Puisqu'il s'agit d'un débat d'orientation, je me concentrerai sur l'exposé des motifs du projet de loi qui affiche un double objectif : augmenter la production pour renforcer la sécurité alimentaire, rendre nos produits plus compétitifs. Mais c'est dans les pays en voie de développement qu'il faut accroître la production, qui n'a jamais suffi à satisfaire la demande interne : Edgar Pisani et moi-même avons animé un colloque à ce sujet en ces murs. Cela suppose que les pays du Nord renoncent à un type d'élevage qui fonctionne comme un aspirateur à protéines importées, empêchant dans les pays du Sud le développement des cultures vivrières. En outre, l'augmentation indéfinie de la production ne sert qu'à accroître les excédents déversés sur les marchés du Sud, ruinant ainsi les exploitations locales et entretenant la malnutrition.
J'en viens au renforcement de la compétitivité. En réduisant les coûts, vous voulez rendre à notre industrie agroalimentaire son leadership. Or la recherche de la compétitivité-prix conduit à une impasse. Au plan économique, elle nous confine dans des secteurs agricoles où nous partons battus : les pays du groupe de Cairns auront toujours des coûts de production inférieurs aux nôtres. Au plan social et territorial, elle conduit à la diminution du nombre de paysans et à la désertification des campagnes. Au plan environnemental, elle favorise un type d'agriculture incompatible avec les objectifs du Grenelle. Il est vrai que l'on dit en haut lieu que « l'environnement commence à bien faire »...