Il s’agit d’un amendement symboliquement très important.
La révision constitutionnelle du 8 juillet 1999 avait permis, en modifiant les articles 3 et 4 de la Constitution, d’inscrire explicitement qu’il était d’ordre constitutionnel de « favoris[er] l’égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux et aux fonctions électives ».
La loi du 6 juin 2000 tendant à favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, qui avait suivi, avait ainsi prévu un dispositif d’incitations et de contraintes pour accroître la proportion de candidatures féminines à la plupart des élections. Nous, socialistes, avons œuvré pour une meilleure représentation des femmes en politique.
À l’époque, déjà, c’est au Sénat que les plus grandes réticences s’étaient exprimées, et pour cause : les sénateurs de la majorité, alors dans l’opposition, estimaient qu’il n’était pas « nécessaire d’imposer des contraintes aussi rigides sur la composition des listes ». On pouvait lire, dans le rapport de Guy Cabanel, que « l’obligation de composition alternée des listes risquait de conduire à imposer l’égal accès plus qu’à le favoriser ».
L’opposition au gouvernement avait alors tenté d’amoindrir la portée de la réforme constitutionnelle. Aussi, il n’est pas étonnant que les réticences, une fois encore, s’expriment sur les travées de la droite.
La loi du 31 janvier 2007 tendant à promouvoir l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives a permis d’améliorer une nouvelle fois la parité politique en France. Elle s’applique désormais aux membres des exécutifs régionaux et municipaux ainsi qu’à l’élection de l’Assemblée des Français de l’étranger.
Si les scrutins de liste se prêtent aisément à la promotion de la parité, celle-ci est en revanche plus difficile à favoriser dans les scrutins uninominaux. Ainsi, les conseils régionaux représentent aujourd’hui les seules assemblées, avec les conseils municipaux des villes de plus de 3 500 habitants, où la parité est stricte, grâce au scrutin de liste. Malheureusement, il ne pourra plus en être de même avec le nouveau projet de loi. Les conseillers territoriaux, issus, pour 80 % d’entre eux, de cantons, ne seraient pas astreints à des règles de représentativité paritaire, à l’exception du choix du suppléant.
Nous souhaitons prévenir un retour en arrière, car force est de constater que, malgré l’existence d’un dispositif juridique étoffé permettant d’assurer l’égalité formelle entre les femmes et les hommes, les inégalités persistent et ne se réduisent que très lentement.
Nous considérons qu’il faut aller au-delà d’une simple égalité de principe : il faut réaliser l’égalité dans les faits.
D’ailleurs, n’y aura-t-il pas matière à non-conformité avec les principes de valeur constitutionnelle dès lors que vous choisissez de « mettre en recul » – c’est-à-dire dans une situation de législation « moins favorable » – une disposition de représentativité du corps électoral et de légitimité par votation ?
M. le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales a affirmé plusieurs fois, par voie de presse, que cette réforme allait faire progresser la parité dans nos assemblées locales à partir de mars 2014, et que, de ce fait, elle ne pouvait être considérée comme un recul. Il a déclaré que ce projet de loi prévoit « automatiquement 50 % de femmes de plus dans les conseils municipaux des 13 000 communes de 500 à 3 500 habitants », dont les membres seront élus sur des listes bloquées comprenant obligatoirement une moitié de femmes. Il a même affirmé que cela correspondait à « environ 40 000 conseillères municipales de plus ».
Est-ce à dire, monsieur le ministre, que les femmes ne seraient compétentes que pour les tâches communales, cependant que les hommes s’occuperaient des affaires de plus grande importance ?