Intervention de Gérard Le Cam

Réunion du 29 septembre 2010 à 14h30
Nouvelle organisation du marché de l'électricité — Article 4

Photo de Gérard Le CamGérard Le Cam :

Les auteurs de cet amendement considèrent que la réforme proposée entraînera une hausse des tarifs de l’électricité sans garantir le financement des investissements nécessaires à l’entretien et au renouvellement du parc nucléaire. Ils s’opposent au renforcement des pouvoirs de la Commission de régulation de l’énergie dans la fixation des tarifs réglementés et au désengagement de l’État.

L’augmentation des tarifs réglementés de l’électricité est largement la conséquence d’une dérégulation, dont la principale justification donnée par les encenseurs de la libéralisation était justement la baisse des prix que la libre concurrence ne manquerait pas d’entraîner au bénéfice des consommateurs.

Le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui n’échappe pas à cette règle, puisqu’une des principales conséquences de la loi NOME sera l’augmentation des tarifs, pour les particuliers comme pour les entreprises, alors même que notre économie traverse une crise majeure.

La Commission de régulation de l’énergie a déjà indiqué que la loi NOME aurait pour conséquence une hausse des prix de l’électricité de 11, 4 % en 2010, puis de 3, 5 % en 2011 et les années suivantes.

De plus, selon de nombreux chercheurs, l’étude d’impact de la loi NOME, qui nous vante les mérites du dispositif pour atteindre les objectifs conjoints de développement de la concurrence de détail et de maintien des prix non résidentiels à des niveaux bas alignés sur les coûts de revient du nucléaire existant, ne repose pas sur des principes économiques cohérents. Cela se traduit par une grande complexité dans la mise en œuvre du dispositif et ouvre la voie aux jeux d’influences et aux conflits d’intérêts et de conceptions.

C’est pourquoi nous craignons fortement que le financement de l’investissement nécessaire à l’entretien et au renouvellement du parc nucléaire ne soit pas garanti. Cela concerne à la fois les réseaux, dont les usagers et les élus de proximité connaissent l’état de dégradation, et la construction de nouveaux moyens de production, hydroélectriques, thermiques, nucléaires ou fondés sur des énergies renouvelables. Il en va de même pour les investissements garantissant la sûreté des installations existantes.

En quoi la dérégulation et la mise en concurrence ont-elles été profitables au consommateur dans le secteur particulier de l’électricité, où le stockage n’existe pratiquement pas ? Il est maintenant de notoriété publique que la dérégulation du secteur électrique se traduit par une augmentation des tarifs et par une dégradation de la qualité de la prestation, avec une multiplication des black-out. Les usagers n’ont rien à espérer de cette nouvelle loi, qui vise à transformer un outil industriel en outil de performance financière.

Pourtant, l’objectif assigné à EDF n’était-il pas de permettre à tous les Français de bénéficier des bienfaits de la « fée électricité » à un coût accessible et dans des conditions de fiabilité acceptables ? De là découlaient deux traits caractéristiques : fixation par l’État de tarifs correspondant aux objectifs de modération et de solidarité et programme intensif d’investissement dans la production et la distribution.

Contrairement à ce qu’ont pu affirmer les hérauts du libéralisme, EDF a réalisé les énormes investissements de ses programmes hydroélectrique et nucléaire sans recourir aux subventions de l’État. Implicitement, cela signifiait que les consommateurs, dans la mesure où ils avaient financé les investissements, seraient ceux qui profiteraient de la santé de l’entreprise, par l’intermédiaire de prix de l’électricité attractifs.

Après avoir privé les citoyens de leur propriété collective, vous voulez aller plus loin et remettre en cause les conditions qui assuraient à EDF la maîtrise de sa capacité de production et de vente de l’électricité de base à bas prix. Cela revient à affaiblir l’opérateur historique, dont l’État, donc nous tous, est le principal actionnaire, au profit d’intérêts purement privés.

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