Intervention de Jacques Pelletier

Réunion du 27 octobre 2005 à 11h00
Coopération décentralisée en matiere de solidarite internationale — Adoption des conclusions du rapport d'une commission

Photo de Jacques PelletierJacques Pelletier :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, traduction concrète de l'impératif de solidarité qui inspire l'action extérieure de la France, la coopération décentralisée constitue aujourd'hui une composante essentielle de notre politique de coopération internationale et d'aide au développement.

La coopération décentralisée, action extérieure des collectivités territoriales françaises, a imposé sa légitimité et bénéficie du soutien de l'Etat. Elle constitue une réalité institutionnelle et politique que traduisent les chiffres : d'après les données de la Commission nationale de la coopération décentralisée, près de 3 250 collectivités ou groupements français entretiennent plus de 6 000 relations de coopération dans 115 pays, représentant 230 millions d'euros, ce qui n'est pas négligeable.

Avant même de se voir attribuer un cadre juridique cohérent - mais à l'évidence insuffisant - avec la loi du 6 février 1992, la coopération décentralisée n'a cessé de se développer en qualité et en quantité depuis quinze ans.

La coopération initiée par les collectivités territoriales a toujours été, à mes yeux, une excellente coopération. C'est une coopération directe entre nos collectivités et les collectivités étrangères. C'est une école de la démocratie, qui sert aussi bien nos amis du Sud que nos concitoyens, qui se rendent ainsi mieux compte des difficultés vécues au quotidien par les pays sous-développés. Oui, je crois que la coopération décentralisée participe pleinement à l'effort entrepris pour l'éducation au développement.

Comme le souligne un récent rapport du groupe de travail mis en place par le Conseil d'Etat sur le sujet, le droit de la coopération décentralisée a toujours été en retard sur sa pratique. Et c'est peut-être pour cela qu'elle a été oubliée par les lois de décentralisation de 1982 et 1983.

En effet, seule la loi du 2 mars 1982 fait mention, dans son article 65, de la coopération transfrontalière, laquelle ne constitue que l'une des deux faces de la coopération décentralisée, l'autre étant la coopération au développement.

Depuis 1992, la coopération décentralisée a rattrapé une grande partie de son retard en matière juridique et a accumulé, ces dernières années, des instruments juridiques nouveaux mis à la disposition des collectivités territoriales.

Toutefois, son cadre juridique n'est pas encore parfaitement sécurisé, comme est venue le rappeler la décision du tribunal administratif de Poitiers du 18 novembre 2004. Celui-ci a effet censuré des actions engagées en Afrique par un conseil général au motif qu'elles étaient dépourvues d'intérêt local. Cette décision a mis en relief la fragilité juridique des actions de coopération décentralisée.

A partir de là, il devenait nécessaire et urgent de sécuriser juridiquement l'action extérieure des collectivités territoriales en mettant le droit en adéquation avec les faits. C'est ce à quoi nous invite la très bonne proposition de loi de notre collègue et ami Michel Thiollière, texte que nous examinons aujourd'hui dans une version remaniée et améliorée par la commission des lois et son excellent rapporteur.

Cette initiative, aussi urgente que pratique, nous permettra de renforcer la sécurité juridique des actions de coopération décentralisée dont l'intérêt local serait susceptible de faire débat. Nous donnerons ainsi une base juridique plus solide aux actions d'aide au développement et d'aide humanitaire d'urgence.

De plus, le texte prévoit que les collectivités territoriales et leurs groupements pourront financer des ONG ou des associations sans passer de convention. Ainsi, des actions de coopération décentralisée pourront avoir lieu dans l'urgence, comme c'était déjà parfois le cas. Mais, cette fois-ci, elles se dérouleront en toute sécurité juridique.

Le droit international comme le droit interne offrent aujourd'hui aux collectivités territoriales qui le souhaitent les moyens appropriés de mener des actions de coopération décentralisée. Cette proposition de loi viendra renforcer notre droit interne et permettra aux collectivités territoriales d'agir mieux, plus vite et de manière plus sûre en faveur des collectivités et des populations étrangères, de les aider techniquement, financièrement et humainement.

De cette façon, les collectivités territoriales françaises renforceront encore davantage leur dimension d'acteur de la politique de coopération et d'aide au développement de notre pays.

Des questions très concrètes demeurent toutefois en suspens et méritent une réflexion spécifique, avant de trouver une éventuelle traduction législative : je pense, par exemple, à la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux, ou encore aux circuits de financements des projets. Sur ces sujets, et sur bien d'autres encore, le Haut conseil de la coopération internationale, par l'intermédiaire de sa commission « coopération décentralisée », a entamé un travail de réflexion qui fera l'objet de propositions pratiques à destination de tous les acteurs de la coopération décentralisée.

Ces acteurs attendent aujourd'hui que nous adoptions la proposition de loi qui nous est présentée par notre collègue Michel Thiollière. Le groupe du RDSE votera bien évidemment ce texte avec enthousiasme, en souhaitant, madame la ministre, que vous puissiez le faire inscrire rapidement à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion