En tant que rapporteur spécial de la mission « Sports, jeunesse et vie associative », je tiens, en premier lieu, à vous remercier, monsieur le ministre, pour le très bon état d'esprit manifesté par vos services dans la préparation de ce débat.
En effet, votre administration m'a fourni, dans des délais raisonnables, non seulement des chiffres sur l'exécution du budget, mais aussi, et surtout, plusieurs éléments très intéressants concernant les résultats de votre ministère en 2005, dont certains alimenteront utilement notre discussion.
Cela préfigure bien ce que la commission des finances attend, à l'avenir, du débat sur le projet de loi de règlement en « mode LOLF ».
Une telle attitude s'inscrit d'ailleurs dans une certaine continuité, puisque votre ministère, dont le périmètre se limitait, à l'époque, aux sports, s'était porté volontaire pour être un des premiers départements ministériels à expérimenter la LOLF. Et je crois aussi, monsieur le ministre, que cela traduit une culture de la performance propre au domaine sportif dont vous vous occupez, et que vous insufflez à vos services.
Cependant, je manquerais à mon rôle si je n'accompagnais l'éloge d'un regard parfois critique sur l'exécution du budget, et même sur votre performance, monsieur le ministre. Le temps qui m'est imparti me contraindra à limiter mon propos à quatre thèmes, mais je ne doute pas que mes collègues en aborderont bien d'autres.
Premier thème, un programme « Jeunesse et vie associative » encore défaillant. Tout d'abord, en tant que rapporteur spécial, je suis frappé par le déséquilibre entre les deux piliers de votre ministère, c'est-à-dire entre ce que nous appelons désormais les programmes opérationnels de votre mission.
Je m'explique. Le premier programme de votre mission, celui qui concerne les sports, apparaît bien structuré, avec des objectifs et des indicateurs de performance clairs. De plus, votre organisation et vos systèmes d'information vous ont permis, dès cette année, de renseigner de façon précise un nombre significatif d'indicateurs. Mais, hélas ! l'autre programme, celui qui a trait à la jeunesse et à la vie associative, n'est pas au niveau, ce que la Cour des comptes a souligné dans son rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l'État pour l'exercice 2005.
D'une part, les indicateurs ne sont pas représentatifs de la performance de votre ministère. D'autre part, les procédures de remontée des informations de vos services déconcentrés pour le renseignement de ces indicateurs ne sont pas encore définies.
Dans ces conditions, pour cette partie « Jeunesse et vie associative », vous n'avez pas, monsieur le ministre, les moyens d'exercer vraiment votre mission de pilotage, et le Parlement n'a pas les moyens de se faire un jugement sur votre efficacité, ce qui va à l'encontre des principes de la LOLF.
Aussi, et ce sera ma première question, serai-je heureux d'entendre ce que vous comptez faire pour remédier à cette situation le plus tôt possible.
Deuxième thème, un budget « variable d'ajustement ». Ensuite, et même si vous n'en êtes pas responsable, monsieur le ministre, je constate qu'en 2005 le budget que vous a accordé le Parlement a encore subi des gels importants : plus de 48 millions d'euros, soit environ 9, 4 % de régulations de crédits.
La cause de certaines de ces régulations prêterait à sourire si elles n'affectaient aussi gravement les crédits du sport, de la jeunesse et de la vie associative : ainsi en est-il des quelque 800 000 euros de contribution de votre ministère à l'organisation du référendum du 29 mai 2005, dont le rapport avec la mission dont vous avez la charge semble pour le moins lointain...
Mais, plus encore que le chiffre des gels de crédits, c'est le caractère récurrent de cette pratique qui ne peut me satisfaire en tant que rapporteur spécial. En effet, ces régulations avaient déjà représenté 8, 9 % de vos crédits en 2004 et 8 % de votre budget en 2003.
Je voudrais donc, d'une part, affirmer avec force qu'aucun budget ne saurait servir de variable d'ajustement commode. Dans la nouvelle architecture, chaque budget correspond à une mission de l'État, qu'il lui revient de remplir dans les meilleures conditions ! Et je pense que vous me rejoindrez sur ce point, monsieur le ministre.
Je voudrais, d'autre part, dire ma perplexité de commissaire des finances. Il me semble que ces gels systématiques, dans de telles proportions, ne favorisent pas vraiment la sincérité des « justifications au premier euro » que vous soumettez au Parlement à l'automne, dans le cadre du projet de loi de finances.
Cela est d'autant plus vrai que, depuis que l'établissement public CNDS a succédé au compte d'affectation spéciale FNDS, votre budget ne peut plus compter sur les contributions de ce dernier, qui pouvaient parfois compenser quelque peu les régulations budgétaires que vous subissiez.
Je souhaiterais donc, et cela sera ma deuxième question, monsieur le ministre, entendre votre position et vos réflexions sur ce problème.
Troisième thème, les difficultés financières de certaines fédérations sportives. Après l'architecture, après les chiffres, j'en arrive à présent à votre action et à la performance de votre ministère pour l'année 2005.
J'avais, dans mon dernier rapport spécial, insisté sur la nécessité de renforcer la vigilance à l'égard de la santé financière et de la gouvernance des fédérations sportives. J'avais notamment cité les cas des fédérations de ski, de sports de glace ou d'équitation.
Aussi attendais-je avec impatience de voir l'évolution des indicateurs qui rendent compte du nombre de fédérations sportives en difficulté financière, que vous avez très pertinemment inclus dans votre projet annuel de performances.
Je rappelle qu'en 2004, sur quatre-vingt-cinq fédérations unisports, neuf étaient en « situation financière fragile » et sept en « situation financière dégradée ». En outre, onze fédérations présentaient un taux d'autofinancement inférieur à 50 %. Hélas ! si j'ai souligné la qualité des documents que vous m'avez fait parvenir, ces indicateurs-là n'étaient, semble-t-il, pas actualisés. Personne n'est parfait !
Je me tourne donc vers vous pour vous soumettre un nouveau questionnement. Pouvez-nous nous préciser les grandes lignes de votre action en la matière ? Et, de façon complémentaire, pouvez-vous nous indiquer ce qui s'est passé depuis 2004 ? Certaines fédérations en difficulté ont-elles redressé la barre ? À l'inverse, d'autres fédérations connaissent-elles ce type de problème ?
Quatrième thème, le retard pris pour la mise en place du suivi médical des sportifs. Le dernier sujet que j'évoquerai sera moins financier et portera sur le suivi médical des sportifs de haut niveau et des espoirs.
Comme vous le savez, cette question est importante à la fois pour la protection de la santé des sportifs et pour préserver l'éthique des compétitions.
D'après vos services, en 2005, 69 % des sportifs de haut niveau et 59 % des espoirs ont bénéficié d'un tel suivi. Certes, c'est mieux qu'en 2004, mais c'est moins bien que la prévision de votre ministère pour 2005 ; en effet, cette année-là, 77 % des sportifs de haut niveau et 70 % des espoirs auraient dû être suivis.
Aussi, je vous poserai une dernière question, qui sera double. D'une part, l'objectif que vous vous êtes fixé et selon lequel, en 2008, l'ensemble des sportifs de haut niveau et des espoirs pourront bénéficier du suivi médical est-il remis en cause ? D'autre part, ce retard a-t-il une origine purement technique, ou est-il dû à d'autres facteurs, par exemple, le moindre volontarisme de certaines fédérations ?
Le temps m'étant compté, je m'en tiendrai là. Toutefois, mes collègues, notamment M. le rapporteur pour avis, auront sans doute d'autres questions à vous poser.
Monsieur le ministre, je conclurai mon propos en vous renouvelant mes remerciements pour la qualité de la collaboration de vos services.
La commission des finances du Sénat est convaincue que la loi de règlement ne doit pas se résumer à une discussion de chiffres entre experts. Elle doit devenir le moment de l'évaluation des résultats de la gestion des ministres, le « moment de vérité budgétaire », selon l'expression du président Arthuis.
Avec un an d'avance, vous nous avez aidés à aller dans cette voie : grâce à vous, pour prendre une métaphore sportive, nous allons « transformer l'essai » !
En conclusion, je voudrais me réjouir du remarquable parcours de l'équipe de France... de rugby des moins de vingt et un ans, devenue championne du monde, la semaine dernière !