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...tution suscite toujours bien des passions, car elle touche à plusieurs tabous de notre société : le sexe, l’argent, la misère. Néanmoins, les mentalités évoluent et un consensus toujours plus large se fait jour sur la nécessité d’œuvrer efficacement pour abolir cet esclavage moderne que dénonçait Victor Hugo. Aujourd’hui, plus personne ne peut prétendre ignorer que, en France, 85 % des personnes prostituées et 97 % des prostituées de rue sont d’origine étrangère, que l’immense majorité d’entre elles sont les victimes de réseaux de traite, ni que, selon les chiffres du ministère de l’intérieur, la prostitution rapporte en France entre un et deux milliards d’euros par an aux mafias. Le déni sociétal qui prévalait, le confort de l’image de la prostituée glamour qui rassurait, la résignation face à ce...
Quant au mythe des deux prostitutions, l’une liée à la traite, violente, et l’autre, rebaptisée, pour en aseptiser la réalité, « travail du sexe », il est déconstruit lui aussi. Le procès du Carlton a fait tomber les masques : les prostituées sont tout autant humiliées, maltraitées, dominées. La prostitution est en effet avant tout une relation marchande et le client y est roi. Oui, la société d’aujourd’hui ouvre les yeux et refuse l’inacceptable. Les exactions de Boko Haram ou de Daech, dont le but affiché est la réduction en esclavage sexuel des femmes, sont encore autant de raisons pour les Français de crier haut et fort que non,...
...du système prostitutionnel ; c’est pour satisfaire sa demande que les réseaux choisissent notre pays pour y développer leur activité, et c’est bien son argent qui les enrichit et donc les encourage. Bien sûr, j’entends les propos de certains qui, en toute bonne foi, craignent que le remède ne soit pire que le mal et que la pénalisation des clients n’engendre des effets pervers pour les personnes prostituées, encore plus en danger et encore plus précarisées.
Non, les personnes prostituées ne seront pas plus isolées et donc pas davantage en danger : si un client parvient à trouver une personne prostituée, alors les associations et les services de l’État le pourront aussi ! De toute façon, le moment le plus dangereux pour la personne prostituée est toujours le même : quand la porte de la chambre ou de la camionnette se referme, car la prostitution est violence.
Rappelons que, en 2014, 100 % des meurtriers identifiés des huit prostituées assassinées étaient des clients. Non, les personnes prostituées ne seront pas non plus exposées davantage aux risques sanitaires.
Mme Claudine Lepage. … accompagnement des personnes prostituées, renforcement de la lutte contre la traite des êtres humains et des réseaux, prévention et éducation, et responsabilisation du client.
J’appuie la position de Michelle Meunier, de Mme la secrétaire d’État et de Mme Cohen. Permettez-moi de rappeler quels principes fondent la proposition de loi. Les personnes prostituées sont avant tout des victimes. Or si l’on reconnaît que la prostitution est une violence, comment peut-on traiter les personnes prostituées comme des délinquantes ? La société doit au contraire les protéger et les accompagner, ce qui permettrait d’ailleurs d’instaurer avec elles un lien de confiance. De surcroît, deux moyens non spécifiques à la prostitution sont employés de longue date pour lim...
...lissement de l’un et de l’autre participe de la même logique, à savoir la pénalisation et la responsabilisation du client. Si l’article 16 crée une infraction de recours à la prostitution punie d’une contravention de cinquième classe, l’article 17 révèle, s’il en était besoin, combien notre volonté est non pas de stigmatiser le client, mais bien de lui faire prendre conscience que, en payant une prostituée, il enrichit les mafias et participe donc pleinement à ce fléau de la traite des êtres humains à travers le monde.
...us nombreux ayant choisi d’interdire l’achat d’actes sexuels témoigne sans ambiguïté aucune de la réaction des réseaux, qui se tournent dorénavant vers des pays plus rentables, c’est-à-dire ceux qui ont opté pour la réglementation. Ces pays, que ce soient les Pays-Bas, l’Allemagne ou l’Espagne, ont ainsi vu fleurir les Eros centers. Or, nous le savons bien, l’immense majorité des personnes prostituées de ces établissements spécialisés sont d’origine étrangère. La boucle est bouclée ! Pour terminer, un seul chiffre permet d’ouvrir les yeux : en France, on estime le nombre de personnes prostituées entre 30 000 et 40 000, alors qu’on en compte 400 000 en Allemagne, soit dix fois plus. Au-delà de cette évidente nécessité de prendre en compte le client, premier rouage du système, si l’on veut ré...
...clairement la position abolitionniste de la France et permet d’établir concrètement que nul n'est en droit d'exploiter la précarité et la vulnérabilité d’autrui ni de disposer de son corps pour lui imposer un acte sexuel contre rémunération. La prostitution est un phénomène sexué qui contrevient au principe d’égalité entre les hommes et les femmes. En effet, si 85 % des 20 000 à 40 000 personnes prostituées en France sont des femmes, 99 % des clients sont des hommes. Dans les années 2000, les personnes prostituées étaient à 90 % de nationalité étrangère, alors que cette proportion n’était que de 20 % en 1990. Principalement originaires de Roumanie, de Bulgarie, du Nigeria, du Brésil et de Chine, ces personnes sont le plus souvent maintenues sous la coupe de réseaux de traite et de proxénétisme orga...
...nous adresserons aux réseaux de proxénétisme. Nous faisons le pari qu’en s’attaquant à la demande, la proposition de loi dissuadera efficacement les réseaux proxénètes d'investir sur un territoire dont la législation est moins favorable à la réalisation de profits criminels. Enfin, cet article responsabilisera le client et renversera la charge de la preuve, qui pèse aujourd'hui sur les personnes prostituées par le biais du délit de racolage, que nous venons de rétablir.
...es moyens les plus efficaces. Tel qu’adopté par les députés, dans un large consensus transpartisan, le texte comporte une vraie cohérence, manifestée par quatre piliers : renforcement de la lutte contre le proxénétisme, création d’un parcours de sortie de la prostitution, prévention et éducation, responsabilisation du client. Il s’agit donc bien d’agir auprès des trois acteurs : les réseaux, les prostituées et les clients. Cessons l’hypocrisie : le client est le premier rouage du système prostitutionnel ; c’est bien son argent qui enrichit les réseaux, lesquels, pour satisfaire sa demande, mettent sur le trottoir toujours plus de prostituées. Tout est dit, suis-je tentée d’indiquer ! Il est illusoire de vouloir mettre fin à ce marché sans ouvrir les yeux de celui qui en est à l’origine : le consom...
Ce texte, issu d’un long travail parlementaire entamé en septembre 2010 par les députés Danielle Bousquet et Guy Geoffroy, a donné lieu à de nombreux débats, où chacun a pu intervenir : les personnes prostituées, les associations spécialisées, les pouvoirs publics, la presse, les clients et l’ensemble de la population. Le texte sur lequel nous devons maintenant nous prononcer n’a plus grand-chose à voir avec celui sur lequel nous avons travaillé. Ce soir, les mots de François Hollande résonnent bien étrangement : « La prostitution est une des expressions les plus frappantes de ces inégalités et violen...
...l article L. 316-1-1 inséré dans le même code pour prévoir la compétence liée du préfet pour la délivrance d’une autorisation provisoire de séjour aux victimes de la traite ou du proxénétisme engagées dans un projet d’insertion sociale et professionnelle. Privé de compétence discrétionnaire, le préfet sera donc tenu, dans ce cas-là aussi, de délivrer l’autorisation de séjour, même si la personne prostituée n’a pas porté plainte contre le réseau de traite et est encore sous le joug de son proxénète. On voit bien le risque de manipulation qui en résulte : les réseaux auront tôt fait de détourner la loi à leur bénéfice, en faisant en sorte qu’un plus grand nombre de prostituées puissent séjourner légalement en France. Il me semble que nous n’avons pas intérêt à présenter la France comme un pays d’ac...
Cet amendement vise à supprimer l’article 13 et donc à réintroduire la pénalisation des prostituées. Tout ça pour ça ? C’est la première phrase qui me vient à l’esprit ! Pourtant, je pense avant tout au devoir de responsabilité des législateurs : en décembre 2011, l’Assemblée nationale adoptait à l’unanimité la proposition de résolution réaffirmant la position abolitionniste de la France. Le 28 mars 2013, c’était au tour de la proposition de loi de Mme Benbassa d’être adoptée par le Sénat. ...
...viens des Pays-Bas, où j'ai pu avoir divers entretiens sur le sujet. Ce pays a fait un choix diamétralement opposé au nôtre, ce qui n'a pas empêché les réseaux de se développer, parallèlement aux « vitrines » qui jalonnent les rues d'Amsterdam. Les Pays-Bas regardent avec beaucoup d'attention ce qui se prépare en France. La prostitution soi-disant consentie est aussi accompagnée de violences. La prostituée devient la chose du client, qu'elle soit prostituée de rue ou escort girl - les témoignages de celles qui ont été entendues dans un récent procès qui a fait beaucoup de bruit sont éloquents. J'ajoute que la prostitution n'est jamais un choix de vie : c'est la nécessité qui y pousse. La responsabilisation du client - terme que je préfère à celui de pénalisation - est ce qui fait débat au sein de ...
J'aimerais que nous revenions sur la situation des personnes prostituées en situation irrégulière. Il me semble en effet judicieux que la dénonciation de leurs proxénètes ou du réseau dont elles sont victimes ne conditionne pas l'obtention de leurs papiers. Il faut par exemple citer le cas de femmes africaines qui sont prostituées par leurs familles : il est très vraisemblable que jamais ces femmes ne dénonceront les coupables.
Ce sujet m'intéresse beaucoup mais j'avoue un grand manque d'informations sur ces sujets. Vous avez mentionné les implications de la prostitution sur la fiscalité, la sécurité sociale et la retraite. On ne peut pas dire que les prostituées exercent librement leur métier. Or, parmi ceux qui sont en faveur de la libéralisation de la prostitution, l'un des arguments c'est d'en faire un métier avec sécurité sociale, fiscalité etc. Or, en théorie, cela existe déjà mais on ne peut pas dire que le système soit satisfaisant. Merci de m'éclairer.
...orter une réponse aux préoccupations des riverains, notamment quant aux nuisances engendrées, il s’agissait de lutter plus efficacement contre les réseaux de proxénétisme. Il va sans dire, compte tenu de la situation actuelle, que la mise en œuvre de cette disposition est un échec, tous les intervenants, ou presque, l’ont mentionné. En tout état de cause, comment peut-on considérer les personnes prostituées comme des délinquantes ? Ce sont avant tout des hommes et, la plupart du temps, des femmes que la société doit protéger, car elles sont souvent soumises à de puissants réseaux de proxénètes. À cet égard, lors du vote de la loi de 2003, le Conseil constitutionnel avait déjà émis une réserve d’interprétation, en invitant les juridictions à « prendre en compte, dans le prononcé de la peine, la circ...