Nous garderons une certaine nostalgie de ces moments.
Et nous étions impatients de connaître l’avis qu’exprimerait le Gouvernement sur le fruit des travaux de cette commission mixte paritaire.
Je dois vous l’avouer, monsieur le ministre, ce matin, j’étais à la limite de la déception en découvrant la quarantaine d’amendements déposés par le Gouvernement – une copie revue et corrigée ! – qui donne la mesure de la pression exercée par le Gouvernement sur un travail dont les parlementaires eux-mêmes étaient plutôt satisfaits.
Puis, nous avons pris le temps d’analyser le contenu de chacun de ces amendements, et c’est sans doute parce que ce texte abondant comportait de multiples alinéas qu’il fallait d’abord opérer quelques corrections de coordination et de rédaction. Le Sénat a ce privilège de pouvoir disposer d’un temps de réflexion plus long que celui qui est offert à nos collègues députés.
Monsieur le ministre, je ne me méprends pas sur le contenu de chacun de ces amendements, qui m’inspirent trois observations.
Je souhaiterais d’abord exprimer une incompréhension.
À l’article 2, vous êtes revenu sur la limitation de la valeur ajoutée par rapport au chiffre d’affaires.
Le texte issu des travaux du Sénat reconnaissait que, pour des entreprises mobilisant une main-d’œuvre nombreuse, il fallait limiter la valeur ajoutée à 80 % du chiffre d’affaires. Puis, les députés, avec l’aide de quelques-uns de leurs collègues sénateurs, sont revenus sur ce dispositif pour limiter le bénéfice de ce plafonnement de valeur ajoutée aux entreprises réalisant moins de 7, 6 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Il est clair qu’un certain nombre d’entreprises, notamment de main-d’œuvre intérimaire, peuvent, dans ces conditions, être tentées de s’implanter à la périphérie de nos frontières. Cela peut être extrêmement préjudiciable à la France !
Vous êtes donc revenu sur ce dispositif, monsieur le ministre, et vous avez fixé le plafond à 85 % pour les entreprises réalisant plus de 7, 6 millions d’euros de chiffre d’affaires. J’avoue mon incompréhension. Je pense que vous auriez pu retenir un pourcentage de 80 % pour l’ensemble des entreprises. Quelques entreprises très manufacturières risquent de subir un vrai préjudice, ce qui est tout à fait l’inverse de l’objectif que nous cherchons tous à atteindre.
J’avais cru comprendre que ceux qui souhaitaient ramener en deçà de 7, 6 millions le plafonnement le faisaient pour obtenir une économie pour le budget de l’État, économie qui se trouvait partiellement réinvestie dans le passage d’un taux d’actualisation de 1 % à 1, 2 % pour les bases 2008 servant de référence au calcul du produit de taxe professionnelle pour 2010.
Vous êtes revenu sur ce coefficient de 1, 2 %, c’est-à-dire que vous avez repris le gage qui résultait de la suppression du plafond de 80 %. Dès lors que vous étiez revenu à 1 %, vous auriez pu revenir à 80 % pour l’ensemble des entreprises.
Mais cela améliore le solde budgétaire, et il faut s’en réjouir.
Ma deuxième observation sera pour dissiper un soupçon de défiance.
Nous avions mis un soin extrême à faire l’économie du ticket modérateur.
On pouvait penser que ce ticket modérateur avait son utilité dès lors que les élus territoriaux disposaient d’une marge de manœuvre pour faire évoluer plus rapidement le taux de la cotisation foncière des entreprises. Or nous avons fini par accepter – il est vrai que le Gouvernement s’est fait pressant – que les taux soient totalement liés.
Je dénonce cette défiance à l’égard des élus, monsieur le ministre, d’autant qu’il est des questions auxquelles je n’ai pas reçu de réponse.
Que se passera-t-il lorsqu’une entreprise franchira le plafond des 3 %, non pas parce que les collectivités auront augmenté leurs taux, mais parce que le chiffre d’affaires de cette entreprise, qui jusque-là pouvait bénéficier d’un taux sur la valeur ajoutée inférieur à 1, 5 %, aura soudainement progressé ?
Et que ferez-vous pour les organismes bancaires qui auront de multiples implantations ? Comment calculera-t-on le ticket modérateur ?
Je garde l’espoir, puisque nous sommes dans la série des articles 43 B et 43 C, que ces dispositions pourront être revues au mois de juin prochain pour que nous trouvions un dispositif qui nous mette à l’abri de ce soupçon de défiance.
Enfin, je voudrais saluer une orientation prometteuse en matière de péréquation.
Il est vrai qu’une cotisation nationale est un instrument de péréquation dont on a toujours rêvé et qui nous permet de « péréquer » non seulement sur le différentiel de croissance mais aussi sur les stocks.