Je pourrais arrêter ici mon propos… Mais, ne craignant pas de vous lasser, je vous présenterai quelques observations portant sur une douzaine d’articles sur lesquels, quel que soit le vote du Sénat tout à l’heure – monsieur le secrétaire d’État, on ne peut préjuger de rien… –, j’aimerais que nous prenions date.
Tout d’abord, un ensemble d’articles touchent à la dépénalisation de la vie des affaires : ils visent à remplacer les peines d’emprisonnement, qui ne sont jamais prononcées, ainsi que les amendes par des injonctions civiles et des nullités.
Le référé civil fonctionne bien, avec des astreintes très lourdes pour les entreprises. Toutefois, la proposition de loi reste en deçà des propositions du groupe de travail présidé par l’ancien président de la Cour d’appel de Paris, Jean-Marie Coulon.
J’ai envisagé de rétablir les peines d’emprisonnement et d’amende pour les délits graves et intentionnels, afin de faire peser sur les chefs d’entreprise l’opprobre qui s’attache à de telles peines, même prononcées avec sursis.
Mais j’ai finalement entendu les représentants des entreprises : au cours de leur audition, ils nous ont fort curieusement expliqué qu’ils préféraient souvent les peines d’emprisonnement, jamais exécutées, ou les peines d’amende, vite payées, vite oubliées, aux astreintes ou aux nullités, dont les conséquences juridiques sont très lourdes pour leurs entreprises…
Une autre mesure contestable est la brèche ouverte – certes au profit des PME – dans l’interdiction faite aux administrateurs d’une société dont ils n’ont pas été préalablement les salariés de signer avec elle un contrat de travail. Pour ma part, je suis tout à fait hostile à cette mesure : je pense qu’il y a un conflit d’intérêts latent dans le fait qu’un administrateur d’une société en soit également le salarié.
La proposition de loi supprime aussi toute obligation de dépôt du rapport de gestion pour les sociétés en nom collectif, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés anonymes, à l’exception des sociétés cotées.
Or le critère de la cotation, employé tout au long de la proposition de loi, n’est pertinent dans aucun des cas : pourquoi un traitement différent serait-il réservé aux sociétés cotées et aux sociétés non cotées ? Les problèmes dont il est question sont sans rapport avec le fait que les sociétés soient cotées ou non !
Surtout, je désapprouve sur le fond la suppression du rapport de gestion, qui porte atteinte à la transparence des affaires.
L’article 10 de la proposition de loi revient sur les dispositions relatives à la responsabilité sociale et environnementale des entreprises de la loi portant engagement national pour l’environnement, dite Grenelle 2.
En effet, il reporte à 2012 l’entrée en vigueur des obligations pesant sur les entreprises, le décret en Conseil d’État prévu par la loi n’ayant pas encore été pris… En cette occasion, le Gouvernement se prévaut de sa propre turpitude !