Intervention de Joseph Kergueris

Réunion du 16 décembre 2008 à 16h00
Gendarmerie nationale — Discussion générale

Photo de Joseph KerguerisJoseph Kergueris :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le débat qui nous réunit aujourd’hui sur le projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale fait suite aux réflexions conduites par le groupe de travail de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, présidé par notre collègue Jean Faure.

Actualisant des dispositions législatives et réglementaires quelque peu datées, le projet de loi permet d’adapter cette arme aux nouvelles réalités territoriales et sociales de notre pays.

Madame la ministre, vous savez combien le sujet est sensible pour les parlementaires de province issus des zones rurales, dont je suis. En effet, la gendarmerie y est présente – elle ne l’est même jamais assez – au quotidien.

Cela étant, la gendarmerie est également présente dans cette maison, et l’examen de ce projet de loi nous donne l’occasion de saluer le dévouement et la compétence des personnels de la garde républicaine qui veillent à la sérénité de nos débats.

Le texte qui nous est soumis vise d’abord le rattachement organique de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur à partir du 1er janvier 2009. Il ne s’agit pas là d’une inflexion majeure, car un rapprochement s’était déjà opéré, dans le cadre d’une longue évolution. Nous voilà seulement parvenus au terme de ce cheminement vers une complémentarité entre gendarme et policier, chacun ayant son statut propre.

Madame la ministre, vous serez désormais responsable de l’organisation de la gendarmerie nationale, de sa gestion, de son emploi et de l’infrastructure militaire qui lui sera nécessaire.

Toutefois, il est très important que la gendarmerie nationale conserve son statut militaire. Il n’est nullement question d’une fusion avec la police car, aux termes de l’article 1er du projet de loi, elle demeure bien une force armée, dont les missions de sécurité intérieure, qu’il s’agisse de la police administrative, du maintien de l’ordre, du renseignement, de l’information ou de la protection des populations, les missions judiciaires et les missions militaires sont parfaitement définies.

Ainsi, pour la première fois, le texte reconnaît l’une des spécificités essentielles de la gendarmerie nationale, qui réside dans sa capacité de s’engager dans le règlement des crises de haute intensité, voire dans les conflits armés. Dieu sait si les opérations extérieures auxquelles participe notre pays le requièrent !

Cela étant, les officiers et les sous-officiers de gendarmerie restent bien des militaires, soumis au statut général des militaires. Ils conservent leurs obligations et leurs sujétions particulières, qui découlent à la fois de leur statut militaire et de leurs missions de police, notamment en matière de logement en caserne – lequel doit être considéré, convenons-en, plus comme une contrainte que comme un avantage, quoi qu’en disent certains.

Cependant, il est prévu dans le projet de loi de placer les responsables locaux des services de la police nationale et des unités de gendarmerie sous l’autorité des préfets.

Dans un amendement qui sera soumis au Sénat, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a préféré ne pas retenir cette formulation. Elle a estimé en effet que l’affirmation de l’autorité des préfets sur les commandants locaux de gendarmerie était susceptible de porter atteinte au principe d’obéissance hiérarchique consubstantielle au statut militaire de la gendarmerie. Il faut, selon moi, soutenir l’amendement de la commission.

Cette position nouvelle à l’égard du préfet induit nécessairement la suppression de la procédure de réquisition des forces armées pour l’emploi de la gendarmerie au maintien de l’ordre. Cela pourrait ne pas poser de problème insurmontable, dans la mesure où la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et la commission des lois ont préféré conditionner la suppression de la procédure de réquisition pour l’emploi de la gendarmerie au maintien de l’ordre à l’instauration d’une nouvelle procédure d’autorisation du recours aux moyens militaires spécifiques, tels que les véhicules blindés, et de l’usage des armes pour le maintien de l’ordre, en ce qui concerne tant les gendarmes que les policiers.

À cet instant, permettez-moi d’évoquer un souvenir. Nous sommes quelques-uns, ici, à avoir vécu les événements de 1948. À cette époque, pour maintenir l’ordre, il était aussi possible de recourir à la troupe ! Compte tenu de l’existence de la gendarmerie mobile et des compagnies de CRS, l’organisation du maintien de l’ordre en France ne s’inscrit plus du tout dans le même contexte.

Les amendements que j’ai évoqués sont de nature à répondre aux questions que les gendarmes se posent. Il faut ajouter qu’atteindre l’objectif d’une parité globale de traitement et de carrière entre gendarmes et policiers est l’une des conditions de la pérennité du statut militaire ; les dispositions concernant la reconnaissance d’une grille indiciaire spécifique vont dans ce sens.

La gendarmerie demeurera chargée de la prévôté militaire à l’égard des autres composantes de nos forces armées, et les attributions de l’autorité judiciaire pour l’exercice de cette mission sont préservées.

Nos collègues de la commission des lois ont par ailleurs souhaité que soit inscrit dans le code de procédure pénale le principe du libre choix du service enquêteur par l’autorité judiciaire ; personnellement, c’est un souhait que je partage.

Enfin, il est proposé, dans le projet de loi, une gestion rénovée des ressources humaines, une compétence de principe vous étant confiée, madame la ministre, en matière de gestion des personnels de la gendarmerie, compétence partagée chaque fois que nécessaire avec votre collègue le ministre de la défense. Toutefois, ce dernier continuera d’exercer la compétence indispensable en matière de discipline. En outre, il est prévu de mieux reconnaître la place et le rôle importants de la réserve.

Enfin, je voudrais attirer votre attention – je parle sous le contrôle de ma collègue Anne-Marie Payet – sur le sort des gendarmes originaires d’un département d’outre-mer.

Dans certains de ces départements, le pourcentage de gendarmes originaires de la collectivité est modeste, ce qui peut poser problème dans les contacts avec la population, la connaissance des pratiques locales, des mentalités, voire de la langue étant parfois insuffisante.

Dans le cadre du rapprochement des statuts entre police et gendarmerie, les militaires originaires d’un département d’outre-mer souhaiteraient bénéficier eux aussi de la possibilité de retourner chez eux après avoir passé sur le territoire métropolitain une période moins longue que ce qui est prévu actuellement. C’est là une préoccupation légitime, à laquelle il serait souhaitable que le Gouvernement soit attentif.

En conclusion, madame la ministre, sous la réserve expresse qu’il soit enrichi des amendements déposés et défendus par la commission des lois et par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, ce projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale recevra l’appui du groupe de l’Union centriste.

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