Cet adage du droit romain signifie que la prescription ne court pas contre celui qui ne peut valablement agir. Je tiens à rappeler, à cet égard, que l'immunité ainsi définie vise à protéger non pas l'homme, mais la fonction. Cette protection est d'autant plus complète que les limites dans le temps en sont clairement définies.
L'Assemblée nationale a également renforcé l'équilibre de la procédure de destitution, prévue à l'article 68 - vous l'avez d'ailleurs indiqué, monsieur le garde des sceaux, en approuvant ces modifications -, en supprimant l'empêchement du Président de la République après l'adoption par les deux assemblées d'une proposition de réunion de la Haute Cour, en réduisant à un mois, au lieu de deux, le délai à l'issue duquel celle-ci doit statuer, et surtout - c'est important - en prévoyant que la réunion de la Haute Cour et la destitution doivent être décidées à la majorité des deux tiers des membres composant l'assemblée concernée et non à la majorité absolue. Quel progrès ! Qu'auraient dit, si nous en étions restés à la majorité absolue, ceux qui voient en cette réforme un coup politique ?
L'empêchement pouvait apparaître comme une sanction, préjugeant la décision finale de la Haute Cour. Le raccourcissement du délai à l'issue duquel la Haute Cour doit avoir statué est la contrepartie du maintien en fonction du Président de la République.
La majorité des deux tiers finalement retenue par les députés paraît offrir les garanties nécessaires à la mise en oeuvre d'une procédure dont l'ultime objet est de permettre à la représentation nationale de mettre fin au mandat de l'élu de la nation tout entière.
Ce renforcement de la majorité nécessaire au déclenchement de la procédure évitera le détournement de ce dernier à des fins partisanes. L'une des principales objections de M. Badinter sur les propositions de la commission Avril - je partageais l'avis de notre collègue à cet égard - portait d'ailleurs sur la majorité simple.
L'Assemblée nationale a enfin souhaité interdire toute délégation de vote pour l'ensemble des scrutins prévus par l'article 68. De fait, la décision de réunir la Haute Cour comme celle de destituer le chef de l'État supposent, par leur gravité, que ne prennent part au vote que les parlementaires présents.
En définitive, les modifications adoptées par l'Assemblée nationale confortent l'équilibre d'une procédure de destitution conçue comme la contrepartie indispensable d'une protection fonctionnelle très étendue.
C'est pourquoi la commission des lois vous invite, mes chers collègues, à adopter ce projet de loi constitutionnelle sans modification.