Intervention de François Rebsamen

Réunion du 3 décembre 2010 à 10h00
Loi de finances pour 2011 — Compte spécial : gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien

Photo de François RebsamenFrançois Rebsamen, rapporteur spécial de la commission des finances :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous prie de m’excuser d’avoir quelque peu bousculé l’ordre du jour.

Je suis chargé de vous présenter les crédits du programme 220, Statistiques et études économiques, qui recouvre le budget de l’INSEE, et les crédits du programme 305, Stratégie économique et fiscale, qui regroupe les moyens de la direction générale du Trésor et de la direction de la législation fiscale.

J’aborderai, en premier lieu, le programme 220. En présentant le 6 octobre dernier un rapport d’étape sur la délocalisation de l’INSEE à Metz, je vous faisais part des fortes inquiétudes de la direction générale de l’Institut devant la réduction très importante de ses moyens de fonctionnement et d’intervention ces deux dernières années, 2009 et 2010 : hors dépenses de personnel, la dotation de l’INSEE est passée de 69, 1 millions d’euros en 2008 à 55 millions d’euros en 2009 et à 56, 5 millions d’euros en 2010.

Parallèlement, ses effectifs ont été réduits de 5, 75 %.

L’année dernière, à la même époque, je vous disais déjà qu’on ne saurait garantir, à terme, avec une telle pente, la qualité et l’indépendance de la statistique publique, à laquelle, je le sais, vous êtes tous profondément attachés. Jean-Philippe Cotis s’en était d’ailleurs ému publiquement le 19 février dernier.

Cette mise en garde était d’autant plus justifiée que l’INSEE doit faire face à de multiples chantiers : le lancement du projet « INSEE ambition 2015 », la réorganisation des directions régionales et le déménagement sur le plateau de Saclay de l’École nationale de la statistique et de l’administration économique, l’ENSAE, sans oublier la création du pôle statistique à Metz.

Dans ce contexte, la dotation globale de l’État pour 2011 marque, ce dont je me félicite, une consolidation du budget de l’INSEE. Avec l’ouverture de 434, 62 millions d’euros, celle-ci augmentera de 4 %. Les crédits de fonctionnement et d’investissement enregistrent un bond de 19, 1 %, pour s’établir à 67, 3 millions d’euros, contre 56, 5 millions d’euros cette année. Les crédits de personnel de titre 2, sous l’effet du glissement vieillesse-technicité, que tous les élus connaissent, augmenteront de 1, 66 %, pour s’établir à 367, 3 millions d’euros en 2011, contre 361, 6 millions d’euros en 2010.

À titre personnel, je tiens à souligner qu’il était urgent de ne plus attendre. En effet, souvenons-nous des fortes inquiétudes qui s’étaient exprimées au début de l’année 2010. Le directeur général de l’INSEE avait alors rappelé que la diminution des crédits de fonctionnement de son institut compromettait le bon accomplissement de ses missions, sans compter les milliers de factures impayées qui étaient en souffrance au printemps dernier.

De plus, il faut le savoir, l’INSEE doit également faire face à une augmentation de la demande : les statisticiens sont de plus en plus sollicités par Bruxelles. Ainsi, en 2009, la moitié des enquêtes françaises ont alimenté Eurostat et, dans le même temps, l’INSEE a travaillé à la mise en place de nouveaux indicateurs.

Pour toutes ces raisons, les crédits attribués à l’INSEE ne devront plus, à l’avenir, chuter.

L’augmentation des moyens budgétaires ne saurait masquer la réduction de 5 % des effectifs : avec un plafond d’emplois de 5 221 équivalents temps plein travaillé, les ETPT, l’INSEE perd 266 postes par rapport à 2010. Je constate donc que se poursuit la diminution globale des effectifs, qui avait déjà été dénoncée lors de l’examen de la loi de finances pour 2010.

Aussi, dans le contexte particulièrement difficile de la délocalisation de l’INSEE, et malgré l’entrée prévue, en 2011, de 150 nouveaux agents recrutés par voie de concours, ainsi que la création de 159 emplois nouveaux, je rappelle avec force le risque d’atteinte à la qualité et à l’indépendance de la statistique publique que représenterait, selon moi, une application stricte de la règle de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux.

De la même manière, je déplore que soient très fortement réduits, dans le budget de l’INSEE pour 2011, les moyens consacrés à l’action n° 5, Action régionale, alors que ceux-ci sont destinés à mettre en valeur l’apport de cet institut et de ses directions régionales en matière d’information locale et d’aide à la décision des pouvoirs publics locaux.

La contraction de 12 % des crédits dévolus à cette action, qui sont ramenés de 60, 28 millions d’euros, en 2010, à 52, 75 millions d’euros, en 2011, correspond à une diminution des effectifs de l’ordre de 126 ETPT.

Plus globalement, la question des effectifs constitue un volet majeur de la réorganisation de cet institut, dans l’optique de la création du centre statistique de Metz et du redéploiement stratégique des équipes de l’INSEE vers une montée en gamme des études.

Prenons acte de la réévaluation à la hausse du budget global de l’INSEE pour l’année 2011, qui ne constitue d’ailleurs, je tiens à le souligner, qu’un retour à l’étiage financier des années 2006 et 2007.

Cette dotation devrait continuer à progresser dans le cadre de la programmation pluriannuelle, pour atteindre 442, 77 millions d’euros en 2013. Afin d’assurer la pérennité des moyens d’action de l’INSEE, il faudra veiller à ce que l’augmentation des moyens de la statistique publique, prévue dans le projet de loi de finances pour 2011 et dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011-2014, soit effective.

Enfin, sans revenir dans le détail sur l’installation du pôle statistique à Metz, je rappelle que le coût de l’opération immobilière s’établit à environ 50 millions d’euros selon le premier bilan que j’ai dressé dans le rapport d’information que j’ai rédigé au nom de la commission des finances. Ce coût est très élevé et, même s’il ne relève pas de la mission « Économie », il sera directement pris en charge par le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».

À cet égard, je vous rappelle, mes chers collègues, les fortes réserves que la commission des finances a émises sur le projet de réhabilitation des locaux de la direction régionale de la SNCF à Metz.

Avec un calendrier des travaux étalés sur cinquante et un mois, tous les élus le savent, les risques de dérive des coûts inhérents à toute opération de restructuration de bâtiments anciens et la nécessité de procéder à des déménagements multiples et croisés dans une ville qui ne dispose pas d’une offre de bureau suffisante font que ce choix ne garantit ni la meilleure utilisation des deniers publics ni l’adéquation optimale aux besoins exprimés par l’INSEE.

Aussi la commission des finances a-t-elle appelé à un réexamen approfondi de toutes les propositions, y compris l’installation du centre statistique de l’INSEE dans des immeubles neufs, comme le souhaitait d’ailleurs la direction de cet institut.

Si le bâtiment en lui-même n’est pas classé, il se situe dans un périmètre de protection des monuments historiques, ce qui impliquera beaucoup de doigté et de temps pour faire avancer les travaux.

En outre, il conviendra d’évaluer l’impact financier des mesures d’accompagnement de cette opération et de mesurer ses répercussions sur les moyens de fonctionnement et le personnel, notamment au sein des directions régionales.

J’en viens maintenant à l’examen du programme 305, Stratégie économique et fiscale.

Ce programme soutient la direction générale du Trésor et la direction de la législation fiscale non seulement dans la conception et la mise en œuvre de la politique économique et financière de la France au niveau national, international et européen, mais aussi dans l’élaboration de la législation fiscale, ce qui est très important.

Il assure également la rémunération des prestations réalisées par la Banque de France pour le compte de l’État, en particulier l’activité des commissions de surendettement.

Le programme est doté de 508, 6 millions d’euros au titre des crédits de paiement. Par rapport aux crédits votés dans la loi de finances pour 2010, la dotation pour 2011 augmente globalement de 46, 6 %.

Or l’évolution des crédits de l’action n° 1, Définition et mise en œuvre de la politique économique et financière de la France dans le cadre national, international et européen, est principalement marquée par l’augmentation du montant versé pour la rémunération des prestations réalisées par la Banque de France, qui passera de 145, 8 millions d’euros cette année à 317 millions d’euros en 2011.

Il faut rappeler que cette dotation a été constamment sous-évaluée au cours des trois dernières années. Ainsi, en 2009, la dépense effectivement réalisée a dépassé de 30 millions d’euros le montant des crédits votés. Pour l’exercice 2010, le Gouvernement juge probable que le montant du remboursement effectivement versé soit une nouvelle fois supérieur à la dotation budgétaire inscrite dans la loi de finances. L’augmentation notable de la dotation allouée à la Banque de France en 2011 répond aux exigences du Système européen de banques centrales, qui impose la rémunération au « coût complet », et non plus au coût estimatif.

Il faut en conclure que la budgétisation du programme pour 2011 sera beaucoup plus conforme au principe de sincérité budgétaire, ce dont tout le monde ne peut, j’en suis certain, que se satisfaire.

Au final, bien que je ne souscrive pas à tous les objectifs de la politique budgétaire du Gouvernement – cela ne surprendra personne ! –, et sous réserve des remarques et observations formulées précédemment, je vous propose, mes chers collègues, d’adopter, sans modification, les crédits proposés pour les deux programmes dont j’ai la charge.

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