Cependant, compte tenu des déséquilibres territoriaux, que signifie l’autonomie fiscale lorsqu’il n’y a pas, ou peu, de masse taxable et, partant, de perspectives de recettes ?
Dans certains départements, le coût des compétences transférées, ne serait-ce que dans le domaine social avec le RSA et l’APA, est sans commune mesure avec le niveau réel de la contribution qui peut y être levé.
En la matière, une prise de conscience s’impose : plus loin nous souhaiterons aller dans la décentralisation, en confiant aux collectivités territoriales des missions jusque-là exercées par l’État sur son budget, plus il sera difficile, sur un plan macroéconomique, d’assumer le principe d’autonomie fiscale. Je prendrai, là encore, l’exemple de la Bretagne : l’État y collecte 11, 3 milliards d’euros, mais en redistribue 16, 3 milliards !
De ce point de vue, l’instauration de la nouvelle contribution économique territoriale me paraît ouvrir de nouvelles perspectives pour assurer, dans toute la mesure possible, une meilleure équité entre les territoires. Les péréquations et compensations sont peut-être des entorses au principe de l’autonomie fiscale, mais elles expriment une autre valeur, celle de la solidarité nationale, à laquelle nous sommes tous attachés. Cette dernière mérite selon moi d’être autant respectée et défendue qu’un principe d’autonomie dont nous mesurons bien les limites.
Le troisième point que j’aborderai concerne le sort qui sera réservé à la taxe sur le foncier non bâti compte tenu de la suppression de la taxe professionnelle.
Aujourd’hui, la taxe sur le foncier non bâti pèse fortement sur l’agriculture, secteur économique pourtant soumis lui aussi, comme chacun le sait, à une rude concurrence, et s’apparente, à bien des égards, à une taxe professionnelle. Aussi, le raisonnement qui prévaut pour alléger les charges sur les entreprises à fort investissement me semble également valable pour les entreprises agricoles, où le poids du foncier est lourd. Je sais que ces contributions ne sont pas tout à fait de même nature, puisque le foncier ne s’amortit pas. Pour autant, je souhaite que l’examen du dossier de la révision des bases foncières nous donne l’occasion de réfléchir à la pertinence économique de cette taxe et à son évolution.
Enfin, le quatrième point de mon intervention portera sur la maîtrise de nos dépenses
Si nous partageons tous cet objectif, il serait pour le moins fâcheux que la recherche de l’excellence en tous points – qualification des personnels, sécurité, environnement – conduise, par la création de normes excessivement contraignantes, à augmenter les dépenses des collectivités territoriales. Je ne suis pas de ceux qui considèrent que nos collectivités territoriales bénéficieraient d’une sorte de garantie de ressources provenant de l’État, indépendamment du contexte économique.
Pour autant, il ne faudrait pas que, dans le même temps, l’État, au mépris de ce même contexte économique, en vienne à mettre lui-même à faire supporter aux collectivités territoriales des charges nouvelles, au détour d’un décret ou d’une circulaire.
En d’autres termes, si l’État ne veut pas ou ne peut pas compenser toutes ces nouvelles charges, il serait bien inspiré d’éviter d’en créer, surtout lorsque leur utilité reste à démontrer.
Dans le même ordre d’idée, je reconnais à la fiscalité écologique une finalité pédagogique salutaire, et je me réjouis que le Gouvernement ait récemment annoncé son intention d’affecter le produit de la taxe carbone acquittée par les collectivités à un fonds de l’ADEME qui servira à financer les investissements des collectivités locales en matière d’économie, d’énergie et de développement durable. J’ai également noté que la taxe carbone serait intégralement remboursée aux particuliers. Cela étant, l’instauration de contributions écologiques ne doit pas aboutir à absorber l’intégralité du bénéfice tiré de l’exonération de la taxe professionnelle. Pour notre part, nous avons trop souvent déploré et dénoncé ce genre de pratique.
Mes chers collègues, le projet de budget pour 2010 est marqué par un souci de lucidité et de vérité. Il ouvre des perspectives et prépare la sortie de crise, en s’inscrivant, au-delà de la conjoncture particulière que nous traversons, dans une logique de libération de notre économie.
Je sais gré au Gouvernement, malgré un contexte difficile, de faire preuve de courage alors qu’il eût été plus facile de différer une décision aussi lourde de conséquences que la réforme de la taxe professionnelle. C’est parce que je le sais attentif aux propositions du Sénat, dans le but commun de rendre cette nécessaire réforme juste et équilibrée, que nous aborderons la discussion avec confiance.