La mission commune d'information organise une table ronde consacrée aux ligues de sport professionnel qui réunit :
président de la ligue nationale de rugby ;
vice-président de l'association nationale des ligues de sport professionnel et premier vice-président de la ligue nationale de basketball ;
directeur général de la ligue de football professionnel ;
La mission commune d'information sur le sport professionnel et les collectivités territoriales a été créée début octobre. Nous avons entendu les associations d'élus locaux, puis nous nous sommes intéressés au modèle économique du sport professionnel, au financement des stades et à leur place dans la cité. Nous nous sommes rendus à la fédération française de tennis, à Nanterre - pour rencontrer les responsables du club de basketball ainsi que les concepteurs de la future Aréna 92 - et nous avons été reçus par la direction du Paris Saint-Germain. La semaine dernière, nous avons réuni les présidents de fédérations lors de notre seconde table ronde.
Il ressort de ce travail que l'implication des collectivités territoriales dans le développement du sport professionnel est importante, même si une nouvelle tendance se fait jour dans certaines disciplines voyant émerger des clubs souhaitant se financer avec des capitaux privés. Les relations entre les collectivités territoriales et le sport professionnel demeurent riches et complexes. Une intervention publique est souvent indispensable pour permettre l'émergence d'un club comme celui de Nanterre en basketball ou le succès d'une épreuve telle que le Vendée Globe Challenge. Dans d'autres cas, les collectivités se sentent moins partenaires que contributeurs sans pouvoir de décision. Nous le savons, les collectivités peuvent être impliqués dans le financement de stades ne correspondant pas nécessairement à des besoins pérennes ou n'ayant fait l'objet d'aucune étude préalable rigoureuse - comme cela fut le cas au Mans ou à Grenoble. Elles sont parfois sollicitées plus que de raison en vue d'adapter les équipements sportifs à l'évolution de la réglementation ou aux besoins des diffuseurs. Elles sont trop souvent appelées à combler les déficits des comptes en fin de saison, sans posséder de vision claire de l'utilisation de ces fonds publics.
Un besoin de transparence se fait ainsi sentir, sans remettre en cause l'intérêt des collectivités territoriales pour le sport professionnel. L'émergence d'un sport spectacle, souvent très éloigné de l'éthique du sport, pose la question de la légitimité de l'intervention des collectivités locales et de l'équité des compétitions. Dans ces conditions, comment pouvons-nous améliorer la régulation du secteur afin qu'il se développe harmonieusement ? Comment préserver l'aléa sportif, fondement de la légitimité de ces interventions, sans fragiliser les investissements ? De quels équipements et de quelles formations les clubs ont-ils besoin pour poursuivre leur développement ?
Pour discuter de ces questions, je remercie nos interlocuteurs pour leur présence. Je laisse à chacun la parole afin de vous situer dans le cadre de notre mission, puis le rapporteur et les sénateurs présents vous poseront leurs questions.
Je tiens à excuser l'absence de Philippe Bernat-Salles, retenu dans l'un de nos clubs à Dunkerque. Je vous remercie pour cette invitation. C'est un plaisir d'échanger avec vous sur nos problématiques.
Les liens entre le sport professionnel et les collectivités sont nombreux : aides publiques, partenariats publics, infrastructures sportives. De nombreuses incompréhensions existent avec les collectivités locales, mais il convient de souligner les bonnes pratiques et les succès rencontrés dans les partenariats engagés. En décidant de ne pas se désengager du sport professionnel, les collectivités appuient ces réussites.
Je préside depuis 2008 cette ligue que j'ai contribué à créer. La ligue nationale de volleyball a été la seconde à voir le jour, après celle de football. Nous gérons trois divisions, dont une féminine, ce qui fait d'elle une ligue importante.
650 joueurs et joueuses professionnels évoluent dans 40 clubs dont le budget moyen en Ligue A est de 1,6 million d'euros.
Patrick Wolff, le président de l'association nationale des ligues de sport professionnel (ANLSP), m'a demandé de dire quelques mots sur cette organisation qui regroupe les ligues professionnelles de sports collectifs de salles et de plein air. Cette association a vu le jour afin de répondre aux problématiques communes telles que les veilles législative et télévisuelle, le lobbying réalisé en amont des évolutions législatives en France et en Europe. Il me semble utile d'aborder régulièrement ces problématiques communes.
La ligue nationale de basketball gère deux divisions professionnelles, de 16 et 18 clubs, pour un chiffre d'affaires d'environ 100 millions d'euros. La moitié des revenus provient de partenariats privés, 30 % de subventions publiques - un peu plus en Pro B - tandis que les 20 % restant sont issus du merchandising et de la billetterie.
Nous mettons en place un label afin de structurer les clubs et de leur donner des pistes de progrès. Ce dispositif n'a pas pour but d'ajouter des contraintes aux collectivités. En tant qu'élu, je sais que ces contraintes existent, mais elles diminuent. Nous expérimentons également un système d'invitations ; il s'agit d'une piste intéressante pour le sport professionnel. Ce modèle est à mi-chemin entre le modèle classique de montées et descentes en vigueur en France et en Europe et le modèle de la National basketball association (NBA) qui évolue en ligue fermée. Ce modèle intermédiaire permettrait d'inviter les clubs en fonction de critères clairement définis - équipements, organisation, capacité à mobiliser des partenaires privés dans une zone de chalandise intéressante - afin de les amener au plus haut niveau. Le système permet à deux clubs de Pro B d'accéder à la Pro A autrement que par ses résultats sportifs. Une commission indépendante de la ligue - comprenant notamment des membres du ministère des sports - étudie le potentiel des zones dans lequel le basketball est actuellement insuffisamment développé. Aucun club ne s'est dégagé l'année dernière. Cette année, huit ont candidaté ; nous espérons que deux pourront se détacher. Ce modèle a l'avantage d'augmenter à la fois le nombre de matchs et la sécurité pour les clubs et les collectivités, puisque deux équipes seront reléguées parmi 18 clubs et non plus parmi 16. Tout le monde regarde ce système avec intérêt. J'espère que deux villes émergeront.
Une commission Aréna travaille avec le ministère des sports afin de définir les équipements nécessaires aux clubs de basketball pour être compétitifs en Europe. Le budget moyen d'un club de Pro A - environ 5 millions d'euros - est insuffisant pour intégrer le top seize européen qui nécessite 8 à 10 millions d'euros. Le problème majeur des sports de salle réside dans l'absence d'infrastructures en France. Ce sujet est débattu depuis des années, sans qu'aucune salle ne soit construite. Dans le même temps, des pays moins avancés économiquement parviennent à se développer.
Je tiens à excuser l'absence de Frédéric Thiriez. Puisque vous avez déjà rencontré la fédération française de football, je me limite au football professionnel. Les subventions versées par les collectivités locales peuvent paraître minimes par rapport à d'autres sports, puisqu'elles représentent environ 2 % du chiffre d'affaires du football professionnel - qui s'élève à 1,3 milliard d'euros. Les partenariats des collectivités locales s'élèvent pour leur part à 26 millions d'euros. Si les clubs sont des partenaires de premier rang pour les collectivités, la ligue entretient également des rapports fréquents avec les collectivités sur le territoire. Je sollicite chacune d'entre elles pour l'élaboration du calendrier général de compétition afin de vérifier qu'il n'y ait aucun doublon. Nous sommes sollicités lorsque les villes ont un projet, comme cela fut le cas avec Michelle Demessine lors de la préfiguration du stade de Lille. Nous avions alors rencontré des citoyens lillois qui se posaient des questions sur l'évolution du sport professionnel. La discussion est également particulièrement dense avec certaines collectivités sur des sujets ponctuels. Ainsi, à Caen, nous nous sommes assurés que les jeux équestres mondiaux se dérouleraient sans inconvénient pour le club de football. De même, nous nous sommes plusieurs fois rendus à Bastia pour vérifier que la participation des clubs locaux aux championnats satisfasse l'ensemble des parties. Dans nos contacts approfondis avec les collectivités, tout le monde fait preuve de bonne volonté et connaît parfaitement les dossiers.
Nous constatons une évolution très progressive des tentatives d'appropriation des enceintes par le privé. L'Euro 2016, qui sera une réussite en termes de rénovation et de construction, sera compliqué à analyser en termes de progrès dans les protocoles de gestion des équipements entre les clubs, les collectivités et les opérateurs - Vinci, Eiffage. Si le modèle de l'Olympique Lyonnais est facile à appréhender, ceux de Marseille ou Bordeaux le sont plus difficilement. Nous assistons dans l'ensemble à une tentative de professionnaliser ces enceintes sur le long terme.
Dans le cadre des normes définies par la fédération, la ligue intervient auprès des collectivités lorsque nous estimons que certains stades méritent une amélioration de leurs équipements. Les mesures ne sont jamais prises unilatéralement par la ligue. En principe, les collectivités nous demandent notre avis dans l'optique de mener les travaux. De notre point de vue, ces relations sont constructives. Elles sont organisées par des textes clairs que chacun doit respecter. Le football, comme les autres sports professionnels, se dirige vers un modèle de licence pour que les clubs accèdent aux compétitions de l'élite dans des conditions financières balisées. Cette évolution est lourde, mais elle n'implique pas que les règles du Conseil d'État soient détournées.
Je ne perçois aucune tension particulière et je ne pense pas que les intérêts de certains sont floués. Les collectivités sont largement à la hauteur de leurs tâches. Le dialogue s'est également développé avec les pouvoirs publics locaux depuis quelques années, notamment avec les préfectures sur les questions de sécurité. Des problèmes de principe se posent parfois, autour de la notion de sport spectacle qui oublierait les valeurs sportives et les règles d'équité. Pour des raisons économiques, nous pourrions être tentés de questionner le principe de relégation, mais le débat n'existe pas, car les clubs ne le souhaitent pas. Le sport spectacle n'est donc pas le prélude à une ligue fermée.
La ligue nationale de rugby est une ligue de quinze ans, relativement jeune. Nous gérons deux divisions et trente clubs, avec un budget de 80 millions d'euros cette année et 120 millions l'année prochaine. Le chiffre d'affaires des deux divisions s'élève à environ 350 millions d'euros.
Les collectivités entretiennent surtout des relations avec les clubs. La ligue intervient principalement pour les projets d'évolutions de stade et de réglementation. Depuis le début, nous tentons de rationaliser les rapports entre les clubs en adoptant différentes mesures. Le salary cap évite par exemple l'explosion de la masse salariale. Nous avons également fait une proposition relative aux joueurs issus des filières de formation afin de remettre la formation au centre de la réflexion. Contrairement à beaucoup de ligues dans lesquelles la France n'est pas premium dans le monde, notre championnat est le plus valorisé dans le rugby, ce qui crée des contraintes.
Les subventions publiques représentent 3 % du budget du Top 14 et 5 % de la Pro D2.
Pour les années à venir, notre principale problématique dans notre relation avec les collectivités concerne les stades. Dans cette optique, nous avons créé un label stade qui sera en place la saison prochaine. Pour des raisons géographiques, nous n'avons pas bénéficié des rénovations et des constructions liées à la coupe du monde 1998 ou à l'Euro 2016. Il s'agit d'un sujet de développement de notre sport dans les prochaines années.
Le rugby cherche à se stabiliser et à se réguler afin de proposer des compétitions équilibrées. Comme Jean-Pierre Hugues, nous n'envisageons pas de passer en ligue fermée, ce modèle ne rejoignant pas la mentalité française. Nous essayons toutefois de stabiliser les situations afin de favoriser les investissements.
Le football et le rugby n'envisagent pas d'adopter un modèle de ligue fermée. Le basketball opte pour un système à mi-chemin en invitant en Pro A des clubs émergents en fonction de différents critères. Si la relégation d'un club et les investissements engagés dans les infrastructures mettent en danger son équilibre économique, le repêchez-vous ?
Nous le repêchions l'année dernière, mais nous ne le ferons pas cette année. Nous avons constaté un effet d'aubaine chez les clubs qui rencontraient des difficultés en décembre. Ces derniers présentaient alors un dossier qui ne rentrait pas dans nos critères. Nous recherchons en effet des agglomérations « nouvelles » afin d'accompagner des clubs émergents dans la division inférieure et dont les collectivités souhaitent soutenir les partenariats privés pour atteindre le haut niveau rapidement. Des agglomérations telles que Marseille, Châlons-Reims, Lille ou Rouen présentent ce potentiel de compétitivité.
Seuls les clubs de Pro B peuvent se porter candidats. Dès lors que nous souhaitons conserver l'aléa sportif, un club de Pro A descendra et restera, a minima, en Pro B l'année suivante.
Prenons un exemple pour bien comprendre votre modèle : si Marseille évolue en Pro B et présente un dossier, vous pouvez l'inviter en Pro A. La ville peut accompagner la montée et financer une infrastructure sportive. Si le club est relégué à l'issue de la saison, la ville se trouve alors avec un équipement neuf dont elle n'a pas besoin.
Il est du rôle de la ligue d'accompagner le club, notamment dans sa gestion, et de s'assurer que son dossier est solide afin de limiter les risques de relégation l'année suivante. Cette situation est toutefois possible.
Nous avons en tête les exemples de Grenoble et du Mans où les collectivités ont accompagné un projet sportif. Elles sont désormais directement impactées par les mauvais résultats sportifs.
Le critère financier est important ; un budget minimum est fixé, au moins égal à la moyenne des clubs de Pro A. Ce critère donne davantage d'assurance de rester au plus niveau. Nous souhaitons conserver le système de montées et descentes. Aussi, le principe d'invitations fonctionnera une seule fois, lorsque le nombre de clubs en Pro A passera de 16 à 18. Les chances d'être relégué se réduisent, de 2 sur 16 à 2 sur 18. Nous discutons avec Serge Blanco, car le Top 14 de rugby est également confronté à ce risque de voir un club historique descendre. Le système que nous proposons ne répond toutefois pas entièrement à la problématique de sécurisation.
La présence d'une aréna est un critère parmi d'autres ; il n'est pas prépondérant. Le but n'est pas de posséder un équipement neuf, mais d'ancrer le rugby dans une région.
Dans les années à venir, un passage de la D1 de handball à 16 clubs est souhaitable. Nous privilégions un système classique de montées et descentes ainsi que des invitations. Nous ne souhaitons pas annuler la relégation, car un problème d'éthique se poserait. Selon nous, il convient d'opter pour une ligue fermée ou de conserver le système de montées et descentes pour tous, mais pas de choisir un modèle à mi-chemin.
Pour éviter que deux clubs descendent parmi les 14 du championnat, nous avons envisagé de passer à 16 équipes. La problématique du nombre de matchs se pose toutefois. Contrairement à d'autres sports, il est impossible en rugby de jouer de manière trop rapprochée. Nous étudions la possibilité de ne reléguer qu'un seul club.
Afin de faire émerger de nouvelles villes, notre réflexion porte sur la Pro D2. Nous envisageons un championnat spécifique accessible sur dossier. Celui-ci se situerait au niveau de la Fédérale 1 et permettrait aux clubs de monter en Pro D2. Une ligue fermée n'est pas envisageable en rugby. Puisque les descentes sont trop importantes par rapport au nombre d'équipes et qu'il est difficile d'augmenter le nombre de clubs, notre approche tend à permettre le développement en Pro D2 de zones où le rugby est peu implanté.
La problématique du Mans dépasse le cadre du football : elle relève des partenariats public-privé (PPP). La commission Glavany, qui a mis en exergue l'imprudence de la collectivité, préconise de mettre en place un réseau de conseil informel à même de donner son avis sur les opérations réalisées. Je pense toutefois que les collectivités ont les moyens techniques et intellectuels de vérifier les contrats qu'elles signent. L'évolution dans la gestion des équipements met tout le monde en difficulté. Vinci, dans le cadre d'un plan pluriannuel d'occupation, nous demande de prévoir un calendrier de rencontres sur plusieurs années. Or, nous ignorons les clubs qui seront présents en championnat à ce moment-là. Les intérêts des clubs, des collectivités et du gestionnaire sont contradictoires. Un interlocuteur direct est préférable à une relation tripartite. Ce modèle a été choisi pour des raisons de financement. La situation du Mans est regrettable mais, heureusement, d'autres montages fonctionnent. Dans la majorité des projets, les clubs sont stables, les gestionnaires d'équipement réalisent leurs objectifs et les finances des villes ne sont pas atteintes. Le dossier du Mans n'est pas bouclé puisque des actions juridiques sont en cours. Ce cas est unique.
Dans le cadre de notre mission, nous nous sommes intéressés à l'économie recherchée par les clubs à travers la gestion de leurs infrastructures. Vous l'avez dit, les grandes salles font défaut. Le football sera satisfait après les rénovations liées à l'Euro 2016 et le rugby voit des projets émerger. À chaque présentation de projet par les sports de salle ou de plein air, deux aspects interviennent : le spectacle sportif et la multifonctionnalité. Nous sommes toutefois songeurs, car les grands artistes à même de remplir les salles sont limités. Les stades peuvent-ils accueillir des spectacles compte tenu des problématiques de calendriers ? Les concerts sont prévus un ou deux ans à l'avance, alors que vous connaissez uniquement les rencontres sur une année.
Pensez-vous par ailleurs que la France dispose d'un public potentiel pour le spectacle sportif équivalent à l'Angleterre ou à l'Allemagne pour le football ? Dans ces pays, les clubs accueillent 20 000 personnes même lorsqu'ils se situent en dernière position du championnat ou évoluent en deuxième division. Nous ne possédons peut-être pas cette culture du spectacle sportif.
Enfin, des enceintes multisports sont-elles envisageables ? Une superposition pourrait permettre de posséder une seule et même enceinte pour deux clubs résidents. Cette question fait débat dans les sports de plein air en raison des dates et de l'état des pelouses.
En volleyball, Ajaccio possédait une salle de 600 places ; le club parvient désormais à remplir les 1 600 sièges de sa nouvelle structure. Je suis persuadé que le potentiel est identique à Avignon, à Narbonne ou à Chaumont, obligé de se délocaliser pour les rencontres de coupe d'Europe.
Le basketball, le handball et le volleyball peuvent s'entendre sur ces sujets. Un problème se pose si trois clubs professionnels sont présents dans la même ville. Un rapide tour d'horizon montre toutefois que ce risque de cohabitation n'existe pas réellement. Actuellement, nous peinons à organiser les finales de championnat de France à Paris en raison du nombre d'événements pour le peu de salles disponibles.
La capacité du public français à remplir un stade est une problématique culturelle qui peut évoluer. En quinze ans, nous avons triplé l'affluence des matchs de rugby.
Deux écueils se font jour dans une cohabitation avec le football. La problématique du calendrier peut s'étudier, mais la question de la pelouse est plus délicate. Nous pouvons imaginer un système de pelouse rétractable interchangeable, même si ce dispositif semble compliqué. La cohabitation pose également des difficultés dans le partage des habitudes du club résident et dans la distinction des centres d'entraînement. À Toulouse, le stade sert au football et, par intermittence, au rugby. Une cohabitation en continu de deux clubs professionnels de haut niveau apparaît compliquée.
Nous avons l'expérience de ce partenariat, souvent difficile. La coupe du monde de rugby a pu se tenir en France car nous avons adapté notre calendrier pour que les équipes nationales jouent dans des stades de football. Le processus a été compliqué, mais nous l'avons fait avec plaisir. De la même manière, l'Euro 2016 entraînera des difficultés pour le rugby, puisque les terrains seront inutilisables à compter de début mai. À la ligue nationale de rugby et à la ligue de football professionnel, des équipes de gestion des calendriers étudient ces problématiques.
La fédération et la ligue sont régulièrement en concurrence avec le rugby pour l'utilisation du Stade de France en fin de saison. Les discussions sont parfois compliquées. Je partage l'opinion de Paul Goze : il est possible d'organiser des événements ponctuels. Il est toutefois plus difficile de faire cohabiter deux modèles différents en termes de public, de sécurité et de pratique sportive. La cohabitation est sans doute plus facile dans les sports de salle.
Une expérience permanente a peu de chance de prospérer. Les municipalités et les préfectures ne le souhaitent d'ailleurs pas nécessairement.
Il est envisageable d'accueillir plusieurs clubs résidents dans une même salle. Des exemples existent, notamment à Toulouse où le handball et le volleyball cohabitent régulièrement. Une solution ingénieuse a dû être trouvée pour le sol.
Il est parfois plus difficile de conjuguer le sport et les spectacles en raison de la lourdeur d'organisation et de l'immobilisation de la salle. Ces activités sont plus rentables que le sport, mais elles requièrent d'établir le calendrier très en amont. Comme les ligues de football et de rugby qui collaborent dans l'élaboration de leurs calendriers, nos trois ligues harmonisent les leurs afin de permettre une fluidité dans la tenue des trois championnats.
Nous constatons que le public s'adapte à la capacité des salles dans lesquelles les clubs évoluent, proportionnellement à la taille de la population. L'Espagne compte douze salles de plus de 12 000 spectateurs, l'Allemagne en compte dix et la Slovénie et la Lituanie deux chacune. Ce n'est pas le cas en France où les deux plus grandes salles se trouvent à Montpellier et à Pau, avec 7 500 places. Cette situation est impensable dans un pays comme le nôtre.
Ma conception de l'organisation du sport diffère selon les agglomérations. Lorsque la population est importante et les budgets présents, la cohabitation de plusieurs sports est possible. Dans les régions comprenant plusieurs villes de taille moyenne - comme la Bourgogne - nous devons mutualiser les sports en analysant l'histoire de chacun dans la région et le soutien apporté par les collectivités. Certaines nations procèdent ainsi. La concurrence épuise les collectivités, les publics et les partenaires privés. Un partenariat dépourvu d'assurance à moyen terme est difficilement gérable. Beaucoup de régions sont confrontées à ce problème. Nous discutons de ces sujets depuis longtemps, bien au-delà des visions partisanes. Peut-être que les contraintes économiques de la collectivité et de l'ensemble de la société nous obligeront à mettre ce sujet sur la table.
Dominique Juillot l'a dit : notre pays manque cruellement de salles de 5 à 10 000 places pour assurer la polyvalence entre les trois disciplines. Les belles installations et les affiches sportives attirent les publics, qui peuvent être mixés entre les sports. Les fédérations et les ligues possèdent une vision de l'ancrage local et des positionnements idéaux à trouver. Il vous revient de faire passer le message aux collectivités. Nous sommes tous preneurs. Dans ma ville, les trois sports peuvent cohabiter dans une même salle. Un festival se déroule en juillet, ce qui ne pose pas de problème de calendrier. Avignon n'est pas la seule ville à offrir cette opportunité. Les possibilités sont différentes dans les stades.
La part de subventions directes des collectivités locales au sport professionnel est très faible - 2 à 5 % - même s'il est vrai que ces montants s'additionnent parfois sur un même territoire. Connaissez-vous la répartition entre les différents échelons de collectivités ? Compte tenu du débat actuel sur les compétences exclusives des départements et des régions, l'une devra se substituer à l'autre pour que les niveaux de subvention se maintiennent.
Nous réfléchissons à une manière de concilier la glorieuse incertitude du sport et la nécessité d'introduire une forme de sécurisation des investissements des collectivités et des clubs. Nous constatons au niveau législatif, dans le cadre de l'action publique territoriale, un renforcement des métropoles. Avez-vous le sentiment qu'à moyen terme, nous nous acheminons vers des clubs professionnels de métropole ? Une organisation autour de 14 métropoles présenterait le désavantage de déserter le Centre, Orléans, Châteauroux, Clermont-Ferrand, Poitiers ou Limoges étant trop petites pour être considérées comme des métropoles.
Le football et le rugby sont peu financés par les collectivités ; les TV représentent leur principale source de revenus. Ce n'est pas le cas en basketball. 70 % de nos subventions publiques proviennent de la ville ou de l'agglomération, 15 % sont issues des départements - qui se désengagent de manière globale, même si d'importantes disparités existent - et 15 % viennent de la région. Nous disposons d'une marge de manoeuvre à cet échelon si nous nous basons sur la formation, compétence prioritaire de la région. La possibilité pour nous de percevoir la taxe d'apprentissage dans les centres de formation est une évolution importante. Des centres de formation d'apprentis (CFA) des métiers du sport ont mutualisé cette taxe d'apprentissage avec les pôles afin d'abonder les cadres futurs de la formation. Si cette possibilité nous est retirée, d'importants financements disparaîtront. Il convient d'être prudent dans la réforme de la formation professionnelle.
D'une certaine manière, nous encourageons la création de métropoles. Les clubs des grandes agglomérations sont plus à même d'être compétitifs en Europe. J'ignore si ce développement est positif ou non.
La métropolisation est une tendance très forte dans le Top 14, où nous avons perdu des villes de tailles moyennes telles que La Rochelle, Montauban, Mont-de-Marsan, Albi ou Dax, au profit de plus grandes villes. Lyon devrait monter en Top 14 la saison prochaine, remplaçant une nouvelle ville de taille moyenne. Cette tendance devrait se poursuivre.
Les subventions des collectivités proviennent à 60 % de la ville, à 25 % du département et à 15 % de la région. Ces subventions représentent 3 % des budgets du Top 14 et 5 % de la Pro D2. Les droits TV constituent jusqu'à 15 à 20 % des budgets des clubs professionnels - Top 14 et Pro D2 confondus.
Le ratio est différent dans le football où les droits TV représentent environ 50 % des budgets. La répartition des subventions des collectivités est très variable. Certaines utilisent de manière coordonnée le plafond maximal d'aides publiques et concentrent leurs efforts sur un club ; c'est le cas à Montpellier. Dans l'ensemble, les communes sont celles qui participent le plus à l'effort de subventions, puis les régions et les départements. Les données fournies par la direction nationale de contrôle de gestion (DNCG) montrent d'importantes disparités selon les collectivités. Certaines mettent en place des actions coordonnées au niveau régional, d'autres avancent en ordre dispersé. Ces documents sont à votre disposition.
Notre histoire récente prouve que nous ne disposons pas d'une grande capacité de contrôle des montées et des descentes. Nous avons provisoirement perdu Lens qui possède un grand public de football et l'Est de la France disparaît des championnats professionnels depuis la rétrogradation de Strasbourg. Nous sommes inopérants dans l'orientation des projets sportifs vers des métropoles à grand public. Ces situations relèvent, non pas d'un choix stratégique d'une municipalité, mais d'un investisseur. Olivier Sadran a permis la renaissance du football à Toulouse, un investisseur russe est présent à Monaco et les Qataris investissent à Paris. Ces opportunités, saisies ou non par les personnes possédant les moyens financiers nécessaires, modifient la carte. Ces trois exemples montrent que les investissements concernent toutes les tailles de villes. J'ignore si le renforcement financier, administratif et urbanistique des villes suffirait à concentrer les projets des investisseurs sur les métropoles.
Un équilibre est effectivement nécessaire entre la compétition et la sécurisation. Nous avons étudié le modèle collectiviste américain qui permet la pérennité des clubs, mais il est inacceptable tant pour l'ambiance sportive française que pour la fédération internationale de football association (FIFA) ou l'union des associations européennes de football (UEFA). Le Japon adopte un modèle mixte qui empêche les relégations vers les championnats amateurs. Le football français devrait rester dans un modèle classique. Les tentatives de notre président de passer à 18 clubs en Ligue 1 pour des raisons économiques et de calendrier n'ont pas convaincu les clubs. Certains considèrent que si les droits TV rattrapent ceux constatés en Allemagne ou en Italie, les indemnités de relégation devront être considérablement augmentées afin d'aider les clubs historiques à remonter rapidement. Le modèle anglais, qui prévoit ces indemnités, permet aux grandes équipes de constamment évoluer en Premier League. Les structures des clubs historiques français sont très lourdes à financer ; sans une remontée rapide, les créanciers peinent à faire venir des investisseurs extérieurs.
En volleyball, les subventions publiques représentent 63 % des budgets des clubs. Nous dépendons de ces subventions, comme le football dépend des droits TV. Toute dépendance étant mauvaise, nous tentons de réduire ce ratio. Le label LNV (ligue nationale de volley) va dans ce sens. Il ne s'agit pas d'une contrainte supplémentaire pour les collectivités, mais d'une aide à la structuration et à la professionnalisation des clubs. Plus le ratio est faible, plus il est valorisé dans le label. Nous souhaitons une dépendance moins forte des clubs, mais nous ne contrôlons pas les subventions octroyées par les collectivités. Les maires ou les conseillers généraux souhaitent parfois soutenir le seul club professionnel de leur territoire.
Lorsqu'un club accède à la première division, la ligue impose-t-elle des règles en termes d'aménagement des équipements pour accueillir les compétitions et les médias ? Le club est-il tenu de se mettre en règle rapidement ? Il semble préférable de lui laisser deux à trois ans pour s'assurer de sa stabilité sportive. Les ligues et les fédérations sont-elles donneuses d'ordres ?
La loi indique que les ligues n'ont pas autorité pour imposer des normes. Pour la pérennité du club, il est toutefois nécessaire de posséder les équipements adéquats afin de bénéficier des recettes de billetteries et d'accueillir les partenaires privés. Les ligues préparent les clubs à l'accession à la division supérieure et au plus haut niveau. Un club a davantage de chances de se maintenir s'il est préparé et si son enceinte est remodelée. Dès lors que les collectivités accompagnent moins les clubs, ces derniers doivent se donner les moyens d'accueillir des partenaires privés.
Les clubs montent parfois rapidement, sans posséder la structure nécessaire. Sur ce point, Nanterre est cas typique. Si la collectivité n'avait pas financé l'ensemble des frais supports du club - qui paie uniquement la masse salariale - celui-ci n'aurait pas pu jouer en Euroligue, car la Halle Carpentier n'est pas adaptée. La ville a décidé d'agrandir la salle pour la porter à 3 500 places. Si ces travaux sont réalisés durant l'été, Nanterre sera capable de se stabiliser. Sans ces aménagements, le club ne survivra pas plus de deux ans. Le sport professionnel ne peut pas vivre sur les seules subventions, sans billetterie ni financement privé. La situation serait par ailleurs inéquitable par rapport à d'autres clubs obligés de réduire leur masse salariale, leurs dépenses marketing ou leurs frais administratifs.
Les ligues se permettent-elles de juger de l'équité entre les clubs selon les capitaux étrangers reçus, le montant des subventions perçues ou encore du montant de la redevance due ?
Cette équité constitue l'une de nos préoccupations, mais nous n'avons aucune prise dessus. En investissant, un élu prend un risque politique. Les financements des Zéniths, des maisons de la culture ou des espaces d'arts ne font pas l'objet d'autant de questionnements. Pourtant, contrairement à ces structures, le nombre de bénévoles exerçant dans le sport professionnel est important, y compris parmi les présidents de clubs. Sur 100 personnes nécessaires à l'organisation d'un match de basketball, 70 sont bénévoles. Si un élu trouve son intérêt dans ce subventionnement, il en va de sa responsabilité. Pourquoi devrions-nous réglementer ces éléments ? Des lois existent sur les plafonds des subventions. Nous sommes contrôlés tous les deux ou trois ans.
L'équité est une chimère, si ce n'est dans le sport américain où les recettes sont mutualisées. Ce système apparaît paradoxal dans un pays aussi libéral, qui prône pourtant l'équité dans le sport afin que le résultat soit aussi indécis que possible. Il n'est pas adapté à notre mentalité. Dans le rugby, nous essayons de mutualiser les ressources. Les débats sont nombreux. Nous sommes loin de l'équité. Le modèle américain implique notamment la création de franchises et l'absence de montées et de relégations. Ce système est éloigné du système de clubs régissant le sport européen depuis des décennies. Dès lors que nous n'entrons pas dans ce modèle, l'équité parfaite est impossible. Vous n'empêcherez pas qu'il y ait davantage d'argent à Paris qu'à Perpignan, même si je le regrette.
Le sport américain fonctionne ainsi car il n'est pas exposé à la compétition internationale ; il évolue en vase clos. L'aléa sportif est très grand. Une partie des droits TV est répartie équitablement entre les clubs de Ligue 1 et en intégralité en Ligue 2. Il n'existe pas en Europe de montant maximum d'investissement pouvant être consenti par un repreneur afin de favoriser les desseins sportifs qu'il a en tête. Le fair-play financier ne corrige pas ce point ; il permettra de contrôler le sponsoring et certains déséquilibres financiers entre les clubs, mais ne comprimera pas les dépenses pour établir l'égalité. La Formule 1 est le seul sport prévoyant un tel plafond de dépenses.
Les mécanismes d'autorégulation liés au fonctionnement des DNCG freinent les ambitions de recrutement des clubs en s'assurant que les dépenses sont raisonnées. La masse salariale de plus de la moitié des clubs professionnels est sous contrôle et certains sont interdits de recrutement pour éviter les dérives et introduire des éléments d'équité.
Un décret nous interdit de réglementer sur les critères de montées et descentes. La DNCG opère toutefois un contrôle des budgets prévisionnels pour que le club ne se mette pas en danger lors de sa montée.
Les subventions sont sans lien avec l'équité, dès lors que les montants sont votés dans le respect des procédures et des plafonds. La DNCG contrôle la production des documents et la conformité des budgets. Le sénateur Dufaut connaît bien la problématique de la rupture d'équité puisque le club d'Avignon a plusieurs fois été sanctionné en raison des distorsions constatées entre les budgets et les comptes réalisés. Les DNCG contrôlent les masses salariales de 90 % des clubs de volleyball.
Les normes sont terriblement contraignantes pour les collectivités. Jean-Pierre Hugues indiquait précédemment que les fédérations imposent des normes. Pourtant, de mémoire, la fédération française de football nous a dit que celles-ci étaient définies par la ligue.
Lors de sa montée en première division, Avignon a eu trois mois pour aménager un stade de 17 000 places, pour un coût de 8 millions d'euros. Le club est redescendu l'année suivante. Même si nous sommes bien classés, l'affluence moyenne se situe aux alentours de 1 800 spectateurs. Un citoyen qui constate que le stade est vide se pose la question de la pertinence de sa construction.
La ligue n'a pas la capacité à émettre des normes sportives. La fédération a récemment dégradé les normes pour les clubs de National afin de tenir compte de la pression des collectivités locales, tout en maintenant celles de la Ligue 1 et de la Ligue 2. Les clubs passant du National à la Ligue 2 devront ainsi combler un écart encore plus important.
Les propos de mon collègue de la fédération sont étonnants puisqu'une commission fixe les normes. À la ligue, nous préparons les montées des clubs en les conseillant sur des critères financiers et humains. Nous leur recommandons également d'assurer un accueil correct des télévisions. Nous ne fixons jamais d'obligation de mise aux normes.
Lorsque Créteil est devenu professionnel, le club et la ville souhaitaient que des travaux soient rapidement effectués. Nous avons discuté afin que les aménagements fondamentaux permettant de recevoir le public dans un certain confort soient réalisés. Le club a ainsi pu bénéficier des autorisations nécessaires pour entrer dans un championnat professionnel. La ville, qui a anticipé le besoin, possédait davantage de compétences techniques que le club pour piloter ces aménagements.
La ligue a perdu sa capacité à imposer un nombre de places minimal. Nous avons perdu un contentieux et payé d'importants dommages financiers. Les exemples que vous citez ne peuvent plus se reproduire.
Elle date de 2003.
Il est impossible d'imposer des aménagements de stades à des fins commerciales ou de confort, mais l'obligation est souvent implicite. Des problèmes se posent dans la retransmission des matchs, par exemple si la luminosité est insuffisante. Les médias imposent-ils à la ligue des contraintes dans les contrats ?
En basketball, les changements réguliers des configurations sportives obligent les collectivités à revoir l'aire de jeu. Envisagez-vous une maîtrise de ces réglementations ?
Les clubs n'ont aucune obligation à se plier aux normes télévisuelles. Ils sont toutefois indirectement sanctionnés si les retransmissions depuis leur stade sont impossibles. Canal+ est réticent à diffuser les matchs qui se jouent à Perpignan en raison de zones d'ombres constatées dans le stade. Le club ne bénéficie de quasiment aucune retransmission en premium le soir.
Les contrats qui nous lient aux diffuseurs n'incluent aucune exigence relative au nombre de lux. Le passage à la haute définition oblige toutefois à demander aux clubs de renforcer leurs équipements. Parfois, ces aménagements ne sont pas réalisés ou sont mal faits, mais il n'y a jamais de sanction sportive. L'unique sanction est que le diffuseur opte pour une autre équipe et une autre enceinte pour son match premium. L'état de la pelouse, sa qualité technique et visuelle ou encore le taux de remplissage des gradins jouent un rôle dans la décision du diffuseur, car ils impactent le spectacle sportif. Encore une fois, il n'existe aucune contrainte juridique.
En basketball, les obligations d'éclairage sont imposées par le diffuseur. La ligue a dû intervenir pour que Canal+ diffuse un match de Nanterre, en dépit d'un mur visible d'un côté du terrain. Un mur ou une tribune vide sont terribles pour une retransmission télévisée.
Une seconde contrainte, spécifique au basketball, provient de la gestion des coupes d'Europe pas un organisme privé. L'Euroligue impose des normes aux clubs, qui doivent faire ce qu'ils peuvent pour y répondre - nombre de sièges, confort, caméras. Dans la seconde coupe d'Europe, la France est le seul pays à ne pas bénéficier d'un diffuseur qui prenne en charge les frais de diffusion. Le club est obligé de produire des images pour l'équipe visiteuse qui retransmet la rencontre dans son pays. Le coût se situe entre 20 000 et 30 000 euros de sous-traitance pour chaque match. Nous sommes en retard sur ce point, même par rapport aux pays de l'Est. Le sport professionnel français se trouve encore à l'âge de pierre.
Les diffuseurs ne versent aucun droit TV au volleyball. Aussi, nous n'imposons aucune pression financière aux clubs dans l'amélioration de leurs équipements en vue d'une retransmission en championnat.
L'avis du Conseil d'État en 2003 a entraîné des problèmes, non pas tant sur le pouvoir normatif des ligues que sur l'absence de pouvoir normatif dans l'exploitation des salles. Les collectivités ne peuvent plus se reposer sur une norme pour justifier leur investissement puisqu'aucune norme n'existe en matière d'infrastructure sportive. Ce point nous pose problème en handball. La ligue a été créée en 2004, soit après le décret. L'absence de référentiel explique sans doute le retard accumulé dans les salles qui tarde à se rattraper.
Les problèmes sont identiques dans le sport féminin. J'ai été maire d'Arras. Les aménagements liés aux nouvelles normes sont très coûteux. Elles modifient les équipements pour un résultat aléatoire et souvent ponctuel. Sans le concours des fédérations nationales pour réguler les normes européennes et internationales, il est impossible de s'organiser. J'ai entendu que la volonté des sports de salle est d'organiser leur diffusion sur le territoire. Vous ne pouvez pas exercer seuls ; vous devez trouver des appuis au niveau européen. La pression est la seule solution. Les fédérations ne peuvent pas y parvenir seules ; elles ont besoin d'un appui européen.
Le football féminin veut se développer. Eurosport a récemment diffusé Arras-Lyon à 20 heures 45. Comme il manque des lux dans le stade et que la diffusion est imposée, le club a dû trouver un autre stade. Les moyens ne sont pas pris pour développer le sport de haut niveau en France.
J'entends depuis longtemps les propos de M. Goze sur le système d'invitations. Arras possède une tradition de rugby. Sans les aides de la fédération et de la ligue, il sera difficile d'étendre le marché du rugby professionnel à l'ensemble du territoire, tant celui-ci est concentré dans le sud-ouest - outre Paris et Lyon. Les supporteurs sont présents et les collectivités demandeuses, mais les ligues et fédérations doivent leur répondre.
Nous avons joué les demi-finales de Top 14 à Lille et à Nantes. Nous ne recourons pas à un système d'invitations. Nous proposons une compétition au niveau de la Fédérale 1, seulement ouverte aux clubs dont les dossiers ont été acceptés. Il s'agit d'un championnat à part à l'issue duquel deux équipes monteront en Pro D2, en remplacement des deux qui seront reléguées.
Nous avons pu instaurer le salary cap dans le rugby en raison du peu de concurrence internationale. Le fait que nous soyons leader nous permet de prendre ces dispositions. Le salary cap régule les masses salariales et facilite la gestion entre les équipes. Les écarts de rémunération nuisent à la compétition et à la qualité des matchs. Il s'agit là d'une particularité de notre sport.
Le schéma de concurrence européen pose la question du retard pris en France. Nous sommes parfois obligés de mettre très rapidement les installations aux normes européennes. Une salle doit contenir 5 000 places. En France, elles contiennent majoritairement entre 3 500 et 4 500 sièges. Pourquoi sommes-nous si frileux ? Le coût n'explique pas tout, car il se trouve davantage dans le fonctionnement que dans la construction. Nos salles sont trop coûteuses - environ 30 % plus chères qu'en Espagne ou en Italie - et trop longues à construire - environ six à sept ans. Le système de normes et de recours complexifie les démarches. Lyon est un exemple, mais il n'est pas le seul. Notre système démocratique est poussé à l'extrême. Les salles évoluent grâce aux obligations de procéder à des améliorations.
Nous avons mis en place un système qui compile un match pour les réseaux sociaux et la télévision. Six de nos seize salles de Pro A ne sont pas connectées à Internet pour permettre d'appliquer ce dispositif.
J'évoquais la mutualisation. Il existe dans votre région, madame Demessine, trois clubs qui évoluent en première division. Les trois peuvent se trouver en situation difficile. Le pouvoir politique a un rôle à jouer puisqu'il finance les clubs.
Le rugby travaille à la construction d'un équipement propre, géré par la fédération et Lyon construit un stade financé par des fonds privés. Vous évoquiez le manque d'une infrastructure pour accueillir des compétitions internationales et des finales de handball, volleyball et basketball. Menez-vous une réflexion commune autour du partage d'un équipement digne de ces rencontres ?
J'ai entendu parler du projet d'augmentation de la capacité de la Halle Carpentier, mais nous ne sommes pas impliqués.
Nous menons des réflexions avec le handball, car le Paris Saint-Germain pourrait s'intéresser à d'autres sports. Nous avons trouvé des terrains vierges à la périphérie de Paris. La collectivité accepte de les céder à un prix intéressant afin que les Qataris y construisent des infrastructures. Des discussions existent avec les collectivités. Dunkerque possède des clubs au plus haut niveau en basketball et en handball ; les deux vont cohabiter.
Je me permets de préciser cette question : la fédération française de rugby souhaite financer une infrastructure dont elle sera propriétaire ; le volleyball, le handball et le basketball s'accordent pour dire qu'il manque une grande salle à Paris. Existe-t-il une réflexion afin que les trois fédérations ou ligues portent un projet commun privé afin de satisfaire ce besoin ?
Nous nous sommes renseignés avec la fédération pour reprendre la salle olympique de Londres qui était démontable. Le coût de l'opération était de 15 millions d'euros. Nous n'avons toutefois trouvé ni le terrain ni un club résident à même de l'occuper. Il est très compliqué de réunir tous les éléments.
Personnellement, je ne suis pas favorable à un financement privé des infrastructures, car il s'agit d'un travail régalien. Les partenariats public-privé sont envisageables, mais il est du rôle de la collectivité d'assurer des infrastructures sportives.
Au regard de la réaction de la ministre sur le projet de la fédération française de rugby, je voudrais connaître son opinion pour un projet privé, commun à nos trois fédérations, qui concurrencerait Bercy. Une telle démarche n'est pas souhaitable et n'est pas souhaitée par l'État français. Les ligues et fédérations pourraient participer, même financièrement, mais difficilement être porteuses du projet.
Les investissements apparaissent dangereux pour certains élus. Dans le même temps, vous soulevez de réels besoins qui ne semblent pas pharaoniques.
Je pense que l'intercommunalité deviendra l'interlocuteur principal du sport professionnel. Les attentes dépendent d'une collectivité de cette taille, hormis pour certaines grandes villes à même de rivaliser. Nous sommes à la croisée des chemins, car les intercommunalités ne disposent pas toutes d'une compétence sportive. Les collectivités font preuve d'un manque de politique sportive qui explique le retard pris dans les salles. Nous prouvons aujourd'hui que nous parvenons à nous entendre. Du temps sera toutefois nécessaire pour qu'une visée sportive soit partagée par les collectivités et le mouvement sportif. Nous devons mieux élaborer ces fusions pour rassembler des énergies. Je n'ai pas réussi avec le basketball - probablement car nous voulions aller trop vite - mais les projets s'imposeront. Nous avons réussi ces fusions en rugby, en athlétisme, en water-polo et en natation grâce au travail en intercommunalité sur les équipements et le développement du sport professionnel dans le territoire. Les élus lancent un appel. Vous devez en lancer un auprès des collectivités. C'est ainsi que nous trouverons des solutions aux problèmes.
À la lecture des différents rapports sur le sport professionnel, et particulièrement sur les infrastructures, les projets soulignent la nécessité pour les collectivités de disposer de plusieurs points de vue. Or, les ligues et les fédérations ne sont pas consultées sur ces thématiques. Nous comptons pourtant des personnes formées, qui possèdent un oeil extérieur lucide et connaissent la situation sur les territoires. Le pouvoir normatif a été retiré aux ligues, mais un avis différent sur un projet est bénéfique à la collectivité.
Comme vous, je souhaite que le sport professionnel soit régi à l'échelle de l'agglomération. Vous dites également que le temps viendra pour la mutualisation, mais nous devons être vigilants, car si les infrastructures sont déjà prises, un problème se posera dans l'identification des clubs choisis. Nous devons avancer rapidement, car lorsqu'une ville possède déjà sa structure, il est difficile de l'abandonner pour mutualiser les équipements. Nous avons rencontré l'ensemble des agglomérations pour accélérer ces démarches.
Le vote des budgets dans les agglomérations est souvent difficile, car les intérêts divergent.
Il n'existe pas réellement de problématique autour des stades puisque les conditions d'accueil du public sont correctes. En revanche, nous entendons que les sports de salle manquent cruellement d'équipements pour évoluer aux niveaux nationaux et internationaux. Vous avez besoin de salles de plus de 5 000 places. Il n'est pas souhaitable d'attendre les investisseurs extérieurs. Un débat doit avoir lieu entre les collectivités, les fédérations, les ligues et l'État sur le financement de ces structures.
La demande des clubs d'avoir la main sur la gestion des équipements est forte. Il semble que les ligues sont plus réservées sur cette question.
Je suis représentant de la ligue, mais également président d'un club professionnel. Si nous devons nous lancer dans un montage financier ou attendre un investisseur pour financer nos infrastructures, rien ne serait fait. Même dans le football, combien de clubs ou d'agglomérations ont les moyens de construire ? Les montages économiques avec les collectivités ont également leurs limites.
Ces gestions ne sont peut-être pas souhaitées par les collectivités d'accueil pour des raisons politiques. Pour la majorité de nos clubs, la capacité financière des investisseurs est insuffisante. Le problème du sous-financement des clubs se pose déjà ; il serait accru si de nouveaux projets de stades devaient être développés. L'accueil du public est effectivement très correct et s'améliorera avec le temps.
Cinq clubs du Top 14 évoluent dans des stades de moins de 10 000 places alors que la fréquentation moyenne en championnat est de 13 500 spectateurs. Comme l'a dit Jean-Pierre Hugues, même s'il semble que les clubs souhaitent évoluer, peu de propriétaires peuvent les soutenir et se lancer dans un tel financement. La volonté potentielle est freinée par la capacité à financer ces investissements.
Peu de nos stades ont profité de la coupe du monde 1998 ou de l'Euro 2016. Un travail important doit être réalisé dans l'amélioration de nos stades. Le contenant fait le contenu. Nous disons que le public est moins actif que dans d'autres pays, mais il faut comparer les stades. Nous revenons à l'éternelle question de la poule et de l'oeuf. Le développement des stades serait porteur du développement des publics vers le sport.
Nous vous avons transmis quelques questions complémentaires ; nous analyserons vos contributions écrites avec plaisir. Nous souhaitons notamment une précision sur le niveau de subvention des collectivités territoriales auprès des clubs professionnels.