorités de celle-ci. Ainsi, à titre exceptionnel, la Médaille militaire peut être concédée, par décret pris en conseil des ministres, aux maréchaux de France et aux officiers généraux grands-croix de la Légion d'honneur qui, en temps de guerre, ont exercé un commandement en chef devant l'ennemi ou ont rendu des services exceptionnels à la défense nationale. C'est assez dire l'importance que revêt la possession de cette distinction, gagnée « au feu », en particulier par beaucoup des auteurs des courriers que nous sommes nombreux ici à avoir reçus.

Depuis sa création, cette médaille a été attribuée à environ un million d'hommes de troupe et sous-officiers et à 156 généraux et maréchaux, parmi lesquels Joffre, Foch, Lyautey, de Lattre et Leclerc. Elle a également honoré des personnalités étrangères, notamment Churchill, le général Eisenhower et le président Franklin Roosevelt.

On compte actuellement environ 200 000 titulaires vivants de la Médaille militaire. Le contingent annuel est de l'ordre de 3 500 récompenses, destinées à honorer les militaires, hommes et femmes, qui ont servi au moins huit années dans l'une des trois armées ou la gendarmerie nationale et rendu des services exceptionnels.

La Médaille militaire est la troisième décoration dans l'ordre de préséance, après la Légion d'honneur et la croix de Compagnon de la Libération, mais avant l'ordre national du Mérite.

Sa gestion est, depuis l'origine, assurée par la Grande Chancellerie de la Légion d'honneur. Celle-ci se borne toutefois aux questions administratives et de discipline. Aussi, pour soutenir les médaillés et affirmer leur solidarité, une société de secours mutuel a-t-elle été créée par les médaillés militaires eux-mêmes en 1904. Reconnue d'utilité publique en 1931, cette société nationale, dénommée « Les Médaillés militaires », avait pour vocation d'apporter un soutien matériel et financier aux médaillés et à leurs familles, à une époque où les assurances sociales n'existaient pas, tout en cultivant une fraternité et une solidarité entre les médaillés.

Aujourd'hui, cette société nationale compte plus de 70 000 adhérents répartis dans le monde entier. Elle poursuit son oeuvre de solidarité, essentiellement au travers de la gestion d'une maison de retraite, implantée à Hyères.

En effet, son rôle initial d'assurance sociale a pour ainsi dire disparu, principalement du fait de l'avènement de la sécurité sociale en 1945, mais aussi en raison de la fin des conflits successifs et meurtriers qui ont émaillé notre histoire au cours des cent cinquante dernières années.

Or, malgré cette évolution dans les missions de la société nationale, celle-ci reste régie, comme à l'origine, par le code de la mutualité.

Si ce choix des médaillés fondateurs s'est longtemps avéré fort judicieux, il n'apparaît plus en être de même aujourd'hui. En effet, les dispositions du code de la mutualité, telles qu'issues de l'ordonnance du 19 avril 2001 transposant les directives européennes « assurances » pour la sphère de la mutualité, semblent particulièrement lourdes et inadaptées aux activités actuelles de la société nationale. Cela est vrai en ce qui concerne les règles de fixation des cotisations et celles qui sont applicables au versement des prestations ou au rôle de l'assemblée générale, ou encore pour ce qui est des buts visés.

C'est pourquoi la Société nationale « Les Médaillés militaires » considère aujourd'hui qu'un statut associatif serait plus approprié à la poursuite de ses activités, notamment pour la distribution d'aides liées à des besoins ponctuels ou urgents et pour le maintien d'une communauté solidaire et vivante entre les médaillés. La formule associative a d'ailleurs été choisie par les organismes équivalents que sont la Société d'entraide des membres de la Légion d'honneur et l'Association des membres de l'ordre national du Mérite.

Cette transformation de statut a été préparée par la Société des médaillés militaires, qui prévoit de se dissoudre au profit de l'Association de l'orphelinat et des oeuvres des médaillés militaires, créée en son sein il y a déjà de nombreuses années.

Néanmoins, pour que cette transformation soit effective, il reste un verrou législatif à lever : celui de l'article L. 113-4 du code de la mutualité. En effet, celui-ci rend obligatoire, après dissolution d'une mutuelle, le transfert de son actif à une autre mutuelle ou au Fonds national de garantie des mutuelles.

Par dérogation à cette disposition, la présente proposition de loi prévoit que l'actif de la Société nationale « Les Médaillés militaires » sera transféré à l'association d'utilité publique qui exercera à l'avenir les missions de cette dernière. Prévoyants, les médaillés militaires, réunis en assemblée générale le 11 décembre 2006, ont d'ailleurs su procéder à une refonte complète des statuts et du règlement intérieur de cette association.

L'approbation de cette dérogation nous a paru effectivement souhaitable. D'une ampleur limitée, elle ne remet pas en cause le fait que les biens de la société, à savoir son siège à Paris et la maison de retraite de Hyères, seront toujours utilisés dans un but non lucratif, ce qui reste conforme à l'un des grands principes fondateurs de la mutualité.

Cette mesure est, je peux vous le dire compte tenu des réactions que j'ai recueillies, très attendue par les intéressés, et il nous a semblé que c'est là un geste bien normal que nous devons à nos 200 000 médaillés militaires.

La commission des affaires sociales vous propose donc, mes chers collègues, d'adopter la proposition de loi sans modification. Elle a également souhaité rendre un hommage appuyé, en séance publique, à tous nos compatriotes médaillés militaires. Il s'agit là, pour nous, de remplir un devoir de solidarité et de mémoire à leur égard. N'oublions pas avec quelle fierté légitime, lors de chaque commémoration devant les monuments aux morts, nos anciens combattants arborent cette Médaille militaire, gagnée dans des circonstances difficiles, souvent au risque de leur vie !

Aussi, pour ce que les médaillés militaires ont apporté à la France, pour le devoir de mémoire qu'ils nous aident à perpétuer et pour la solidarité, la camaraderie et le culte du souvenir qu'ils nous donnent en exemple, nous leur devons d'approuver cette proposition de loi.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 19 minutes ;

Groupe socialiste, 14 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 7 minutes.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Guy Fischer.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m'associe bien sûr à l'hommage public qui vient d'être rendu par notre rapporteur aux médaillés militaires.

Cette proposition de loi a pour objet d'apporter une modification statutaire qui permette à la Société nationale « Les Médaillés militaires », reconnue d'utilité publique, de poursuivre ses missions d'assistance et de secours à ses membres, ainsi qu'aux veuves et orphelins de médaillés militaires.

Je ne reviendrai pas sur tout ce qui a été dit à propos de l'histoire de cette décoration. Nous sommes bien sûr unanimes pour saluer avec le plus grand respect ces hommes et ces femmes dont la nation a reconnu les mérites ou les faits d'armes par l'attribution de cette prestigieuse distinction.

De même, nous sommes, je le pense, unanimes pour considérer que le statut d'association siérait mieux aux activités d'entraide de cette société, qui aurait pu d'ailleurs être un ordre, au même titre que l'ordre de la Légion d'honneur et l'ordre national du Mérite.

Cependant, l'histoire en a décidé autrement ; le statut de mutuelle, adopté à la création de la société en 1898, époque qui a d'ailleurs vu naître le secours mutuel, n'est plus adapté et se heurte aujourd'hui aux dispositions de l'article L. 113-4 du code de la mutualité, qui prévoit qu'en cas de dissolution d'une mutuelle le patrimoine de celle-ci doit obligatoirement être transféré à une autre mutuelle ou, à défaut, au Fonds national de garantie des mutuelles.

Ainsi, le strict respect de la loi qui s'impose à tous priverait la Société nationale « Les Médaillés militaires » des actifs nécessaires à ses oeuvres et de son patrimoine, constitué par son siège parisien et la maison de retraite de Hyères.

Nous ne pouvons accepter cela, d'autant que nous sommes, au sein du groupe communiste républicain et citoyen, très attachés à ce que les anciens combattants et victimes de guerre demeurent seuls responsables des affaires qui les concernent.

Je pense toutefois que la gestion de la maison de retraite aurait pu être confiée à une mutuelle d'anciens combattants promouvant la spécificité de l'entraide au sein du monde combattant et respectueuse des aspirations des médaillés militaires. C'est une solution dont je n'ai pas étudié la faisabilité technique, mais qui aurait eu le mérite de conforter l'action de ces mutuelles, tout en offrant aux médaillés militaires toutes les garanties d'une gestion adaptée, et ce sans déroger au code de la mutualité. C'est là où nos positions diffèrent quelque peu, madame le rapporteur. De nombreuses associations d'anciens combattants sont confrontées aujourd'hui à la difficulté de gérer de telles maisons de retraite.

Cela étant, le problème qui perturbe le fonctionnement de l'institution peut compromettre l'efficacité de l'action des médaillés militaires en direction de leurs membres et de leurs familles. Nous ne souhaitons donc pas nous opposer à cette proposition de loi. Nous aurions souhaité qu'il n'y ait pas de dérogation au code de la mutualité, néanmoins nous nous abstiendrons, par respect, sur ce texte.

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Braye

Ce n'est pas gentil pour les médaillés militaires !

Debut de section - PermalienPhoto de André Dulait

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de la proposition de loi relative aux modalités de dissolution de la mutuelle dénommée Société nationale « Les Médaillés militaires » nous donne l'occasion de saluer solennellement les médaillés militaires et de leur témoigner l'estime et la reconnaissance qui leur sont dues.

Depuis un siècle et demi, des hommes et des femmes se sont vu attribuer cette récompense suprême, qui vient honorer leur bravoure et leurs faits d'armes. Ils se sont battus, ont souffert et parfois ont perdu la vie pour notre pays. Je suis donc très fier d'être aujourd'hui l'orateur du groupe de l'UMP et de pouvoir leur exprimer notre reconnaissance et notre admiration.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.

Debut de section - PermalienPhoto de André Dulait

Cette proposition de loi avait été précédée d'un certain nombre d'autres, élaborées sur l'initiative de M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Spécifique aux non-officiers, la Médaille militaire rend justice au courage et au mérite des soldats de troupe et des sous-officiers. Elle peut exceptionnellement être concédée aux maréchaux de France et aux officiers généraux grands-croix de la Légion d'honneur. Elle est ainsi devenue la troisième décoration dans l'ordre de préséance, puisque son port et sa disposition réglementaire la placent immédiatement après la croix de Compagnon de la Libération et avant l'ordre national du Mérite.

Elle rend hommage à des gens célèbres comme Foch, Leclerc, Koenig ou Jean Moulin, mais aussi à tous les soldats inconnus qui ont combattu avec honneur pour notre pays et qui, aujourd'hui encore, s'illustrent dans le cadre des opérations extérieures où nos troupes sont engagées. « Valeur et discipline », telle est la devise de la médaille militaire ; elle illustre bien tout ce qui fait la grandeur de cette décoration.

Cette décoration lie ces hommes et ces femmes à travers le temps, à travers l'espace et quels que soient les grades. Chacun s'est illustré à un moment clé par un comportement exceptionnel, à l'étranger, dans le cadre d'opérations extérieures, ou sur le territoire, comme peuvent le faire gendarmes ou pompiers. Avoir la médaille militaire, c'est avoir su se transcender pour défendre des valeurs auxquelles on croit et qui font la grandeur de notre pays.

En 1904, une Société de secours mutuel fut constituée, qui devint la Société nationale « Les Médaillés militaires » ; elle développa un dispositif de solidarité envers les médaillés et leurs familles dans le besoin. Une association fut créée pour compléter ces oeuvres sociales : l'Association de l'orphelinat et des oeuvres. Celle-ci a très vite accompli un travail exemplaire, notamment à la suite des deux guerres mondiales.

L'association a notamment pu apporter une aide financière substantielle aux familles des sociétaires - à leurs veuves et à leurs enfants - lorsqu'ils sont décédés en service. Elle a pu aussi venir à l'aide de ceux qui, après une vie de travail éprouvante, ont pu se marginaliser, et leur offrir solidarité et fraternité.

La création de la sécurité sociale en 1945 a conduit la Société nationale « Les Médaillés militaires » à se concentrer sur ses oeuvres sociales et à cesser son rôle initial d'assurance sociale. Celle-ci a toutefois conservé le statut de mutuelle sous lequel elle avait été créée.

Or la transposition des directives communautaires sur les assurances, intervenue en 2001, a eu pour conséquence d'entraîner une réforme du code de la mutualité. Cette réforme, qui n'a pas épargné la Société nationale « Les Médaillés militaires », s'est révélée particulièrement inadaptée à sa spécificité. En effet, elle ne gère qu'une seule maison de retraite, et se consacre surtout à la défense des intérêts de ses 70 000 membres.

Il semble évident à tous que le statut associatif est plus approprié aux activités de la Société nationale. C'est d'ailleurs sous ce statut que fonctionnent les associations d'entraide des membres de l'ordre de la Légion d'honneur et de l'ordre national du Mérite, qui ont des missions identiques aux siennes.

Une idée a émergé consistant à faire absorber la Société nationale « Les Médaillés militaires » par l'Association de l'orphelinat et des oeuvres. Bien entendu, cela a pour conséquence la dissolution de la Société nationale. Or cela se heurte aux dispositions de l'article L. 113-4 du code de la mutualité, qui prévoit, en cas de dissolution d'une mutuelle, la nécessaire affectation du patrimoine de celle-ci à une autre structure mutualiste ou au fonds national de garantie des mutuelles.

Appliquée stricto sensu, cette disposition reviendrait à priver l'ensemble des médaillés militaires du patrimoine commun accumulé, qui permet à la Société nationale d'exercer son oeuvre de générosité.

Aussi, nous ne pouvons qu'approuver l'article unique de la proposition de loi qui permet, par dérogation au code de la mutualité, la dévolution du patrimoine de la Société nationale à l'association d'utilité publique qui exercera à l'avenir ses missions, défendra les intérêts des femmes et des hommes qui ont combattu pour notre pays avec force et courage - parfois au péril de leur vie -, et soutiendra leurs familles.

Nous savons bien que ce type de dérogation devra rester exceptionnel pour ne pas fragiliser le fonds national de garantie des mutuelles, dont la finalité est d'assurer la couverture des droits de ses adhérents en cas de défaillance d'une mutuelle. Mais à personnes exceptionnelles, nous nous devions de répondre par un traitement exceptionnel.

Pour conclure, permettez-moi de saluer, outre ceux qui ont pris place dans nos tribunes, tous les médaillés militaires. Je veux, au nom de notre groupe, leur dire notre respect et notre reconnaissance.

Je souhaite également saluer la mémoire de Micislas Orlowski, président général de la Société nationale « Les Médaillés militaires », décédé à la fin de l'année dernière.

La France est fière de ses médaillés militaires et il est essentiel de prouver aujourd'hui cette reconnaissance en leur montrant à quel point notre nation leur est attachée et les admire.

Le groupe UMP votera ce texte avec enthousiasme.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de André Dulait

Comme le disait Georges Clemenceau à propos des anciens combattants, « ils ont des droits sur nous ».

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens d'abord à rendre ici hommage à tous les médaillés militaires pour leur bravoure et leur mérite.

La médaille militaire, décoration spécifiquement militaire, est créée par décret le 22 janvier 1852. À la chute de l'Empire, la République conserve ce système. Aujourd'hui, 3 500 récompenses sont décernées annuellement.

Dès 1904, les médaillés militaires s'organisent et créent une société de secours mutuel qui devient la Société nationale « Les Médaillés Militaires », reconnue d'utilité publique en 1931, ayant pour vocation un soutien matériel et financier aux médaillés et leurs familles.

Alors que ce rôle initial d'assurance sociale a progressivement disparu, la Société nationale est toujours régie par le code de la mutualité. Depuis l'entrée en vigueur en 2001 d'un nouveau code, le droit applicable aux mutuelles s'est révélé inadapté à la nature et au fonctionnement de la Société nationale « Les Médaillés militaires ».

C'est pourquoi, afin de se mettre en conformité avec les exigences du nouveau code, les médaillés militaires ont fait le choix de transférer l'activité de la Société nationale « Les Médaillés militaires » à l'association de l'orphelinat et des oeuvres qui lui sont liées. Cette démarche a été engagée lors de l'assemblée générale extraordinaire du 11 décembre 2006. Il s'agit, en quelque sorte, de fusionner la Société nationale avec l'association.

Mais cette fusion se heurte à l'article L. 113-4 du code de la mutualité qui prévoit que, en cas de dissolution d'une mutuelle, l'excédent de l'actif de celle-ci est nécessairement affecté à une autre structure mutualiste ou au fonds national de garantie des mutuelles.

L'objet de l'article unique de la proposition de loi est donc d'autoriser la Société nationale à déroger à cet article du code de la mutualité afin que, après sa dissolution et le transfert de ses activités à l'association de l'orphelinat et des oeuvres, elle puisse transmettre à celle-ci le patrimoine accumulé depuis plus d'un siècle par ses sociétaires et poursuivre ainsi son travail de solidarité et de mémoire.

Le groupe socialiste approuve l'objet de la proposition de loi qui vise à donner les moyens aux médaillés militaires de faire fonctionner leur maison de retraite et de poursuivre leur oeuvre.

Mais si cette proposition de loi est dictée par des motifs juridiques et techniques, la méthode proposée n'est peut-être pas des plus pertinentes dans la mesure où elle implique une dérogation législative au code de la mutualité. Il n'est pas raisonnable d'ouvrir ainsi la porte aux dérogations. Il aurait été possible que des mutuelles d'anciens combattants plus importantes se substituent à celle des médaillés militaires.

Cependant, prenant acte de la nécessité de l'évolution proposée par la proposition de loi, il n'est pas souhaitable d'entraver la mise en place de la mesure proposée. Le groupe socialiste s'abstiendra donc.

Debut de section - PermalienPhoto de Janine Rozier

Après avoir écouté mes collègues, je suis déçue et étonnée. En effet, voilà une demi-heure à peine, M. Guy Fischer me faisait part, au nom de son groupe, de son intention de voter cette proposition de loi. Le groupe socialiste avait pris le même engagement à l'issue de la réunion de la commission. Ils ont changé d'avis !

Debut de section - PermalienPhoto de Janine Rozier

Mme Janine Rozier, rapporteur. Un tel texte me semblait mériter l'unanimité du Sénat. Êtes-vous certains, mes chers collègues, de ne pas vouloir une nouvelle fois changer d'avis et voter avec nous ?

Applaudissementssur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de l'article unique.

Lors de la dissolution de la mutuelle dénommée Société nationale « Les Médaillés militaires », l'excédent de l'actif net sur le passif peut, par dérogation à l'article L. 113-4 du code de la mutualité, être dévolu à une association reconnue d'utilité publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Je mets aux voix l'article unique de la proposition de loi.

La proposition de loi est adoptée définitivement . - Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

(Ordre du jour réservé)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Nicolas Alfonsi tendant à modifier certaines dispositions relatives au fonctionnement de la collectivité territoriale de Corse (nos 156, 214).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Nicolas Alfonsi, auteur de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Alfonsi

Mes chers collègues, avant d'entrer dans le détail de la proposition de loi sur le mode de scrutin en Corse, que j'ai pris l'initiative de déposer, je formulerai trois observations liminaires.

Tout d'abord, ce texte est le produit des circonstances. Nous avons récemment discuté d'un projet de loi sur la parité et, à cette occasion, j'avais pris l'initiative de déposer des amendements qui constituaient, je le savais bien, des cavaliers budgétaires. Le président Patrice Gélard me l'avait gentiment fait remarquer et m'avait invité à déposer une proposition de loi. Nous avons donc profité d'une fenêtre de tir - enfin, n'exagérons rien, surtout s'agissant de nous

Rires

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Alfonsi

Toutefois, je tiens à dissiper tout malentendu, et je m'adresse en particulier à M. le ministre : il ne faut voir aucune malice de ma part dans le dépôt de cette proposition de loi ; j'ai bien pris soin de préciser, dans l'exposé des motifs, qu'il ne fallait pas considérer ces quelques modifications techniques comme une nouvelle réforme institutionnelle ; il faut donc chasser cette idée de notre esprit.

Sans doute partagez-vous mon point de vue à cet égard, monsieur le ministre, et, en l'absence de réponse de votre part, je considérerai que cela vaut approbation : il n'y aura pas de réforme institutionnelle en Corse au cours de la prochaine mandature.

Cette proposition de loi est le fruit de l'expérience d'une vingtaine d'années ; je pense être la mémoire de la collectivité territoriale de Corse. Si l'on étudie d'un point de vue historique les textes des vingt dernières années concernant la Corse, on observe qu'ils sont tantôt en avance, tantôt en retard sur les textes nationaux.

Ainsi, quand le statut Defferre a été adopté, dans l'attente des textes sur la régionalisation, nous étions en avance, monsieur le ministre. On avait alors inventé un système électoral qui n'existait nulle part ailleurs. Dans une décision interprétative, le Conseil constitutionnel avait considéré que le mode de scrutin prévu pour la Corse devait impérativement être adapté au futur mode de scrutin national. Cela a été fait en 1985 par Pierre Joxe, alors ministre de l'intérieur, qui était alors revenu au droit commun, sans que personne ne s'en émeuve.

En 1991, le nouveau « statut Joxe » ne fixait aucun seuil aux listes pour pouvoir fusionner avec d'autres listes au second tour. Le texte que je vous présente prévoit la possibilité de fusionner pour les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés. Il s'agit donc bien d'une modification technique.

À ce stade, je ferai deux observations complémentaires pour bien éclairer le débat.

Tout d'abord, les mesures sur le mode de scrutin de l'élection de l'Assemblée de Corse auront un effet neutre. À l'évidence, il serait vain de donner tous les dix ans des pouvoirs, des compétences supplémentaires, des moyens financiers, etc., à l'Assemblée de Corse si aucun dispositif efficace ne lui permet d'exercer ses compétences et de mettre en oeuvre les moyens mis à sa disposition.

Ensuite, les droits des citoyens en Corse doivent être au moins égaux à ceux des citoyens des autres régions françaises. Pour quelle raison seraient-ils pénalisés par un mode de scrutin ne permettant généralement pas de dégager une majorité claire ?

Quel que soit le résultat du vote, cette proposition de loi aura eu au moins le mérite de nous permettre de revenir sur l'histoire des vingt dernières années.

Les dispositions que je propose sont simples ; dans son rapport, dont je salue la qualité, M. le rapporteur propose de les adopter. Il s'agit d'instituer un seuil, fixé à 5 % des suffrages exprimés, à partir duquel les listes pourront fusionner entre les deux tours et de porter à 7 % le seuil permettant à une liste de se maintenir au second tour ; j'avais suggéré de fixer ce dernier seuil à 7, 5 %, mais nous ne sommes pas à une décimale près. Il s'agit également d'augmenter la prime accordée à la liste arrivée en tête.

À l'échelon national, en vertu de la loi de 2003, le seuil permettant à une liste de se maintenir au second tour est fixé à 10 % et celui permettant à une liste de fusionner est fixé à 5 %. En Corse, ces seuils sont de 5 % pour se maintenir et de 0 % pour fusionner. Par ailleurs, alors que la prime à la liste arrivée en tête est de 25 % à l'échelon national, elle est de 5, 80 % en Corse, soit trois sièges.

L'expérience prouve que l'on est généralement très près de la majorité absolue, mais que l'on ne l'atteint pas souvent, tout simplement parce qu'il manque quelques sièges.

Je propose donc non pas de revenir au droit commun, c'est-à-dire aux seuils de 10 % pour le maintien et de 5 % pour la fusion, mais d'adopter ce que M. le rapporteur a qualifié de « solution équilibrée », à savoir un seuil de 7 % pour le maintien et de 5 % pour la fusion.

Aujourd'hui, la démographie étant ce qu'elle est - chaque consultation électorale mobilise 120 000 électeurs -, un conseiller à l'Assemblée de Corse - je rappelle qu'un conseiller à l'Assemblée de Corse n'est pas un conseiller territorial, comme on le dit parfois - est le « produit », si j'ose dire, de 3 000 ou 4 000 suffrages. Dans ces conditions, l'environnement local, la faible démographie, le peu de prix que l'on attache au suffrage, le fait que tout individu se croie investi d'un destin et que, par conséquent, il prenne l'initiative de déposer une liste, quitte à donner ensuite ses suffrages au plus offrant s'il n'a recueilli que 3 % des voix, conduit à un grand nombre de situations extraordinairement perverses, comme l'a montré la dernière élection en 2004.

On a même dit que la gauche était majoritaire, et presque tout le monde avait fini par le croire. En fait, dès le lendemain de l'élection, de nombreuses listes qui avaient recueilli 2 % ou 3 % des suffrages avaient fusionné avec des listes de gauche pour y retrouver leur famille d'esprit. Cela explique le trouble permanent de l'opinion, qui a de quoi être découragée.

Cette proposition de loi contient par ailleurs d'autres dispositions techniques.

Certains prétendront que ce n'est pas le moment de modifier le mode de scrutin ; je pense en particulier au Gouvernement, bien que je ne connaisse pas sa position, car je me suis dispensé de la lui demander.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Alfonsi

Mais ce n'est jamais le moment ! Après l'élection présidentielle auront lieu, l'an prochain, les élections municipales.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Alfonsi

En 2010, on invoquera les élections sénatoriales !

J'ai pris l'initiative de déposer ce texte au moment où les passions étaient apaisées

Aux autres qui diront que toutes les sensibilités doivent être représentées, y compris les plus homéopathiques, les plus extrêmes, je répondrai que c'était vrai il y a vingt ans - Gaston Defferre, je le rappelle, avait accepté le quotient -, mais que, depuis, ces sensibilités ont eu tout le temps de prospérer et de s'exprimer. On ne peut pas attendre encore, au détriment des mécanismes démocratiques les plus élémentaires !

Je sais que l'opinion de mes collègues sur cette question, au Sénat et à l'Assemblée nationale, est globalement positive, à quelques nuances près.

Il s'agit d'un texte équilibré. Le Sénat ferait donc oeuvre utile, me semble-t-il, en l'adoptant. Je n'ose pas espérer l'unanimité, encore que sur un sujet aussi technique, mais dont la portée politique est importante, je ne suis pas loin de la souhaiter.

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d'aborder le contenu de cette proposition de loi modifiant certaines dispositions relatives au fonctionnement de la collectivité territoriale de Corse, je ferai quelques remarques préliminaires.

Première remarque préliminaire, le texte dont nous sommes saisis est une proposition de loi, et non un projet de loi, ce qui implique un certain nombre de conséquences.

Ainsi, l'Assemblée de Corse n'a pas été préalablement saisie de ce texte, ce qui aurait été obligatoire s'il s'était agi d'un projet de loi.

Par ailleurs, cette proposition de loi est le résultat des amendements que notre collègue Nicolas Alfonsi avait déposés sur deux textes, le projet de loi relatif à la parité entre hommes et femmes sur les listes de candidats à l'élection des membres de l'Assemblée de Corse et le projet de loi tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. Il les avait alors retirés et avait accepté l'invitation qui lui avait été faite de déposer une proposition de loi.

Enfin, s'agissant d'une proposition de loi, le Gouvernement n'est pas engagé dans cette procédure.

Deuxième remarque préliminaire, il ne s'agit naturellement pas de porter atteinte aux droits des Corses. C'est la raison pour laquelle je souhaite que, entre l'adoption de cette proposition de loi par le Sénat et son inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, l'Assemblée de Corse soit saisie du texte pour qu'elle puisse donner son avis.

J'en viens à ma troisième remarque préliminaire. J'ai sollicité l'avis soit oralement, soit par écrit, des députés et des sénateurs de Corse, ainsi que du président de l'Assemblée de Corse. Leur point de vue est très proche de celui de notre collègue Nicolas Alfonsi. Tout au plus convient-il de mentionner qu'un certain nombre de parlementaires souhaitent que le statut de la Corse se rapproche progressivement du statut régional. D'autres ont trouvé que les propositions de notre collègue n'allaient pas suffisamment loin. D'autres encore considèrent que le moment n'est pas propice à une telle proposition de loi et qu'il conviendrait peut-être d'attendre la fin de la période électorale.

En conséquence, après avoir écouté les uns et les autres, j'estime que la proposition de loi de notre collègue est bienvenue. Elle permettra de mettre fin aux anomalies qui affectent le fonctionnement de l'Assemblée de Corse en entraînant la multiplication du nombre des forces politiques qui se présentent aux élections et en empêchant pour l'instant la formation de véritables majorités.

Par ailleurs, cette proposition de loi ne porte atteinte à personne. Au contraire, elle permet d'ouvrir un débat qui pourra utilement se poursuivre le jour où l'Assemblée nationale l'inscrira à son ordre du jour ou celui où le Gouvernement acceptera de l'inscrire à l'ordre du jour prioritaire.

Quant au contenu même de la proposition de loi, celle-ci ne comprend que deux articles.

Tout d'abord, l'article 1er augmente la prime majoritaire, en la portant de trois à six sièges pour les membres du conseil de l'Assemblée de Corse, ce qui d'ailleurs ne permet pas, dans la situation actuelle, de dégager une véritable majorité.

Ensuite, cet article porte de 5 % à 7 % des suffrages exprimés le seuil permettant à une liste de se présenter au second tour ; M. Alfonsi avait proposé de fixer ce seuil à 7, 5 % dans sa proposition de loi, mais il a été ramené à 7 %, les décimales ne paraissant pas souhaitables dans une loi. C'est tout de même le seuil le plus bas pour toutes nos élections ! À cet égard, peut-être faudra-t-il, monsieur le ministre, que l'on se penche un jour sur l'harmonisation de ces seuils, tant les différences sont nombreuses selon les modes de scrutin ? C'est le cas en particulier à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy, où les seuils sont encore différents de ceux qui sont prévus pour les autres collectivités territoriales.

Enfin, l'article 1er concerne la fusion des listes. À l'heure actuelle, il n'existe aucun seuil, ce qui permet naturellement la multiplication des listes au premier tour. La proposition de loi de Nicolas Alfonsi fixe à 5 % des suffrages exprimés le seuil à partir duquel la fusion sera possible au second tour, ce qui est à peu près la norme pour toutes les élections.

L'article 2 procède à une harmonisation avec les élections régionales : en cas d'incompatibilité pour cause de cumul de mandats, l'intéressé dispose d'un mois pour choisir l'un ou l'autre des mandats.

Comme vous le savez, le mandat de conseiller à l'Assemblée de Corse est incompatible avec la fonction de membre du conseil exécutif de Corse. Ainsi, après que l'Assemblée territoriale a élu le conseil exécutif, toute une série de ses membres se retire pour laisser la place aux « suivants de liste », ce qui n'est pas tout à fait souhaitable. Je crois donc qu'il convient de suivre, sur ce point, notre collègue Alfonsi.

Cette dernière remarque étant faite, je vous demande, au nom de la commission des lois, de voter en faveur de cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et du RDSE.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales

Monsieur Alfonsi, permettez-moi d'abord de vous féliciter pour votre persévérance, puisque le texte dont nous allons débattre aujourd'hui trouve en partie son origine dans des amendements que vous avez défendus, voilà maintenant deux mois, lors de l'examen du projet de loi tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives.

Mon propos sera bref pour deux raisons essentielles : d'abord, il s'agit d'une séance dont l'ordre du jour est réservé à l'initiative parlementaire et je ne voudrais pas, naturellement, brider cette initiative ; ensuite, le sujet a déjà été abordé il y a quelques semaines à peine.

Cette proposition de loi, qui a bénéficié de l'excellent travail du doyen Patrice Gélard et qui a reçu l'aval de la commission des lois, comporte, vous l'avez souligné, deux volets.

Le premier vise à modifier le mode d'élection de l'Assemblée de Corse pour ce qui concerne les seuils de fusion des listes et d'accès au second tour, ainsi que la prime majoritaire attribuée à la liste arrivée en tête.

Une liste devrait ainsi réunir 7 % des voix, contre 5 % aujourd'hui, pour pouvoir se maintenir au second tour. Par ailleurs, seules les listes ayant obtenu 5 % des voix pourraient fusionner, alors qu'aucun seuil n'existe à ce jour. Enfin, la liste arrivée en tête du scrutin se verrait attribuer une prime de six sièges, au lieu de trois actuellement.

Comme je l'avais déjà indiqué lors du débat relatif à la parité, et comme mes services ont pu le signaler au rapporteur - vous l'avez d'ailleurs un peu anticipé, monsieur Alfonsi -, le Gouvernement n'entend pas s'engager sur la voie d'une réforme des modes de scrutin à quelques mois d'échéances électorales majeures pour notre pays.

Vous le savez aussi bien que moi, tout mouvement en ce sens serait immédiatement disséqué et interprété à l'aune des prochaines échéances, ce qui ne peut être le souhait ni de la représentation nationale ni du Gouvernement. En cette matière sans doute plus qu'ailleurs, la sérénité doit toujours prévaloir.

Comprenez-moi bien : je ne prétends pas, naturellement, que le mode de scrutin actuel soit parfait. Je note toutefois qu'il a déjà fait l'objet de plusieurs modifications depuis 1991 afin de mieux prendre en compte les spécificités de la Corse. S'il est indéniable que des aménagements sont nécessaires, je suis convaincu qu'un véritable débat ne pourra s'engager qu'à partir du second semestre. Il exige, en effet, une très large concertation avec tous les acteurs concernés, en particulier l'Assemblée de Corse, afin d'assurer la « stabilité de l'Assemblée et [le] respect du pluralisme d'idées et d'opinions en son sein. »

J'ajoute que c'est aussi ce que prévoit la loi, puisque l'article L. 4422-16 du code général des collectivités territoriales dispose : « L'Assemblée de Corse est consultée sur les projets et les propositions de loi [...] comportant des dispositions spécifiques à la Corse ».

Ce sera au prochain gouvernement de mener ce travail en s'appuyant, bien évidemment, sur les propositions des parlementaires, en particulier sur celles que vous venez de formuler.

Le second volet comporte une série de dispositions techniques visant à améliorer le fonctionnement de l'Assemblée et du conseil exécutif de Corse.

Grâce à l'expertise juridique du doyen Patrice Gélard, le texte que nous étudions modifie quelque peu la proposition de loi que vous portiez, monsieur Alfonsi, sans perdre de vue l'objectif qui est le vôtre.

Il en ressort, d'abord, le souhait d'encadrer l'incompatibilité entre le mandat de conseiller de l'Assemblée de Corse et la fonction de conseiller exécutif.

La proposition de loi prévoit ainsi un délai d'option d'un mois à partir de la date à laquelle l'élection au conseil exécutif est devenue définitive, ce qui pourrait par exemple permettre à un conseiller exécutif de continuer à prendre part aux scrutins organisés au sein de l'Assemblée. Ce cumul pourrait d'ailleurs s'étirer dans le temps, puisque l'élection au conseil exécutif est susceptible de recours contentieux. En ce cas, la règle commune s'applique.

Dès lors, c'est le principe même de la séparation des pouvoirs qui serait ainsi mis en cause, ce qui ne paraît pas opportun. J'imagine que nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion des articles.

Il est ensuite prévu d'instaurer un délai maximal d'un mois pour remplacer les conseillers exécutifs dont le siège est vacant. Pour le président, la procédure est différente. Le Gouvernement n'a pas d'objection sur ce point et s'en remettra donc à la sagesse des sénateurs.

L'ultime proposition, qui visait à fixer au vendredi, au lieu du jeudi, la première réunion de l'Assemblée de Corse afin d'éviter toute concomitance avec la réunion des conseils généraux, n'a pas été retenue par votre commission des lois. L'actuel calendrier électoral disjoint en effet les élections régionales et cantonales et rend donc inutile cette disposition.

Tels sont les quelques éléments dont je voulais vous faire part au nom du Gouvernement.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur les travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe socialiste, 14 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 7 minutes.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Bernard Frimat.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La proposition de loi présentée par Nicolas Alfonsi, comme vous le rappeliez à l'instant, monsieur le ministre, est issue de nos débats sur la loi tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. Notre collègue avait eu l'occasion d'expliquer à cette tribune pourquoi il déposait des amendements et pourquoi il les reprendrait dans une proposition de loi.

Sur le fond, l'approche de M. Alfonsi est intéressante : celui-ci met l'accent sur trois points importants.

Le premier point concerne la prime à la liste arrivée en tête. M. Alfonsi nous propose, dans le but, nous dit-il, de renforcer la stabilité de la majorité de l'Assemblée, de doubler la prime, qui passerait de 6 % à 12 % des sièges.

Le deuxième point vise à éviter ce qu'il a qualifié de « perversions » - la lutte contre la perversion, on le sait, est un travail difficile, sans doute lui-même un peu pervers -, en créant un seuil de fusion des listes, puis en harmonisant, notre rapporteur y a veillé, le seuil de fusion et le seuil de maintien.

Ces interrogations de bon sens correspondent à de réels problèmes. Pour autant, la proposition de loi qui nous est présentée épuise-t-elle le sujet ? Je ne le pense pas ! Elle a le mérite de mettre l'accent sur les questions essentielles, mais le débat doit être plus profond et plus large.

S'agissant de la prime - nous en débattions la semaine dernière - vous disposez d'un large éventail, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La prime à 12 %, si nous suivons la proposition de Nicolas Alfonsi, une prime à 25 % pour les conseils régionaux, une prime à 33 % pour Saint-Barthélemy et Saint-Martin, une prime à 50 %, jurisprudence « Grignon », pour Saint-Pierre-et-Miquelon, pour les conseils municipaux. Nous avons même pour la Polynésie française, si vous me permettez ce mauvais jeu de mots, la prime à « zéro », de façon à se mettre à la hauteur de ceux qui gouvernent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. La « déprime » !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

On nous dit que la prime a pour objet d'assurer la stabilité de la majorité en place et de permettre aux exécutifs locaux d'être gouvernés ; je peux le comprendre. Ce que je ne comprends pas, c'est que l'on puisse atteindre le même but avec une prime de 0 %, 6 %, 12 %, 25 %, 33 % ou 50 % !

Le Conseil constitutionnel s'exprimera, je l'espère, à partir de la loi relative à l'outre-mer. Sur ce point, il conviendrait de définir un système cohérent. Faut-il appliquer une prime de droit commun, comme c'est le cas pour les régions, ou une prime particulière ? Je n'en sais rien ! La question mérite une concertation, un débat, mais la prime ne saurait être à géométrie variable, de surcroît révisable.

La création d'un seuil de fusion me semble constituer un progrès. Certes, je salue le travail réalisé par le rapporteur, qui a évoqué dans son rapport la liste de personnes consultées, mais la consultation a tout son charme quand elle est engagée a priori ; la consultation a posteriori, les décisions étant prises, a une saveur plus limitée...

Il serait intéressant d'avoir l'avis du Conseil d'État, même si cet avis reste inconnu, comme chacun le sait.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Mais il s'agit d'une proposition de loi, et seuls les projets de loi requièrent l'avis du Conseil d'État. Y a-t-il un avis officiel de l'Assemblée de Corse ? Non ! Il serait pourtant utile de le connaître avant de se prononcer.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

L'ensemble des formations politiques ont-elles été consultées officiellement ? Pas davantage ! Toute une série de contacts, d'éléments ont été établis, des choses positives ont émergé, mais il ne me semble pas que nous soyons parvenus, à ce stade, à un état d'achèvement.

Votre proposition de loi, mon cher collègue, devrait connaître un sort favorable, si l'on en juge par le vote de la commission des lois. Ce sera le début d'une navette parlementaire dont nul ne peut prévoir la fin. Nous savons tous qu'un certain nombre de textes de fin de législature sont encore, plusieurs années après, en cours de navette ! C'est un beau destin, mais ce n'est sans doute pas celui que vous recherchiez...

Monsieur le ministre, nous pouvons sans crainte nous accorder sur le fait qu'il y aura un prochain gouvernement, après, c'est plus compliqué... Le prochain gouvernement serait bien inspiré, à partir de la proposition de loi de Nicolas Alfonsi, après une consultation générale, de nous proposer ce qui ne sera jamais qu'un ultime élément.

Je ne pense pas que la Corse ait besoin d'une nouvelle réforme institutionnelle. Un certain nombre d'ajustements sont peut-être nécessaires pour que la vie démocratique, que nous y savons très vive, puisse être un peu plus ordonnée.

Pour le groupe socialiste - Mme Alima Boumediene-Thiery s'exprimera au nom des Verts -, les conditions qui permettraient d'adopter une position tranchée ne sont pas rassemblées aujourd'hui. J'ai montré les aspects positifs de cette proposition de loi, j'ai souligné le manque de concertation. Par conséquent, nous nous abstiendrons.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m'étonne de l'examen d'une telle proposition de loi à quelques semaines de scrutins importants qui ont notamment pour enjeu l'évolution institutionnelle de notre pays. J'y vois plutôt un ballon d'essai. En effet, selon notre rapporteur Patrice Gélard, le présent texte ne pourra être inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale avant la fin de la législature et il sera souhaitable de le soumettre, une fois adopté, pour consultation à l'Assemblée de Corse.

Cette conception de la politique n'est pas conforme à l'idée que je me fais de la démocratie : le Sénat propose un texte sans aucun débat préalable approfondi avec les Corses et leurs représentants élus.

La présente proposition de loi sous-entend de manière évidente une logique de bipolarisation, alors que le statut Joxe de 1991 avait substitué au droit commun un scrutin régional à la proportionnelle à deux tours, avec l'obligation pour les listes d'obtenir au moins 5 % au premier tour afin de pouvoir être présentes au second tour, en vue de permettre l'expression de toutes les sensibilités politiques. À l'époque, le Conseil constitutionnel avait validé ces mesures.

Ce dispositif spécifique à la Corse n'a pas été modifié par la loi de 2003 relative à l'élection des conseillers régionaux.

En augmentant le seuil qui permettra le maintien au second tour de l'élection à l'Assemblée de Corse, en créant un seuil pour les fusions de listes au second tour et, enfin, en accroissant la prime majoritaire, vous battez en brèche le pluralisme.

Instituer un seuil de 7 % des suffrages exprimés pour le maintien au second tour, voire de 7, 5 % comme le propose M. Alfonsi, restreindra la représentativité de l'Assemblée de Corse en favorisant la règle des négociations et des débauchages aujourd'hui en vigueur au détriment du débat politique.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Je vous en prie, monsieur le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. le président de la commission, avec l'autorisation de l'orateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Je voudrais revenir sur ce que vous avez dit à propos de l'absence de concertation. Si nos collègues parlementaires qui connaissent bien un sujet ne pouvaient plus déposer de proposition de loi, cela remettrait totalement en cause le droit d'initiative parlementaire.

Cette procédure n'empêche pas ensuite la concertation. Au reste, le rapporteur a procédé à un certain nombre d'auditions sur ce texte, ce qui permet quand même de se faire une idée.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Le droit d'initiative parlementaire est l'une des rares prérogatives du Parlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

Mais un sujet aussi sensible que la Corse, sujet que vous connaissez bien, monsieur le président de la commission, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

... mérite une approche sinon plus prudente, du moins plus pointue et qui prenne en compte, au-delà des auditions du rapporteur, la réalité politique et sociale en Corse.

Selon l'auteur de la proposition de loi, c'est cette restriction démocratique qui permettrait de débloquer l'institution. Mais est-ce en raison du mode de scrutin actuel, monsieur Alfonsi, qu'il n'y a pas eu d'alternance en Corse, contrairement aux autres régions de France métropolitaine, ou bien est-ce en raison des jeux politiciens ?

Le référendum de 2003 portant sur la création d'une collectivité unique a démontré que, quand on donne la parole au peuple dans des conditions où il peut se forger sa propre opinion, il sait se faire entendre. La présente proposition de loi peut ressembler à une revanche sur le résultat de cette consultation. Si tel est le cas, il faut changer le peuple ! Mais, on le sait, la tâche est difficile.

Il reste donc le mode de scrutin, comme si la question était de nature électorale, alors que les difficultés de la Corse sont d'un tout autre ordre. Ce dont nous devrions discuter aujourd'hui, c'est de la réalité économique et sociale désastreuse de la Corse, des violences indépendantistes, sources de dérives affairistes et maffieuses qui créent les difficultés de la Corse.

Notre attitude, comme celle des élus communistes de la collectivité territoriale de Corse, est de proposer, à l'opposé de cette démarche, un mode de scrutin qui permette l'expression de toute la diversité. Nous sommes donc favorables à l'instauration d'un mode de scrutin proportionnel avec une assemblée composée de soixante et un membres, comme auparavant, et non de cinquante et un membres, comme aujourd'hui. Nous proposons également de porter le nombre de membres du conseil exécutif issu de l'Assemblée de Corse à neuf au lieu de huit actuellement.

Une telle réforme, importante, doit s'accompagner d'un effort de transparence, de participation citoyenne aux décisions à la gestion.

Mes chers collègues, cette problématique n'est pas spécifique à la Corse. La vie politique de notre pays, la crise des institutions, la dérive présidentialiste à laquelle nous assistons exigent une révision en profondeur du mode de représentation dans notre pays.

L'attente populaire est grande en Corse, comme dans l'ensemble du pays. La proposition de loi qui nous est soumise et les conclusions de la commission des lois vont dans le sens inverse, celui d'une limitation de l'exercice du pouvoir à quelques-uns. Nous ne pouvons donc approuver un texte qui s'éloigne plus encore de l'extension du fait démocratique auquel nous aspirons.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je regrette également qu'une telle proposition de loi, dont on connaît la sensibilité politique, soit examinée en fin de législature.

Pour accéder au deuxième tour de l'élection territoriale, une liste de candidats doit actuellement obtenir 5 % des suffrages exprimés au premier tour, alors que ce seuil est fixé à 10 % dans l'Hexagone. M. Alfonsi proposait de porter ledit seuil de 5 % à 7, 5 % ; la commission a opté pour 7 %.

Pour fusionner entre le premier et le deuxième tour, aucun minimum n'est aujourd'hui exigé en Corse. Ainsi, une liste qui a obtenu 1 % des suffrages peut fusionner avec une liste qui a franchi le seuil de 5 %, alors que, dans l'Hexagone, le droit commun prévoit un seuil de 5 % pour pouvoir fusionner. La proposition de loi vise également à fixer pour la Corse le seuil de 5 % à l'issue du premier tour pour qu'une liste puisse fusionner avec une liste ayant franchi le seuil de 7 % des suffrages.

La liste arrivée en tête à l'issue du second tour bénéficie aujourd'hui, en Corse, d'une prime de trois élus, alors que, dans l'Hexagone, une prime de 25 % est attribuée à la liste arrivée en tête. Le présent texte tend à ce que la prime passe de trois à six élus en Corse en faveur de la liste arrivée en tête.

Il n'y a pas lieu de s'attarder sur les autres modifications proposées par M. Alfonsi. Je m'en tiendrai donc à celles que je viens de mentionner, car elles requièrent une analyse de fond.

Il s'agit tout d'abord de considérations d'ordre général propres au principe de l'exercice de la démocratie.

Je le rappelle, les Verts sont par principe favorables à la proportionnelle intégrale, qui, par définition, peut traduire au mieux les aspirations de tout corps électoral.

En effet, la proportionnelle intégrale offre, de fait, un cadre d'expression au maximum de courants d'idées qui traversent une société. Elle constitue également une véritable école de la responsabilité citoyenne, car elle met les acteurs en présence dans l'obligation d'élaborer des compromis afin de gérer la cité. C'est ainsi que peuvent se mettre en place de véritables dynamiques. In fine, un maximum d'électeurs se sentiront partie prenante en fonction de l'aptitude à construire ensemble.

Nous sommes nombreux à penser qu'il y a matière à expliquer en bonne partie la désaffection grandissante de l'électorat à l'égard des urnes par le fait que les partis politiques ayant le plus d'électeurs mènent aujourd'hui le jeu avant le premier tour, et même après. On ne tient en effet pas compte des aspirations de l'électorat des formations de moindre importance, qui semblent souvent n'avoir aucun poids : plus les seuils exigés sont élevés, plus nombreux sont les électeurs qui se sentent exclus du champ de la démocratie. En outre, une forte prime à la liste arrivée en tête aggrave considérablement cette situation.

Il s'agit ensuite de considérations propres à la situation particulière de la Corse, qui, il faut le dire, nécessite la reconnaissance politique de cette question et une solution politique.

La proposition de loi ne constitue pas une bonne réponse à la situation de l'île, d'autant que le seuil actuel de 5 % se situe déjà bien au-dessus du seuil de la proportionnelle intégrale. Cependant, le législateur de 1991 a considéré, à juste titre, qu'il fallait favoriser au mieux l'expression de la diversité politique dans une île où il apparaissait essentiel d'encourager la participation active d'un maximum de Corses au débat public en dérogeant au droit commun des régions en la matière.

Les Verts, quant à eux, sont attachés depuis toujours à la prise en considération de la spécificité de la Corse. Est-il nécessaire de rappeler que les autres îles. de l'Union européenne sont dotées de véritables compétences législatives, ce qui est loin d'être le cas de la Corse ?

Aussi comprenons-nous très mal que, tout en affirmant qu'il ne faut plus toucher aux institutions de l'île, M. Alfonsi veuille réduire très fortement les possibilités d'expression de la diversité politique de la Corse.

Pour notre part, nous considérons que l'efficacité politique commande de favoriser les meilleures conditions possibles d'écoute des aspirations locales dans leur diversité. Nous ne pensons pas que le fait de casser le thermomètre puisse supprimer la fièvre.

Nous avons confiance en la capacité des Corses à construire leur avenir en élaborant un véritable projet de société. Les Verts voteront donc contre les modifications proposées en ce qui concerne tant les seuils que l'augmentation de la prime majoritaire.

Pour conclure, je dirai simplement qu'il nous faut très vite avoir le courage de rouvrir le dialogue concernant l'évolution institutionnelle de la Corse.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

I. Dans le premier et le deuxième alinéas de l'article L. 366 du code électoral, le mot :

« trois »

est remplacé par le mot :

« six »

II. Les deux premiers alinéas de l'article L. 373 du même code sont ainsi rédigés :

« Seules peuvent se présenter au second tour de scrutin les listes ayant obtenu au premier tour un nombre de suffrages au moins égal à 7 % du total des suffrages exprimés.

« Ces listes peuvent être modifiées dans leur composition pour comprendre des candidats ayant figuré au premier tour sur d'autres listes, sous réserve que celles-ci aient obtenu au premier tour au moins 5 % des suffrages exprimés et ne se présentent pas au second tour. En cas de modification de la composition d'une liste, le titre et l'ordre de présentation des candidats peuvent également être modifiés. »

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La parole est à M. Nicolas Alfonsi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas Alfonsi

Je profite de cette explication de vote pour répondre en quelques mots aux intervenants.

Madame Boumediene-Thiery, la proportionnelle intégrale a purement et simplement conduit à la dissolution de l'Assemblée de Corse un an après son élection.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué les échéances électorales. Mais il y en a tout le temps ! Je prends quand même volontiers acte que les réformes institutionnelles ne sont pas à l'ordre du jour et qu'il faudra tout remettre à plat au cours du second semestre. C'est un point important, et je note que vous l'avez souligné avec beaucoup de fermeté.

Monsieur Frimat, vous êtes sans doute l'un des esprits les plus subtils de votre groupe. Pour autant, vous avez eu quelques difficultés à justifier votre abstention.

Vous avez évoqué un large éventail de primes. Je le clame haut et fort : je suis favorable à la prime majoritaire de droit commun ! Toute allusion à ce qui peut se passer dans des territoires lointains est donc nulle et non avenue. J'ai en effet toujours considéré que la collectivité territoriale de Corse devait être assujettie au droit commun. Par conséquent, si le ministre décidait de porter à 10 % le seuil de 7 %, je serais le premier à l'approuver.

Vous pouvez trouver dans cette avalanche de primes qui existent ailleurs un argument, certes un peu faible, mais subtil, pour vous abstenir. Mais n'allez pas plus loin !

Mes chers collègues, je souhaite que l'ensemble du Sénat s'associe à ce texte, car il est indispensable au fonctionnement démocratique de l'Assemblée de Corse.

M. Bret prétend que l'augmentation des seuils permettra toutes les magouilles ; c'est consternant ! On sait en effet qu'il suffit aujourd'hui de réunir 2 000 ou 3 000 voix sur son nom et de s'associer à des listes, appelons-les idéologiques, pour entrer à l'Assemblée de Corse.

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.

L'article 1er est adopté.

I. Le dernier alinéa de l'article L. 4422-18 du code général des collectivités territoriales est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Le mandat de conseiller à l'Assemblée de Corse est incompatible avec la fonction de conseiller exécutif de Corse.

« Tout conseiller à l'Assemblée de Corse élu au conseil exécutif de Corse dispose d'un délai d'un mois à partir de la date à laquelle cette élection est devenue définitive pour démissionner de son mandat de conseiller à l'Assemblée de Corse ou de sa fonction de conseiller exécutif. Il fait connaître son option par écrit au représentant de l'État dans la collectivité territoriale de Corse, qui en informe le président de l'Assemblée de Corse.

« À défaut d'option dans le délai imparti, il est réputé démissionnaire de son mandat ; cette démission est constatée par arrêté du représentant de l'État dans la collectivité territoriale de Corse.

« Le régime des incompatibilités concernant les conseillers à l'Assemblée de Corse reste applicable au conseiller à l'Assemblée de Corse démissionnaire pour cause d'acceptation de la fonction de conseiller exécutif. Il est remplacé au sein de l'Assemblée dans les conditions prévues à l'article L. 380 du code électoral. »

II. Le premier alinéa de l'article L. 4422-20 du même code est ainsi rédigé :

« En cas de décès ou de démission d'un ou de plusieurs conseillers exécutifs autres que le président, l'Assemblée procède, sur proposition du président du conseil exécutif de Corse, à une nouvelle élection pour pourvoir le ou les sièges vacants dans le délai d'un mois. » -

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

La commission propose de rédiger comme suit l'intitulé de la proposition de loi : « Proposition de loi tendant à modifier le mode de scrutin de l'élection de l'Assemblée de Corse et certaines dispositions relatives au fonctionnement de la collectivité territoriale de Corse ».

Il n'y a pas d'opposition ?...

L'intitulé de la proposition de loi est ainsi rédigé.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Avant de mettre aux voix les conclusions du rapport de la commission sur la proposition de loi n° 156, je donne la parole à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Tout d'abord, je ferai une remarque liminaire sur le fonctionnement de nos travaux, remarque qui, bien entendu, n'engage que moi.

Lorsque nous avons réformé la Constitution afin d'ouvrir une fenêtre au Parlement sur l'organisation des débats, il nous avait alors semblé que cet ordre du jour réservé devait, avant toute autre chose, être législatif.

Il s'agissait principalement de profiter de cette occasion pour « pousser » des textes d'origine parlementaire qui, dans l'entonnoir de l'ordre du jour prioritaire, n'avaient jamais l'occasion d'être inscrits.

De ce point de vue la gestion de la Haute Assemblée par rapport à celle des députés était empreinte de sagesse.

Le consensus recherché en conférence des présidents permettait d'assurer plus de chance à la poursuite de la navette une fois les textes transmis à l'autre chambre.

Je donnerai un seul exemple : sur les cinquante-deux lois d'origine parlementaire promulguées depuis le début de la législature, trente et une sont d'origine sénatoriale. La principale raison de ce succès est probablement cette gestion plus rigoureuse de l'inscription des textes.

La récente évolution de l'usage a permis d'ouvrir plus largement l'accès de l'opposition à l'ordre du jour réservé. Je m'en réjouis ; j'y vois le signe d'une démocratie mature puisqu'elle accepte et encourage le pluralisme.

Cependant, il est de la responsabilité de chaque groupe de présenter des textes ayant vocation à voir la navette se poursuivre.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Si chacun utilise sa niche parlementaire comme une vitrine programmatique, c'est le sens même de cet ordre du jour réservé qui sera vidé de sa substance !

Proposer des textes qui n'ont pas vocation à être promulgués et en discuter est-il dans l'esprit de cette journée mensuelle ? N'est-ce pas un retour indirect au temps des motions de la IVe République que nous souhaitions révolu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

J'en viens au texte qui nous est proposé.

Comme chacun sur ces travées, les membres de mon groupe et moi-même partageons le sentiment qu'il est nécessaire de faire évoluer les modes de scrutin pour l'élection à l'Assemblée de Corse. La dernière élection a démontré les limites du système actuel et son opacité. Si les médias n'avaient pas été aussi focalisés sur les résultats électoraux des vingt et une régions du continent, je ne doute pas qu'ils auraient eu matière à écrire sur le cas spécifique de la Corse !

Mais si nous partageons l'ambition de l'auteur de la proposition de loi - je salue sa constance dans ses opinions et ses choix politiques -, nous ne sommes pas persuadés que le recours, dès aujourd'hui, à cette proposition de loi était la meilleure des entames. En effet, si chacun s'accorde à reconnaître qu'il est plus que temps de faire évoluer les règles du scrutin, tout le monde diffère sur la formule à retenir.

Le moins que l'on puisse dire est qu'il existe tout de même un certain nombre de divergences entre les acteurs locaux.

Ainsi que l'a rappelé notre excellent rapporteur, M. Gélard, si MM. Giacobbi et Vendasi partagent les vues de notre collègue Alfonsi, M. de Rocca Serra, président de l'Assemblée de Corse, conteste le calendrier ; M. Santini aurait préféré que l'Assemblée soit consultée ; M. Renucci, député, est favorable à l'augmentation de la prime majoritaire, mais préfère le maintien du seuil d'accès au second tour à 5 % des suffrages exprimés ; M. Zuccarelli, député, souhaite avec une certaine constance que le mode de scrutin régional soit purement et simplement appliqué.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Bret

C'est la réalité : il n'y a pas d'accord entre vous !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

D'ailleurs, le texte qui nous est soumis par la commission des lois modifie également la proposition initiale puisqu'il prévoit de fixer à 7 % des suffrages exprimés le seuil d'accès au second tour.

Évidemment, les points de désaccord sont moins nombreux que les points de convergence. Quoi qu'il en soit, c'est une raison supplémentaire pour penser qu'il aurait sans doute fallu remettre quelque temps encore l'ouvrage sur le métier pour aboutir à un plus grand consensus.

Néanmoins, nous voulons bien reconnaître avec le rapporteur que ce texte doit être entendu comme une base de travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Et c'est à ce titre que nous allons l'adopter.

Cette proposition de loi sera, en quelque sorte, une forme nouvelle d'avant-projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Est-ce à dire que ce mode de scrutin sera validé définitivement ? Je n'en sais rien !

Assurément, nous n'en ferons pas notre doctrine, non pas que nous ne partageons pas la philosophie du texte équilibré qui nous est soumis, mais parce qu'il convient de ne pas engager trop avant le Parlement, alors même que l'Assemblée de Corse ne s'est pas prononcée.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

M. Gérard Cornu. Que ce texte serve de base de travail, soit, mais avant que le Parlement émette une position définitive sur cette question, nous devons laisser aux acteurs locaux le temps de trouver un compromis.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François Zocchetto

Je donnerai en quelques mots la position du groupe UC-UDF.

Cette proposition de loi concerne la Corse et elle émane d'un Corse. Évidemment, la proximité crée l'expérience, mais elle peut aussi susciter beaucoup de critiques à l'encontre de l'auteur de la proposition de loi.

Cette proposition de loi est courageuse, car elle va à l'encontre d'intérêts particuliers qui se nourrissent de turpitudes lors des scrutins successifs.

Cette proposition de loi est nécessaire, car elle tend à rétablir une certaine équité : au nom de quoi nos concitoyens qui vivent en Corse n'auraient-ils pas le droit de bénéficier d'institutions aussi stables que celles qui existent dans les autres régions françaises ?

Cette proposition de loi est également nécessaire parce que des situations de paralysie et d'opacité ont été créées par le mode de scrutin actuellement en vigueur.

Enfin, cette proposition de loi est opportune, car il n'y aura pas d'élections locales en Corse dans les mois à venir. C'est donc bien le moment de la voter.

Nous souhaitons que ce texte soit inscrit le plus rapidement possible à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale et qu'il soit adopté, éventuellement avec des aménagements susceptibles de rapprocher le mode de scrutin de l'Assemblée de Corse de celui des autres régions françaises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

J'ai entendu beaucoup de choses intéressantes.

Le droit à l'initiative parlementaire a été obtenu lors de la révision constitutionnelle de 1995, et cette évolution qui permet à chaque groupe de déposer une proposition de loi était souhaitable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Tout à fait !

Bien entendu, le plus souvent, nous obtenons un consensus sur des sujets d'intérêt général, même si quelquefois nous ne sommes pas suivis par l'Assemblée nationale ; on l'a constaté avec le texte sur la nouvelle législation funéraire, qui n'a toujours pas été examiné par l'Assemblée nationale, malgré nos efforts et ceux du ministre.

Debut de section - Permalien
Brice Hortefeux, ministre délégué

Le décret a été publié ce matin !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

On procède par décret parce qu'on ne peut pas aller jusqu'au bout ! Ce n'est pas la meilleure solution !

Par ailleurs, cette proposition de loi concerne les collectivités locales. S'il s'était agi d'un projet de loi, il aurait été déposé en priorité sur le bureau du Sénat. Nous sommes donc tout à fait dans notre rôle lorsque nous discutons de ce texte.

Si un parlementaire ne pouvait pas présenter une proposition de loi au motif qu'il existe des désaccords entre les uns et les autres, cela voudrait dire que seule la « démocratie participative » vaudrait. C'est au Parlement de trancher et de décider ce qui paraît être le meilleur pour la nation !

Ceux d'entre vous qui sont parlementaires depuis un certain nombre d'années, mes chers collègues, savent combien nous avons voté de statuts, et pas toujours dans les meilleures conditions.

En l'occurrence, il s'agit d'une proposition minimale, qui vise à éviter certaines dérives actuelles.

Il importe que nous nous prononcions aujourd'hui. Bien entendu, le dialogue se poursuivra, le moment venu, entre l'Assemblée de Corse, le Gouvernement et l'Assemblée nationale.

En tout état de cause, il est bon que le Sénat s'exprime sur ce sujet important et à une période assez éloignée des élections locales. On ne peut pas nous reprocher de bouleverser les choses quand nous agissons vraiment a minima et alors que nous avons modifié ou créé, voilà exactement une semaine, pas moins de cinq systèmes électoraux dans les collectivités.

Par conséquent, toucher un peu au mode de scrutin de l'élection de l'Assemblée de Corse ne me paraît pas complètement aberrant, même en fin de législature.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

Il est vrai que le Sénat accomplit un excellent travail. Comme le disait mon illustre prédécesseur Jules Ferry, le Sénat est là pour veiller à ce que la loi soit bien faite. Nous nous y efforçons, et nous sommes d'ailleurs complimentés ici et là pour notre souci de rechercher une bonne législation. Ce n'est pas toujours facile, mais nous oeuvrons avec persévérance.

Personne ne demande plus la parole ?

Je mets aux voix les conclusions du rapport de la commission sur la proposition de loi n° 156.

La proposition de loi est adoptée. - Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

J'ai reçu de M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement une lettre en date de ce jour par laquelle le Gouvernement ajoute au début de l'ordre du jour du Sénat du jeudi 15 février le projet de loi autorisant la ratification de l'accord euro-méditerranéen relatif aux services aériens entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et le Royaume du Maroc, d'autre part.

Acte est donné de cette communication, et l'ordre du jour sera ainsi modifié.

La commission des affaires étrangères a souhaité que cette convention soit examinée selon la procédure simplifiée.

Il n'y a pas d'opposition ?...

Cette procédure sera donc mise en oeuvre sauf si un groupe politique demandait, au plus tard le mercredi 14 février 2007 à dix-sept heures, que le projet de loi soit débattu en séance selon la procédure habituelle.

(Ordre du jour réservé)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Poncelet

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à organiser le recours aux stages, présentée par MM. Jean-Pierre Godefroy, Jean Desessard, Charles Gautier, Roger Madec, Richard Yung, Jean-Pierre Bel, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, David Assouline, Bertrand Auban, Mme Marie-Christine Blandin, M. Yannick Bodin, Mmes Nicole Bricq, Claire-Lise Campion, M. Bernard Cazeau, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Pierre-Yves Collombat, Roland Courteau, Yves Dauge, Mme Christiane Demontès, MM. Claude Domeizel, Michel Dreyfus-Schmidt, Bernard Frimat, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Mme Sandrine Hurel, MM. Alain Journet, Yves Krattinger, Serge Larcher, André Lejeune, Mme Raymonde Le Texier, MM. Jacques Mahéas, François Marc, Jean-Pierre Michel, Jean-François Picheral, Bernard Piras, Mme Gisèle Printz, MM. Thierry Repentin, Claude Saunier, Mme Patricia Schillinger, M. Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Tasca, MM. Michel Teston, Jean-Marc Todeschini, Pierre-Yvon Trémel, André Vantomme et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés (nos 364, 2005 2006 et 215).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très heureux et très honoré de vous présenter aujourd'hui cette proposition de loi qui vise à mieux encadrer le recours aux stages étudiants et à apporter davantage de garanties aux stagiaires. Je remercie le président de la commission des affaires sociales et les membres de cette commission qui ont accepté de me désigner comme rapporteur.

Déposée sur le bureau du Sénat en juin 2006 et inscrite à l'ordre du jour à la demande de mon groupe, le groupe socialiste, cette proposition de loi a été élaborée dans le contexte du mouvement de revendication suscité, notamment, par le collectif Génération précaire, qui a mis en évidence un certain nombre de dérives dans l'utilisation des stages par les entreprises.

Des témoignages multiples montrent que les stages sont parfois détournés de leur vocation pédagogique pour devenir une source de main-d'oeuvre à moindre coût. Certaines entreprises fonctionnent en ayant recours en permanence à des stagiaires qui occupent de véritables postes de travail, tout en étant rémunérés à un niveau très inférieur au SMIC. Il peut arriver que le stagiaire qui s'apprête à quitter l'entreprise soit invité à former celui qui va lui succéder sur le même poste.

Les stages peuvent aussi être utilisés comme un outil de prérecrutement et équivalent alors à une période d'essai prolongée. De jeunes diplômés s'inscrivent parfois à l'université uniquement pour pouvoir conclure une convention de stage, alors qu'ils disposent de la qualification requise pour pouvoir assurer les fonctions auxquelles ils postulent.

Le recensement effectué chaque année par le magazine L'Express montre que « la case stage » est devenue quasi obligatoire, mais aussi qu'elle a tendance à se substituer à l'emploi de jeunes diplômés ; parmi les cent plus importants recruteurs sondés par le magazine, plus du quart d'entre eux proposeront, cette année, plus d'offres de stages que d'emplois destinées à de jeunes diplômés, parfois jusqu'à deux ou trois fois plus.

Ce problème des stages n'est d'ailleurs pas uniquement « franco-français ». Grâce à l'impact médiatique, y compris dans la presse étrangère, des actions du collectif Génération précaire, les témoignages de nombreux jeunes Européens montrent que la problématique de l'insertion professionnelle des jeunes est commune à de nombreux pays de l'Union européenne.

Je remercie les militants qui m'ont alerté sur ce problème d'avoir constitué un réseau européen et d'avoir porté le débat au niveau du Parlement et de la Commission européenne. J'espère, et nous pouvons le souhaiter, mes chers collègues, qu'une solution pourra aussi être élaborée à ce niveau.

En attendant, la proposition de loi que je vous présente aujourd'hui vise à mettre un terme à ces abus et à redonner aux stages leur objectif pédagogique. Certes, des initiatives ont été prises l'an passé, en réaction à la mobilisation des stagiaires, mais elles demeurent, à mon sens, insuffisantes.

La loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006 a en effet introduit quelques règles qui vont dans le sens d'une moralisation du recours aux stages, mais qui, de fait, restent très en deçà des attentes de ces étudiants et de ces stagiaires.

Cette loi a d'abord prévu que tout stage en entreprise est obligatoirement précédé de la conclusion d'une convention tripartite, signée entre le stagiaire, l'établissement d'enseignement supérieur où il poursuit ses études et l'entreprise qui l'accueille.

Elle a ensuite limité à six mois, en principe, la durée des stages.

Elle a rendu obligatoire le versement d'une gratification au stagiaire au-delà de trois mois, assujettie à cotisations sociales pour la part qui excède un seuil fixé à 360 euros.

Enfin, la loi a unifié la situation des stagiaires au regard de la protection contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Des décrets ont ensuite été pris pour l'application de la loi pour l'égalité des chances. Ils ont précisé le contenu de la convention de stage et ont interdit aux entreprises de recourir à un stagiaire pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent de l'entreprise, ainsi que pour remplacer un salarié absent, faire face à un surcroît temporaire d'activité ou occuper un emploi saisonnier. Il s'agit ainsi d'éviter que le recrutement de stagiaires ne se substitue à l'embauche de salariés.

Nous attendons encore le décret qui doit préciser le montant de la gratification accordée aux stagiaires. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous nous donniez des indications sur la date de publication de ce décret et sur le montant de la gratification - j'insiste sur ce terme - envisagée. Car c'est une information essentielle pour l'ensemble des étudiants.

En avril 2006, le Gouvernement, plusieurs syndicats étudiants et les représentants des établissements d'enseignement supérieur ont également signé une « charte des stages étudiants en entreprise » destinée à compléter le dispositif législatif et règlementaire. Je précise que la charte n'a cependant pas été signée par l'Union nationale des étudiants de France, l'UNEF, qui est le principal syndicat étudiant, ni par le collectif Génération précaire. Ce dernier n'avait pas qualité pour signer, mais il a clairement fait savoir qu'il voulait une loi et non une charte.

La charte insiste longuement sur les obligations mutuelles des étudiants, des entreprises et des établissements d'enseignement. Elle prévoit en particulier que l'étudiant est suivi par un tuteur dans l'entreprise et par un enseignant référent dans son établissement d'enseignement.

Mais cette charte ne revêt aucun caractère contraignant. Elle constitue davantage un référentiel de bonnes pratiques. Finalement, elle ne s'imposera qu'à ceux qui voudront bien être vertueux. En outre, elle ne définit pas l'abus de stage. Un décret a d'ailleurs quelque peu précisé les choses, je tiens à le souligner à cet instant.

J'observe que le comité de suivi de la charte, dont la création a été annoncée, n'a toujours pas été mis en place et j'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous précisiez vos intentions à ce sujet. Le travail d'évaluation auquel doit procéder ce comité me paraît en effet indispensable.

La proposition de loi présentée par mon groupe permettrait d'aller plus loin en posant un cadre législatif complet pour organiser le recours aux stages. Elle ne vise pas à décourager les entreprises de proposer des stages aux étudiants. Je suis au contraire favorable à une plus grande professionnalisation des formations universitaires, dont les stages constituent l'une des principales modalités. Au-delà des stages, c'est aussi l'apprentissage et l'alternance qu'il faut développer à l'université.

Par cette proposition de loi, il s'agit simplement de prévoir et de combattre les abus, tout en permettant à l'ensemble des étudiants d'avoir accès aux stages. J'observe en effet que les étudiants qui ont besoin de travailler pour financer leurs études sont souvent contraints d'accepter des « petits boulots », sans lien avec leurs études mais correctement rémunérés. Ne serait-il pas plus judicieux qu'ils puissent effectuer des stages qui compléteraient leur formation théorique, ce qui est aujourd'hui impossible pour beaucoup, car ils ne leur procurent pas le revenu dont ils ont besoin ?

Je souligne que la proposition de loi a vocation à s'appliquer à l'ensemble des stages, qu'ils soient accomplis auprès d'employeurs publics ou privés - c'est peut-être là où le bât blesse pour certains - et non pas seulement aux stages en entreprise ; cela me paraît relever de l'équité. Elle donne valeur législative à des règles posées dans la charte ou figurant dans des décrets. Elle renforce en outre les garanties apportées aux stagiaires, surtout en matière de rémunération.

Les articles 1er et 2 introduisent une série de dispositions parallèles, d'abord dans le code de l'éducation, puis dans le code du travail. En effet le statut de stagiaire présente un caractère hybride, à mi-chemin entre le monde de l'éducation et le monde du travail. Il s'agit donc de tenir compte de la double position du stagiaire, à la fois étudiant et travailleur.

Tout stage devra donner lieu à la signature d'une convention tripartite comportant des mentions obligatoires. Il devra y être insisté sur les responsabilités respectives de l'établissement d'enseignement supérieur - qui devra notamment contrôler l'adéquation du contenu du stage à la formation suivie par l'étudiant -, de l'organisme d'accueil - qui devra désigner un maître de stage chargé d'exercer une fonction de tuteur - et du stagiaire - qui devra réaliser la mission qui lui est confiée, dans le respect des règles en vigueur dans l'organisme d'accueil, et rédiger, le cas échéant, un rapport ou un mémoire de stage.

Nous proposons que la rémunération du stagiaire soit au moins égale à 50 % du SMIC, dès lors que la durée du stage est supérieure à un mois. Nous parlons bien de rémunération et non d'une simple gratification, ce qui, juridiquement mais aussi symboliquement, n'a pas la même portée.

La fixation d'un minimum légal pour la rémunération des stagiaires constitue l'une des principales avancées de ce texte, de même que le principe de la prise en charge par l'employeur - dans des conditions qui seront à déterminer - des frais de transport, quand le lieu de stage est très éloigné, de logement ou de restauration engagés par le stagiaire.

La durée maximale des stages effectués au cours d'une même année universitaire ne saurait en outre excéder six mois ; cela paraît légitime, car l'accomplissement de stages ne doit pas se substituer à la formation dispensée par l'établissement d'enseignement. Des dérogations pourront toutefois être prévues pour certaines formations.

Le stagiaire bénéficiera des garanties accordées aux salariés en matière de santé et de sécurité au travail et sera protégé en cas de maladie : sa rémunération sera maintenue pendant au moins un mois et la maladie ne pourra être invoquée comme motif de rupture du stage.

Un autre point me paraît essentiel : la proposition de loi définit et réprime l'abus de stage.

Le stage ne doit pas être utilisé pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail, ni pour répondre à un besoin qui devrait être satisfait par l'embauche d'un salarié en contrat à durée déterminée.

Un stage ne doit pas non plus être accompli par un jeune diplômé qui dispose de la formation adéquate pour occuper le poste qui lui sera confié. La sanction prévue par le texte en cas d'infraction est une amende de 1 500 euros, doublée en cas de récidive ; je reviendrai sur ce point tout à l'heure.

Toujours pour lutter contre les abus, la proposition de loi prévoit l'information des représentants du personnel concernant les stages et l'envoi des conventions de stage à la direction départementale du travail, qui disposerait alors d'un délai de quinze jours pour faire connaître son opposition motivée.

Afin de faciliter l'accès au juge, la proposition de loi dispose ensuite que les litiges nés de la convention de stage seront désormais portés devant le conseil de prud'hommes et non devant le tribunal d'instance, comme c'est le cas actuellement. Il me semble en effet que le conseil de prud'hommes, qui applique une procédure plus souple et dont les délais de jugement sont souvent plus courts, sera mieux à même de traiter ces affaires et, surtout, de procéder à des règlements amiables en cas de litige.

Enfin, le texte envisage l'hypothèse d'une embauche à l'issue du stage. Dans ce cas, la durée du stage s'imputera sur la période d'essai et sera prise en compte pour le calcul de l'ancienneté du salarié.

L'article 3 prévoit qu'un arrêté ministériel fixera la part de la rémunération du stagiaire qui sera assujettie à cotisations sociales. Afin de ne pas alourdir excessivement le coût d'un stagiaire pour l'entreprise, il est raisonnable de prévoir, comme c'est le cas aujourd'hui, qu'une partie de la rémunération sera exonérée de cotisations. Il est cependant important que les stagiaires accumulent des droits à retraite et à assurance chômage.

L'article 4 prévoit enfin un gage pour compenser les éventuelles charges supportées par les régimes sociaux.

Mes chers collègues, la commission des affaires sociales a examiné la proposition de loi lors de sa réunion du 7 février dernier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Il me revient, en tant que rapporteur, de vous rapporter fidèlement sa position, même si celle-ci, je ne vous le cache pas, n'a pas répondu à mes attentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Je tiens à signaler tout d'abord que le débat en commission a été riche ; de nombreux sénateurs et sénatrices appartenant à tous les groupes sont intervenus, ce qui témoigne de l'intérêt des parlementaires pour ce sujet. La plupart de mes collègues ont par ailleurs admis que la pratique des stages donnait parfois lieu à des dérives, qu'il convient de combattre.

Je regrette que la majorité de la commission ait cependant jugé que la proposition de loi ne permettrait pas de traiter le problème de manière efficace. Elle a considéré que l'obligation faite aux employeurs de rémunérer les stagiaires au moins à hauteur de 50 % du SMIC et de prendre en charge leurs dépenses de transport, de logement et de restauration constituerait une charge excessive, susceptible de décourager l'offre de stages. À cet instant, je tiens à signaler que, lors des auditions que j'ai menées pour préparer ce rapport, le représentant de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises, notamment, n'a pas soulevé ce genre d'objections et a même approuvé le principe d'une telle rémunération.

En résumé, la majorité de la commission a estimé que l'adoption de la proposition de loi aurait un effet contraire à l'objectif recherché. La commission s'est donc prononcée, à mon grand regret, pour le rejet du texte.

Pour autant, elle ne s'est pas montrée hostile à certains des amendements que j'aurais aimé voir apportés au texte pour en améliorer le dispositif, et j'étais prêt à discuter de tous les amendements. J'avais en effet moi-même souhaité que certaines procédures puissent être rendues moins rigides que dans le texte initial pour, justement, tenir compte des contraintes pesant sur les entreprises.

Parmi ces amendements, je souhaitais notamment substituer l'inscription des stagiaires dans le registre unique du personnel, ce qui est un bon moyen de contrôle, au contrôle de la convention de stage par l'inspection de travail qui, de fait, je veux bien l'admettre, n'en a ni le temps ni les moyens.

Quoi qu'il en soit, il est singulier qu'en application de notre règlement le texte de la proposition de loi puisse être rejeté avant même l'examen des articles qu'elle contient, alors que j'ai le sentiment que nous aurions pu y trouver le moyen d'améliorer la situation de nos jeunes concitoyens.

En conclusion, je regrette donc l'avis défavorable de la majorité de la commission, et je remercie les sénateurs qui ont cosigné ce texte et qui sont présents aujourd'hui pour le soutenir.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le sujet abordé dans cette proposition de loi revêt une grande importance. Le stage doit faire partie des formations professionnelles et supérieures. Il est normal que, dans les cursus, soient prévues des périodes successives consacrées aux stages.

En effet, si, dans certains établissements, le recours aux stages est systématique, dans d'autres, il est encore l'exception. C'est une anomalie. Aujourd'hui, toute formation, en tout cas dans l'enseignement supérieur, doit donner à l'étudiant l'occasion de se confronter à une réalité professionnelle, quelle qu'elle soit : celle de l'entreprise, celle d'une administration - j'y reviendrai, il y a sans doute des progrès à faire de ce point de vue -, celle du métier qu'il sera peut-être, demain, amené à exercer.

D'une manière générale, nous avons des progrès à accomplir.

Comme je le soulignais précédemment, les stages sont sensiblement moins développés dans le secteur public que dans le secteur privé, et ils y sont, de surcroît, rarement rémunérés. C'est un inconvénient. L'État et les autres collectivités publiques doivent donc incontestablement faire mieux. Comme souvent, les collectivités locales ont plutôt tendance à montrer l'exemple et à faire preuve de plus d'ouverture que les services de l'État. Du moins, tel est le constat que j'ai été amené à dresser.

En outre, les employeurs privés et les entreprises susceptibles d'accueillir des stagiaires ont, à l'évidence, de réels besoins en la matière. Le nombre de stages nécessaires, ou en tout cas celui que nous devrions atteindre, est considérable : il s'élève probablement à plusieurs centaines de milliers.

C'est pourquoi vos préoccupations, que je comprends bien, doivent être mises en parallèle avec le souci de ne pas donner d'incitation négative aux employeurs susceptibles d'accueillir des stagiaires.

En réalité, nous devons trouver un équilibre. Certes, d'un côté, il est nécessaire d'assurer la protection des stagiaires. Même si les abus que vous avez évoqués ne constituent pas la règle, car ils ne sont pas représentatifs de la majorité des stages proposés dans notre pays, ils existent néanmoins. Il faut donc protéger les stagiaires. Mais, d'un autre côté, si nous adoptons des législations trop rigides ou si nous instituons trop de contraintes, les employeurs et les entreprises éprouveront certainement des réticences à accueillir des stagiaires, alors même que le développement de cette formule extrêmement heureuse dans les cursus de formation est nécessaire.

À cet égard, monsieur le rapporteur, permettez-moi de vous faire part de mon étonnement.

La législation reconnaissant les stages et le texte d'application qui a suivi, c'est-à-dire la charte des stages étudiants en entreprise, adoptée postérieurement, sont encore très récents. C'est seulement en 2006, en effet, qu'un début de statut a, pour la première fois, été accordé aux stagiaires par la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances. Auparavant, aucune disposition législative n'avait été adoptée pour donner aux stagiaires le minimum de protection qui semble indispensable.

Vous le comprendrez donc, on peut s'étonner que la présente proposition de loi intervienne au lendemain de l'adoption de ces nouvelles dispositions, tout comme l'on peut s'étonner qu'aucune initiative n'ait été prise en la matière lorsque la majorité que vous souteniez était aux responsabilités, monsieur le rapporteur ! Vous choisissez de déposer cette proposition de loi au moment même où un statut est, pour la première fois, accordé aux stagiaires.

Le dispositif institué par la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances constitue un cadre adapté pour l'exercice des stages dans les entreprises. Vous l'avez rappelé, un décret a été pris en application de l'article 9 de cette loi et la charte des stages étudiants en entreprise a été adoptée.

Vous avez mis en exergue le fait qu'une organisation syndicale étudiante, d'ailleurs coutumière du fait, n'a pas signé la charte. Mais toutes les autres organisations représentatives d'étudiants qui ont des élus dans les différentes instances l'ont soutenue. De même, les trois organisations représentant les établissements d'enseignement supérieur, c'est-à-dire la Conférence des présidents d'université, la Conférence des directeurs d'école et de formations d'ingénieurs, la Conférence des grandes écoles, en sont également signataires, ainsi que le MEDEF, la Confédération générale des petites et moyennes entreprises, ou CGPME, et l'Union professionnelle artisanale.

Ainsi, la charte a fait l'objet d'un très large accord. Elle contient des dispositions très concrètes et elle institue des règles qui sont considérées par les différents acteurs comme à la fois protectrices pour les stagiaires et non dissuasives pour les entreprises. C'est ce point d'équilibre qu'il convenait d'atteindre ; nous y sommes parvenus grâce à la négociation.

Il en est de même s'agissant de la rétribution - certains parlent plutôt de « rémunération » ou de « gratification » - des stagiaires. Nous avons préféré que cette question soit traitée par un accord de branches, car les rémunérations varient en fonction du niveau d'études, des cursus proposés et de l'entreprise ou de l'activité. Par conséquent, il n'est sans doute pas opportun de poser des règles d'ordre national.

Dans la mesure où la discussion a lieu, il faut lui laisser le temps d'aboutir.

Vous proposez que le stagiaire perçoive une rémunération correspondant au minimum à 50 % du SMIC à partir du deuxième mois de stage. Or, dans un certain nombre de cas, notamment lorsque le niveau d'études est élevé, ce niveau de gratification est probablement déjà atteint, et parfois même dépassé.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

En revanche, une telle rémunération peut être considérée comme excessive par l'entreprise offrant des stages à des jeunes moins qualifiés, moins opérationnels et ayant besoin d'apprendre par la pratique.

C'est pourquoi, si la présente proposition de loi part d'une très bonne intention, les dispositions qu'elle vise à instituer sont, à mon sens, contreproductives. Je partage donc totalement l'avis de la commission des affaires sociales.

Les auteurs de ce texte souhaitent, semble-t-il, rapprocher les statuts de stagiaire et de salarié. Or, considérer un stagiaire, qui est dans une position particulière en tant qu'étudiant ou que personne en formation, comme un salarié est une erreur. Respectons donc les différents statuts et faisons en sorte de développer le stage comme outil de formation des jeunes.

Puisque nous disposons désormais d'un cadre législatif, il vaut mieux attendre quelques mois avant d'en tirer un bilan. Nous verrons ensuite s'il y a lieu de relancer une négociation, par exemple une procédure conventionnelle, pour tenter d'améliorer la situation. Mais, de mon point de vue, il n'est pas opportun de légiférer aujourd'hui en la matière.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Mme Michèle André remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :

Groupe Union pour un mouvement populaire, 33 minutes ;

Groupe socialiste, 23 minutes ;

Groupe Union centriste-UDF, 11 minutes ;

Groupe communiste républicain et citoyen, 9 minutes ;

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Léonce Dupont.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la fin de l'année 2005, les étudiants se sont mobilisés pour alerter l'opinion et les pouvoirs publics sur le comportement abusif de certains employeurs en matière de stages qui leur étaient proposés.

Il est vrai que certaines sociétés tendent à faire occuper des emplois à durée indéterminée par des stagiaires successifs et que ces derniers ne bénéficient pas toujours d'une rémunération, même minime. D'ailleurs, et vous venez de le rappeler, monsieur le ministre, l'administration n'est pas la plus généreuse en la matière !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Mais il convient de ne pas généraliser et de ne pas ostraciser les nombreux professionnels qui tentent de partager leur expérience et de faire connaître leurs métiers auprès des jeunes.

En outre, de telles pratiques ne sont pas spécifiques à la France. Dans de nombreux pays, on considère la possibilité de pouvoir s'initier ainsi à la vie professionnelle comme une chance justifiant en elle-même des efforts de la part du jeune qui en bénéficie.

En France, suite à une large concertation, le Gouvernement - je tiens d'ailleurs à saluer M. Gérard Larcher, ainsi que vous-même, monsieur le ministre - a organisé la signature, le 26 avril 2006, de la charte des stages étudiants en entreprise, qui tend à sécuriser la pratique des stages, sans pour autant, et j'insiste sur ce point, décourager les employeurs d'y recourir.

Par ailleurs, et M. le rapporteur l'a rappelé, une disposition a déjà été votée dans la cadre de la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances. Je relève que M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, auteurs de la présente proposition de loi, n'ont pas attendu la parution du décret d'application de cette disposition, le 29 août 2006, pour déposer leur texte.

Je m'interroge donc sur l'intérêt de présenter une proposition de loi après l'adoption d'une disposition législative et d'une charte, et ce sans même attendre le texte d'application de la loi. Ne risque-t-on pas de contribuer ainsi à l'inflation législative, sans laisser aux initiatives récentes le temps de s'installer dans le paysage et d'entrer tout simplement dans les moeurs ? Notre pays souffre de cela. À mon sens, nous avons besoin de sortir de notre société de défiance pour instaurer une société de confiance.

Le décret du mois d'août dernier précise utilement les mentions devant figurer dans la convention tripartite qui doit être signée entre l'établissement d'enseignement supérieur, le stagiaire et l'entreprise d'accueil. En outre, il interdit le recours à des stagiaires dans un certain nombre de circonstances, parmi lesquelles je m'étonne d'ailleurs de voir figurer l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.

Mes chers collègues, s'il faut éviter les dérives et abus, il nous faut également, me semble-t-il, garder à l'esprit qu'un stage non seulement revêt une dimension pédagogique, mais constitue également une initiation à la vie professionnelle. Or cette dernière ne passe-t-elle pas par l'exercice de certaines missions, ce qui va donc au-delà de la simple observation du travail effectué par d'autres ?

Les étudiants que je rencontre se plaignent très souvent que leurs stages ne leur permettent pas de se confronter véritablement aux réalités de leur future vie professionnelle ; le seul rôle d'observateur se révèle frustrant.

De même, si la structure d'accueil doit veiller à ce que le rôle du tuteur soit efficacement assumé, il n'apparaît pas absurde qu'elle en attende un certain retour, surtout si elle verse une gratification aux stagiaires.

Vous m'avez compris, je ne suis pas surpris que la commission des affaires sociales ait décidé de rejeter cette proposition de loi. En tant que rapporteur de l'enseignement supérieur pour la commission des affaires culturelles, j'aurais prôné la même solution si cette dernière avait été saisie de ce texte législatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Je regrette, d'ailleurs, qu'elle n'en ait pas été saisie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

Nous connaissons la difficulté des étudiants pour trouver des stages. Pourtant, cette expérience pratique se révèle désormais indispensable pour leur future insertion professionnelle.

Or si les entreprises sont généralement prêtes à assumer le rôle d'accueil qui leur incombe - elles ont tout intérêt à le jouer si elles veulent ensuite recruter de jeunes diplômés qualifiés -, elles savent également que recevoir un étudiant est chronophage pour leurs salariés. Il faut donc que chacun puisse s'y retrouver.

Or inscrire dans le marbre, c'est-à-dire dans la loi, les dispositions qui nous sont proposées risquerait, me semble-t-il, de décourager un certain nombre d'employeurs susceptibles de s'inquiéter d'une forme de complexité introduite dans un domaine où la souplesse s'impose, car elle est liée à la diversité des besoins des étudiants, en fonction de leur cursus dans l'enseignement supérieur.

Nous devons donc, je le crois, laisser vivre les dispositifs existants et la charte. Il faut les faire connaître et procéder à l'évaluation de leur application par toutes les parties concernées. À cet égard, je propose d'en établir un premier bilan à l'occasion de la présentation du projet de budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2008.

Par ailleurs, ne faudrait-il pas s'interroger sur les pratiques d'un certain nombre de services publics ? Il est assez courant que leurs stages soient quasiment réservés aux enfants de leur personnel.

M. le président de la commission des affaires sociales s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Léonce Dupont

C'est souvent le cas, par exemple, dans les commissariats de police ou à la SNCF. Certes, cela concerne surtout les stages des élèves en classe de troisième ou de seconde, mais n'est-ce pas déjà à ce stade que l'orientation des jeunes est essentielle et que se forme leur représentation des métiers ?

Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les avantages des stages accompagnant la formation initiale des étudiants sont incontestables. Leur rôle dans l'insertion professionnelle des jeunes est central et doit être pleinement reconnu à l'heure où le chômage qui les frappe demeure plus élevé que celui des autres catégories d'âge.

Ils apportent à un étudiant, outre son premier contact effectif avec le monde du travail, un complément de formation et une expérience valorisables lors de l'entrée dans la vie active.

De leur côté, les entreprises ne sauraient ignorer l'intérêt de faire découvrir aux étudiants les enjeux de la production, les jeunes stagiaires pouvant, par ailleurs, constituer un élément important du dynamisme de l'entreprise d'accueil grâce au regard neuf et extérieur qu'ils peuvent porter sur elle.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Si le développement des stages doit être activement recherché pour améliorer l'insertion professionnelle des jeunes, il est néanmoins essentiel de rappeler que les stages ont avant tout une finalité pédagogique, ce qui signifie qu'il ne peut y avoir de stage hors parcours pédagogique.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

En effet, le stage permet la mise en oeuvre de connaissances théoriques dans un cadre professionnel et donne à l'étudiant une expérience du monde de l'entreprise et de ses métiers. En aucun cas un stage ne peut être considéré comme un emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Il est cependant apparu que des stages pouvaient être utilisés comme une modalité de préembauche, voire comme un contrat de travail dissimulé, les détournant ainsi de leurs finalités premières.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Certains stages ont donné lieu à des abus, on ne peut le contester.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je pense aux stages dépourvus de valeur pédagogique ou au recours, par certaines entreprises, à cette formule dans des situations qui auraient justifié la conclusion d'un contrat de travail.

C'est pourquoi la loi pour l'égalité des chances, votée en 2006, a inséré un encadrement juridique des stages dans le dispositif qu'elle a consacré à la lutte contre la précarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Ainsi, l'article 9 de cette loi a-t-il rendu obligatoire la conclusion d'une convention tripartite -étudiant, établissement d'enseignement et employeur - pour les stages en milieu professionnel ne relevant pas de la formation professionnelle continue.

Il s'agit d'améliorer les conditions de travail du stagiaire et de le prémunir contre les abus en encadrant le déroulement du stage. Cette obligation légale s'applique, que le stage soit obligatoire ou non dans le cursus de formation.

Le décret nécessaire à l'application de cet article est paru le 29 août 2006. Il précise, notamment, que doivent obligatoirement figurer dans la convention la définition des activités confiées au stagiaire en fonction des objectifs de formation, la durée hebdomadaire maximale de présence du stagiaire dans l'entreprise, le montant de la gratification qui lui est versée, le régime de protection sociale dont il bénéficie, les conditions de son encadrement et les modalités de suspension et de résiliation du stage.

Le décret interdit également de conclure une convention de stage soit pour remplacer un salarié en cas d'absence, de suspension de son contrat de travail ou de licenciement, soit pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent, soit pour faire face à un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, soit encore pour occuper un emploi saisonnier.

Il démontre, si besoin était, à quel point vous vous êtes engagé, monsieur le ministre, avec Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, à améliorer cet outil fondamental d'orientation et d'insertion professionnelle pour les jeunes, qui les prépare au passage vers le monde du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La loi prévoit également que ces stages, à l'exception de ceux qui sont intégrés à un cursus pédagogique ou de ceux qui font partie du cursus de formation d'une profession réglementée, ont une durée initiale - ou cumulée, en cas de renouvellement - qui ne peut excéder six mois. La présente proposition de loi ne fait que reprendre ce délai maximum.

Ce même article 9 traite également de la question de la rémunération, qui est un élément essentiel du statut du stagiaire. Le principe de l'octroi d'une rémunération pour les stages d'une durée supérieure à trois mois a donc été instauré.

Pour éviter toute ambiguïté, il a été précisé que le stage ne crée pas une relation de travail salarié et, donc, que la rémunération est une « gratification » et non pas un salaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Par ailleurs, l'article 10 de la même loi crée une franchise en deçà de laquelle l'employeur et le stagiaire n'acquittent ni cotisations ni contributions sociales. Lorsque l'indemnité est supérieure à ce seuil, l'employeur et le stagiaire cotisent sur la seule fraction excédant le seuil et non plus sur la totalité de la somme.

Tout cela doit donc permettre une meilleure indemnisation des stagiaires.

Enfin, ils bénéficient tous des prestations accidents du travail et maladies professionnelles du régime général, à l'exception des indemnités journalières et de l'indemnité en capital, quel que soit le montant de leur rétribution.

Le législateur n'est donc pas resté inactif, comme vous le voyez. Beaucoup a déjà été fait par notre majorité, et nous considérons qu'il convient de laisser ces nouvelles mesures produire leur plein effet.

Par ailleurs, le Gouvernement a signé, le 26 avril 2006, une charte des stages étudiants en entreprises avec les représentants des entreprises, des établissements d'enseignement supérieur et des étudiants. Cette charte a pour objectif de sécuriser la pratique des stages, tout en favorisant leur développement, bénéfique à la fois pour les jeunes et pour les entreprises.

Les rédacteurs de la charte sont le MEDEF, la CGPME, l'Union professionnelle artisanale, l'UPA, l'Union nationale des professions libérales, l'UNAPL, l'Union nationale interuniversitaire, l'UNI, la Fédération des associations générales étudiantes, la FAGE, Promotion et défense des étudiants, PDE, le collectif Génération précaire, la Conférence des présidents d'université, la Conférence des grandes écoles et la Conférence des directeurs d'écoles et de formations d'ingénieurs, c'est-à-dire la quasi-totalité des partenaires sociaux, ainsi que les services du ministère délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes et du ministère délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche.

Le champ de la charte concerne tous les stages d'étudiants en entreprise, sans préjudice des règles particulières applicables aux professions réglementées.

Dans ce cadre, le stage doit permettre la mise en pratique des connaissances en milieu professionnel et faciliter le passage du monde de l'enseignement supérieur à celui de l'entreprise.

Cette charte rappelle que le projet de stage est formalisé dans la convention signée par l'établissement d'enseignement, l'entreprise et le stagiaire, qui tend à préciser, notamment, leurs engagements et leurs responsabilités respectifs. Là encore, la proposition de loi est satisfaite sur plusieurs points par la charte.

En outre, tout stage fait l'objet d'un double encadrement par un enseignant de l'établissement et un membre de l'entreprise, comme le souhaite M. Godefroy dans sa proposition de loi. L'enseignant et le membre de l'entreprise travaillent en collaboration, sont informés et s'informent de l'état d'avancement du stage et des difficultés éventuelles.

Le responsable du stage au sein de l'établissement d'enseignement est le garant de l'articulation entre les finalités du cursus de formation et celles du stage, selon les principes de la présente charte. Leurs institutions respectives reconnaissent la nécessité de leur investissement, notamment en temps, consacré à l'encadrement. Sur ce point également, la charte répond aux dispositions que le texte qui nous est soumis veut imposer par la loi.

On ne peut donc plus clairement démontrer à quel point les partenaires sociaux sont déterminés à favoriser les stages tout en les encadrant dans des conditions didactiques et constructives.

M. Jean Desessard s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Diffusée au cours du printemps 2006 auprès des entreprises, des branches professionnelles, des établissements d'enseignement supérieur et des services de l'État, cette charte constitue à ce jour le texte de référence encadrant les stages.

Par ailleurs, l'État s'est engagé, en application du Plan national de lutte contre le travail illégal pour les années 2006-2007, à ce que les corps de contrôles puissent exercer une vigilance sur les conditions de travail des stagiaires en entreprise. L'idée du rapporteur de proposer un contrôle a posteriori de la convention par l'inspection du travail se trouve donc satisfaite.

Je crois, par conséquent, que la quasi-intégralité de ce qui tend à sécuriser le stage, pour le rendre le plus profitable possible à l'étudiant sur le plan pédagogique, a d'ores et déjà été mis en place par la loi et par la charte.

Sans doute peut-on considérer que le caractère non coercitif de la charte fait planer un doute sur son efficacité. La proposition de loi prévoit d'y remédier en imposant un encadrement par la loi, dont l'inobservation pourra être lourdement sanctionnée, notamment par la création de la notion d'abus de stage.

À titre personnel, je suis de ceux qui veulent faire confiance au dialogue social.

Les sénateurs du groupe socialiste et du groupe CRC marquent leur scepticisme en toussotant.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Les partenaires sociaux se sont mis d'accord pour un meilleur encadrement des stages au profit de tous. Nous devons leur faire confiance.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Sans doute ne pourrons-nous pas éviter totalement les abus, mais mettre en place un carcan administratif trop lourd, complété par une pénalisation au titre du travail dissimulé, me semble disproportionné.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

La proposition de loi prévoit, par ailleurs, d'instaurer une rémunération des stagiaires à hauteur de 50 % du SMIC au-delà d'un mois de stage. C'est méconnaître la réalité du terrain et donner un signal fort en défaveur des stages que d'imposer un tel niveau minimum de rémunération.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je redoute qu'une telle mesure ne soit, en définitive, totalement contreproductive et que les employeurs ne soient découragés par ces contraintes excessives.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Il ne faudrait pas, en effet, que la proposition de loi ait un effet pervers, similaire à celui de la contribution Delalande qui avait alourdi le coût du licenciement de salariés âgés et abouti à ce que la France connaisse l'un des plus faibles taux d'emploi des seniors en Europe.

Partant de très bonnes intentions, ces dispositifs risquent d'aboutir, en réalité, au résultat inverse de celui qui est recherché.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Avec de telles mesures, il n'y aurait plus d'abus, car il n'y aurait plus de stage. N'oublions pas que nos jeunes éprouvent des difficultés pour trouver un stage, qui exige du temps et de l'investissement de la part de l'employeur.

Sans doute serait-il souhaitable que les représentants des employeurs publics et ceux du secteur associatif soient associés à la charte afin de couvrir un champ plus large. Pour le moment, laissons à la loi et au dialogue le temps d'agir.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP suivra les conclusions de la commission des affaires sociales tendant à rejeter la présente proposition de loi.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le mardi 4 octobre 2005, les stagiaires, contraints de porter des masques afin que leurs patrons ne les reconnaissent pas, défilaient dans nos rues afin d'exprimer leur colère, légitime, pour être devenus des « sans droits », plus pauvres que le travailleur pauvre.

Ces femmes et ces hommes sont sortis de l'ombre pour révéler la précarité de leur situation ! Dans l'espoir d'être intégrés un jour dans une entreprise, ces stagiaires ont accepté de travailler de longs mois, la plupart du temps sans aucune compensation financière et, surtout, sans aucune garantie en termes de droits et de protection. Après avoir admis cette situation pendant des années, stoïquement et en silence, les jeunes la rejettent aujourd'hui !

C'est non pas le stage qui est remis en cause, car il est souvent indispensable aux jeunes lorsqu'ils s'inscrivent dans le cadre d'une formation qualifiante, mais bien la manière dont il a été perverti au profit de certaines entreprises, administrations ou associations, qui bénéficient d'une réserve de main-d'oeuvre à moindre coût, la sécurité sociale étudiante assurant la couverture sociale !

Censé être un « tremplin pour l'emploi », le stage s'est mué, au fil des années, en une « forme d'emploi ».

Si la charte du 26 avril 2006 a marqué une certaine prise de conscience, de la part de l'État et des entreprises, des difficultés des stagiaires, elle n'en reste pas moins insuffisante. En effet, elle a un caractère non contraignant et elle occulte des points essentiels, tels que la rémunération des stagiaires ou encore le recours abusif à ces derniers par certains employeurs.

Manquant d'un encadrement législatif précis, le stage a souvent été détourné de sa fonction d'apprentissage. Aujourd'hui, il est coutumier de voir une succession de stagiaires remplacer un salarié à plein temps, salarié que l'entreprise évite soigneusement d'embaucher. Cette situation est préjudiciable non seulement pour la formation et l'insertion professionnelle du stagiaire, mais également pour les salariés, car de telles pratiques détruisent corrélativement de vrais emplois !

D'ailleurs, le Conseil économique et social, ne s'y s'est pas trompé, puisque, dans son rapport d'août 2005, sur l'insertion professionnelle des jeunes issus de l'enseignement supérieur, il soulignait « la nécessité de procéder à un réexamen des conditions statutaires des stages en entreprises ».

Parallèlement à cette précarité des stagiaires, le taux de chômage en France des jeunes de moins de vingt-cinq ans est l'un des plus élevé d'Europe : selon l'INSEE, le taux de chômage des jeunes actifs s'élevait à 22, 8 % en 2005.

Le paradoxe est donc le suivant : les offres de stages s'amplifient inversement aux offres d'emplois ! Ainsi, force est de constater que le recours abusif aux stagiaires est un frein à l'embauche des jeunes. Cette situation n'est pas acceptable, alors que notre jeunesse a exprimé, à de multiples reprises, son « ras-le-bol » d'être en permanence en situation d'urgence sociale !

À la lumière de ces constats, la mise en oeuvre d'un cadre législatif précis pour redonner au stage son caractère pédagogique et sa mission d'insertion des jeunes actifs est une exigence. La célèbre citation de Lacordaire « Entre le fort et le faible, le riche et le pauvre, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit » trouve ici tout son sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

C'est pourquoi, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe communiste républicain et citoyen se réjouit de la discussion de ce texte, qui permettra sans nul doute de lever le voile, s'il en était encore besoin, sur la situation précaire des stagiaires et de répondre, enfin, à leurs exigences, face à un patronat toujours plus gourmand !

La majeure partie des propositions que nous avions soutenues lors du débat relatif au projet de loi pour l'égalité des chances, tendant à redonner au stage ses missions premières, propositions qui semblent indispensables à de nombreuses organisations d'étudiants et d'enseignants, au collectif « Génération précaire » notamment, sont inscrites dans le texte qui nous est présenté aujourd'hui.

Il s'agit, tout d'abord, d'interdire le recours intempestif aux stagiaires. Il convient ainsi de clarifier la notion d'abus de stage et, en conséquence, de déterminer les sanctions qui en découlent. Sur ce point, ce texte est plus indulgent que notre proposition, mais adopter le principe d'une amende est d'ores et déjà un premier pas ; à nous, par la suite, d'aller plus loin !

Toujours dans cette perspective, nous proposions de ne permettre le renouvellement ou la prolongation d'un stage qu'une seule fois. C'est pourquoi sa durée doit être obligatoirement inscrite dans la convention écrite entre l'établissement de formation et l'entreprise.

De même, le contenu des conventions de stages doit être davantage précisé, notamment l'objectif pédagogique et les responsabilités des différents intervenants. Il est nécessaire de contrôler l'adéquation du stage à la formation dispensée, d'instaurer un tutorat approprié dans l'entreprise et dans l'université, d'évaluer l'apport du stage en fonction de la formation ainsi que la qualité d'accueil et d'encadrement pédagogique.

Toutefois, nous sommes conscients que la mise en place d'un référent pédagogique à l'université risque de rester lettre morte en l'état actuel des effectifs dans l'enseignement supérieur, qui sont bien insuffisants. Cette mesure a donc un corollaire : l'augmentation des moyens accordés à l'enseignement supérieur, Monsieur le ministre, je suis sûre que vous m'aurez entendue !

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

M. François Goulard, ministre délégué. Comme d'habitude !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Toujours dans le souci de protéger légalement le stagiaire, nous avions proposé d'imputer la durée du stage sur la période d'essai lorsque, à l'issue de celui-ci, un contrat de travail est conclu. Il s'agit là de souligner que l'étudiant qui réalise un stage dans une entreprise y acquiert nécessairement une expérience professionnelle. En effet, il nous semble que, si un stagiaire a passé plusieurs mois dans une entreprise, voire une année entière dans certains cas, son employeur a largement eu le temps de l'évaluer, connaît ses compétences et se trouve en mesure de déterminer s'il est apte ou non à occuper un emploi salarié au sein de ladite entreprise.

Cette question rejoint le constat, fait ces dernières années, de l'allongement de la durée des stages, les écoles de commerce ou d'ingénieurs commençant même à généraliser les stages d'une année.

Il est fréquent que des stagiaires voient la durée de leur stage abusivement prolongée et continuent à travailler dans ce cadre, sans la perspective d'une embauche à plus ou moins long terme. C'est pourquoi, nous proposions de limiter à trois mois la durée du stage. La durée inscrite dans le texte est de six mois. Là encore, l'adoption d'un tel principe nous convient.

L'allongement abusif de la durée des stages est étroitement lié à la question prégnante de la rémunération, ou de l'indemnisation, du stagiaire et nécessite, également, l'intervention du législateur. Les employeurs ont bien compris qu'ils pouvaient utiliser cette main-d'oeuvre dont la rémunération n'est pas obligatoire et qui, de surcroît, est prête à effectuer des tâches n'entrant pas forcément dans son projet pédagogique initial.

La rémunération des stagiaires n'étant pas encadrée, les situations sont diverses et, dans bien des cas, elle est limitée au tiers du SMIC, niveau auquel l'entreprise est exonérée de toutes charges sociales.

Pire encore, bien souvent, les stages ne sont pas rémunérés. Les jeunes issus de milieux modestes ne peuvent ainsi y accéder, alors même qu'ils sont à la recherche d'un emploi et qu'ils sont convaincus qu'un stage leur permettra d'acquérir l'expérience professionnelle exigée par les employeurs. Cette inégalité sociale est encore plus accentuée pour les stages à l'étranger, qui génèrent des coûts d'hébergement, de nourriture et de transport importants à la charge du stagiaire !

C'est donc dans un souci d'équité, mais également en vertu de l'article 23-3 de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui dispose que « Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable », que nous demandions que les stages soient rémunérés. La proposition faite ici d'une rémunération d'au moins 50 % du SMIC pour les stages de plus d'un mois est donc, de ce point de vue, satisfaisante.

Une autre question appelle toute ma vigilance et mériterait d'être soulevée lors de ce débat ; elle concerne la discrimination. Tout comme elle est avérée sur le marché du travail, certains jeunes en sont victimes lorsqu'ils sont à la recherche d'un stage. Il faudrait alors pouvoir permettre aux établissements de déposer une plainte, lorsqu'une discrimination est constatée.

C'est une piste que j'évoque, mais qui pourrait faire l'objet d'une prochaine discussion. En tout cas, elle constitue encore un élément d'amélioration possible du statut des stagiaires.

Pour conclure, le groupe communiste républicain et citoyen du Sénat, conscient de l'intérêt, pour certains étudiants, d'avoir recours au stage, est néanmoins persuadé de la nécessité d'apporter des garde-fous légaux à ces périodes de découverte de l'entreprise et du monde du travail.

En effet, nous n'accepterons pas de contrat dérogatoire au code du travail en ce qui concerne les jeunes stagiaires ; ce serait une perche supplémentaire tendue au MEDEF, qui n'en a vraiment pas besoin ! Par ailleurs, le recours abusif aux stagiaires par certains cabinets d'avocats ou bureaux d'études nous conforte dans notre volonté de réhabilitation indispensable du stage en permettant qu'il ne soit pas détourné de son objectif pédagogique, au seul profit des entreprises.

Aussi, nous soutiendrons cette proposition de loi présentée par nos collègues du groupe socialiste.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

M. Richard Yung. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je dois dire que je suis pris d'un certain vertige devant les travées vides de l'UMP : on se croirait presque en mer !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Cela traduit un mépris pour le débat parlementaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je voudrais tout d'abord remercier notre collègue Jean-Pierre Godefroy d'avoir pris l'initiative de cette proposition de loi, qui rassemble des données et des réflexions jusque-là éparses et qui nous donne l'occasion de débattre, et peut-être de progresser, sur l'importante question des stages.

Une telle initiative vient du constat suivant : en France, les stages prennent une place de plus en plus importante dans la vie de nos jeunes concitoyens et de nos étudiants.

Comme beaucoup d'entre vous, j'appartiens à une génération qui est arrivée sur le marché du travail sans jamais avoir poussé auparavant la porte d'une entreprise ou même d'une administration. Le premier jour où l'on travaillait était le premier jour où l'on entrait dans l'entreprise !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

À cette époque, c'était la règle générale, que l'on sorte d'une université ou d'un BTS. Peut-être était-ce moins le cas lorsque l'on venait d'une grande école...

Tout le monde se réjouit des stages ; ils ont le grand avantage de permettre aux étudiants de se familiariser avec la vie professionnelle et, surtout, avec le travail en équipe. En effet, quand on est étudiant, on ne travaille pas spontanément avec d'autres.

Dans les années quatre-vingt-dix, les stages ont commencé à changer de nature : les stagiaires sont progressivement devenus une sorte de main-d'oeuvre supplétive. Nombreux sont aujourd'hui ceux qui sont conduits à exécuter des tâches de conception et de production, ce qui n'est pourtant pas l'objet d'un stage.

Pour répondre à l'un des orateurs qui m'a précédé, je dirai que nous ne proposons pas de faire des stagiaires des salariés ; ce sont les employeurs qui agissent ainsi ! Beaucoup d'étudiants occupent des postes permanents, alors qu'ils ne sont que légèrement indemnisés, très faiblement rétribués, voire pas du tout. C'est souvent, d'ailleurs, dans le secteur public que les plus grands abus sont commis.

Faute de trouver un emploi à la sortie de l'école ou de l'université, et pour meubler leur curriculum vitae, certains jeunes diplômés acceptent des stages non rémunérés et s'inscrivent à l'université, la convention de stage étant payée à leur place par l'entreprise.

Chers collègues, en tant que sénateur des Français établis hors de France, je voudrais attirer votre attention sur la question particulière des stages effectués à l'étranger, et surtout dans les enceintes consulaires, au sein des missions économiques ou des centres culturels. Certains stages sont également réalisés dans le secteur privé étranger, mais cela ne relève pas de notre compétence.

Grâce à la multiplication des échanges internationaux, nos jeunes peuvent passer trois mois, voire six mois, à Pékin, à Kuala Lumpur, à Vienne ou encore à Mexico, ce qui est en soi une excellente chose. Ils y apprennent beaucoup. Ils ont notamment l'occasion de se frotter à d'autres cultures ; ils sont en présence d'autres façons de réfléchir et d'aborder les problèmes...

Toutefois, dans ce domaine aussi, a été observé un glissement. Des centres culturels, par exemple, fonctionnent fréquemment avec trois, quatre, voire cinq stagiaires. Certaines missions économiques comptent dans leur effectif deux ou trois stagiaires, tout comme certains consulats. Or, ce ne sont pas nécessairement des stagiaires de l'ENA.

Voilà donc un véritable problème ! En effet, ces stages à l'étranger sont très souvent réalisés sans la moindre convention de stage. Monsieur le ministre, veuillez m'excuser, mais l'État est souvent un mauvais employeur et ne donne pas le bon exemple !

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

À qui le dites-vous !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Les stagiaires ne bénéficient d'aucune protection, sociale ou autre, d'aucune indemnisation, et ils doivent, par ailleurs, payer leur voyage !

Un cas m'a été très récemment signalé : une jeune stagiaire attachée au consulat de Washington, qui n'est pas rémunérée et qui a emprunté de l'argent pour payer son loyer, s'est vu refuser les tickets-restaurants lui permettant d'accéder à la cantine du consulat ! Il y a de quoi avoir honte pour la République, n'est-ce pas ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Je comprends que les sénateurs de droite ne soient pas là ; ils ne veulent pas entendre cela !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Par ailleurs, les stages, ou certains d'entre eux, sont, souvent, insuffisamment encadrés ; l'objet pédagogique n'est pas clairement défini ou reste vague ; la convention de stage, quand elle existe, est souvent vide et les directeurs de stage soit font défaut, soit passent en courant.

Dans l'exercice de fonctions précédentes, j'ai eu l'occasion de prendre des stagiaires. Vous les rencontrez une heure au début de leur stage pour échanger quelques mots ; puis, vous les remettez assez rapidement entre les mains d'un directeur ou d'un sous-directeur ; enfin, vous les voyez trois ou six mois après, pendant une demi-heure, et c'est tout ! Ils constituent une lourde charge pour des gens qui ont déjà du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Vous le dites vous-même ! C'est bien de reconnaître que c'est une charge pour l'employeur !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Grâce à la mobilisation du collectif Génération précaire, un certain nombre de progrès ont été obtenus, en particulier à travers la loi du 31 mars 2006 : la convention de stage, l'idée d'une gratification sont des éléments qui vont dans le bon sens.

Toutefois, nous pensons que ce texte reste encore largement insuffisant. Il généralise, en effet, une sorte de sous-salariat ; vous noterez que je n'ai pas dit « sous-prolétariat ». Par manque de volonté, ou de courage, le Gouvernement n'a pas voulu faire de peine au MEDEF en adoptant des dispositions trop contraignantes dans ce domaine.

La charte des stages, que certains orateurs ont précédemment évoquée, est, à bien des égards, un catalogue de bonnes intentions, il faut le dire ! Elle n'a pas de valeur contraignante ; elle s'inscrit dans une bonne démarche mais un tel dispositif est encore très largement insuffisant.

Je voudrais, pour terminer, attirer votre attention sur une disposition qui me tient évidemment à coeur, moi qui suis représentant des Français établis hors de France.

En effet, la présente proposition de loi introduit - ou introduira -, dans le code de l'éducation, un article L. 615-4 relatif aux stages effectués à l'étranger, qui permettra de contraindre l'organisme d'accueil du stagiaire à l'étranger, s'il s'agit d'un service de l'État français, à respecter toutes les obligations prévues par la loi. Quant aux entreprises, on ne peut, bien sûr, que s'en remettre à la convention entre l'établissement d'enseignement supérieur dont dépend le stagiaire et la société ou l'entreprise privée qui l'emploierait.

Pour tous ces motifs, en particulier pour la prise en compte de la situation des stagiaires français à l'étranger, je voterai la proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la généralisation des stages dans l'enseignement supérieur a représenté un formidable progrès. Elle a ouvert les portes du marché du travail à des étudiants en cours de formation, désireux d'acquérir une approche plus concrète des pratiques professionnelles et de leur futur métier. Ainsi, plus de 800 000 jeunes effectuent chaque année un stage dans une entreprise ou une administration.

Comme l'a indiqué mon collègue Jean-Pierre Godefroy, dont je salue le remarquable travail, nous sommes favorables à une plus grande professionnalisation des parcours universitaires. Aussi, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui ne doit en aucun cas être interprétée comme l'expression d'une volonté de décourager les entreprises de recruter des stagiaires ; elle tend seulement à mieux les encadrer pour mettre fin à des pratiques visant à détourner les stages de leur finalité pédagogique.

En effet, en période de chômage - celui des jeunes étant deux fois supérieur à la moyenne -, le stage est devenu, pour certains employeurs, un moyen de se procurer de la main-d'oeuvre gratuite ou à très bas coût. Ainsi, en septembre 2005, le collectif Génération précaire dénonçait « l'existence d'un véritable sous-salariat toujours disponible, sans cesse renouvelé et sans aucun droit ». Il déplorait, en outre, qu'il soit possible aujourd'hui de rester confiné indéfiniment et en toute légalité dans ce statut de stagiaire.

Il est malheureux de constater que des entreprises, des associations, et même des services publics, profitent de ce que les étudiants soient prêts à tout accepter pour valider leur formation, pour ne pas avoir de trou dans leur CV ou, tout simplement, pour ne plus traîner l'étiquette de « débutant », très encombrante dans un monde où l'expérience professionnelle est reine.

Il m'arrive de consulter les rubriques d'offres d'emplois dans la presse. Je suis toujours surprise de constater, en lisant celles qui s'adressent aux jeunes diplômés, que les profils recherchés comportent au moins deux ans d'expérience professionnelle, voire davantage. On pourrait penser que les entreprises recherchent des personnes volontaires, qui ont enchaîné jobs et petits boulots durant leurs études. Mais non ! On demande bel et bien à des jeunes sortant à peine de l'université ou d'une grande école d'avoir déjà exercé une activité professionnelle d'une durée significative, identique à celle que recherchent les entreprises.

Cette situation ubuesque, vécue par de très nombreux jeunes diplômés, ne fait pas vraiment rire les principaux intéressés, surtout lorsqu'ils essuient un énième refus en raison de leur manque de pratique. Ils sont alors contraints de prolonger artificiellement leurs études à la seule fin de continuer d'effectuer des stages, en espérant que ceux-ci leur permettront de se mettre en valeur aux yeux des futurs recruteurs.

Il est donc nécessaire de mieux encadrer cette période d'ancrage professionnel pour qu'elle ne s'écarte plus de sa vocation pédagogique, pour qu'elle demeure une source d'enrichissement et d'échange constructif entre le monde du travail et l'université, pour qu'elle continue d'être vécue comme un tremplin pour l'emploi.

Depuis les premières manifestations de Génération précaire, des avancées ont été obtenues.

Tout d'abord, la loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances a rendu obligatoire la convention tripartite. Elle a également limité à six mois la durée des stages hors cursus et a obligé les employeurs à verser une gratification pour les stages d'une durée supérieure à trois mois.

Un décret publié le 31 août 2006 a, ensuite, interdit aux entreprises de recourir à un stagiaire « pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent ».

Par ailleurs, en avril 2006, une charte signée entre le Gouvernement et les partenaires sociaux était venue compléter la loi et avait anticipé sur le dispositif réglementaire.

Ces avancées restent cependant insuffisantes : attendre trois mois avant d'être indemnisé, c'est trop long, et si gratification il y a, celle-ci doit être correcte. On peut aussi craindre une inflation de stages de trois mois moins un jour. En outre, la charte ne revêt aucun caractère contraignant, son application restant suspendue au bon vouloir de chacun. Il était donc indispensable d'aller plus loin par voie législative et de poser un cadre complet et sécurisant.

Je tiens à vous faire part de ma stupéfaction lorsque, en commission des affaires sociales, j'ai constaté que la majorité sénatoriale ne nous suivait pas sur ce sujet essentiel concernant l'insertion professionnelle des jeunes et les abus dont ils sont victimes. Ce rejet est d'autant plus surprenant qu'une proposition de loi visant à encourager et moraliser le recours aux stages par les entreprises a été déposée à l'Assemblée nationale par Mme Valérie Pécresse, députée UMP, suivie dans sa démarche par un très grand nombre de ses collègues.

Ce texte comporte des mesures voisines de celles que nous préconisons, comme l'interdiction faite aux entreprises de prendre en stage, sur des emplois de l'entreprise, des jeunes qui ont achevé le cursus de formation nécessaire pour occuper ces fonctions et qu'elles pourraient embaucher par un véritable contrat.

On pouvait donc, sur un sujet consensuel, s'attendre à une adoption unanime. Il n'en est rien. Force est de constater que l'air du MEDEF, ou plutôt son « besoin d'air », a soufflé plus fort sur le Sénat que le vent de l'Assemblée nationale !

Nous en sommes navrés. Mme Parisot parle de « précarité heureuse » à propos d'un stagiaire ou d'un jeune diplômé en période d'essai. C'est consternant ! Il ne peut y avoir de précarité heureuse sur le marché du travail, surtout quand la situation perdure, comme c'est trop souvent le cas !

Ne pas discuter de cette proposition de loi, c'est cautionner le recours à une main-d'oeuvre hyperflexible, c'est accepter le bradage des diplômes, c'est refuser de reconnaître les abus et les dérives dont sont victimes les jeunes, qui, dans une société inattentive à leurs préoccupations, sont une fois encore considérés comme des gamins ne sachant pas ce qui est bon pour eux.

Cette proposition de loi était un message fort que nous leur adressions. Venant du Sénat, le symbole était significatif. Nous regrettons qu'elle n'aboutisse pas.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

nous pouvons nous réjouir d'un certain consensus à propos d'un constat : ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

... il y a des stages abusifs qui se substituent à de vrais emplois.

Debut de section - Permalien
François Goulard, ministre délégué

M. François Goulard, ministre délégué. « Absence de réaction sur les travées de l'UMP » !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

C'est la commission des affaires sociales qui l'écrit dans son rapport : elle « partage les préoccupations qui ont inspiré cette proposition de loi et ne conteste pas l'existence d'abus, qu'il convient de réprimer, en matière de stages. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Nous voilà donc d'accord, chers collègues de l'UMP, d'accord sur le constat, mais non sur les réponses.

En théorie, les stages sont des formations in situ dans l'entreprise et constituent une préembauche ou un marchepied vers un futur emploi. En réalité, le recours abusif aux stages a des conséquences néfastes sur les missions initiales du stage.

Un stage est censé donner goût au travail ; mais la multiplication des stages finit par dégoûter les stagiaires du monde du travail. Un stage est censé faciliter l'insertion professionnelle ; mais la mise bout à bout de stages consécutifs finit par éloigner de la signature d'un véritable contrat de travail. Un stage est censé former une main-d'oeuvre qualifiée ; mais la multiplicité des stages fait fuir les jeunes diplômés hors de France.

Cette prise de conscience, ce constat de la majorité du Sénat, aujourd'hui, ne débouche pas sur des mesures de bon sens telles que celles qu'a proposées le collectif Génération précaire et que nous avons pu défendre à plusieurs reprises dans cet hémicycle : limitation à six mois de la durée d'un stage ; rémunération minimale à hauteur de 50 % du SMIC, progressive et assujettie aux cotisations sociales ; inscription du stage dans le code du travail ; délai de carence entre deux stages ; convention de stage obligatoire ; plafonnement du nombre de stagiaires par entreprise...

Le Gouvernement reste impuissant face à ce problème, qui touche 800 000 stagiaires par an. La charte de bonne conduite, monsieur le ministre, n'est pas suffisante : à quoi peut-elle aboutir si elle ne s'accompagne d'aucune contrainte ? Les entreprises vertueuses se sentiront engagées, alors que les autres continueront leurs abus et profiteront de cet effet d'aubaine. Les négociations de branche, quant à elles, sont trop longues à mener. Le décret instaurant la rémunération minimale, promis depuis plusieurs mois, tarde à être publié, et ne prévoit de toute façon qu'un seuil de rémunération, très insuffisant, de 360 euros au bout de trois mois.

Expliquez-moi comment on peut survivre avec 360 euros par mois, monsieur le ministre, mes chers collègues de l'UMP !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Enfin, la loi pour l'égalité des chances n'a quasiment rien changé. Elle a reconnu les stagiaires non comme des travailleurs en formation, mais comme de simples étudiants qui n'apportent aucune valeur ajoutée aux établissements les recevant. Ce n'est pas mon approche : pour moi, les stagiaires doivent participer au processus de production, car c'est ainsi que l'on apprend, et ils doivent être protégés par le code du travail.

Le Gouvernement prétend avoir réglé le problème des stages abusifs. Pourtant, on remarque que le classement des offres de stages publié pour la deuxième année par L'Express est éloquent, puisque les entreprises recensées proposent...

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

... deux à trois fois plus de stages que d'emplois !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

... deux à trois fois plus de stages que d'emplois, effectivement. L'Express ajoute que les stages sont « toujours aussi populaires auprès des 100 plus gros recruteurs, qui en offrent cette année 42 350, contre 38 000 l'an dernier ».

Alors, pourquoi ce refus d'avancer que l'on constate aujourd'hui ? Nous aurions pu aboutir à un consensus autour des propositions de la gauche et de la droite, exprimées notamment par Valérie Pécresse, que ma collègue a déjà évoquée, et les Jeunes de l'UMP ! Hélas, le consensus n'a pas été accepté par le MEDEF. Voilà pourquoi nous sommes aujourd'hui dans l'impasse.

Chers collègues de l'UMP

une nouvelle fois, l'orateur se tourne vers les travées vides du l'UMP.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. Une fois de plus, l'UMP... Mes chers collègues, taisez-vous, laissez-moi continuer !

Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

L'UMP semble bien être en accord avec le MEDEF. Dernièrement, la loi visant à la défense des consommateurs, pourtant voulue par le Président de la République lui-même, a été enterrée à l'Assemblée nationale, malgré toutes les promesses faites aux associations agissant dans ce domaine. Apparemment, même Jacques Chirac ne peut rien faire face aux lobbies patronaux !

Les arguments de la droite pour refuser toute avancée législative sur les stages constituent une nouvelle étape dans la pensée antisociale. Jusqu'ici, la droite avait coutume de refuser les revendications sociales au nom de la défense de l'emploi, par peur de décourager les employeurs d'embaucher. Désormais, elle va plus loin puisque, tout en reconnaissant le phénomène des stages abusifs, elle refuse - vous refusez - de les réglementer par peur de décourager le recrutement de stagiaires qui se substituent à des salariés.

Il y a bien là une contradiction dans le discours de la droite : comment faire aimer le travail, revaloriser la fameuse « valeur travail » que la gauche aurait d'après vous maltraitée, sans réglementation équitable pour les jeunes qui découvrent le marché du travail ?

Je ne comprends pas votre logique et les 800 000 stagiaires non plus. C'est pourquoi les sénatrices et le sénateur Verts soutiendront la proposition de loi présentée par M. Godefroy, au nom du groupe socialiste.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Jarraud-Vergnolle

Les meilleures intentions du monde suffiront-elles à prévenir les dérives et les abus que chacun peut constater en matière de stages professionnels ? Il faut l'espérer.

Pour l'heure, un rapide tour d'horizon nous renseigne sur la triste réalité de ce qui devrait être un avant-goût formateur du monde du travail, éventuellement une rampe de lancement, et qui peut constituer un substitut abusif au contrat de travail.

En France, aujourd'hui, le taux de chômage des jeunes atteint 23 %, soit six points de plus que dans le reste de l'Europe. Le diplôme n'est même plus une garantie suffisante, puisque 21 % des jeunes de niveau bac+4 sont toujours au chômage plus de neuf mois après la fin de leurs études.

Ces statistiques révèlent les difficultés grandissantes que rencontrent les jeunes au moment de leur entrée dans la vie professionnelle.

Avec la persistance du chômage, ce phénomène s'est accentué ces dernières années. Avant même de devoir subir les périodes d'essai renouvelables, les successions de CDD et autres contrats d'intérim, les jeunes travailleurs doivent affronter une autre réalité peu valorisante et peu rémunératrice, à savoir le recours quasi systématique au stage, même en dehors du cursus universitaire.

Ainsi est apparue une main-d'oeuvre flexible, occupant parfois sans rémunération de vrais postes de travail. Le stage est malheureusement devenu un palliatif à tout emploi pour des dizaines de milliers de jeunes diplômés, victimes d'un marché du travail dans lequel il est de plus en plus difficile de trouver sa place.

Pourtant, chacun en conviendra, le stage en entreprise demeure un élément essentiel de la formation : il permet aux jeunes de se confronter aux réalités du monde du travail, d'acquérir une première expérience professionnelle, de choisir une orientation professionnelle en connaissance de cause. Il s'agit, bien sûr, d'encourager son développement et de lui reconnaître une place primordiale dans le parcours de formation, mais avec des règles claires et adaptées.

Aussi, au regard de l'augmentation des dérives, il est impératif d'encadrer les stages par un dispositif législatif. Quelques mesures primordiales ont été introduites par la loi pour l'égalité des chances, je n'y reviendrai pas.

De même, la « charte des stages étudiants en entreprise » réaffirme la dimension pédagogique du stage, comme l'ont souligné les orateurs qui m'ont précédée.

L'ensemble des acteurs auditionnés ont été unanimes pour lutter efficacement contre les abus en la matière, en s'appuyant sur les termes de cette charte.

Certes, même si nous pouvons apprécier la volonté de tous, qu'il s'agisse des étudiants, du MEDEF, de la CGPME, de l'UPA ou des enseignants, de mieux encadrer les stages en entreprise, la charte demeure essentiellement un recueil de bonnes pratiques, sans obligation ni contrainte d'application, un recueil de bonnes intentions, en somme. Or, on connaît trop le triste sort des bonnes résolutions !

Dès lors, je vous invite, madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à vous rendre sur les sites Internet proposant des stages en entreprise à de jeunes diplômés : l'expérience est instructive, le constat est affligeant.

Vous serez étonnés de lire les propositions actuelles faites à nos jeunes. J'en ai extrait quelques exemples édifiants !

« Assistant de recrutement : bac+3, stage de six mois temps plein, rémunération de 800 à 1160 euros par an. »

« Analyste financier : expérience de un à deux ans - Type de contrat : stage temps plein, salaire de 800 à 1160 euros par an. » Je ne continuerai pas la liste !

Apparemment, en France, un jeune diplômé - l'épithète « jeune » paraît impropre vu le niveau d'études requis pour accéder au « paradis » des stagiaires - ne vaut même pas le SMIC !

Les jeunes ne sont pas taillables et corvéables à merci. Ils n'ont pas envie d'être bradés, d'autant moins que certaines familles s'endettent pour que leurs enfants accèdent à des études supérieures.

La proposition de loi présentée par Jean-Pierre Godefroy posait un cadre garantissant cette valeur formative du stage. La formation en alternance est une plus-value pour tous et, si l'on veut l'encourager, il faut impérativement la moraliser.

Que nous ne soyons pas tous d'accord et que nos divergences nous conduisent à discuter des modalités d'un encadrement, cela devrait aller de soi. C'est bien le rôle du Parlement de parlementer, c'est bien notre rôle de parlementaires de confronter des points de vue et de finir par trouver l'équilibre.

Mais dans quelle enceinte un constat unanime mène-t-il à l'urgence de ne rien faire ? Dans quelle enceinte la nécessité nous fait-elle seulement dire : « Oui, c'est dur, il faudrait faire quelque chose » ? Dans quel Parlement peut-on approcher du débat sans y entrer vraiment ? Je ne partage pas l'avis de la commission, soit, mais, surtout, je ne comprends pas sa position !

La majorité, friande de slogans, nous sert du « travailler plus pour gagner plus ». Il ne faudrait pas confondre ce slogan de campagne avec une réalité honteuse : « travailler pour rien pour gagner moins que rien ».

Nos enfants ne sont pas utilisables « à tout va ». Quelle bonne raison auraient-ils de commencer par « en baver » ? Quelle étonnante conception de l'égalité des chances !

La majorité qui, depuis peu, n'a plus peur de s'approprier des références historiques qui ne lui appartiennent pas, appréciera cette citation : « Si la jeunesse n'a pas toujours raison, la société qui la méconnaît et qui la frappe a toujours tort », nous disait François Mitterrand !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Rires

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, je demande une suspension de séance d'un quart d'heure.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Des raisons évidentes : il n'y a aucun sénateur UDF en séance !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Madame la présidente, monsieur le ministre, je voudrais faire observer que le groupe socialiste est allé jusqu'au bout de ses interventions. Nous aurions pu abréger la discussion, pour mettre le Gouvernement encore plus dans l'embarras, mais nous ne l'avons pas fait.

Nous verrons, à la reprise de nos travaux, si un membre du groupe UMP sera présent pour nous faire part de son avis !

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

La séance, suspendue à dix-neuf heures dix, est reprise à dix-neuf heures vingt.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

La séance est reprise.

Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...

La discussion générale est close.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Avant de mettre aux voix les conclusions négatives du rapport de la commission des affaires sociales tendant au rejet de la proposition de loi, je donne la parole à M. Richard Yung, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Madame la présidente, je déplore les conditions dans lesquelles se déroule la fin de cette discussion et le fait que le groupe UMP ait entièrement déserté l'hémicycle. Ce n'est pas, à mon sens, un bon message que nous envoyons à la jeunesse de France.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Mon propos ne s'adresse pas à vous, monsieur de Richemont, puisque, effectivement, vous êtes présent !

Mes chers collègues, je ne vous surprendrai pas en vous disant que notre groupe n'a pas été convaincu par les arguments qui ont été développés par la commission. Nous continuons de penser qu'il est nécessaire d'encourager le développement des stages et de mieux les encadrer.

Il reste de grands progrès à faire dans la mise en oeuvre de la législation existante ; je pense, en particulier, à la loi du 31 mars 2006. Quant à la charte des stages étudiants en entreprise, elle est certes respectable, mais elle n'emporte pas d'effets pratiques. Il faut, en conséquence, aller plus loin, et c'est le sens de la proposition de loi que nous avons présentée.

Il est nécessaire de mieux encadrer les stages afin de les rendre profitables aux deux parties : aux entreprises qui emploieront les stagiaires et aux stagiaires eux-mêmes.

Enfin, pour ce qui me concerne, je suis sensible aux conditions dans lesquelles sont effectués les stages dans l'administration hors de France.

Pour toutes ces raisons, nous maintenons notre position et nous voterons contre les conclusions négatives de la commission.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Seillier

Permettez-moi, en cet instant, de souligner le caractère quelque peu insolite de notre position.

Cette discussion s'inscrit dans un contexte particulier. Le Sénat a décidé - et cela me paraît légitime - d'ouvrir la possibilité à un membre de l'opposition d'être à la fois l'auteur et le rapporteur d'un texte. En l'occurrence, je n'ai pas lieu de critiquer ce choix, ni sur le fond, car la proposition de loi qui nous est présentée porte sur un sujet très important, ni sur le choix du rapporteur : personne ne contestera la qualité du travail de Jean-Pierre Godefroy, tant en commission que dans l'hémicycle.

Certaines des propositions contenues dans ce texte me conviennent. Il m'apparaît, notamment, légitime qu'un stagiaire qui est recruté par l'entreprise dans laquelle il a effectué son stage voie la durée de ce dernier intégrée dans sa période probatoire.

Cela dit, cette proposition de loi constitue un acte inachevé. Lorsque le rapport a été discuté en commission, nous n'avons pas eu la possibilité de présenter des amendements pour prolonger le travail accompli par le rapporteur.

Si la commission avait adopté des amendements, le rapporteur se serait peut-être trouvé confronté à une situation difficile. Il aurait en effet dû décider, en conscience, s'il pouvait continuer à soutenir le texte avec les modifications apportées par la commission ou si, au contraire, cette dernière avait dénaturé la philosophie de sa proposition de loi initiale. Bref, il lui aurait appartenu de décider si les travaux de la commission avaient permis, ou non, de trouver un compromis convenable pour le rapporteur et pour la majorité de la commission.

Madame la présidente, le vote que j'ai émis en commission, et que je vais renouveler dans un instant, signifiait que je ne pouvais pas adopter le texte en l'état. Il ne s'agissait pas d'un vote contre le rapport de M. Godefroy ni contre le sujet qui nous est proposé ; il s'agissait, en quelque sorte, d'un vote d'insatisfaction sur une procédure qui s'arrête à mi-chemin.

Que signifie cette procédure ? S'agit-il d'un symbole, d'un signe de sympathie destiné à montrer que le Sénat traite son opposition avec égards ? Je pense que nous ne saurions, ni les uns ni les autres, nous satisfaire d'une mesure symbolique aussi superficielle.

Je profite donc de mon explication de vote pour soulever cette question de fond. Les travaux du Sénat ne pourraient que gagner en qualité si nous allions jusqu'au bout de la procédure. Il reviendrait ensuite au rapporteur de dire s'il considère, en conscience, qu'il peut accepter le travail fait par la commission.

Je maintiens donc le vote que j'ai émis en commission, mais je souhaitais en expliquer le sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Le groupe communiste républicain et citoyen a apprécié le travail fourni par Jean-Pierre Godefroy. Comme l'a rappelé Annie David, notre groupe a présenté de nombreuses propositions sur ce sujet, apportant ainsi sa pierre au débat.

La discussion qui a eu lieu cet après-midi était plus que nécessaire. Nous regrettons toutefois les conditions dans lesquelles elle s'est déroulée.

En effet, alors que l'exécutif du Sénat - le bureau, la conférence des présidents - réfléchit sur la revalorisation du travail parlementaire, notamment sur la manière de dynamiser l'initiative parlementaire, nous regrettons le mépris affiché par la plus importante des formations politiques de la Haute Assemblée.

Je sais bien que des problèmes d'emploi du temps peuvent se poser, mais cela ne peut justifier le fait que les travées de l'UMP, et maintenant celles du l'UC-UDF, soient totalement vides alors qu'est venu le moment des explications de vote !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Cette proposition de loi est, plus que jamais, d'actualité. Bien entendu, nous participerons au débat qui, nécessairement, resurgira en d'autres occasions. En effet, le problème des stagiaires est d'autant plus pressant que nous vivons une époque où une multitude de réflexions s'impose à nous.

Monsieur le ministre, vous le savez, pour mener des études, la plupart des étudiants sont obligés de travailler. Pour ma part, j'ai fait partie de cette catégorie !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Effectivement ! Aujourd'hui, les stagiaires, qu'ils soient étudiants ou surdiplômés, essuient l'affront d'être sous-valorisés et, parfois, totalement dévalorisés en termes de rémunération. En commission, j'ai cité l'exemple de stagiaires de niveau bac+9, employés dans un grand laboratoire pharmaceutique pour 700 euros par mois !

Par ailleurs, nous devons insister sur le fait que près de 29 % des jeunes sont concernés par cette situation. Notre réflexion doit donc les prendre en compte. À travers cette proposition de loi et le débat auquel elle a donné lieu, une réponse était apportée à Génération précaire. En effet, on oublie un peu vite le mépris auquel les jeunes ont été confrontés et qu'ils ont douloureusement vécu.

Aujourd'hui, force est de constater l'explosion de la précarité, le creusement des inégalités et le fait que la France compte 7 millions de travailleurs pauvres. Sur ce sujet, les arguments développés par Annie David ou Jean-Pierre Godefroy doivent nous interpeller.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous voterons cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri de Richemont

M. Henri de Richemont. Je suis ravi de me trouver ici pour expliquer mon vote sur la proposition de loi déposée par M. Godefroy.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Henri de Richemont

Je vous félicite, mon cher collègue, d'avoir présenté ce texte, car cela montre que le Parlement accomplit bien sa mission en permettant à chaque groupe de faire des propositions sur des sujets importants. Or le stage en entreprise constitue effectivement un sujet sérieux, puisque c'est à travers lui que les jeunes peuvent découvrir le monde de l'entreprise.

Pour ma part, je suis souvent sollicité par des jeunes qui souhaitent connaître, à travers un stage, le fonctionnement d'un cabinet d'avocats. Je pense donc qu'il est fondamental de faire en sorte que les entreprises, comme les professions libérales, puissent accepter facilement les stagiaires.

Je regrette que la proposition de loi entretienne une confusion entre les statuts de stagiaire et de salarié. En effet, je crois très profondément que l'on tue l'attractivité en accroissant les contraintes et la rigidité.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri de Richemont

L'important est d'inciter les employeurs à prendre de jeunes stagiaires, même s'il faut aussi, bien entendu, sanctionner tout ce qui relève du recours abusif à ces derniers.

Ce n'est pas en rendant plus difficile l'accueil de nouveaux stagiaires dans les entreprises que nous contribuerons à la lutte contre la précarité, à laquelle nous nous associons. Au lieu d'attirer des stagiaires dans les entreprises, la rémunération des stages à hauteur de 50 % du SMIC aurait pour effet de dissuader les entreprises de prendre des stagiaires, ce qui n'est sûrement pas le but recherché. C'est la raison pour laquelle je m'associerai au vote de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Je souhaite, tout d'abord, remercier M. de Richemont d'avoir bien voulu accepter de délaisser le sujet des tutelles pour nous rejoindre sur celui des stages. Au demeurant, c'était tout à fait indispensable pour le groupe de l'UMP, qui avait déserté cet hémicycle !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Je souhaite, ensuite, remercier les membres de la commission des affaires sociales. Toutefois, je regrette que la qualité du travail qui a eu lieu en commission n'ait pas été retrouvée dans l'hémicycle.

Le problème posé par les stages aux niveaux national et européen s'est manifesté au moment de la mobilisation contre le CPE, ce formidable loupé. Je crains fort que, à ne pas s'intéresser plus aux jeunes, à ne pas considérer leurs desiderata, par exemple en désertant l'hémicycle, on n'adresse pas un message très positif à notre jeunesse, qui attendait certainement beaucoup plus de ce débat.

C'est donc avec un peu de déception que je vois s'achever mon rôle de rapporteur d'une proposition de loi que j'ai présentée, au nom du groupe socialiste.

Monsieur Seillier, j'ai beaucoup apprécié la façon dont vous avez abordé le problème. J'étais tout à fait disposé à améliorer le texte, qui n'avait pas pour vocation à être adopté en l'état. Mais le règlement de notre assemblée est ainsi fait ! Il faudrait d'ailleurs y regarder de plus près, car il devrait être possible, sur un tel texte, de trouver un consensus, dans l'intérêt de nos jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

S'agissant du problème de la rémunération, de nombreux stages, fort heureusement, sont mieux payés que le plancher prévu dans la proposition de loi ! En le fixant à 50 % du SMIC, alors qu'elles seront exonérées de charges sociales pour 30 % du salaire minimum, on ne demande pas, me semble-t-il, un effort surhumain à nos entreprises pour former nos jeunes, c'est-à-dire la génération qui va nous succéder. C'est un geste que la République aurait sans doute pu faire à leur endroit.

Je remercie tous ceux qui ont accepté de participer jusqu'au bout à ce débat. Je regrette cependant, monsieur le ministre, que vous n'ayez pas apporté de réponse concernant le comité de suivi et le montant de la gratification que le Gouvernement entend accorder aux stagiaires.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Je voudrais tout d'abord vous remercier, monsieur Godefroy, d'avoir accepté d'être le rapporteur de votre proposition de loi. C'est la première fois depuis bien longtemps que se produit dans cet hémicycle une telle configuration, qui s'inscrit dans la logique de ce qu'a voulu le président du Sénat pour donner sa place à l'opposition, en lui permettant de défendre des propositions de loi.

Je vous remercie, monsieur le rapporteur, d'avoir obéi à l'esprit de notre commission, à savoir le respect des uns et des autres, la recherche de la discussion, comme vous l'avez dit vous-même à l'instant, pour convaincre, sans jamais manifester le moindre mépris.

Face au défi qui était devant nous, nous avons souhaité permettre à chacun de sauver la face. Il n'était pas question, comme Bernard Seillier l'a très bien expliqué tout à l'heure, de dénaturer cette proposition de loi, vous contraignant ainsi à rapporter un texte qui n'aurait plus été le vôtre. Nous avons pourtant hésité. Nous avons même étudié la possibilité de supprimer l'article 1er, ce qui aurait entraîné le dépôt d'amendements. En tout état de cause, nous aurions abouti à un texte qui n'aurait plus rien eu à voir avec celui que vous aviez présenté.

De votre côté, vous avez accepté la logique de la commission, même si vous ne l'avez pas approuvée. La proposition de loi relative aux droits des parents séparés en cas de garde alternée des enfants, déposée par M. Michel Dreyfus-Schmidt, a connu la même aventure, puisqu'elle fut également rejetée par la commission, puis par la Haute Assemblée. Quelques temps après, la mesure proposée par Michel Dreyfus-Schmidt était adoptée dans un autre texte.

On peut se demander, comme le faisait tout à l'heure Robert Bret, si nous n'avons pas atteint les limites de l'exercice. C'est pourquoi je ne manquerai pas de transmettre au bureau et au président du Sénat une proposition visant à définir d'autres méthodes qui permettraient tant à la majorité qu'à l'opposition du Sénat de faire valoir auprès du Gouvernement leurs propositions, de façon très solennelle. Nous pourrions ainsi nous enrichir de suggestions émanant des uns et des autres, sans avoir à les opposer.

Je terminerai en disant à M. Godefroy que je n'ai pas eu le sentiment d'un mépris de la part de la majorité, même si, en cet instant, elle n'est quasiment plus présente, à l'exception de M. Henri de Richemont, que je remercie d'être encore parmi nous.

J'ai entendu, d'abord en commission, puis tout à l'heure à la tribune, les représentants de la majorité - que ce soit Jean-Léonce Dupont, pour l'UC-UDF, ou Isabelle Debré, pour l'UMP, deux personnes très sensibles au respect à la fois des personnes et des idées - faire le constat que la messe était dite, c'est-à-dire que chacun connaissait les conclusions de la commission.

Après vous avoir entendu, monsieur Godefroy, ils vous ont répondu à la tribune. Ils n'ont donc nullement fait preuve de mépris. Seul un concours de circonstances a conduit les représentants de la majorité à quitter cet hémicycle avant le vote final, qui, chacun le savait, aurait lieu sous forme de scrutin public.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Si nous devions suivre ce raisonnement, nous ne serions pas souvent là !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

Voilà ce que je tenais à vous dire, car je ne voudrais pas que Jean-Pierre Godefroy conserve de cette « aventure » la moindre rancoeur.

Je souhaite, au contraire, comme je le disais tout à l'heure, que nous trouvions une méthode plus moderne pour faire valoir les positions du Sénat.

MM. Henri de Richemont et Bernard Seillier applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix les conclusions négatives du rapport de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi n° 364.

Je suis saisie d'une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 105 :

Le Sénat a adopté.

En conséquence, la proposition de loi est rejetée.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de suspendre nos travaux, permettez-moi de vous dire que je porterai, avec M. Fischer, à la connaissance de la prochaine conférence des présidents les réflexions inspirées par le moment que nous venons de vivre au cours de cette séance mensuelle réservée à l'ordre du jour fixé par le Sénat.

Comme vient de le dire le président de la commission des affaires sociales, M. Nicolas About, nous nous efforcerons de trouver une meilleure façon de travailler.

En tout cas, je tiens à remercier de leur présence ceux qui ont assisté à cette discussion jusqu'à son terme.

Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Roland du Luart.