Ce budget, dans une continuité à laquelle l'État ne nous a pas habitués, montre clairement la priorité accordée à l'enseignement supérieur et à la recherche : de 2007 à 2011, il enregistre une progression 18,4 %, contre 7,3 % seulement pour le budget général de l'État. Ainsi, seront concrétisées les réformes structurelles qui commencent à porter leurs fruits. Néanmoins, la réduction des crédits de paiement pour la période 2011-2013 me préoccupe. A périmètre constant, ceux-ci diminuent de 0,88 % en 2012 et de 0,80 % en 2013, contre une hausse de 1,89 % et de 1,99 % pour le budget général. Cette évolution est toutefois, tempérée par les moyens supplémentaires dégagés dans le cadre de l'emprunt national.
Pour 2011, le programme 150 relatif aux formations supérieures et à la recherche universitaire, qui concentre près de la moitié des crédits de la mission, augmente de 1,02 % en crédits de paiement par rapport à 2010 tandis qu'il diminue de 0,14 % en autorisations d'engagement.
L'évolution de ces crédits est marquée par la poursuite de l'accession à l'autonomie de 31 universités au 1er janvier 2011, qui entraîne un transfert de leur masse salariale et des dépenses de fonctionnement. A cet égard, la Conférence des présidents d'université s'inquiète des modalités de prise en compte du « glissement vieillesse technicité » (GVT) jusqu'alors globalisé au sein du budget de l'État. Lors de son audition le 2 novembre dernier, la ministre a indiqué que les universités ayant un GVT en expansion seraient aidées pendant une période transitoire. Je salue la cohérence de cette position : l'État assume sa part tandis que les universités devront, à terme, gérer les conséquences de leurs décisions.
L'opération Campus, rappelons-le, est financée par les intérêts produits par la dotation exceptionnelle de 3,7 milliards provenant de la vente par l'État d'une partie des titres d'EDF en 2007, complétés à concurrence de 1,3 milliard par l'emprunt national de 2010. Dans l'attente de la finalisation des partenariats public-privé - à ce sujet, le Sénat a adopté la proposition de loi, co-signée par M. Adnot et moi-même, le 17 novembre dernier - les 270 millions d'intérêts de cette dotation sont employés pour ouvrir 58 chantiers liés à la vie étudiante - cafétérias, espaces verts, bibliothèques - dont les universités seront maîtres d'ouvrage, le plus souvent dans le cadre des pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES).
Le programme 231 « Vie étudiante » enregistre une hausse de 3,45 % de ses crédits de paiement. Je me réjouis que le Gouvernement, face aux réactions des parlementaires, ait renoncé à une alternative entre aide personnalisée au logement et demi-part de l'impôt sur le revenu : une telle décision aurait défavorisé les étudiants issus des classes moyennes.
Sans insister sur la priorité accordée au logement étudiant ces dernières années, dont Mme la ministre a longuement parlé, notons que la baisse des dépenses d'investissement de 60 % en autorisations d'engagement et de 18,7 % en crédits de paiement en 2011 s'explique par l'accélération des travaux immobiliers qu'a permise le plan de relance. J'appelle de mes voeux la mise en place d'une garantie des risques locatifs, dont le Gouvernement annonce l'expérimentation. De fait, seul le parc locatif privé peut couvrir l'essentiel des besoins en matière de logement.
La totalité de l'effort budgétaire du programme, soit 127 millions, est consacrée aux bourses : 36 millions pour les bourses sur critères sociaux, 78 millions pour la mise en place progressive du 10e mois de bourse en contrepartie de l'allongement effectif de l'année universitaire, 13 millions pour les aides au mérite. En contrepartie, les économies à hauteur de 61,1 millions en autorisations d'engagement et de 57,7 millions en crédits de paiement, se traduisent par une regrettable baisse de 25,7 % des aides à la mobilité, de 23 % des crédits du fonds national d'aide d'urgence et de 3 % de la subvention au réseau des oeuvres. N'aurait-il pas mieux valu limiter la progression des aides au mérite ? De surcroît, je m'interroge sur les modalités du rapprochement entre centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) et les PRES : ne conviendrait-il pas de transformer les CROUS en agences territorialisées qui offriraient une palette plus large de services aux étudiants comme à l'étranger ?
Le décloisonnement des acteurs de la recherche, qui s'est concrétisé par la simplification des modes de gestion des unités mixtes de recherche, se poursuit par des accords entre la Conférence des présidents d'université et des organismes publics de recherche. Confortons cette évolution : dans son dernier rapport annuel, l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche préconisait de renforcer le pouvoir d'orientation des conseils scientifiques et la souplesse de gestion des laboratoires.
Dans mon rapport écrit, j'évoque les conclusions du colloque sur les classements internationaux des universités, intitulé « Oublier Shanghai », organisé par notre commission avec la délégation du Sénat à la prospective, le 6 mai 2010. La réalisation des classements est un véritable chantier scientifique européen, qui doit intégrer des résultats tels que le taux d'insertion professionnelle, les brevets ou la contribution à la croissance du pays, auquel non seulement l'Observatoire des sciences et techniques mais aussi les chercheurs doivent participer activement. Je demanderai à la ministre de préciser les actions engagées à ce titre.
Je fais également un point sur l'évaluation du plan « Réussite en licence » destiné à remédier au taux d'échec trop élevé des étudiants. Le financement de ce plan représente un effort cumulé de 730 millions sur la période 2008-2012, dont 211 millions en 2011 - soit une hausse de 41,3 millions. Pour une orientation active, il faut harmoniser les indicateurs de performance des universités en matière d'insertion professionnelle. Beaucoup reste à faire pour transmettre des informations de qualité aux étudiants et à leurs familles, même si de nombreuses universités en ont pris conscience.
J'ai souhaité établir aussi un premier bilan des propositions que Philippe Adnot et moi-même avons avancé dans notre rapport de juin 2010 sur la dévolution du patrimoine immobilier des universités. J'y insiste sur notre vigilance pour que l'enseignement supérieur reste accessible à tous, notamment par le biais d'établissements de proximité. Et je propose de demander à la ministre de préciser la stratégie envisagée afin que les universités de proximité soit « tirées » par les universités les plus dynamiques et les PRES, et qu'elles trouvent pleinement leur place dans notre système en mutation.
J'y évoque un sujet d'actualité : les recours contre les décrets relatifs au statut des enseignants-chercheurs. Ces textes étant déclarés conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel, le Conseil d'État est en train de statuer sur les requêtes dont il a été saisi.
J'y regrette l'insuffisance des enquêtes d'insertion professionnelle des étudiants. En effet, l'enquête sur les diplômés de master 2007, rendue publique en octobre dernier, présente des failles et ses conclusions sont peu utilisables. Je m'étonne d'un critère d'insertion 30 mois après l'obtention du diplôme. J'interrogerai la ministre sur les pistes d'amélioration envisagées.
Enfin, j'y insiste sur l'importance du Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes qui finance les associations étudiantes. La charte relative à « la dynamisation de la vie associative liée aux universités » élaborée au printemps 2009, qui a vocation à faire reculer l'opacité dans l'emploi du fonds concerné, n'a toujours pas été signée. En séance, je demanderai à la ministre des informations complémentaires.
Pour conclure, j'invite la commission à donner un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission.