Intervention de Claude Domeizel

Réunion du 26 mars 2009 à 15h30
Service d'accueil des élèves dans les communes de moins de 2000 habitants — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Claude DomeizelClaude Domeizel :

Jamais une loi n’avait fait l’objet, dans les six premiers mois de son application, autant de contestations, et de tous bords ! Le chahut et les sifflets qu’elle a provoqués au congrès des maires de novembre dernier en sont la manifestation publique la plus significative. Sans parler de l’émoi qu’elle a suscité localement chez les maires, toutes tendances confondues, émoi exacerbé par les recours introduits par des préfets, qui ont assigné des maires pour les punir de n’avoir pas appliqué ce service minimum !

Nous sommes donc dans une situation de véritable cacophonie juridique.

Dans ce contexte, votre note du 22 décembre 2008 tend à laisser croire que Mme la ministre de l’intérieur et vous-même découvrez une rafale de mises en cause de maires indisciplinés. Nous ne sommes pas dupes : tout cela a dû être bien orchestré !

Dans cette note, vous avez demandé aux préfets de maintenir les recours contre les communes et surtout les maires qui avaient refusé d’appliquer la loi, c’est-à-dire ceux qui, en quelque sorte, se comportaient en grévistes du SMA.

Comme vous, je considère que la loi doit être respectée. Cependant, lorsqu’un dispositif se heurte à une opposition de cette ampleur, venant de représentants du peuple, il faut se remettre en cause !

Voilà une loi irréaliste, car difficile à mettre en œuvre.

Le problème est bien là : il s’agit, en effet, pour les maires, d’organiser, dans un délai relativement court – 48 heures – un accueil, pour des enfants de deux à dix ans dans les meilleures conditions de sécurité.

Par-delà le malaise qu’elle peut créer chez ceux qui se considèrent comme des briseurs de grève, les maires sont désormais chargés d’une nouvelle obligation. Comme s’ils n’en avaient pas assez ! Le maire peut, bien sûr, faire appel à son personnel communal. Encore faut-il que le personnel non gréviste soit en nombre suffisant… Au demeurant, le maire peut également se trouver confronté à des agents qui refusent d’effectuer un travail soit parce qu’il doit être accompli dans des plages horaires où ils ne peuvent se rendre disponibles, soit parce qu’il ne correspond pas à leur cadre habituel d’intervention.

M. le secrétaire d’État chargé de la fonction publique, que j’ai questionné oralement le 18 mars dernier sur un autre sujet, m’a lui-même confirmé qu’un fonctionnaire territorial ne pouvait se voir imposer une tâche pour laquelle il n’avait pas été recruté.

Par ailleurs, cette astreinte, venant s’ajouter à un travail habituel, avant et après le service d’accueil, peut entraîner une trop grande amplitude d’horaire de travail, qui placerait le maire dans l’illégalité au regard du code du travail.

Le maire est donc autorisé à faire appel à des personnes n’appartenant pas à l’administration communale, retraités, membres d’associations, voire, plus absurde encore, des parents. Il est incité à constituer à l’avance un « vivier » de personnes susceptibles de présenter les « qualités nécessaires » à un encadrement sécurisé.

Ces listes doivent auparavant être transmises à l’inspection académique afin que celle-ci puisse notamment vérifier que les personnes en question ne figurent pas dans le fichier judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles, le FIJAIS.

Premièrement, comment garantir que ces personnes listées seront disponibles le jour dit, c’est-à-dire plusieurs semaines, voire plusieurs mois après l’établissement de la liste ? Quelle sera la durée de validité de ce fichier, qui nécessitera forcément des mises à jour fréquentes ?

Deuxièmement, ces fichiers devront-ils être soumis à déclaration à la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL ?

S’agissant des « qualités nécessaires » exigées, je vais vous rapporter le point de vue du maire d’une commune rurale de mon département, qui me paraît bien résumer la situation. Il ne comprend pas que, pour conduire un tractopelle ou un engin de déneigement, ou accomplir la moindre intervention sur une installation électrique, une habilitation soit indispensable, alors que rien de tel n’est exigé pour encadrer des enfants !

Dans une même école, les enseignants non grévistes et leurs élèves travailleront-ils normalement, en présence ou à proximité du service d’accueil minimum dont l’unique activité, inévitablement bruyante, est axée sur les loisirs ?

Je profite de l’occasion qui m’est donnée aujourd’hui, monsieur le ministre, pour obtenir des réponses à des questions qui m’ont été souvent posées.

Concernant les locaux, les enseignants grévistes pourront-ils refuser l’accès à leur classe ? Le personnel assurant le service minimum d’accueil devra-t-il tenir le registre des présences ? Disposera-t-il des renseignements personnels concernant, notamment, la santé des enfants et les personnes habilitées à les prendre en charge à la sortie de l’école maternelle ?

Certes, la loi a prévu de transférer la responsabilité administrative de la commune à l’État. Mais, pour se prémunir en cas de faute, les intervenants occasionnels doivent-ils souscrire une assurance en responsabilité civile personnelle, à l’instar des enseignants ?

Voilà une loi dont l’application future comporte bien des incertitudes.

Monsieur le rapporteur, vous indiquez que le SMA a été mis en place dans près de 80 % des communes, alors que M. le ministre avance le pourcentage de 90 %.

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