Intervention de Dominique Braye

Réunion du 15 juin 2011 à 14h30
Équilibre des finances publiques — Article 1er, amendements 41 74 1

Photo de Dominique BrayeDominique Braye :

L’article 1er me pose problème car ses deux dispositions fondamentales tendent à rendre quelque peu schizophrène le parlementaire que je suis !

La première concerne les lois-cadres d’équilibre des finances publiques, auxquelles je suis profondément attaché et qu’il est essentiel que nous adoptions au plus vite. La deuxième a trait au monopole des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale sur les principales dispositions relatives aux prélèvements obligatoires, auquel je suis très opposé et qu’il est impératif que le Sénat n’adopte pas.

J’estime en effet qu’il est essentiel – et urgent – de lutter contre les déficits, mais je ne vois pas le rapport entre cette lutte et le monopole institué par le projet de loi constitutionnelle. Pourquoi retirer au législateur ordinaire le droit de toucher à la fiscalité, alors qu’il n’est à l’origine que de 16 % des pertes de recettes sur les dix dernières années ? Pourquoi lui supprimer la possibilité d’augmenter ou de créer des taxes qui iraient dans le sens de ce que souhaite le Gouvernement ?

Par ailleurs, le monopole vide la réforme constitutionnelle que nous avons adoptée il y a moins de trois ans d’une grande partie de ses acquis. Que signifie encore le droit d’initiative s’il ne peut plus du tout s’exercer en matière fiscale ?

Enfin, le monopole affaiblit considérablement – vous le savez – la place du Sénat, en remettant en cause sa priorité d’examen pour les textes concernant l’organisation des collectivités territoriales puisque les dispositions sur les compensations du transfert de charges devront être renvoyées dans un projet de loi de finances, examiné en premier lieu par l’Assemblée nationale.

Je ne veux pas entrer dès maintenant dans le détail des amendements qui nous seront proposés, mais il me semble, d’ores et déjà, que deux positions assez proches sont en présence. Les amendements proposés par nos commissions permettent en effet de lever les préoccupations des uns et des autres en maintenant les droits du Parlement, tout en renforçant le contrôle des mesures fiscales par les lois financières.

L’amendement n° 41 présenté par M. Emorine au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire et l’amendement n° 74 présenté par M. Legendre prévoient que les dépenses fiscales ne pourront entrer en vigueur qu’au 1er janvier, c'est-à-dire après l’examen de la loi de finances. Le législateur financier pourra donc les supprimer ou les modifier, ce qui satisfait totalement à l’exigence de la lutte contre les déficits par le respect des lois-cadres que nous souhaitons tous voir entrer en vigueur.

Les amendements n° 1 rectifié et 7 rectifié, présentés respectivement par la commission des lois et la commission des affaires sociales, inversent la charge de la preuve en prévoyant une validation systématique en loi de finances. De plus, ils s’appliquent à toutes les mesures fiscales, y compris à celles qui créent des recettes. L’inconvénient de ce dispositif, me semble-t-il, est qu’il oblige le Parlement à voter deux fois les mêmes dispositifs dans l’année, ce qui est de nature à affaiblir la portée de son vote. On voterait une fois pour de faux, une deuxième fois pour de vrai, si j’ose dire !

Je suis néanmoins persuadé qu’il existe un point d’accord possible. Toutefois, ce point d’accord est rendu plus difficile par la rectification adoptée hier, qui aboutit à inscrire un délai obligatoire de quatre mois. Autrement dit, toutes les dispositions fiscales qui seront adoptées début juillet – et vous savez qu’elles sont nombreuses – tomberont automatiquement, puisque le projet de loi de finances n’est adopté définitivement qu’au 31 décembre, soit plus de quatre mois après leur vote.

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