Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Réunion du 12 novembre 2014 : 2ème réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission examine tout d'abord le rapport pour avis de M. Louis Duvernois sur le projet de loi de finances pour 2015 sur les crédits de la mission « Action extérieure de l'État ».

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

Au sein du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » de la mission « Action extérieure de l'État », seule la politique d'attractivité universitaire et scientifique, conduite auprès des étudiants et chercheurs étrangers par le biais de Campus France et de nos programmes de bourses, connaît un réel dynamisme, en bénéficiant d'un surplus de crédits de l'ordre de cinq millions d'euros. En revanche, les crédits consentis à notre réseau culturel à l'étranger et à notre réseau d'établissements scolaires à l'étranger diminuent (hors dépenses de personnel) respectivement de 1,6 % et 2,2 %.

Il convient, à mon sens, d'alerter le Gouvernement sur la nécessité de modérer, dans le cadre du prochain budget triennal, les normes de réduction de la dépense applicables à notre diplomatie culturelle et d'influence : les opérateurs du programme 185 ont d'ores et déjà largement contribué aux efforts de redressement des comptes publics avec une diminution des crédits culturels, hors dépenses de personnel, de plus de 32 % au cours de la période 2009-2015. L'effondrement des crédits d'intervention culturels, de l'ordre de plus de 60 % sur la même période, nourrit le découragement de nos personnels culturels à l'étranger, qui n'ont plus les moyens de mettre en oeuvre des opérations culturelles ambitieuses et de soutenir la créativité des artistes français et étrangers dans le monde.

Parmi les trois principaux opérateurs de notre action culturelle extérieure, l'Institut français est sans doute celui qui se trouve confronté à la situation la plus délicate, en ces temps douloureux de rétrécissement des marges de manoeuvre budgétaires. La programmation pluriannuelle de ses moyens dans le cadre du contrat d'objectifs et de moyens (COM) le liant à l'État pour la période 2011-2013 s'est vue régulièrement contrariée par l'application continue de mesures d'économies dans le cadre de l'effort national de redressement des comptes publics. Sa dotation, d'un montant de 31,3 millions d'euros en 2015, se voit logiquement appliquer la norme de réduction des subventions aux opérateurs de l'État de 2 %.

En 2013, dans son rapport sur le réseau culturel de la France à l'étranger, la Cour des comptes estimait que seulement 14 % du budget d'activités de l'Institut français en 2012 était consacré à des subventions directes au réseau des établissements culturels publics à autonomie financière, alors que l'objectif affiché était de 37,5 %.

Toutefois, l'institut rappelle, pour sa part, que son apport au réseau ne se résume pas au versement d'une subvention directement aux instituts culturels à l'étranger ayant statut d'établissement à autonomie financière. Il souligne la nécessité de prendre en compte le conseil, l'expertise, les moyens matériels et les outils mis à la disposition des établissements pour leur permettre de conduire leur programmation dans les meilleures conditions. À ce titre, il appelle à tenir compte des crédits d'intervention qui sont versés aux partenaires extérieurs en coordination avec le réseau. Il considère que 68 % de son budget d'activité, soit plus de 15 millions d'euros, ont été versés directement ou indirectement au réseau culturel. Par ailleurs, un total de 5,7 millions d'euros sera, en 2015, distribué aux 385 alliances françaises subventionnées par le ministère des affaires étrangères, soit un montant équivalent à celui consenti en 2014.

L'expérimentation du rattachement du réseau culturel à l'Institut français s'est achevée le 31 décembre 2013 et le ministre des affaires étrangères a considéré que ses résultats n'étaient pas à la hauteur des effets escomptés. Il serait dommageable, néanmoins, de revenir au statu quo ante. À cet égard, je compte interroger le ministre des affaires étrangères sur les moyens qu'il compte donner à l'Institut français pour imposer sa légitimité dans le pilotage stratégique du réseau culturel, peser sur l'organisation d'opérations d'envergure dans des zones d'influence prioritaires alors que son budget d'intervention se trouve chaque année amputé et emporter l'adhésion des agents du réseau en leur offrant de véritables perspectives de carrière.

Le montant total de la dotation versée par l'État à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) s'établit, dans le projet de loi de finances pour 2015, à 537,2 millions d'euros, soit une légère diminution par rapport à 2014. L'AEFE constitue un levier puissant et précieux de notre dispositif d'influence culturelle, linguistique et intellectuelle auprès des élites étrangères.

La réforme de la politique de bourses, consécutive à la suppression de la prise en charge des frais de scolarité pour les lycéens, a eu pour effet, dans un contexte d'enveloppe budgétaire contrainte, de diminuer sensiblement les quotités de bourse pour un grand nombre de familles. Le pourcentage des familles ayant bénéficié d'une bourse à 100 % est ainsi passé de 59 % en 2012-2013 à 45 % en 2013-2014, alors que, parallèlement, les frais de scolarité ne cessent d'augmenter, obligeant des familles françaises à retirer leurs enfants de nos établissements homologués.

Pour rappel, l'AEFE est la seule à assumer la prise en charge à l'étranger des pensions civiles de personnels détachés de l'éducation nationale. Sur les 10 000 personnels qui assurent leur service en dehors de l'éducation nationale, 8 000 sont affectés à des établissements d'enseignement français à l'étranger. Parmi ces derniers, 6 500 sont des expatriés résidents, dont les pensions civiles sont prises en charge par l'agence. En revanche, les établissements homologués bénéficiant de détachés directs n'ont pas à payer les pensions civiles correspondantes. On estime à 60 millions d'euros le montant de ces pensions civiles non provisionnées. Cette situation crée non seulement de la dette mais désavantage l'opérateur.

Campus France, opérateur chargé de la promotion de notre système d'enseignement supérieur et de recherche à l'étranger, peut compter sur la sanctuarisation de notre politique de bourses en faveur des étudiants et chercheurs étrangers, dont il assure en grande partie la gestion. Il peut s'appuyer sur un réseau solide et performant de 147 « espaces Campus France » et 69 antennes relais dans 116 pays. En prenant en charge l'ensemble de la chaîne d'accueil des étudiants étrangers, de l'information sur l'offre française d'enseignement supérieur au logement étudiant en passant par le versement à l'étudiant de l'allocation d'entretien et la prise en charge de sa couverture sociale, Campus France a gagné la confiance des élites étrangères.

Le site Internet de Campus France recense l'ensemble des dispositifs de guichet unique d'accueil présents en régions et, le cas échéant, les aides et les services proposés par les collectivités territoriales en direction des étudiants étrangers. Campus France prévoit, de plus, la mise en place en 2015 d'un parrainage international avec la branche française de l'association européenne « Erasmus Student Network », ESN France, afin de favoriser l'accueil et l'intégration des étudiants étrangers par d'autres étudiants déjà installés, qu'ils soient Français ou eux-mêmes étrangers. Il lui appartient également de favoriser l'émergence d'un réseau mondial d'ambassadeurs de l'enseignement supérieur français, que ce soit par la constitution d'un registre des anciens étudiants (alumni) étrangers, qui devrait prendre la forme d'une base de données mise en place à la mi-novembre 2014, ou par la dissémination d'« enseignants relais » au sein des universités étrangères, comme le suggère la Cour des comptes dans le rapport que je citais à l'instant.

Des progrès peuvent encore être réalisés en ce qui concerne la délivrance de titres de séjour aux étudiants étrangers. Campus France a constaté, en effet, une forme de zèle au sein de certains consulats qui réclament aux étudiants étrangers des pièces non exigées par les circulaires et les télégrammes diplomatiques (TD) relatifs à l'octroi de titres de séjour par les postes diplomatiques à l'étranger, notamment en posant des conditions de logement qui ne figurent pas dans ces documents. En particulier, Campus France s'est ému que certains consuls généraux opposent un barrage quasi systématique aux demandes de titres de séjour en vue de l'apprentissage du français langue étrangère (FLE). À cet égard, je partage les propositions émises par Campus France qui demande, d'une part, d'exonérer de l'obligation de visa les ressortissants étrangers souhaitant intégrer un parcours d'apprentissage FLE n'excédant pas six mois et, d'autre part, de rétablir l'obligation de motivation des décisions de refus de visa étudiant prises par les autorités consulaires.

Enfin, je souhaiterais aborder la question de l'avenir de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), qui doit préparer la succession de son secrétaire général, M. Abdou Diouf. Les chefs d'État et de gouvernement des 57 pays membres de l'OIF devront choisir, à la fin du mois de novembre, au sommet de la Francophonie à Dakar, une personnalité faisant consensus parmi les cinq candidats qui se sont jusqu'ici publiquement déclarés : quatre candidats africains (Maurice, République du Congo, Burundi et Guinée équatoriale) et une candidate canadienne, en la personne de Mme Michaëlle Jean, ancienne gouverneure générale du Canada.

Historiquement, le poste de secrétaire général de l'OIF, créé en 1997 à l'issue du sommet de la Francophonie de Hanoï, a toujours été détenu par un Africain, le Sénégalais Abdou Diouf ayant succédé en 2003 à l'Égyptien Boutros Boutros-Ghali.

La candidature de Mme Michaëlle Jean, bien qu'ardemment soutenue par le gouvernement canadien et ceux des provinces du Québec et du Nouveau-Brunswick, soulève un certain nombre de critiques de la part de ceux qui estiment que la nomination d'une ancienne gouverneure générale du Canada, personnalité politique non élue, représentante de la Reine de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord qui dirige, par ailleurs, le Commonwealth, constituerait un signal troublant pour la Francophonie multilatérale.

Je tiens à souligner l'importance pour la France de peser de tout son poids sur un choix aussi stratégique que la désignation du futur secrétaire général de l'OIF et déterminant pour la capacité de communauté francophone à s'imposer comme un espace géopolitique cohérent au sein d'un monde globalisé. Il appartient à la France de marquer de son empreinte les prochaines orientations stratégiques de l'OIF, à l'heure où notre pays entend renouveler, notamment à travers les interventions recentrées de l'Agence française de développement, son partenariat privilégié avec l'Afrique dans ses dimensions géopolitique, linguistique, éducative, culturelle et économique.

Faut-il encore rappeler que la francophonie des peuples, imaginée au XIXe siècle par le géographe français, Onésime Reclus, est devenue au XXe siècle une idée africaine concrétisée par des dirigeants politiques après la décolonisation ? La promotion de la langue française constitue le socle fondateur de ce projet de solidarité dans près de 70 pays sur tous les continents. La francophonie, c'est au XXIe siècle, l'idée moderne d'une culture librement partagée, expression d'une volonté politique de participer à la marche du monde dans le respect des singularités linguistiques, culturelles et religieuses.

En conclusion, malgré les réserves que j'ai émises sur l'érosion sensible des crédits culturels sur la période 2009-2015, je vous proposerai, mes chers collègues, de donner un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 185 au sein de la mission « Action extérieure de l'État ».

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Je souhaite aborder plusieurs sujets.

Tout d'abord, si l'AEFE participe à l'effort demandé à toutes les administrations, son budget a peu diminué, ce qui est un signe très important en faveur de la jeunesse et de l'éducation. Le réseau continue à se développer et comprend 494 établissements homologués par l'éducation nationale. Ce succès s'accompagne, cependant, d'une certaine inquiétude concernant la difficulté d'obtenir des enseignants titulaires détachés, la France ayant déjà des difficultés à pourvoir à tous les postes. C'est une question à suivre de près.

Concernant les bourses scolaires, je n'ai pas la même approche que vous de la réforme des bourses. Certes, moins d'enfants reçoivent une bourse à 100 %, mais, aujourd'hui, 21 % des enfants français scolarisés dans le réseau AEFE perçoivent des bourses qui sont, selon moi, mieux réparties.

Je n'émets pas les mêmes réserves que vous sur la candidature de Mme Jean à l'OIF, car cette Canadienne d'origine haïtienne très dynamique considère la francophonie comme un vecteur économique et met la jeunesse au coeur de son projet.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

J'ai l'honneur de siéger au conseil d'administration de Campus France. J'atteste que l'établissement a su affirmer son rôle malgré les difficultés rencontrées en 2012. Toutefois, il faut rester vigilant afin que les crédits soient bien utilisés pour la formation des agents en poste. Parfois perdurent de mauvaises habitudes ou de mauvaises informations, à l'instar de la prise en compte de l'évolution du système d'enseignement supérieur qui n'est pas encore toujours appropriée par les personnels dans les postes, notamment s'agissant des nouvelles opportunités de poursuite d'études en langues étrangères ouvertes par la loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche.

Concernant la simplification des mesures d'accueil des étudiants étrangers, il faudra être vigilant, au moment de l'examen du texte sur l'immigration, de manière à mettre en place des dispositifs plus accueillants et sécurisants pour les étudiants étrangers qui choisissent d'étudier en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Annick Duchêne

Je confirme que des visas sont refusés à certains étudiants, certains consulats pouvant parfois commettre des maladresses à ce sujet.

J'ai rencontré Mme Jean. C'est une femme exceptionnelle, intelligente et qui a beaucoup d'idées, mais je reconnais que la nomination d'une ancienne responsable canadienne pourrait susciter des interrogations, notamment en matière de partenariats économiques sur le continent africain.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

Je partage l'analyse de Mme Lepage sur le réseau de l'AEFE. Cela étant, il est en forte croissance et, par conséquent, le coût de son fonctionnement augmente rapidement et il semble difficile de l'accompagner dans les meilleures conditions dans un contexte budgétaire tendu.

Concernant les bourses, je tiens les statistiques de l'AEFE. On peut toujours supposer que certaines ont été attribuées de façon un peu laxiste en dépit des barèmes existants liés aux conditions de ressources des familles. Quoi qu'il en soit, les bourses diminuent dans leur quotité alors que, parallèlement, les frais de scolarité augmentent. Le problème de notre enseignement à l'étranger ne réside pas dans la pédagogie, c'est un souci financier. Nous n'avons plus les moyens de financer ce réseau !

J'ai pu observer, au cours d'une mission, que certaines familles françaises sont désormais contraintes d'apporter un complément financier aux bourses qui ont diminué, de même que des familles étrangères, dont les enfants représentent les deux tiers des effectifs de notre réseau. Sans la contribution financière de ces familles étrangères, il est évident que nous ne pourrions même plus accueillir convenablement les élèves français. Quand les bourses diminuent, la charge pour les familles augmente, ce qui devient de plus en plus insupportable. Cette situation est identique d'un pays à l'autre.

L'État employeur se dérobe à ses responsabilités vis-à-vis des enseignants français détachés à l'étranger, au titre de leurs pensions. Il se défausse sur les établissements, dégradant ainsi leur équilibre financier déjà fragile. Les frais de scolarité vont ainsi continuer à augmenter, ce qui va entraîner le retrait d'un certain nombre de familles.

Sur l'OIF, je ne prends position pour aucune candidature en particulier, quelle qu'elle soit. Je considère simplement que ce poste revêt une nature éminemment politique. Or, le Canada qui est membre de l'OIF est dual sur le plan linguistique, il fait partie intégrante de la monarchie constitutionnelle britannique et son gouverneur général est nommé par la Reine de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord. Je pose juste la question d'une pertinence éthique sur ce choix. Par ailleurs, Mme Jean n'a jamais été élue mais nommée au poste de gouverneure générale. Et un autre candidat africain est arrivé au pouvoir à l'issue de trois coups d'État !

Je partage la remarque de Mme Gillot sur les crédits alloués à Campus France et j'en tiendrai compte dans mon avis budgétaire. Cet opérateur joue un rôle central pour la promotion de l'enseignement supérieur français dans toutes ses composantes. Campus France est un organisme précieux, il est né dans des conditions excessivement difficiles, et a pâti de la rivalité entre les ministères des affaires étrangères et de l'enseignement supérieur et de la recherche. Il a réalisé de gros efforts en faveur de la formation de ses personnels à l'étranger. Quand il y a de la bonne volonté, il y a de l'avenir. Campus France est désormais bien installé et apporte à notre pays de l'influence, du rayonnement et du savoir-faire.

La question des visas est récurrente. C'est un sujet qui peut faire l'objet d'une réflexion de la part de notre commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Pour vous encourager dans cette démarche, je vous signale qu'il y a quelques années, l'Afrique n'a pu être représentée à un colloque mondial organisé par l'Institut coopératif de l'école moderne (ICEM-Pédagogie Freinet) qui a eu lieu en France, le délégué camerounais n'ayant jamais obtenu son visa auprès du consulat malgré les interventions du ministère de l'Intérieur et des Affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Il en est de même pour les artistes étrangers qui restent parfois bloqués dans leur pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je partage cette dernière intervention. J'ai dû batailler dur, il y a quelques années, pour faire venir un musicien ukrainien qui présentait pourtant toutes les garanties.

Je souscris à la présentation de notre rapporteur pour avis et je partage son inquiétude sur l'érosion des crédits de l'AEFE, même si chacun doit participer aux efforts de redressement des finances publiques, ainsi que sur la préoccupation générale d'obtention des visas par les étudiants étrangers.

Alerter le Gouvernement pour modérer les normes de réduction des dépenses dans le prochain budget triennal semble être d'actualité.

Mon interrogation porte sur l'Institut français, l'expérimentation du rattachement du réseau est arrivée à échéance en décembre 2013, les crédits ont diminué. L'institut a-t-il toujours les moyens de mettre en oeuvre son COM ? C'est aussi un sujet à suivre de très près.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Prunaud

Malgré quelques remarques du rapporteur pour avis, que nous partageons, nous n'acceptons pas la baisse du budget, en particulier les crédits prévus pour les bourses. Aussi le groupe CRC émettra-t-il un avis défavorable à l'adoption des crédits.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l'État » du projet de loi de finances pour 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Avant que nous procédions à l'audition MM. Patrick Kanner et Thierry Braillard, je voudrais faire une rapide intervention relative à l'organisation de nos travaux. Lors de la réunion du bureau de notre commission ce matin même et au vu de nos premières réunions, il m'a semblé nécessaire d'instaurer une forme de discipline afin que chacun puisse s'exprimer. Conformément aux propositions que j'ai formulées, le bureau a décidé de fixer le temps de parole de la manière suivante lors des auditions des personnes extérieures :

- 5 minutes pour le ou les rapporteurs ;

- 3 minutes pour un orateur de chaque groupe ;

- puis 2 minutes pour les autres membres de la commission qui souhaiteraient interroger les personnes auditionnées.

Afin de rendre nos échanges plus dynamiques et plus intéressants, il me paraît important qu'un véritable jeu de questions réponses puisse se mettre en place plutôt que chacun se livre à des observations d'ordre général.

La commission auditionne ensuite MM. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, et Thierry Braillard, secrétaire d'État chargé des sports, sur le projet de loi de finances pour 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Nous entendons à présent M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, et M. Thierry Braillard, secrétaire d'État chargé des sports, sur les crédits de leur ministère. M. Braillard va s'exprimer le premier, M. Kanner nous rejoindra à l'issue du Conseil des ministres.

Dans une période de très forte contrainte budgétaire, les interrogations ne manquent pas. Quel avenir pour le Centre national pour le développement du sport (CNDS) ? Comment financer la priorité donnée au service civique ? Dans quelques semaines, nous examinerons le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République. À cette occasion, le sport pourrait être sanctuarisé parmi les domaines de compétence partagée. Les centres de ressources, d'expertise et de performance sportives (Creps) pourraient être transférés aux régions, ce qui soulève certaines difficultés, si j'en crois les débats tenus en commission des finances, à l'Assemblée nationale comme au Sénat. Enfin, les représentants du monde associatif nous ont fait part de leurs craintes quant à l'impact de la future loi sur le fonctionnement des associations, notamment au niveau communal, au plus près du terrain. Ils s'interrogent sur les modalités de transition entre le système actuel et celui à venir.

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État chargé des sports

Pour autant que je puisse en juger, les présidents de conseils régionaux accueillent très favorablement la décentralisation des Creps. S'il y a une chose dont on ne peut pas nous accuser, c'est d'avoir négligé le travail de concertation ! J'ai visité de nombreux Creps et rencontré plusieurs présidents de conseils régionaux ainsi que leurs vice-présidents chargés des sports.

Je suis surpris que vous évoquiez des craintes du milieu associatif, alors que le budget des sports, et en particulier le soutien aux associations sportives, sont quasiment préservés, dans une conjoncture budgétaire particulièrement difficile. Rassurez donc vos interlocuteurs : le soutien dont ils bénéficient sera maintenu, y compris celui lié à la fonction territoriale du CNDS.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je parlais des craintes relatives à la future loi territoriale et à ses répercussions sur la répartition des financements entre collectivités territoriales. Je n'ai pas mis en cause les soutiens budgétaires de l'État.

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État chargé des sports

Je ne représente ni l'association des régions de France (ARF), ni celle des départements (ADF), ni celle des maires (AMF), mais suis secrétaire d'État au sein d'un Gouvernement qui soumet à votre approbation deux lignes budgétaires. Le budget du programme « Sport » pour 2015 s'élève à 228 millions d'euros, contre 229 millions d'euros en 2014. La différence est due aux primes liées aux Jeux olympiques et paralympiques de Sotchi. Les crédits du CNDS proviennent de trois programmes. La participation nationale est maintenue à l'identique, les emplois aussi. Au niveau territorial, le soutien aux comités départementaux et régionaux olympiques et sportifs (CDOS et CROS) sera maintenu, ainsi que celui aux associations sportives, en particulier de proximité. La part équipement baisse de 13 millions d'euros : le CNDS a failli être mis en liquidation après 2011 car les autorisations d'engagement avaient été multipliées, mais sans crédits de paiement... Nous en subissons encore aujourd'hui les conséquences.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lozach

Je limiterai mes observations au programme « Sport » même s'il n'est pas sans lien avec le programme « Jeunesse et vie associative », notamment dans le cadre de l'effort consacré au service civique. Le point fort de votre budget est l'effort consenti au profit du service civique, notamment sportif. Je souhaite que vous inscriviez votre action dans la durée.

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État chargé des sports

Nous aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lozach

Trop de ministres et de secrétaires d'État se sont succédé à votre poste depuis 2007 pour conduire une politique sportive vraiment ambitieuse, qui réclame de la stabilité. Votre budget n'est pas substantiellement modifié et a été adopté à l'unanimité par la commission des finances du Sénat. Les priorités qu'il dégage sont largement partagées : sport pour tous, sport-santé et sport de haut niveau, développé grâce aux Creps, à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (Insep) et aux conventions passées entre l'État et les fédérations sportives - 2015 sera une année préolympique, le soutien de l'État au sport de haut niveau sera essentiel ! Pour renforcer l'emploi sportif, vous prévoyez de doubler le nombre de contrats d'apprentissage d'ici à 2017.

Un plan de redressement avait dû être mis en place dans l'urgence en 2012 pour le CNDS, qui était au bord de la faillite. La baisse des crédits d'équipement inquiète le monde du sport, comme nous l'écrivent les CDOS et les CROS. Avez-vous envisagé de supprimer la part équipement ? Comment la méthode pour promouvoir la candidature de la France aux Jeux olympiques de 2024 - juste avant l'Exposition universelle de 2025, pour laquelle notre pays pose aussi sa candidature - tiendra-t-elle compte des leçons de nos échecs passés ? Le prélèvement de 0,3 % sur la Française des jeux pour financer les stades devait s'arrêter en 2015. Finalement, il se poursuivra jusqu'en 2017. Comment se passe la préparation de l'Euro 2016 ?

Chaque année, le Sénat, attaché à une pratique vertueuse du sport, évoque les moyens consacrés à la lutte contre le dopage. L'État maintient sa subvention de 7,8 millions d'euros à l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), complétée par des crédits de prévention et de recherche. Vous souhaitez créer un statut du sportif. Qu'entendez-vous par là ? La fameuse question de l'indemnité versée par l'État au consortium qui gère le Stade de France revient chaque année dans nos débats. Ce problème a été réglé, au moins temporairement, par votre prédécesseur : la convention entre le consortium, la fédération française de football et celle de rugby prévoit un statu quo pour au moins six ans. Si le grand stade de la fédération de rugby est construit, il faudra veiller à sa desserte.

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État chargé des sports

Il faut bien réaliser des économies quelque part... Les 13 millions d'euros retranchés de la part équipement du CNDS auraient pu l'être sur la part nationale, qui finance des emplois directement affectés aux CROS et aux CDOS. Ou sur la part territoriale, dont ces structures perçoivent, outre les subventions des conseils généraux et régionaux, environ 8 ou 9 millions d'euros. Il ne faut pas vouloir le beurre et l'argent du beurre ! Nous assumons nos choix.

Ainsi, nous poursuivons le plan mis en place par Mme Fourneyron pour remettre à flot le CNDS. En 2011 - peut-être parce que l'année suivante était 2012... - une véritable frénésie d'engagements a été observée, mais ils n'étaient pas financés. Résultat : un déficit de 500 millions d'euros en 2012. Mme Fourneyron a eu le courage de mettre en oeuvre un plan de redressement qui s'étalera jusqu'en 2017. À l'heure actuelle, le déficit est encore de 240 millions d'euros. Nous inscrivons des crédits de paiement pour honorer les engagements pris.

Nous devons aussi nous demander si cette part équipement a un effet de levier sur les investissements dans les infrastructures sportives. La réponse nous est donnée par un rapport de l'inspection générale de la jeunesse et des sports, et elle est négative.

Enfin, quelle est la vocation du CNDS ? La part équipement doit-elle financer la rénovation des surfaces synthétiques des terrains de football - qui représente la moitié des demandes - ou favoriser des territoires qui manquent de moyens, des disciplines sportives peu médiatisées ? Dès 2016, le CNDS aura retrouvé ses marges de manoeuvre : raison de plus pour réfléchir ensemble à cette question.

Sur la candidature aux Jeux olympiques, je laisserai M. Kanner répondre.

Debut de section - Permalien
Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports

Pardon pour mon retard : le Conseil des ministres s'est terminé à 11 h 35 et je respecte les feux rouges...

Debut de section - Permalien
Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports

La capacité de la France à accueillir de très grands événements sportifs est une des composantes de son attractivité et de son rayonnement : Coupe Davis à Lille, Euro de basket l'an prochain, de football en 2016, candidature pour l'organisation de la coupe du monde féminine en 2019... Il n'est pas aberrant de présenter notre candidature à l'organisation des Jeux olympiques de 2024, car nous avons rattrapé notre retard et notre niveau d'équipement est désormais remarquable. Pour l'Euro 2016, nous disposerons de stades de football, qui pourront servir aussi à d'autres activités. Nous accueillerons le Championnat du monde de cyclisme sur piste à Saint-Quentin. Il ne nous manque rien, si ce n'est une très grande piscine olympique, démontable, et un village olympique, qui serait convertible en logements. Nous sommes en mesure de remplir les critères énoncés par la maire de Paris : candidature respectant le développement durable, vertueuse sur le plan économique et soucieuse des contraintes de l'agenda de la Ville de Paris. Le Comité français du sport international, sous la présidence de Bernard Lapasset estime, comme le président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) Denis Masseglia, que c'est au mouvement sportif d'être le principal maître d'ouvrage de cette candidature. L'État n'est là que pour faciliter les choses, et rassembler autour du volontarisme de la Ville de Paris. Il ne s'agit pas de contraindre mais de convaincre ! L'éventuelle candidature de Paris doit être nationale, populaire, et servir l'attractivité et le rayonnement de notre pays : tel est l'état d'esprit du Président de la République, du Premier ministre et du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État chargé des sports

La question du statut du sportif me tient à coeur, et je vous suggère d'inviter en janvier M. Jean-Pierre Karaquillo qui me rendra alors un rapport sur ce sujet. Le code du travail prévoit en son livre 7 un statut de l'artiste, un statut du mannequin, du concierge, mais pas du sportif ! Il y a un mois, la chambre sociale de la Cour de Cassation a requalifié le contrat d'un hockeyeur lyonnais et s'apprête à faire de même pour un rugbyman, estimant que le contrat à durée déterminée n'est plus adapté au monde du sport professionnel. Passer au contrat à durée indéterminée serait une première mondiale et causerait des difficultés sans nombre aux employeurs comme aux salariés. Pour autant, les sportifs doivent disposer d'un statut protecteur : ceux qui ne sont rémunérés qu'en nature - loyer pris en charge, défraiements, primes en cas de victoire - n'accumulent pas de droits à retraite et ne disposent pas d'une protection sociale. Les parlementaires doivent s'associer à ce projet.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Votre budget diminue de 1,3 % et les crédits du CNDS baissent de 13 millions d'euros, ce qui remet en cause certains projets ou reporte la charge de leur financement sur les collectivités territoriales.

Où en est la loi de modernisation du sport, qui devait être présentée en juin 2014 ? Le Président de la République annonçant la candidature française a été contredit le lendemain par la maire de Paris. Est-ce de bonne méthode ? J'ai rencontré des athlètes de niveau olympique qui n'ont pas les moyens de se préparer aux prochains jeux car leur sport est peu médiatique : les membres de l'équipe de France de bobsleigh, par exemple, sont soutenus par des bénévoles qui recherchent des financements pour eux. C'est inacceptable ! Votre ministère ne doit pas soutenir seulement les sportifs qui sont en haut de l'affiche.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement prévoyant 25 millions d'euros pour créer 5 000 postes de service civique. L'enveloppe prévisionnelle s'en trouve-t-elle augmentée ou s'agit-il d'un redéploiement ? La part de ces emplois financée par les collectivités territoriales pourra-t-elle l'être durablement, étant donné la diminution des dotations et les difficultés que les collectivités ont déjà à assumer le coût de la réforme des rythmes scolaires ?

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

La Ville de Paris et la région Ile-de-France vont s'investir dans l'organisation, en 2018, de la dixième édition des « Gay games ». Quelle sera la participation de l'État à cet événement qui promeut le sport pour tous tout en faisant reculer les préjugés ? Travaillez-vous à développer la pratique sportive sur ordonnance, qui a fait ses preuves ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Je me réjouis que votre budget soit préservé, ce qui vous donne les moyens d'assurer la cohésion sociale dont notre pays a besoin. Le service civique est un engagement fort du Président de la République. Quel sera le rythme de sa mise en oeuvre jusqu'en 2017 ? Membre du conseil d'administration du CNDS, j'ai connu la situation que Mme Fourneyron a trouvée en arrivant, qui explique l'année blanche en 2012. Comment les emplois d'avenir vont-ils progresser dans votre périmètre ministériel ? En qualité de rapporteur spécial de la commission des finances, j'ai rendu un rapport sur l'implantation du musée du sport à Nice. A-t-il trouvé son public ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Dans l'attente du rapport Karaquillo, le budget 2015 contient-il des dispositions pour soutenir les sportifs de haut niveau dans les disciplines les moins médiatisées ? L'Euro 2016 profitera-t-il aussi aux petits clubs amateurs ? Je crois comprendre que le CNDS reprendra son rôle lorsque ses finances seront rétablies...

Debut de section - Permalien
Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports

La dernière grande loi structurante date de plus de dix ans : c'était celle de Mme Buffet. Il est temps de remettre les choses à plat. Faut-il le faire par une loi-cadre à l'efficacité incertaine, ou privilégier un ensemble de textes complémentaires ? Nous n'avons pas encore tranché. Le sport en France, ce sont 17 millions de licenciés, 17 millions d'amateurs non-licenciés. Cela mérite un débat parlementaire, d'autant que le secteur représente 400 000 emplois, pour un chiffre d'affaires atteignant entre 2 et 3 % de notre produit intérieur brut (PIB).

Incontestablement, l'Euro 2016 mobilise de grosses sommes. L'Union européenne des associations de football (UEFA) gère son business plan comme elle l'entend depuis la Suisse. Sommes-nous capable d'accueillir un événement pareil ? Nous pourrions considérer que non, et laisser la place à l'Azerbaïdjan, à la Russie ou au Qatar, qui ont de gros moyens. Mais l'Euro 2016 rassemblera près de 4 milliards de téléspectateurs et attirera dans les stades environ 2,5 millions de personnes, soit 4 ou 5 millions de visiteurs dans le pays. Pour la première fois, l'UEFA a accepté de verser 20 millions d'euros aux dix villes-hôtes. Est-ce suffisant ? L'UEFA paiera aussi pour la première fois la location des stades, à hauteur de 23 millions d'euros. Enfin, grâce à un dispositif de soutien à la Fédération française de football, 37 millions d'euros seront versés aux clubs amateurs. Ces retombées me paraissent raisonnables, comparées aux enjeux financiers, même si l'on aurait pu souhaiter que les villes-hôtes reçoivent un peu plus... Quoi qu'il en soit, il reviendra à ces dernières de répartir ces recettes : le maire de Bordeaux, par exemple, compte redistribuer une part de la somme aux clubs sportifs de son ressort. L'Euro 2016 doit être un levier pour développer le sport de masse, comme l'Euro 2015 de basket doit être une locomotive pour la discipline en France.

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État chargé des sports

L'aide aux disciplines sportives moins médiatiques mais dans lesquelles la France obtient de bons résultats aux Jeux olympiques fait partie de nos préoccupations. Le budget d'aide aux fédérations est maintenu. L'aide personnalisée par laquelle l'État soutient les sportifs également. Nous avons en outre décidé de nous intéresser de plus près aux sportifs de haut niveau en situation précaire. Un groupe de travail, constitué de sept personnes de la direction des sports affectées à la mission d'optimisation des performances (MOP), les a recensés - ils sont 257, qui peuvent espérer une médaille à Rio -, a rassemblé les informations sur leur situation, leur formation et leurs souhaits professionnels et les a reçus individuellement. Ces sportifs seront mis en relation avec des entreprises susceptibles de leur trouver un emploi durant leur carrière sportive et surtout après celle-ci. Leur assurer ainsi une meilleure situation ne pourra qu'accroître leurs performances sportives.

J'ai reçu les organisateurs des « Gay games », qui avaient prévu une répartition financière défavorable à l'État : ils sollicitaient 100 000 euros de la ville, autant de la région, mais 700 000 euros de l'État ! Nous sommes tombés d'accord sur la nécessité de revoir ce schéma.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Grosperrin

Avec vous c'est, comme disait la comtesse de Ségur, le beau temps après la pluie ! Je crois qu'aucun gouvernement n'a été à la hauteur des attentes du mouvement sportif. Étant donné la conjoncture budgétaire, ne faudrait-il pas concentrer nos moyens sur les fédérations qui ont le plus de chances de remporter des médailles aux Jeux olympiques ? Comment articuler la réforme des filières de haut niveau avec la réforme territoriale ? L'efficacité de la MOP est-elle avérée ? Quid du devenir des cadres techniques ? Êtes-vous sûr que les nouvelles régions souhaiteront reprendre les Creps ?

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Comment coopérez-vous avec le ministère de l'éducation nationale dans la gestion des classes sport-études ? Les jeunes joueurs de football issus des pays africains qui n'ont pas réussi à percer sont entièrement démunis. Ils n'ont pas de papiers, ni d'argent... C'est le résultat du travail des agents sportifs. Qu'en pensez-vous ?

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Les échecs des candidatures passées pour l'organisation des Jeux olympiques m'incitent à penser qu'il nous faut déposer un dossier très solidement construit. La Ville de Paris sera très attentive à l'engagement de l'État : pas question, pour elle, de sacrifier le social ou le logement à un projet prestigieux !

Je connais bien la logique de Bercy mais elle peut se révéler contreproductive : nous devrons mettre un terme aux écrêtements subis par les organismes comme le CNDS, sous peine de mettre en danger le secteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Prunaud

Le budget diminue légèrement. Quelle est la part des crédits consacrés au sport amateur ? Au sport féminin ? Dans les Côtes-d'Armor, une équipe de football féminine se met en place à Lamballe : cela n'a pas été sans peine ! Comment poursuivre la politique de lutte contre le dopage ? C'est fondamental pour nos jeunes. Je me réjouis que vous souhaitiez créer un statut du sportif.

Debut de section - Permalien
Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports

S'il est clair que l'État doit garder à son niveau l'Insep, pépinière de futurs champions et centre médical, qui a été largement rénové à l'initiative de gouvernements précédents, le gouvernement considère que les Creps peuvent être gérés par les régions, pourvu qu'on évite des transferts de compétences mal évalués. Dans le cadre de la nouvelle organisation territoriale de la République, la région sera désormais chef de file de la compétence « sport », qui sera partagée. L'objectif est de développer un sport de masse ; le sport de haut niveau n'est pas nécessairement professionnel. Du reste, le financement des équipements sportifs est déjà largement porté par les collectivités territoriales, à hauteur de 423 millions d'euros exactement. L'essentiel des 270 000 équipements publics sportifs sont gérés par les collectivités territoriales. L'État doit donc se contenter de fixer les objectifs stratégiques.

La candidature à l'organisation des Jeux olympiques (JO) ne peut être portée que par Paris. L'échec de la candidature aux JO de 2012 fut un traumatisme pour tous. Comment l'analyser ? Le mouvement sportif n'avait peut-être pas été suffisamment placé au coeur de la démarche. Cette fois, notre candidature doit viser la victoire et non avoir valeur de témoignage. Cent ans après les derniers Jeux olympiques d'été organisés en France, rien n'interdit de défendre notre candidature. Oui, nous sommes également candidats pour l'Exposition universelle : notre pays est à même d'organiser deux très grands événements internationaux ! Ce sont du reste d'excellents antidotes à la morosité actuelle. Bien sûr, des études devront d'abord démontrer la pertinence sociale des projets, notamment en matière de créations d'emplois, ce que souhaite la maire de Paris. Nous voulons une candidature citoyenne, sociale, durable !

Cette semaine, nous accueillons les représentants de l'Agence mondiale antidopage (AMA) pendant trois jours. Notre pays est en pointe sur cette question. Une ordonnance est en cours de rédaction pour adapter notre législation aux dispositions internationales.

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État chargé des sports

Monsieur Grosperrin, loin de moi l'idée qu'avant, rien de bien n'a été fait. Ainsi, Jean-François Lamour a pris la relève de Marie-George Buffet pour lutter contre le dopage. En revanche, tant au niveau légal que vital, rien n'a été fait avant nous pour le statut du sportif. Je connais un champion du monde qui vit avec 600 euros par mois, sans protection sociale, et qui n'a un toit que grâce à son épouse. De telles situations sont inacceptables et nous allons y mettre un terme.

Les 1 607 cadres techniques sont préservés, il n'y aura pas de suppression de postes, seuls quelques départs en retraite ne seront pas remplacés.

Nous ne soutenons pas le sport professionnel, le rapport de M. Savin et de ses collègues l'a montré. Nous subventionnons le sport de haut niveau grâce à l'aide personnalisée ; et nous soutenons les clubs amateurs, avec la part territoriale du Centre national pour le développement du sport (CNDS). Je vous rassure : Zlatan Ibrahimovic ne reçoit pas de subvention de l'État...

Debut de section - Permalien
Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports

Sur 100 licenciés, il n'y a que 35 à 45 femmes : la parité n'est pas respectée.

Les quartiers prioritaires de la politique de la ville, qui concernent cinq millions de Français dont deux millions de jeunes, doivent être le lieu de la féminisation du sport : je crois à l'intégration par le sport dans ces quartiers, afin de contrer d'autres influences, dangereuses.

L'Assemblée nationale a effectivement adopté un amendement augmentant de 25 millions les crédits consacrés au service civique, afin de créer 5 000 places de plus, soit 45 000 au total en 2015. A l'heure actuelle, nous ne disposons que d'une offre pour quatre ou cinq demandes, ce qui témoigne de l'appétence des jeunes pour ce dispositif. D'ici 2017, nous devrions atteindre le seuil de 100 000 services civiques. Le Président de la République a dit, lors de sa conférence de presse, que ce dispositif serait universel, ce qui ne signifie pas qu'il sera obligatoire. Une classe d'âge est composée de 750 000 jeunes : en 2015, nous proposerons 45 000 services civiques, 50 000 garanties jeunes, pour ceux qui n'ont ni formation, ni logement, ainsi que 150 000 emplois d'avenir, dont 20 000 pour la délégation sport. Toutes ces mesures à destination des jeunes visent à n'en laisser aucun sur le bord du chemin. Le ministre de la jeunesse ne se plaint d'ailleurs pas des arbitrages budgétaires !

Les crédits consacrés à la vie associative ne diminuent pas. En y intégrant les dépenses fiscales, l'État consacre plus d'1 milliard d'euros à cette action. Notre pays compte 165 000 associations qui emploient 1,8 million de salariés, soit un salarié sur dix. Ces emplois sont qualifiés et non délocalisables. Les crédits du fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) seront sanctuarisés à hauteur de 25 millions d'euros, en complément des aides apportées par les collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Le service civique n'est pas spécifique à la vie associative et je me félicite des 25 millions d'euros supplémentaires versés à l'Agence du service civique : nous atteindrons ainsi 45 000 places en 2015.

Quel lien y a-t-il entre le service civique de deux ou trois mois, totalement gratuit, évoqué par le Président de la République, et le service civique tel que nous le connaissons, avec la bourse de 540 euros ? François Chérèque, président de l'Agence du service civique, estime que les collectivités locales, qui n'accueillent que 7 % des jeunes concernés, pourraient faire mieux à l'avenir. En outre, les 150 000 jeunes décrocheurs pourraient s'intégrer grâce au service civique. Quel est le calendrier de la montée en charge de la garantie jeunes ?

Debut de section - Permalien
Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports

Il faut bien faire la différence entre le service civique et les mesures destinées à favoriser l'insertion professionnelle. Certes, le service civique peut aider à l'insertion, mais tel n'est pas son objectif premier. Nous développons le système avec un objectif de 100 000 places en 2017. Peut-être alors aurons-nous identifié de nouveaux emplois utiles mais il est trop tôt pour le dire.

La garantie jeunes est partiellement financée par l'Initiative « emploi des jeunes » instaurée par l'Union européenne pour 2014 et 2015 et dotée de 6 milliards d'euros. Seules la France et l'Italie y ont recours - hélas, car la Commission européenne s'interroge à présent sur la pertinence de cette mesure. La garantie jeunes, qui s'adresse aux décrocheurs, devrait toucher 50 000 jeunes en 2015 et 100 000 en 2017.

Le Président de la République a évoqué un service civique universel de deux mois non rémunéré : peut-être conviendra-t-il de revoir la terminologie pour éviter la confusion entre cette mesure - qui ne saurait être considéré comme un service civique au rabais - et le service civique tel qu'il existe. L'idée est d'amener un jeune à se consacrer à une mission d'intérêt général pendant un ou deux mois ou quelques heures par jour ou par mois. Ceux qui le souhaitent doivent pouvoir s'engager bénévolement dans une mission d'intérêt général. Et cet engagement sera reconnu. Sans doute un diplôme serait-il le bienvenu, mais la prise en charge des cours pour le permis de conduire pourrait également être envisagée. Nous réfléchissons afin de mettre en oeuvre au mieux ce nouvel outil.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Disposez-vous de statistiques sur le suivi des contrats d'avenir ? Les associations et les collectivités semblent avoir du mal à les pérenniser.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Y a-t-il une durée minimum pour le service civique, en-deçà de laquelle les associations refusent de descendre ?

Debut de section - Permalien
Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports

Aucun texte ne prévoit la pérennisation des emplois d'avenir. En revanche, ces jeunes seront sans doute les mieux placés pour occuper les postes pour lesquels ils auront été formés. Ainsi, à la fin des années quatre-vingt-dix, beaucoup d'emplois jeunes ont été recrutés à l'issue de leur contrat. Les emplois d'avenir ont mis le pied à l'étrier pour des jeunes en situation de grande difficulté. Les 15 000 nouveaux contrats de 2015 seront orientés plutôt vers le développement durable.

Pour qu'un jeune s'insère véritablement dans la structure où il est accueilli, le service civique ne peut être inférieur à six mois. Selon M. Chérèque, il faudrait un minimum sept à huit mois pour qu'un jeune puisse être opérationnel. L'association Unis-Cité prend le temps de former ses jeunes et de les mettre en situation avant de les envoyer sur le terrain : un minimum de six mois est donc indispensable et je souhaite que la représentation nationale nous aide à ne pas brader le service civique.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Vous pouvez compter sur nous. J'ai moi-même fait partie du comité de suivi du service civique. J'y suis très attachée. Merci, messieurs les ministres, pour ces échanges.

La réunion est levée à 12 h 55.

- Présidence de Mme Catherine Morin-Desailly, présidente -

La réunion est ouverte à 16 h 30.