Déjà, 100 000 personnes, chaque année, le disent avec leurs pieds en quittant les grandes agglomérations pour s’installer dans la France rurale ou dans les villes petites ou moyennes, à taille humaine, en acceptant une baisse très sensible de leur niveau de vie.
Il ne s’agit pas de bloquer autoritairement le développement urbain, il ne s’agit pas de nier que certaines activités ne peuvent éclore et se développer que dans de grandes villes ; il s’agit de donner aussi de vraies chances aux zones rurales. Tous les Français ne sont pas obligés de passer quatre heures par jour dans les transports pour gagner leur barre d’HLM, alors que nombre d’entre eux seraient heureux de goûter la paix et la convivialité de villes moyennes ou de villages.
Mais, pour accomplir cette révolution, il faudrait s’affranchir du seul calcul de rentabilité qui dicte aujourd’hui les décisions en matière de transports et de communications, pour avoir le courage d’ouvrir les espaces ruraux enclavés, afin de rééquilibrer la répartition spatiale des activités et des hommes sur notre territoire.
Je voudrais vous citer deux exemples qui concernent ma région, Provence–Alpes–Côte d’Azur, et le massif des Alpes du sud.
Dans cette région, 90 % de la population s’entasse sur 10 % du territoire, le long du littoral. En choisissant le tracé des villes pour le TGV Paris-Toulon-Nice, monsieur le ministre, vous attirez encore davantage de populations là où il y en a déjà trop et vous désertifiez encore un peu plus l’arrière-pays.
Autre exemple : dans trente ans, le massif des Alpes du sud sera bordé, au nord, par le TGV Paris-Lyon-Turin, qui circulera à plus de 300 kilomètres par heure, et, au sud, par le Paris-Nice, qui devrait filer à la même vitesse. Dans le même temps, on roulera toujours à 60 ou à 80 kilomètres par heure sur l’épine dorsale ferroviaire des Alpes du sud, entre Marseille et Briançon, à la frontière italienne.
Aujourd’hui, en TGV, il faut trois heures et deux minutes pour aller de Marseille à Paris, distantes de 776 kilomètres ; en restant dans la région Provence–Alpes–Côte d’Azur, il faut quatre heures et trente minutes pour aller de Marseille à Briançon en empruntant 300 kilomètres de voie unique.
Dernier exemple, que je vous réserve pour la fin, monsieur le ministre : le projet d’autoroute A51 entre Grenoble et Gap, que vous avez condamné et brocardé à l’occasion du congrès de la montagne, dans les Hautes-Alpes.