Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaiterais revenir sur le principe constitutionnel d’autonomie financière, qui, lorsqu’il a été adopté en 2004 par la majorité actuelle, sur l’initiative du gouvernement Raffarin, a été présenté comme une avancée importante. Nous l’avions à l’époque dénoncé comme un leurre pour les collectivités territoriales. La réforme actuelle nous prouve malheureusement combien nous avions alors raison.
Nous l’avons dit, la suppression de la taxe professionnelle entraînera une perte de près de 30 milliards d’euros de recettes fiscales, que le Gouvernement propose de compenser par le transfert d’impôt et l’ajout de dotations budgétaires. Il est incontestable que cela réduit à peau de chagrin l’autonomie fiscale des collectivités territoriales. Mais le Gouvernement s’en moque puisqu’il peut partout affirmer qu’il respecte la Constitution et l’autonomie financière des collectivités !
Nous pourrions admettre que, sur ce dernier point, il a raison. Cependant, l’autonomie financière s’apprécie au regard des ressources propres de chaque collectivité. Or cette notion de ressources propres prend en compte les impositions pour lesquelles les collectivités territoriales n’ont ni la possibilité de déterminer l’assiette ni le pouvoir de fixer le taux.
Ainsi seront pris en compte demain, pour le respect de l’autonomie financière, la nouvelle cotisation sur la valeur ajoutée, la taxe spéciale sur les conventions d’assurances, les nouvelles impositions forfaitaires sur les entreprises de réseau, les droits de mutation à titre onéreux, et j’en passe. Sur tous ces impôts, les collectivités locales n’auront aucune maîtrise et seront soumises à des décisions nationales.
Malgré ces compensations, l’autonomie financière diminuera, après la réforme, pour l’ensemble des collectivités territoriales par rapport à l’année 2008. Néanmoins, les compensations permettront, pour un temps, de respecter la Constitution.
Mais ce n’est pas d’autonomie financière que la décentralisation a besoin, ce n’est pas d’une tutelle de l’État que les élus locaux ont besoin ! La décentralisation que, pour notre part, nous défendons se fonde sur la confiance entre l’État et les collectivités locales et sur le renforcement de leur autonomie fiscale, symbole de la démocratie locale. Et, ne l’oublions pas, cette confiance est elle-même sollicitée par l’État, qui ne cesse de faire appel aux collectivités territoriales lorsqu’il s’agit de financer les universités, les routes, les hôpitaux, tous domaines qui relèvent pourtant de sa compétence.
Aussi, vous me permettrez en cet instant de rendre justice à l’inventeur de ce merveilleux principe et à la majorité courageuse qui l’avait à l’époque voté. C’est bien le gouvernement mené par Jean-Pierre Raffarin – aujourd’hui ardent défenseur des collectivités territoriales – et que soutenait déjà l’actuelle majorité qui a entériné ce principe !
En résumé, c’est donc à la majorité de 2004 que l’on doit le premier coup porté aux collectivités territoriales, et c’est bien la même majorité qui continue aujourd’hui de creuser la tombe de la décentralisation. Au lieu de faire semblant de se disputer avec lui par médias interposés, la ministre de l’économie devrait plutôt remercier M. Raffarin de lui permettre aujourd’hui de poursuivre l’asphyxie des collectivités locales.
Les élus locaux ne s’y tromperont pas, mes chers collègues ! La majorité d’aujourd’hui est bien la même qu’hier. La seule différence est que, désormais, la droite assume sans scrupule et sans tabou sa volonté recentralisatrice et autoritaire.