Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 20 octobre 2004 à 15h00
Rappels au règlement

Photo de Roland MuzeauRoland Muzeau :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, mon rappel au règlement a trait - une nouvelle fois ! - à l'organisation de nos travaux.

M. le président du Sénat déclare aujourd'hui même, à la Une d'un hebdomadaire : « Le problème n'est pas de moins légiférer, mais de légiférer autrement. »

L'introduction de dispositions relatives aux licenciements, par le biais d'une lettre rectificative adoptée ce matin même en conseil des ministres, dans le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, dont l'examen en séance publique est prévu mercredi prochain, éclaire de manière pour le moins originale ce propos de notre président.

Légiférer autrement signifie-t-il faire adopter à la hussarde des mesures antisociales d'assouplissement des règles de licenciement ?

Légiférer autrement signifie-t-il confirmer ce que nous savions depuis deux ans, à savoir la transformation du Parlement en vulgaire chambre d'enregistrement des directives gouvernementales ?

Légiférer autrement signifie-t-il écarter la commission compétente, la commission des affaires sociales en l'occurrence, du processus législatif ? En effet, celle-ci n'aura pu examiner le texte de M. Borloo dans sa globalité et l'audition précipitée de M. Larcher, jeudi, à quatorze heures, ne changera rien au fond.

Décidément, la formule « légiférer autrement » doit être comprise comme la mise au pas de l'institution parlementaire...

Depuis quelques jours, nous assistons à une qui pourrait prêter à sourire si le sujet n'était aussi grave.

Mais la dure réalité est là : le Gouvernement ne négocie plus avec les syndicats, il impose ! Le Parlement ne débat plus, il enregistre !

Dans ces conditions, comment envisager d'accepter de discuter dans quelques jours d'un projet de loi dont l'intitulé est devenu totalement obsolète tant il est vrai qu'il s'agit non plus d'un projet de loi de cohésion sociale mais bien d'un projet de déstabilisation sociale ?

En tout état de cause, je vous demande, monsieur le président, de prendre toutes les dispositions nécessaires pour que l'examen de ces mesures soit repoussé afin de permettre l'audition des partenaires sociaux et des ministres concernés en vue de l'élaboration d'un nouveau rapport.

Et que l'on ne vienne pas nous raconter que le texte présenté par M. Larcher et inclus dans le projet de loi de programmation de M. Borloo serait insignifiant sur le fond !

Permettez-moi d'en citer quelques aspects, mes chers collègues.

Les employeurs demeurent incontestablement les mieux servis, et ce ne sont pas les talents d'acteur du président du MEDEF qui y changeront quoi que ce soit !

Quant au projet final, envoyé à la hâte pour examen au Conseil d'Etat, il fait, sachez-le, reculer l'existant pour les salariés des grandes entreprises et ne crée aucun droit pour ceux des petites entreprises, qui pourtant sont touchées par 80 % des suppressions d'emplois. En fait, cet avant-projet de loi est totalement vide de toute proposition pour les 53 % de salariés qui travaillent dans les entreprises de moins de cinquante salariés.

Nous le voyons bien : ce sont les employeurs , et ce malgré les cris de frayeur du baron Seillières, qui sont les mieux servis par un texte qui va faire mal à l'emploi, mal à la cohésion sociale.

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