L’adoption de l’amendement n° 27 obligerait l’employeur à désigner des intervenants en prévention des risques extérieurs à l’entreprise. Cela pourrait être déresponsabilisant pour les acteurs de l’entreprise. En outre, une telle mesure ne me semble pas efficace pour prévenir les risques et améliorer les conditions de travail. Un tel objectif devrait mobiliser l’ensemble des énergies et des compétences. La commission émet donc un avis défavorable.
La proposition de loi prévoit que « l’employeur désigne un ou plusieurs salariés compétents pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels au sein de l’entreprise ». La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 5 rectifié, qui vise à remplacer le mot « compétents » par les mots « disposant de qualifications reconnues par des titres ou des diplômes ».
À titre personnel, cependant, je suis plus réservée, car j’estime qu’un tel amendement constitue un mauvais signal pour tous les salariés qui ont acquis sur le terrain une compétence évidente en matière de protection, de prévention et de conditions de travail. Lorsqu’un ouvrier travaille sur une chaîne ou sur une machine depuis vingt ans, ne peut-on lui reconnaître, hors de tout diplôme ou titre, une compétence ? N’est-il pas mieux à même d’améliorer les conditions de sécurité et de travail qu’un jeune diplômé généraliste, sans connaissance du terrain et extérieur à l’entreprise ? Cela va à l’encontre de la reconnaissance et de la valorisation des acquis de l’expérience, que nous soutenons pourtant tous.
La rectification opérée à l’instant par M. Godefroy répond partiellement à ces interrogations. Je précise que les actions des personnes en question viennent naturellement en complément et ne sauraient se substituer à celles des médecins du travail, dont le rôle doit rester prééminent.
En tout état de cause, un décret devra préciser les modalités d’application de ce nouvel article du code.
L’amendement n° 6 tend à assurer aux salariés désignés par l’employeur pour s’occuper de la prévention des risques professionnels une protection identique à celle dont bénéficient les délégués du personnel en cas de licenciement.
Une telle mesure ne pourrait que décourager les employeurs et empêcher le développement d’une relation de confiance en matière de prévention des risques. Il est probable que peu d’employeurs utiliseront cette procédure si l’amendement est adopté. Ils feront appel à des organismes extérieurs, alors qu’il est sûrement plus pertinent d’engager une dynamique au sein de l’entreprise elle-même. La commission est défavorable à l’amendement n °6, de même qu’à l’amendement n° 28, qui relève de la même philosophie.
L’amendement n° 29 rectifié prévoit que le salarié désigné par l’employeur pour s’occuper de prévention des risques bénéficiera, à sa demande, d’une formation, comme cela est déjà prévu dans le code du travail pour les membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Même s’il existe déjà une obligation générale de formation pour la sécurité au travail, cet ajout peut être utile, car il concerne les salariés désignés par l’employeur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
En ce qui concerne l’amendement n° 7, le nouvel article L. 4644-1du code du travail dispose que « l’employeur désigne un ou plusieurs salariés compétents pour s’occuper des activités de protection ou de prévention des risques professionnels de l’entreprise ». À défaut, si l’entreprise ne dispose pas de cette compétence, l’employeur fait appel à un intervenant extérieur habilité, appartenant soit au service de santé au travail interentreprises auquel il adhère, soit à un organisme interprofessionnel qualifié.
L’expression « peut faire appel » a été utilisée pour ne pas organiser de hiérarchie entre les recours externes et donner à l’employeur de la souplesse pour choisir un organisme compétent, lorsqu’il ne dispose pas de ressources en interne. Par exemple, le secteur du bâtiment a créé depuis longtemps un organisme de prévention, dont l’action est reconnue. Pour les entreprises de ce secteur, peut-être sera-t-il plus pertinent de recourir à cet organe plutôt qu’à leur service de santé. Il est donc préférable d’en rester à la rédaction actuelle du texte. La commission est défavorable à l’amendement n° 7.
L’amendement n° 8 a pour objet de restreindre cette possibilité de recourir à une compétence extérieure à l’entreprise aux intervenants œuvrant « exclusivement dans ce domaine ». Est-ce à dire qu’une personne habilitée, mais qui consacre 10 % de son temps à autre chose que la prévention des risques, est moins compétente qu’un intervenant complètement spécialisé dans la protection et la prévention des risques professionnels ? Ce qui importe, c’est la qualité de la procédure de reconnaissance de la qualification. En outre, qui va contrôler que l’intervenant se consacre exclusivement à ce domaine ? La commission est défavorable à cet amendement.