Intervention de Jean-Pierre Bel

Réunion du 25 novembre 2010 à 15h00
Loi de finances pour 2011 — Action extérieure de l'état

Photo de Jean-Pierre BelJean-Pierre Bel :

Quelles mesures comptez-vous prendre pour faire pression sur le Gouvernement de la Birmanie ?

De même, il n’est pas possible que les droits de l’homme soient absents de la relation franco-chinoise, notamment, car il n’est pas de développement pérenne sans respect des libertés fondamentales. Tout en respectant la Chine dans ce qu’elle peut apporter de très important au monde, la France doit oser – et je crois qu’ils comprennent comme cela – lui parler franchement, directement, des droits de l’homme, et par exemple de la libération du prix Nobel de la Paix, Liu Xiaobo. Si elle ne le fait pas, quel autre pays le fera ?

Enfin, je voudrais vous interpeller au sujet de nos objectifs dans la zone méditerranéenne. La France pèse insuffisamment dans le conflit Israël-Palestine ; elle est muette sur le conflit du Sahara occidental ; elle n’a rien vu venir de la montée de l’insécurité au Sahel, qui est pourtant dans notre zone traditionnelle d’influence ; elle n’arrive pas à donner un contenu fort à notre relation avec la Turquie. Or, peut-on réellement se couper de ce grand voisin, essentiel à la stabilité de la région ?

L’élargissement de l’Union européenne à la Turquie – on peut en penser ce que l’on veut – est, malgré tout, une perspective et celle-ci doit être présentée en toute honnêteté comme telle aux Français. Il ne sert à rien, quelle que soit l’idée que l’on peut avoir, de jouer avec les peurs.

Source de frustrations du côté de la rive sud, de désintérêt du côté de la rive nord, a fortiori depuis l’élargissement de l’Union européenne à l’est, l’Union pour la Méditerranée illustre une nouvelle fois la méthode de Nicolas Sarkozy en matière d’affaires européennes. Il s’agit de créer l’illusion que ses propositions sont nouvelles et sont siennes tout en faisant financer par l’Europe une ambition française. Cela ne peut qu’irriter nos partenaires européens, et accroître la frustration des pays de la rive sud de la Méditerranée. En outre, les postulats sur lesquels cette entreprise est fondée, et notamment l’idée de croire que l’on pourrait contourner les conflits de la région, se sont avérés illusoires.

Or, Nicolas Sarkozy a été un fervent supporter du nouvel accord d’association de l’Union européenne avec Israël, envoyant par là un signal pour le moins incompris des pays arabes. On évoque une remise à plat du projet et une clarification sur la façon, nécessairement plus collective, de gérer l’Union pour la Méditerranée du côté européen. Quelles sont les intentions du Gouvernement à cet égard ?

Pour nous, les grands axes de réorientation de la politique euro-méditerranéenne sont les suivants : réaffirmer son cadre conceptuel en vue de la construction d’une communauté de valeurs, d’intérêts et de destins ; afficher une véritable politique de démocratisation et de promotion des droits de l’homme au moyen d’un soutien visible aux sociétés civiles et aux formations politiques démocratiques de la rive sud ; lancer un agenda de coopération économique régionale et sous-régionale pour résorber les disparités sociales et économiques entre les deux rives et ancrer la région dans la mondialisation ; assurer une dimension parlementaire au processus ; faire de la dimension sociale l’axe principal de la politique euro-méditerranéenne ; considérer l’immigration, l’intégration sociale et la justice dans le cadre d’une approche solidaire fondée sur le strict respect de la dignité et des droits de l’homme.

L’échec de l’Union pour la Méditerranée ne condamne pas l’idée de politique méditerranéenne et ne remet pas en cause la nécessité impérieuse d’en mener une ; bien au contraire ! Mais il impose de reprendre la réflexion sans éviter la question des droits de l’homme et de la démocratie, qui est bien absente des arrangements actuels.

Le consensus qui existait sur les grandes lignes de notre politique étrangère a été détruit depuis 2007. Notre diplomatie était indépendante, ouverte au monde, forte des valeurs de la République. Notre alignement au sein de l’OTAN, la fermeture de notre politique migratoire, ainsi que l’oubli et le mépris des droits de l’homme ont banalisé notre politique extérieure.

C’est pourquoi nous ne voterons pas le projet de budget que vous nous proposez aujourd’hui.

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