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Interventions sur "récidive" d'Alima Boumediene-Thiery


24 interventions trouvées.

Monsieur le président, madame la ministre d’État, mes chers collègues, le texte qui nous est présenté aujourd’hui est le quatrième sur la récidive en quatre ans, comme l’a rappelé M. le rapporteur. Officiellement, ce projet de loi vise à mettre en œuvre un dispositif de rechange, à la suite de la censure du Conseil constitutionnel relative à la rétention de sûreté. En dépit des réserves claires du Conseil constitutionnel, le Gouvernement, aidé en cela par le rapport Lamanda, a entrepris d’aller au bout de sa logique. Il en résulte, après...

...iciable non seulement au travail législatif, mais également à la qualité de la loi. À ce rythme, nous ne serons bientôt plus un Parlement, mais un simple appareil d'enregistrement ! Aujourd'hui, toujours dans l'urgence, vous nous présentez un texte qui, au détour d'un seul article, remet en cause tous les principes fondamentaux de notre droit pénal. Encore un texte relatif à la prévention de la récidive qui prône la répression au détriment de la prévention ! Encore une tentative déplorable de surfer sur l'émotion des Français pour installer une politique de l'enfermement ! Encore un affichage médiatico-législatif qui n'apporte aucune réponse au véritable problème ! Ce projet de loi marque à lui seul un revirement sans précédent dans notre conception du droit pénal. Il ouvre une brèche qui devie...

...e leur champ de compétence. Dès lors que l'injonction de soins devient une obligation, un transfert des responsabilités du juge vers le médecin s'opère, et cela dans une indifférence totale vis-à-vis de la déontologie médicale. Penser que l'expert peut à lui seul décider d'une injonction de soins, c'est miser de manière aveugle et simpliste sur les vertus des soins imposés pour lutter contre la récidive. Un second point mérite toute notre attention : la suppression de l'exigence d'une double expertise pour certains crimes. La double expertise psychiatrique n'est pas, dans ce domaine, une procédure factice : elle permet une meilleure appréhension de la nécessité de l'injonction de soins et, en l'absence d'une concordance des expertises, rend caduque toute tentative d'imposer des soins à une per...

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, chers collègues, bien que nous souscrivions à la nécessité de lutter efficacement contre la récidive, nous souhaitons apporter quelques rectificatifs aux postulats qui fondent le projet de loi aujourd'hui discuté. Lors du débat télévisé qui opposait M. Nicolas Sarkozy à Mme Ségolène Royal, notre actuel président de la République évoquait « un taux considérable de récidive en matière d'infractions sexuelles ». Il est évident que les statistiques dont dispose M. Sarkozy ne correspondent pas tout...

...les couches sociales les plus défavorisées, en exigeant, pour que le juge prononce des peines autres que l'emprisonnement, que le prévenu présente des garanties d'insertion ou de réinsertion. La raison pour laquelle le projet de loi vise ce critère est simple : les statistiques démontrent que les personnes qui ont le bac et qui déclarent une profession au moment de la condamnation ont un taux de récidive proche de zéro, tandis que, pour les personnes qui n'ont pas le bac, pas d'emploi déclaré, mais qui ont un passé judiciaire, le taux de récidive est égal à 80 %. Le recours à un tel critère n'est pas digne de notre justice. En effet, les personnes issues des couches sociales les plus modestes, qui souffrent de conditions de vie déplorables, qui ne disposent pas de revenus, qui n'ont pas de garan...

...la faisabilité. Or, madame le ministre, vous construisez une maison en commençant par le toit. Comment voulez-vous que l'édifice tienne ? À quoi bon annoncer devant la commission des lois vouloir « engager une action déterminée en faveur de la réinsertion des personnes les plus vulnérables, en particulier les mineurs et les détenus », s'il s'agit de les mettre en prison pour un vol de bonbons en récidive ?

Bien sûr, qui vole un oeuf vole un boeuf. Mais, vous le savez, la prison n'est pas un lieu de réinsertion ; elle est même la principale école de la délinquance. Emprisonnez quelqu'un et son avenir est tout tracé : ce sera la récidive ! Les statistiques montrent parfaitement que le taux de récidive est largement inférieur lorsque le prévenu a fait l'objet d'une mesure alternative à l'emprisonnement. Ce n'est pas en entretenant le ressentiment et la marginalisation qu'on luttera efficacement contre la récidive. Concernant le volet psychiatrique de ce projet de loi, permettez-moi de vous faire part des craintes non seulement d...

...ront se soumettre à une injonction de soins. Dans cette distribution généralisée de l'injonction de soins, intervenant autant dans le cadre de la surveillance judiciaire que dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve ou du suivi socio-judiciaire, il est évident que la question des moyens se pose. Vous justifiez cette généralisation en invoquant la nécessité de lutter efficacement contre la récidive. Avec quels moyens comptez-vous réaliser une telle généralisation ? Comment convaincrez-vous les médecins coordonnateurs d'oeuvrer pour cette généralisation, alors qu'un suivi complet par individu leur rapporte seulement 426 euros à l'année ? Vous n'êtes pas sans savoir que les juridictions ont de grandes difficultés à recruter ces médecins chargés de faire l'interface entre le juge d'applicati...

...uge de son rôle de gardien de la liberté individuelle. Il convient de rétablir la possibilité pour le juge de l'application des peines de disposer, dans tous les cas, d'une marge d'appréciation. Le juge doit avoir la possibilité d'aménager une peine indépendamment du refus, par le détenu, de se soumettre à un traitement proposé. Là encore, vous surestimez la valeur des soins sur l'impact de la récidive. À cet égard, il est évident que n'importe quel détenu acceptera des soins pour se soustraire à l'emprisonnement. Dans tous les cas, le résultat sera le même : des libérations conditionnelles seront prononcées, mais l'effet de ce volet psychiatrique aura pour conséquence de gonfler de manière dramatique la demande de médecins et de personnel psychiatrique. Ce personnel déserte déjà les prisons ...

...oncerner toutes les peines, y compris les peines alternatives à la prison. Je rappelle les termes du second alinéa de l'article 132-19 du code pénal : « En matière correctionnelle, la juridiction ne peut prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette peine. Toutefois, il n'y a pas lieu à motivation spéciale lorsque la personne est en état de récidive légale. » Ce projet de loi va donc mettre en distorsion ce second alinéa de l'article 132-19 et le futur article 132-19-1, puisqu'il va imposer une obligation de motivation en cas de peine prononcée contre un récidiviste. Enfin, parce qu'il est de notre devoir non seulement d'éviter toute inflation judiciaire, mais aussi de permettre un traitement diligent des affaires et de veiller à ce que le...

...19-1 et le juge pourra, dans ce cas, prononcer des peines autres que l'emprisonnement. Les délits de violences volontaires les plus graves relèveront de cette disposition, mais par le jeu de l'article 132-16-4 du même code, lequel prévoit : « Les délits de violences volontaires aux personnes ainsi que tout délit commis avec la circonstance aggravante de violences sont considérés, au regard de la récidive, comme une même infraction. » Par conséquent, le délit commis avec la circonstance aggravante de violences étant déjà visé par le neuvième alinéa du texte proposé par l'article 2 pour l'article 132-19-1 du code pénal, il est à mon sens inutile de faire apparaître cette référence aux délits de violences volontaires dans le huitième alinéa.

...otion ? Le vol avec bousculade et le vol ayant entraîné une interruption temporaire de travail, ITT, de vingt jours ont-ils véritablement les mêmes conséquences sur la victime ? Devront-ils donc être traités de la même manière ? À mon sens, ces questions n'ont pas encore reçu de réponses. Les peines minimales auront vocation à s'appliquer de la même manière pour tous les délits commis en état de récidive, quelle que soit leur gravité. Si, effectivement, selon l'adage populaire, qui vole un oeuf vole un boeuf, il ne faudrait tout de même pas exagérer : les délits d'une gravité différente doivent être traités différemment ! Or le projet de loi ne fait pas de distinction valable entre, d'une part, le simple vol ou le vol avec bousculade, et, d'autre part, les vols qui ont entraîné des blessures ou ...

L'article 3 du projet de loi dispose que le juge aura la faculté d'écarter l'excuse de minorité du mis en cause lorsque celui-ci aura commis en état de récidive légale un délit de violences volontaires. Cet amendement vise à supprimer du texte cette mention, qui est beaucoup trop large. À cet égard, je citerai Mme la ministre elle-même, qui, dans un article paru dans l'édition de lundi du quotidien Libération, a écrit : « C'est à ces mineurs-là, auteurs de violences graves et réitérées aux personnes, et à ces mineurs-là seulement, que mon projet de loi ...

...mmédiate devant le juge n'est pas une procédure adaptée à une décision d'exclusion du principe de l'atténuation de la peine pour le mineur. En effet, cette décision ne peut intervenir que dans le cadre de la procédure « classique » de jugement, avec les délais qui y sont attachés entre la présentation au procureur de la République et l'audience devant le tribunal pour enfants. En cas de première récidive, le projet de loi impose au juge de motiver sa décision lorsque les circonstances de l'espèce et la personnalité du mineur le justifient. La décision prend du temps et la procédure de présentation immédiate ne permet pas de telles investigations en raison de son caractère assez expéditif. En cas de deuxième récidive, le juge ne peut décider d'atténuer la peine qu'à la condition de motiver de man...

...l implique une série de contraintes et obligations. La fiction juridique consistant à l'intégrer dans le régime juridique du suivi socio-judiciaire, notamment comme mesure d'application de celui-ci, ne pourra suffire à en faire une simple mesure de sûreté. A la grande différence de ce que M. le ministre ne cesse de nous répéter, cette mesure ne nous permettra pas de lutter efficacement contre la récidive. Pis, elle risque même d'aggraver la situation de la justice. Si j'affirme que la mise en oeuvre du PSEM aggravera la situation pénale et pénitentiaire en général, et de la récidive en particulier, c'est parce que des personnes, qui se situent de chaque côté de l'échiquier politique et à chaque extrémité de la chaîne pénale, ont eu l'honnêteté de poser les vraies questions et ne craignent pas d'...

...et le rapporteur a d'ailleurs fait un excellent travail, et je l'en remercie. Je suis pourtant convaincue que toute politique pénale, notamment en ce qui concerne un sujet aussi complexe et grave que la récidive, doit être élaborée en tenant compte de tous les éléments scientifiques et statistiques indispensables. Cette politique doit être la plus raisonnée, la plus pondérée possible ; on se doit d'en débattre le plus possible. Une politique pénale de prévention de la récidive doit exclure toute instrumentalisation polémique, toute inflation populiste et toute surenchère démagogique. Traiter de la réc...

...trait de casier judiciaire seulement ont été adressées à l'Allemagne pour 424 condamnations prononcées à l'encontre de ressortissants de ce pays. Tant qu'un casier judiciaire européen n'aura pas été constitué, la mise en oeuvre de cette disposition se heurtera à ce premier obstacle infranchissable, auquel s'en ajoute un second : la différence de qualification des notions de délit, de crime et de récidive au sein de l'ordre juridique des autres Etats membres de l'Union européenne. En effet, il ne suffit pas de mettre en place un registre européen des condamnations, encore faut-il que les Etats qualifient de la même manière tel ou tel acte, pour que le juge du for français puisse prendre en compte les condamnations préalables. Dans le cas contraire, nous risquons d'assister, en France, à des disp...

Ces dispositions, qui visent à étendre le champ d'application du sursis avec mise à l'épreuve et le délai d'épreuve pour les récidivistes, vont à l'encontre d'une lutte efficace contre la récidive. En effet, en augmentant le plafond de cinq ans d'emprisonnement et en allongeant le délai d'épreuve auquel peut être soumis le récidiviste, ces dispositions aboutiraient in fine à un accroissement de la population carcérale et handicaperaient davantage la réinsertion et donc l'avenir du récidiviste.

... contredit directement l'exigence de soins qu'impliquent de telles pathologies et situations. Ce n'est pas en maintenant des personnes plus longtemps en prison, en refusant de suspendre la peine de celles qui souffrent de pathologies évolutives et en remettant derrière les barreaux celles qui, justement du fait de leur libération, iraient mieux ou moins mal, que l'on lutte efficacement contre la récidive.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte est né après le dépôt de la proposition de loi relative à l'institution des peines minimales en matière de récidive, dans la suite logique du débat lancé par Nicolas Sarkozy réclamant des peines planchers pour les récidivistes. Pour faire contrepoids à ce texte jugé excessif et pour tenir compte d'une actualité montrant avec frayeur les agissements de criminels récidivistes, la mission parlementaire qui a été mise en place pour tenter de faire le point sur les récidives et les moyens de les prévenir a permis ...