Intervention de Christophe Béchu

Réunion du 8 décembre 2011 à 9h00
Contrôle des armes — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Christophe BéchuChristophe Béchu :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, cher Antoine Lefèvre, mes chers collègues, l’inconvénient, lorsqu’on est relativement d’accord sur un texte, c’est que l’on utilise les mêmes références et que l’on mobilise les mêmes arguments. Je ne rappellerai donc ni les faits divers dramatiques qui sont récemment survenus à Vitrolles, Marseille, Lille et Saint-Ouen ni les chiffres absolument stupéfiants sur l’augmentation du nombre de saisies d’armes dans ce pays : 2 710 saisies d’armes à feu en 2010 et près de 3 500 pour l’année en cours.

La garantie de la sécurité et de l’intégrité de chaque citoyen constitue un droit fondamental. C’est pourquoi l’usage, la détention et la commercialisation d’armes sont devenus un enjeu primordial dans la définition de l’organisation de l’espace public. Dès lors, il est nécessaire de renforcer le dispositif juridique en vigueur sur ces questions.

Pour y parvenir, la mission d’information de l'Assemblée nationale sur les violences par armes à feu et l’état de la législation, dans son rapport du mois de juin 2010, a souligné le besoin de rénover le système actuel de classification des armes, pointant son manque de clarté sur la dangerosité réelle des armes classées et insistant sur le fait que le contrôle actuel effectué par les pouvoirs publics est à la fois complexe et insuffisant.

L’Assemblée nationale a discuté d’une proposition de loi relative à l’établissement d’un contrôle des armes moderne, simplifié et préventif qui nous parvient aujourd'hui. Ce texte dépasse largement les clivages politiques et je me réjouis de cette logique consensuelle pour dénoncer l’obsolescence de l’encadrement législatif actuel et convenir de la nécessité d’une simplification pour améliorer la sécurité de nos concitoyens.

Cette proposition de loi vise donc à remplir deux objectifs : rationaliser le dispositif en vigueur pour le rendre plus efficace ; renforcer les garde-fous attachés à ce système pour garantir son effectivité.

Le premier enjeu majeur de ce texte réside dans la volonté de gagner en transparence et en lisibilité par rapport au dispositif actuel. En effet, il s’agit avant tout d’établir une classification des armes en rapport avec leur dangerosité. Réduites désormais à quatre, ces nouvelles catégories offrent davantage de cohérence, car elles sont rattachées à des obligations qui leur sont propres. Chacun peut aisément comprendre que la détention d’armes de catégorie C requiert moins de garanties que la détention d’armes de catégorie B. En outre, cette classification nous permet de nous rapprocher du modèle posé par la directive européenne du 18 juin 1991.

Dans un même souci d’établir un régime juridique adapté à la dangerosité avérée des armes concernées, l’article 2 de la proposition de loi modifie le champ d’application des armes susceptibles d’être qualifiées d’« armes historiques et de collection », avec un principe, le classement en catégorie D, et, surtout, une date unique de référence pour bénéficier d’une telle qualification : le 1er janvier 1900. Jusqu’à maintenant, le ministère de la défense retenait des dates différentes : pour le modèle, 1870, et pour la fabrication, 1892.

Nous nous réjouissons également de la disposition, introduite par la commission des lois, simplifiant la disposition sur les reproductions d’armes, et qui retient le même millésime de 1900, en incluant toutefois une clause liée à la dangerosité des munitions à étui métallique.

Nous ne pouvons que nous féliciter d’une nouvelle rédaction qui vise à éviter des restrictions excessives du législateur à l’égard des collectionneurs.

Un équilibre a été trouvé, grâce auquel la sécurité publique est garantie par un mécanisme d’enregistrement et notre patrimoine national préservé.

Pour conforter l’intelligibilité et la transparence du dispositif normatif, les conditions d’acquisition et de détention d’armes posées aux articles 3 et 5 du texte ont été, d’une part, renforcées et, d’autre part, clairement définies, avec la reconnaissance d’un véritable statut de collectionneur, que j’évoquais à l’instant.

Toutefois, seules les personnes jugées en pleine possession de leurs capacités mentales et psychiques seront reconnues aptes à la détention d’une arme. Encore devront-elles répondre à un certain nombre d’obligations graduées et proportionnées, en fonction, là aussi, de la dangerosité de l’arme concernée. Nous ne pouvons qu’approuver ces nouvelles définitions, équilibrées et progressives.

La simplification et la rationalisation de la réglementation constituaient le premier enjeu de la proposition de loi ; le second porte sur l’application effective du premier.

Pour garantir l’effectivité de la nouvelle classification, il est en effet impératif d’accompagner ce dispositif d’un certain nombre d’outils juridiques visant à priver, temporairement ou définitivement, de la possibilité d’acquérir ou de détenir une arme des personnes qui ne se sont pas montrées capables d’en mesurer suffisamment la dangerosité.

La proposition de loi comprend ainsi une série d’articles destinés à rendre obligatoire le prononcé de peines complémentaires d’interdiction de détenir ou de porter une arme soumise à autorisation, d’interdiction de détenir un permis de chasser ou encore de confiscation des armes détenues par l’intéressé.

Il s’agit d’inciter les juridictions à prononcer une sanction souvent méconnue, mais qui peut s’avérer particulièrement pertinente lorsque la personne condamnée a commis certains crimes ou délits dénotant un comportement manifestement incompatible avec la détention d’une arme.

Le texte de la commission des lois, dont je tiens, à cet instant, à saluer les travaux approfondis, notamment ceux de son rapporteur, Antoine Lefèvre, contribue à rendre systématique le prononcé de ces peines, afin d’empêcher la réitération ou la commission d’infractions plus graves, en interdisant à une personne condamnée d’acquérir ou de détenir des armes. Des tragédies pourront ainsi être évitées et nous en soutenons donc pleinement l’objectif.

Par ailleurs, dans le but de renforcer la sécurité publique et notamment d’améliorer l’efficacité de la répression des trafics d’armes, les articles 25 à 34 du texte durcissent le régime des sanctions pénales.

Mettre en adéquation ce régime avec la gravité des infractions commises a pour objectif de responsabiliser les personnes utilisatrices d’armes. Il faut rappeler que l’acquisition et la détention d’armes n’est pas une activité comme les autres. Il est donc du devoir du législateur de souligner la nécessité de poursuite et de répression des auteurs de crimes et de délits en la matière.

En outre, plusieurs dispositions visent à renforcer les dispositions pénales du code de la défense en ce qui concerne la violation de ses prescriptions en matière de fabrication, de commerce, de port et de transport d’armes.

Enfin, je souhaite signaler que le texte qui nous est soumis entend améliorer la connaissance et le suivi des armes présentes sur le territoire français, ce dont nous ne pouvons que nous satisfaire.

En conclusion, mes chers collègues, je me permettrai de rappeler que les principaux détenteurs légaux d’armes à feu que sont les chasseurs et les tireurs sportifs font preuve aujourd’hui d’un esprit de responsabilité. Leurs activités sont bien encadrées par les fédérations de chasse ou les fédérations sportives auxquelles ils adhèrent. C’est pourquoi nous souhaitons, par l’adoption de ce texte, améliorer les dispositifs existants, renforcer la lutte contre le trafic et la détention d’armes illégale, sans attenter aux usages de la chasse, du tir sportif ou de collection, dès lors qu’ils s’inscrivent réellement dans ces perspectives.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP soutiendra le texte, dans la rédaction proposée par la commission des lois.

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