L’article 1er a été supprimé en commission, et nous nous en félicitons.
En effet, le texte initial du Gouvernement relevait de la supercherie dans la mesure où il donnait à croire que les collectivités, en maintenant un niveau de constructibilité trop bas, empêcheraient la réalisation de logements et seraient donc responsables de la crise du logement.
Une telle approche est pour le moins contestable.
Le véritable problème tient au désengagement de l’État du domaine du logement, qui se traduit par un assèchement des crédits destinés aux aides à la pierre et une limitation draconienne de la participation des pouvoirs publics au financement de programmes de logements sociaux.
Ainsi, le financement des prêts locatifs aidés d’intégration est passé de 10 760 euros à 9 600 euros dans la dernière loi de finances. Ce montant est très insuffisant, sachant que la construction d’un logement coûte, en moyenne, 150 000 euros.
La substitution à l’article 1er de l’article 1er A ouvre d’autres pistes tout à fait pertinentes pour répondre à la crise du logement, notamment la mise à disposition gratuite de terrains ou d’immeubles appartenant à l’État.
Une telle mesure apparaît justifiée lorsque l’on sait que si des logements se construisent aujourd’hui, ce n’est pas grâce à votre action, monsieur le ministre, mais bien parce que les collectivités interviennent et financent lourdement les programmes de construction. À titre d’exemple, nos communes rurales vendent leurs terrains viabilisés à perte, sinon elles ne trouvent pas preneur.
Pour répondre aux besoins, plutôt que de stimuler l’offre privée de logement, il faut favoriser la production de logements publics accessibles à tous. À cet égard, l’action des collectivités est déterminante ; l’article 1er A constitue une piste intéressante pour la soutenir. En effet, la faiblesse des aides à la pierre, les ponctions opérées sur les ressources des offices d’HLM afin de financer l’ANRU, la hausse du taux de TVA pesant sur les travaux plongent les bailleurs sociaux et les collectivités dans une situation inextricable, qui ne leur permet pas de fournir un effort de construction de logements sociaux qui soit à la hauteur des besoins. La semaine dernière, l’office d’HLM des Côtes-d’Armor m’a adressé un courrier faisant état de ces difficultés.
Il arrive aussi fréquemment aux collectivités locales de céder des terrains pour un euro symbolique aux offices d’HLM départementaux afin que ceux-ci y construisent des logements sociaux. Nous montrons ainsi l’exemple à l’État.
Le nombre de personnes pouvant encore se loger dans le privé diminuant chaque jour en raison de l’envolée des loyers, la situation ne risque pas de s’arranger et la file des demandeurs d’un logement social n’est pas près de se réduire.
Si cette situation est, pour partie, la conséquence de la crise qui a entraîné une perte de pouvoir d’achat pour nos concitoyens, elle est également liée à la spéculation implacable qui sévit dans le secteur du logement et permet des hausses des loyers vertigineuses dans le privé.
Il nous faut donc envisager les moyens concrets de retrouver des marges de manœuvre pour financer la construction de logements publics, notamment par le biais des PLAI et des PLUS.
Je ferai d’abord observer que, parmi les quatre postes constitutifs du prix de revient d’un logement neuf – le foncier, les études, la construction et les intérêts d’emprunts –, deux ne correspondent à aucun travail ni à aucune production matérielle. La valeur du foncier et les intérêts d’emprunts sont purement spéculatifs. Nous pouvons donc actionner deux leviers pour favoriser la construction de logements : il faut agir pour inverser la tendance en matière d’évolution du coût du foncier, préoccupation à laquelle répond pour partie l’article 1er A, et obtenir une réduction de la charge des intérêts d’emprunts.
Sur ce second point, force est de constater que, comme cela a été rappelé précédemment, tous les dispositifs fiscaux d’accompagnement de l’immobilier ont visé à casser la notion même de « parc social », à banaliser celui-ci pour l’intégrer dans la sphère marchande de l’immobilier privé et à encourager dans le même temps l’investissement rentier.
Toutes ces évolutions ont conduit l’État à financer toujours plus l’accession à la propriété et l’investissement locatif à but lucratif, au détriment de la construction sociale et solidaire.
Pourquoi ne pas modifier la destination de ces aides fiscales en instaurant un prêt à taux zéro pour la construction sociale ? §(Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.) Ce dispositif pourrait être mis en œuvre par la Caisse des dépôts et consignations, à condition de réaffirmer la nécessaire centralisation totale des ressources du livret A par cet organisme.