Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 11 septembre 2013 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • LPM
  • infrastructure
  • militaire

La réunion

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La commission nomme rapporteur :

Jean-Louis Carrère sur le projet de loi n° 822 (2012-2013) relatif à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale ;

Daniel Reiner sur le projet de loi n° 837 (2012-2013) autorisant la ratification du traité sur le commerce des armes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Monsieur le Secrétaire général, nous vous accueillons dans le cadre de nos auditions sur le projet de loi de programmation militaire 2014-2019. Nous avons entendu la présentation du ministre, mardi dernier. Il reviendra demain matin à 9 heures 30 pour répondre à nos questions. Nous entendrons à votre suite l'ensemble des plus hauts responsables de la défense.

Durant cette période, le ministère de la défense devra relever de nombreux défis, j'en relèverai quatre qui concernent directement vos attributions, lesquelles se trouvent d'ailleurs renforcées :

- la poursuite de la réforme engagée avec des mouvements de réductions des effectifs et de restructurations qui comportent également, y compris dans le dispositif législatif, des mesures d'accompagnement et de reconversion des personnels militaires et civiles, mais aussi des collectivités territoriales et des sites affectés ;

- la poursuite de la réforme du ministère, avec de nouvelles attributions transversales confiées au secrétariat général, notamment dans le domaine des ressources humaines ;

- les efforts à conduire pour répondre avec des moyens limités au maintien des ambitions, ce qui touche au premier chef la réalisation, la modernisation et la gestion des infrastructures nécessaires pour accueillir les nouveaux équipements, assurer le maintien en conditions opérationnelles de nos armées et les conditions de vie des militaires.

Enfin, le suivi de la disponibilité des ressources financières, notamment des ressources exceptionnelles.

Vous nous direz comment ont été définis les objectifs et les moyens nécessaires à leur réalisation et comment le ministère de la défense entend les mettre en oeuvre au cours de cette période.

Mes collègues et moi vous interrogerons à la suite de votre exposé. Je vous laisse la parole.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Je reviendrai en premier lieu sur les ressources humaines et la maîtrise de la masse salariale, enjeux très lourds de la prochaine loi de programmation (LPM). Le ministre l'a dit à plusieurs reprises : c'est un des sujets les plus difficiles pour nous, les réductions d'effectifs qui s'annoncent venant après des mouvements déjà très importants. L'objectif politique a été de préserver cependant au maximum l'outil opérationnel. Je dirai ensuite quelques mots de la mobilisation des ressources financières et des recettes exceptionnelles. Je reviendrai sur les restructurations et l'infrastructure et dirai quelques mots de la mise en place du nouveau mode de gouvernance du ministère.

La mise en oeuvre de la LPM est conditionnée par la réussite de la manoeuvre liée aux ressources humaines et la maîtrise de la base salariale. La LPM prévoit une déflation de 33 675 équivalents temps plein (ETP), 10 175 au titre des réformes précédentes et 23 500 au titre de la nouvelle déflation. 645 postes seront créés dans des domaines bien spécifiques -lutte informatique défensive, DGSE, prise en compte des exigences liées à sûreté de la propulsion nucléaire.

Comme par le passé, la nature des déflations des 23 500 ETP, est double. Une part résulte de l'adaptation des armées aux nouveaux objectifs capacitaires ; elle se monte à environ 8 000 ETP, auxquels il convient d'ajouter une part du reste à faire au titre de la LPM 2009-2014 et environ 1 000 ETP sur les forces prépositionnées. Une des priorités du projet de LPM étant de préserver les forces opérationnelles, la plus grande part des déflations (14 500) proviendra de la transformation de l'environnement des forces.

On reproduira un taux d'effort proche de celui de la précédente LPM. Toutefois, la volonté étant d'augmenter la place des civils dans les services de soutien, ce taux se répartira entre 78 % pour les militaires et 22 % pour les personnels civils contre 75/25 lors de la précédente loi.

Comment allons-nous faire ? On s'est fixé comme objectif principal de rechercher des gains de productivité dans l'ensemble du dispositif de soutien, d'administration et dans les états-majors. Cela va nous conduire à un travail en profondeur sur l'ensemble des processus, afin d'essayer de simplifier les modes de travail au sein du ministère.

C'est une démarche complexe, qui s'inscrit dans le cadre de la modernisation de l'action publique et qui concerne l'ensemble de l'Etat. La semaine dernière, nous avons arrêté, avec le major général des armées et l'adjoint du DGA, une liste de trente chantiers, qui vont faire l'objet d'une analyse en profondeur afin d'essayer de dégager des gains de productivité. Ces grandes fonctions sont par exemple la fonction achats, la fonction financière, le traitement des factures, ou la maintenance immobilière.

Comme dans la précédente programmation, chaque responsable de chantier recevra une lettre de mission avec un calendrier, et rendra compte périodiquement de l'état d'avancement.

Je ne cache pas que les choses vont être assez difficiles, car nous avons déjà profondément réorganisé la chaîne des soutiens, avec la création des bases de défense et le développement de structures interarmées. Mais, nous allons capitaliser sur tout cela, par exemple dans le domaine financier, en nous appuyant bien plus sur les services du commissariat des armées, en particulier les plateformes achats finances, pour accroître la productivité de ces plateformes et leur faire remonter un certain nombre de tâches administratives qui peuvent être aujourd'hui exercées par les bases de défense.

Pour autant, la manoeuvre va également reposer sur des mécanismes de départ des personnels avec tout un dispositif d'accompagnement.

Plusieurs mesures en faveur du personnel militaire doivent faciliter la mise en oeuvre de la LPM, comme les mécanismes de promotion fonctionnelle ou de paiement de pensions au grade supérieur, afin de soutenir le flux des départs. Le mécanisme des pécules, qui existe déjà, sera reconduit mais aménagé, le pécule étant antérieurement versé en deux fractions, la seconde partie étant conditionnée à la reprise d'une activité professionnelle dans le secteur privé. Cette condition de reprise d'activité sera supprimée.

On modifiera aussi le mécanisme de disponibilité, en rémunérant mieux les militaires qui choisiront de profiter de ce dispositif.

Nous avons essayé de calibrer ces dispositifs de telle sorte qu'ils nous permettent d'atteindre le dépyramidage, la LPM prévoyant de supprimer 5 800 postes d'officiers, à hauteur de 1 000 par an, afin d'essayer de retrouver un taux d'encadrement de 16 %. Nous étions environ à 15,5 % en 2007, et sommes actuellement à 16,75 %. Nous voudrions revenir à 16 % de la population militaire.

C'est un objectif ambitieux. La suppression de 5 800 postes d'officiers sous-entend, en effet, de revoir les conditions d'emploi de ce personnel en veillant à ce que les armées ne privilégient pas la satisfaction de leurs besoins propres au détriment de l'ensemble du dispositif interarmées qui s'est mis peu à peu en place.

La présence d'officiers dans des structures interarmées est indispensable. J'ai besoin dans mes services d'officiers ayant eu un parcours opérationnel. Quand on traite de crédits relatifs au programme d'armement à la direction des affaires financières, il faut avoir des ingénieurs de l'armement et des officiers des armes qui savent parfaitement de quoi on parle pour traduire tout cela sous l'angle financier.

La manoeuvre nécessitera la mise en oeuvre des mesures d'aide évoquées. L'ensemble du dispositif d'accompagnement des restructurations se situera à hauteur de 933 millions d'euros durant la période. C'est une somme conséquente. On devra par ailleurs renforcer le dispositif d'aide à la reconversion. On a créé, lors de la précédente LPM une agence de reconversion unique pour l'ensemble du personnel, défense mobilité, qui va se doter d'une structure dédiée, chargée de s'occuper des officiers supérieurs. Ce dispositif sera analogue à celui existant pour les officiers généraux.

On devra également travailler au rééquilibrage entre personnels civils et militaires, notamment dans les tâches de soutien. Le ministre a confié au directeur des ressources humaines une mission d'analyse des emplois. On s'aperçoit, à la fin de l'actuelle LMP, qu'il existe des sureffectifs de personnels civils localisés dans certains bassins d'emploi. Nous sommes en train de les analyser, nous recensons les compétences des personnels et étudions comment pourvoir certains emplois, par exemple dans les groupements de soutien des bases de défense, aujourd'hui occupés par du personnel militaire mais qui pourraient être occupés par du personnel civil.

En matière de ressources humaines, l'autre défi est bien sûr celui de la maîtrise de la masse salariale. Vous avez évoqué la réforme prévue par le ministre sur ce point : c'est une réforme qui porte sur deux volets. Le premier concerne le regroupement de l'ensemble des crédits de ressources humaines dans un programme unique. On ne sait pas encore si l'on créera un programme spécifique à côté du programme 212 ou si on intègrera ces crédits au programme 212. Des discussions sont en cours avec la direction du budget.

Le secrétaire général pour l'administration (SGA) aura la responsabilité de l'ensemble de ces crédits, qui seront répartis au sein de budgets opérationnels de programmes (BOP), vraisemblablement par gestionnaire d'armée. Ainsi, le gestionnaire du BOP terre serait le directeur des ressources humaines de l'armée de terre ; nous y retrouverons les crédits de rémunérations de l'ensemble des personnels portant un uniforme de l'armée de terre, qu'ils soient employés dans l'armée de terre ou dans d'autres structures du ministère.

Nous étudions aussi comment regrouper dans un BOP unique les crédits relatifs à certaines populations. Je pense au contrôle général des armées, aux ingénieurs du service d'infrastructures, aux personnels du service des essences. Il existera également un BOP unique pour l'ensemble du personnel civil, dont un service de la direction des ressources humaines sera gestionnaire.

Pour gouverner l'ensemble de ces crédits, le SGA s'appuiera sur la direction des ressources humaines du ministère, qui bénéficiera d'une autorité fonctionnelle renforcée vis-à-vis de l'ensemble des directions en charge des questions de ressources humaines au sein du ministère.

Nous avons eu en interne un débat sur l'autorité fonctionnelle renforcée et l'autorité hiérarchique. Nous n'avons pas retenu l'autorité hiérarchique ; la gestion des personnels devant rester de la responsabilité des armées. Ce n'est pas à la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD) de s'occuper de notation, de discipline ou du moral ! En revanche, la DRH-MD doit étudier les processus de recrutement et d'avancement par exemple, afin de savoir à quel moment elle peut intervenir ? Comment intervenir avec un visa, un avis, un droit de veto ?, pour garantir le respect de la masse salariale.

Nous avons jusqu'à la fin de l'année pour jeter les bases de ce système. 2014 sera une année de calage pour tester le dispositif, qui se traduira en construction budgétaire dans le PLF 2015.

Le SGA s'appuiera aussi, dans ce domaine, sur la direction des affaires financières, car il existe, dans le suivi de la masse salariale, un certain nombre d'éléments que la direction des affaires financières maîtrise, par exemple l'appréciation du glissement vieillesse technicité (GVT).

Il s'agit d'une réforme très ambitieuse. Vous avez évoqué le fait que le transfert de responsabilités vers l'état-major des armées, intervenu en 2009, avait suscité quelques difficultés de mise en oeuvre. Il est bien évident que le SGA ne pourra pas résoudre par un coup de baguette magique le problème auquel est confronté le ministère depuis des années en matière de ressources humaines et de maîtrise de sa masse salariale. Cela nécessite donc un travail collectif.

Le directeur des ressources humaines aura notamment pour adjoint un officier général quatre étoiles, qui le secondera et sera l'interlocuteur des directions des ressources humaines d'armée. C'est un travail en commun que nous devons réaliser pour définir les responsabilités de chaque acteur -responsable de programmes, responsable de BOP, mais aussi gestionnaire et préciser les modalités d'exercice de cette autorité fonctionnelle.

Les objectifs en matière de masse salariale seront d'autant plus lourds que nous devons réaliser 4,4 milliards d'euros d'économies sur l'ensemble de la période. Or, si nous n'arrivons pas à maîtriser la masse salariale, nous devrons prendre sur nos propres ressources les moyens de retrouver l'équilibre -sauf pour les mesures résultant de l'application de mesures générales relative à la fonction publique comme la revalorisation du point d'indice de la fonction publique.

Je pense que tout ceci nous conduira inévitablement, dans le cours de la LPM, à modifier la politique des ressources humaines, notamment en ce qui concerne les militaires. Nous allons en effet devoir nous interroger sur les processus de sélection, d'avancement, de déroulement de carrière. Nous devrons intégrer des mesures relatives à l'évolution des textes en matière de retraites, nécessitant de revoir les créneaux d'avancement de grade, l'allongement des carrières, etc.

Des questions se feront également jour en termes de recrutement : combien d'officiers recrutés dans les grandes écoles militaires, ou déjà formés à l'extérieur, mais pour des contrats et des périodes plus courtes ? Tous ces éléments de politique des ressources humaines devront être réexaminés en commun. L'état-major des armées y tiendra une place très importante : principal employeur du ministère, c'est à lui de définir les besoins relatifs à la politique des ressources humaines...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

On évitera les errements que l'on a connus, au cours desquels on a vu la masse salariale s'envoler parce qu'on avait créé beaucoup de postes d'officiers supérieurs, etc.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

C'est l'élément à maîtriser.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Il faut reconnaître que nous avons eu, dans la mise en oeuvre des dispositifs d'accompagnement de l'actuelle LPM, une gestion généreuse. Un certain nombre de personnes qui ont pu partir en bénéficiant des mécanismes d'aide au départ ont été remplacées dans leur grade. Ce dispositif a donc nécessairement un impact sur la masse salariale.

D'un autre côté, cela a permis de faire passer les réformes...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

A quoi cela sert-il de supprimer des postes dans ces conditions ?

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Il faudra également travailler à un plan d'accompagnement du personnel. Le ministre l'a indiqué à plusieurs reprises, et cela figure dans le rapport annexé à la LPM.

Il faut aussi remettre sur la table l'ensemble du dispositif indemnitaire. Une de nos principales difficultés réside dans la multiplicité des primes, que nous n'appliquons pas de manière homogène entre armées. En général, cet examen se fait plutôt par un alignement par le haut ; le problème est qu'il faut revoir le dispositif indemnitaire à ressources constantes. Il va donc falloir du temps, de la persuasion et trouver les bons points d'équilibre.

Le second point concerne la mobilisation des ressources financières, et notamment les recettes exceptionnelles. Vous connaissez les chiffres.

Parmi ces recettes, une part incombe directement à mes services. Il s'agit des recettes liées à l'immobilier. On en a beaucoup parlé dans la précédente LPM ; on n'a pas complètement atteint le montant attendu, mais l'on arrive tout de même à environ 670 millions d'euros sur la période, en ayant vendu un certain nombre d'immeubles en province, et passé un bail de longue durée pour la gestion du parc de logements domaniaux avec la Société nationale immobilière (SNI).

D'où viendront les recettes exceptionnelles du domaine immobilier ? Principalement des immeubles parisiens, que nous allons abandonner pour rejoindre Balard à l'été 2015.

Les bâtiments qui devaient nous être livrés fin 2014 le seront à partir de fin février 2015, pour la partie construite sur la parcelle ouest -celle des nouveaux bâtiments de commandement. Une partie des bâtiments à rénover de la parcelle est seront, quant à eux, livrés en avril. Les emménagements pourront donc commencer à partir de cette date.

Pourquoi existe-t-il un décalage dans le calendrier ? On a tout simplement rencontré des difficultés classiques dans ce type d'opérations -désamiantage et dépollution plus importants que prévus, en particulier des sols sur lesquels était installé le bassin d'essais des carènes. Nous avons, par ailleurs, essuyé des aléas climatiques. Ce sont là des problèmes classiques, mais ce retard ne provient pas, comme on l'a dit, de difficultés avec la ville de Paris. Nous les avons réglées, ce n'est donc pas le motif.

Nous allons donc vendre les immeubles que nous occupons ; nous avons entamé les discussions et plusieurs bâtiments seront vendus dès cette année : le bâtiment de La Pépinière, derrière le Cercle national des armées, à Saint-Augustin, sera vendu comme immeuble de bureaux, après discussions avec la ville de Paris ; les immeubles de Bellechasse-Penthemont seront également mis en vente cette année, puis Saint-Thomas d'Aquin et enfin l'îlot Saint-Germain.

Ce dernier sera le plus difficile à vendre, mais nous avons d'ores et déjà des pistes intéressantes. Il faut des intervenants financièrement solides car nous vendons un emplacement et des façades, l'ensemble du bâtiment devant être entièrement refait. Après discussions avec la ville de Paris, les objectifs en matière de logement social ne devraient s'appliquer que sur une partie de cet immeuble et pas aux autres, ce qui constitue un élément très important pour la vente, ces immeubles pouvant être vendus comme immeubles de bureaux.

Nous devrions atteindre les objectifs en matière de ressources immobilières. Un certain nombre d'autres immeubles en vente en province devraient également rapporter des sommes conséquentes.

Les redevances des opérateurs au titre des cessions de fréquences antérieures devraient également être obtenues sans difficulté.

Une partie des recettes exceptionnelles résulte du programme d'investissement d'avenir, et ce dès 2014. Les discussions avec la direction du budget destinées à bien déterminer les flux, les mécaniques et la technique financière ne sont pas encore totalement bouclées. Faire passer des crédits de plan d'investissement d'avenir sur des programmes d'armement n'est en effet pas aisé. Nous travaillons en particulier sur des opérations relatives au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et à l'Agence spatiale française (CNES). Nous pensons raisonnablement trouver rapidement toute la tuyauterie financière qui convient.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

C'est le Président de la République qui a la voix la plus forte en matière de crédits budgétaires !

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

En effet. Les clauses de sauvegarde sont là, ainsi que les engagements du Président de la République.

Peut-être rencontrera-t-on plus de difficultés sur la cession de nouvelles fréquences, en particulier sur la bande de 700 MHz...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

On l'a déjà vécu. Ces bandes de fréquences sont-elles intéressantes ?

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Oui, ce sont celles utilisées pour la Télévision numérique terrestre (TNT) ; elles nécessiteront des investissements de la part des opérateurs. Il y aura donc forcément un calendrier, plutôt vers la fin de la période que vers le début...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Nous travaillons sur environ 200 millions dans le domaine immobilier, sur les fréquences payées par les opérateurs au titre des cessions de fréquences antérieures et sur le plan d'investissement d'avenir, sur lequel nous avons, ainsi que vous l'avez rappelé, des garanties claires du Président de la République et du Premier ministre. Il faut en bâtir la « tuyauterie », afin que cela fonctionne.

En matière de maîtrise des ressources financières, j'appelle par ailleurs votre attention sur le fait que la stabilisation des dépenses de fonctionnement courant s'établit autour de 3,5 milliards d'euros. Cette stabilisation va se traduire par une baisse en volume de 12 % sur la période, soit environ 100 millions d'euros par an, après une baisse de 7 % des crédits de fonctionnement en 2013. Ce sont là des efforts importants à réaliser.

Cela a conduit l'administration centrale à mettre en place des mesures d'économies très importantes en matière par exemple de véhicules ; elles s'appliquent à l'ensemble du ministère et se traduisent par le retrait de véhicules dans les bases de défense. Cela nous conduit également à revoir -et c'est plutôt positif- une grande partie des contrats en matière d'énergie. Nous allons profiter de l'évolution de la réglementation en matière d'énergie, gaz et électricité, pour passer des marchés groupés.

Je ne vous cache pas que ce qui nous est demandé sera difficile. On a d'ores et déjà des difficultés de fonctionnement importantes dans les bases de défense.

Cela me conduit à dire que nous devons réfléchir à nos implantations territoriales et à la façon dont nous allons gérer les prochaines restructurations. C'est là mon troisième point...

Je pense personnellement qu'il faut réaliser des restructurations avec abandon complet d'emprise et éviter, comme dans la précédente LPM, des transferts d'unités importants entraînant des dépenses d'infrastructures conséquentes. On a consacré entre 400 et 700 millions d'euros par an à ces dépenses d'accompagnement. Je crois que nous ne pourrons pas le faire dans la prochaine LPM.

Cela suppose aussi, pour permettre aux bases de défense une meilleure maîtrise de leurs dépenses de fonctionnement, d'abandonner complètement les emprises et de ne pas prévoir de maintenir des éléments, pour des raisons d'accompagnement économique et social des territoires. Si l'on veut réaliser des économies de fonctionnement, il faudra être à l'avenir plus rationnel.

Cela amène aussi à se poser quelques questions en matière de dépenses d'infrastructures. Devons-nous être propriétaires de l'ensemble de nos immeubles de bureaux en centre-ville ? Ne pouvons-nous pas, dans certains cas, être locataires ? Durant les cinq années écoulées, on a transformé un certain nombre de bâtiments pour accueillir des états-majors, des organismes d'administration, etc. et aujourd'hui, on se pose des questions sur leur maintien. On aurait loué des bureaux, on ne se poserait pas les mêmes questions. Il faut orienter l'ensemble des dépenses de fonctionnement vers les unités opérationnelles.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Nous avons des économies à réaliser dès 2014. Nous y travaillons actuellement avec l'état-major des armées...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

En effet. Nous devons trouver 500 millions d'euros d'économies. Nous nous y employons. Nous étudions tout le fonctionnement des structures centrales. Avec l'état-major des armées, nous cherchons à réduire un certain nombre de dépenses des bases, mais on a de réelles difficultés à atteindre l'objectif...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Nous sommes preneurs d'idées !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Je pense aux logements de fonction et aux voitures de service...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Le parc de voitures de service est déjà en réduction très sensible : il passera de 19 000 à 13 600...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Je ne vous cache pas que cela pose de très grosses difficultés dans le fonctionnement quotidien des structures...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

C'est là qu'il faut faire des économies ! On n'a plus les moyens d'avoir ce genre de dispositif. Il en va de même pour nous !

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Nous y travaillons, et toutes les propositions seront étudiées. Il faut aussi tenir compte de l'impact que cela peut avoir sur le moral des personnels. On doit procéder par étapes, en accompagnant les choses.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Il s'agit surtout de donner du travail à ceux qui n'en ont pas !

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Je vous comprends. Les choses ne seront donc pas simples...

Nous avons par ailleurs prévu dans la loi un certain nombre de dispositifs d'accompagnement, dont nous avons besoin. Nous devons notamment récupérer la totalité des produits des cessions immobilières. Le dispositif sera donc reconduit en loi de finances.

D'autre part, nous envisageons de revoir le dispositif d'accompagnement économique tel qu'il a été mis en place dans la précédente loi. Un rapport récent de la Cour des comptes nous aide à recentrer le dispositif. Dans un certain nombre de garnisons, on a accompagné la mise en place de projets, mais ceux-ci ne se sont pas forcément réalisés sur les emprises militaires. On se retrouve donc avec de grandes emprises qui n'ont pas été reconverties.

La question de la reconversion des bases aériennes notamment est très difficile, compte tenu de leur étendue, du niveau de pollution qu'elles peuvent connaître, et du fait que certaines se retrouvent sur plusieurs communes, voire sur plusieurs départements. Il faut absolument cibler davantage le dispositif d'accompagnement.

Un mot des livraisons d'infrastructures... Il y aura, avec l'arrivée des nouveaux matériels, des dépenses conséquentes à réaliser. Certaines sont liées à l'A 400M. Nous avons déjà commencé à nous en occuper dans la précédente loi, mais il faudra les compléter. Les frégates multimissions (FREMM) entraînent également d'importants travaux, notamment à Toulon -dragage, quais nouveaux. Le Barracuda engendre également des travaux importants, tant pour l'accueil que pour préparer les premières opérations de rénovation. Le programme d'accompagnement relatif à l'arrivée des hélicoptères de nouvelle génération devra en outre être achevé. Nous avons ainsi, pour l'accueil du multi-role transport tanker (MRTT), 77 millions d'euros de dépenses d'infrastructures à réaliser en 2014 et 2015. Nous devons prévoir 162 millions d'euros pour préparer l'arrivée du Barracuda. Ce sont là des sommes et des opérations très lourdes...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Je le suis !

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Si, cela fait partie des dépenses d'infrastructures prévues dans la LPM de même que les dépenses très lourdes de réfection de l'ensemble des installations électriques des deux grands ports.

Le besoin initial pour les infrastructures avait été évalué à 7 Md€ sur l'ensemble de la période. Les économies ont pu être dégagées après un examen très précis de l'ensemble des projets avec l'EMA afin de rationaliser les projets, de décaler les mois urgents, seules solutions pour faire face aux enjeux qui nous attendent et de rester dans l'enveloppe fixée de 6,1 Md€ sur la période, soit environ 1 Md€ chaque année.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Je suppose que vous étalez les dépenses consacrées aux deux ports ?

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Si on ne le faisait pas, on n'y parviendrait pas !

C'est à l'occasion de cet examen que l'on se pose des questions sur l'ensemble de l'immobilier administratif et sur les normes que l'on met en oeuvre en matière d'immobilier opérationnel, si l'on considère, par exemple, la différence de technicité entre le hangar d'accueil du Rafale à Saint-Dizier et celui prévu à Djibouti pour les avions de chasse!

Enfin, je voudrais aborder la nouvelle gouvernance. La direction des affaires financières a, au cours de l'actuelle LPM, connu toute une série de simplifications de l'organisation de la fonction dans le cadre du chantier Aramis, qui a conduit à un échange bien plus important qu'auparavant entre l'état-major des armées, la DGA et la direction des affaires financières.

Cependant, des difficultés persistent, du fait de systèmes d'information qui ne sont pas communs. En outre, il existe, dans le domaine financier, une autorité fonctionnelle mais aussi des autorités organiques, par exemple dans le secteur de la programmation. Il faut donc essayer de rassembler ces différentes responsabilités et travailler de façon plus solide qu'auparavant.

On a tiré un certain nombre d'enseignements du travail de préparation de la LPM où on a mis en relation les équipes de la DGA, de l'EMA et de la DAF pour échanger le plus d'informations possible sur les programmes d'armement. Les difficultés ont porté sur l'évaluation des programmes d'armement et des coûts de dépenses de maintien en condition opérationnelle (MCO). Le ministre en a tiré la conclusion qu'il fallait revoir la répartition des compétences, et donner à la direction des affaires financières une autorité fonctionnelle sur les services financiers du ministère.

Un débat a eu lieu sur le thème de l'autorité hiérarchique et de l'autorité fonctionnelle. Les services financiers du commissariat restent sous l'autorité du directeur central du commissariat et de l'état-major des armées, mais la direction des affaires financières doit avoir la capacité de donner un certain nombre de directives en matière de programmation, de préparation du budget et d'exécution financière. Elle doit pouvoir mesurer l'exécution de ces directives. Le directeur des affaires financières doit avoir la capacité d'apprécier le travail mené par les services financiers.

C'est pourquoi un examen de l'ensemble des procédures est engagé. Nous sommes aidés par le contrôle général des armées et avons jusqu'à la fin de l'année pour définir de nouvelles procédures dans lesquelles la direction des affaires financières pourra s'insérer et donner son avis.

Par ailleurs, on indique dans le rapport annexé à la LPM que le service du commissariat aura autorité sur l'ensemble de la fonction administrative, notamment dans les bases de défense. La direction des affaires financières interviendra du point de vue fonctionnel sur la fonction administrative et financière. Cette évolution entraînera une réorganisation des bases de défense. Les régies consacrées à l'infrastructure mises à la disposition du commandement sont appelées à rejoindre le service infrastructures de la défense. On espère faire des économies importantes grâce à ce regroupement. Cela aura aussi des conséquences sur mes services.

La mise en oeuvre de cette nouvelle gouvernance sera facilitée par l'installation à Balard, où il est prévu que les services soient regroupés sur un même étage selon une logique fonctionnelle.

Notre objectif est de réduire l'effectif de l'administration centrale de 15 et 20 %. Il faudra bien y parvenir, sans quoi nous ne parviendrons pas à atteindre l'objectif global du ministère.

Avec une direction financière de 250 personnes composée principalement de cadre de catégorie A, une telle réduction est assez sensible. Quand on augmente en outre les responsabilités de cette direction, il faut bien viser pour y parvenir.

Je pourrais revenir sur les dispositions juridiques lors de vos questions... Mme Landais, que vous avez prévu d'auditionner, sera en mesure de vous expliquer les raisons pour lesquelles on a proposé telle ou telle mesure au ministère.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

La commission des lois du Sénat et celles des finances se sont saisies pour avis.

La parole est aux commissaires...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

Merci de cette intervention, Monsieur le Secrétaire général, et pour nous avoir parlé des difficultés qui sont les vôtres pour obtenir les résultats ambitieux que l'on vous a fixés. Nous savons que c'est indispensable pour permettre l'application et la réalisation de cette LPM, qui se veut vertueuse et porte les espoirs de nos armées, malgré les difficultés.

Vous avez longuement parlé de la direction des infrastructures, notamment des travaux que vous devez réaliser pour l'accueil de l'A 400 M. Quelques-uns ici ont pu voir, à Orléans, les simulateurs et les hangars nécessaires à cet accueil. Vous avez également évoqué les FREMM et le sous-marin nucléaire d'attaque (SNA) Barracuda, ainsi que le MRTT. Il est vrai qu'il faut, pour accueillir ces matériels nouveaux et différents, créer des installations adéquates.

Vous avez aussi abordé la différenciation de normes et des spécifications entre les Opérations extérieures (OPEX) et la métropole. Au Gabon, les Transall sont rénovés sous la pluie, à l'extérieur. Il y a peut-être un équilibre à trouver !

La direction des infrastructures semble ne pas avoir totalement anticipé les difficultés budgétaires qui sont les nôtres. Elle continue à proposer des projets très ambitieux, mais très chers, que nous ne pourrons malheureusement pas réaliser ! C'est un peu comme certaines spécifications de la DGA : vous n'avez pas les budgets, et ce qui est essentiel à nos forces n'est pas réalisé !

Des rénovations sont à entreprendre dans l'ensemble des unités. Cela représente des centaines de millions d'euros. Vous avez évoqué des sommes allant jusqu'à 1 à 1,5 milliard d'euros par an, alors qu'il ne faudrait pas dépasser le milliard, avec des dossiers prioritaires. Un message ne doit-il pas être adressé à cette direction, pour lui faire comprendre que concevoir est une chose, mais que payer en est une autre et qu'il faut, dès la conception, prévoir des économies de réalisation et de fonctionnement ?

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Je partage entièrement votre analyse. Cette direction est composée d'ingénieurs, qui ont le souci et la volonté de bien faire, et de mettre en oeuvre toutes les techniques qu'ils maîtrisent. Il y a aussi, dans certains cas, de la part des états-majors, des demandes importantes, plus en ce qui concerne l'environnement des forces que les forces. On a eu des discussions sur certains investissements que l'on peut considérer comme n'étant pas possibles compte tenu de nos ressources.

Pour que la discussion ne se déroule pas en vase clos, entre la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives, qui a la responsabilité des crédits d'infrastructure, et le service d'infrastructure, on a considéré que les commandements des bases de défense devaient avoir beaucoup plus de responsabilités dans la définition des besoins et dans la programmation. On a donc confié la responsabilité des schémas directeurs d'infrastructures aux commandants de bases de défense. La demande part bien du terrain et remonte vers les états-majors centraux, mais aussi vers l'état-major des armées.

Puis, tous les trimestres, avec le major général des armées et l'adjoint du DGA, nous revoyons la programmation et le calendrier des opérations, afin de pouvoir les ajuster aux ressources. Le débat sur les spécifications a eu lieu lors des travaux de définition de la LPM, suscité par l'état-major des armées et par des officiers, qui ont amené un certain nombre d'exemples de surspécifications.

Nous sommes convenus que nous devions monter un dispositif d'examen de l'ensemble des devis. On est donc en train de se donner la capacité d'examiner les devis pour les très grosses opérations.

Cela suppose que nous dégagions une expertise technique, afin que l'état-major des armées puisse avoir l'explication technique.

Nous sommes également convenus, à la demande du ministre, que nous lui présenterions en comité ministériel d'investissement -où nous examinons les principaux investissements- les conclusions de ces travaux. On a bien pris conscience de cette question et savons que la ressource n'est pas là pour faire ce que voudraient faire certains...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Je suis étonné quand j'entends dire ici ou là que la ressource n'y est pas. Y était-elle l'an dernier ? On va finir par croire que vous n'avez plus d'argent !

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Je n'ai pas dit cela ! La ressource, dans la future LPM, est équivalente à la précédente, mais il y a une différence entre la ressource dont nous disposons et la masse des projets que nous voudrions réaliser.

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

On s'est posé la question de savoir si l'on pouvait maintenir l'enveloppe de crédits d'infrastructures autour d'un milliard d'euros en moyenne. Nous y sommes parvenus, sauf en matière d'entretien et de maintenance courante. On a là quelques difficultés, mais je pense que le travail de spécifications doit être effectué.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Roger

Monsieur le Secrétaire général, vous l'avez dit, des fermetures de bases de défense sèches et définitives vont avoir lieu...

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Roger

Mais il y a souvent eu de l'irrationnel ! Il pleut toujours bien là où c'est mouillé ! J'attends donc de voir. Ce n'est pas à Lorient qu'il va y avoir une fermeture définitive d'une base de défense ! Il vaut mieux que ce soit moi qui le dise !

Vous vous tournez vers les collectivités territoriales : les élus, autour de la table, sont des élus du territoire, qui ne sont pas réellement bien traités par l'État, par rapport aux obligations qui sont faites aux uns et aux autres !

La ville dont j'ai été le maire jusqu'à mon entrée au Sénat vient de se lancer dans la réforme Peillon. Il a fallu trouver dans notre budget 700 000 euros pour l'appliquer -et l'année n'est pas terminée ! Vous dites que l'on va étudier la façon dont les territoires vont pouvoir absorber des fermetures sèches. Quelle sont les bases de défense qui vont être concernées ? A quel moment allons-nous le savoir ? Des élections municipales, cantonales et régionales doivent avoir lieu, et il serait inadmissible que des élus locaux, de quelque bord que ce soit, découvrent les choses dans un entrefilet après les élections.

En second lieu, j'aimerais qu'on nous communique le chiffre très précis, pour les deux dernières exécutions budgétaires et pour la loi de programmation à venir, un comparatif des contrats de prestation.

On prétend souvent diminuer les effectifs qui s'occupent de la restauration, ou de l'informatique, alors qu'on ouvre la vanne des contrats de prestations, parce qu'il faut réaliser les missions quotidiennes. J'aimerais donc savoir s'il n'existe pas une sorte de vase communicant entre la baisse artificielle de la masse salariale et l'augmentation des prestations externes.

Par ailleurs, va-t-on encore aider les petites et moyennes entreprises (PME) qui travaillent dans les territoires ? Ainsi, à Metz, la base aérienne devait être reconfigurée. A part trois centres commerciaux, il n'existait en réalité aucun projet viable. Le responsable de la Délégation aux restructurations espérait que les collectivités reprennent ce secteur, sans savoir comment, ni pour quoi faire...

Enfin, je suis élu territorial de banlieue. Cela fait bien longtemps que l'armée n'y est plus. Vous espérez vendre à bon prix un certain nombre de locaux que vous possédez dans Paris. Le bon prix va se traduire par l'inflation du mètre carré. Les classes moyenne et populaire pourront de moins en moins se loger dans Paris, et on va les retrouver en banlieue ! Vous participez donc, d'un certain point de vue, à un déséquilibre entre la capitale et les collectivités territoriales de périphérie !

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

Après avoir eu la satisfaction de limiter les dégâts dans le Livre blanc, on entre dans le détail. On sent bien que les choses vont être difficiles, et chacun est habité par le doute. Cela ne va pas être simple...

Une question sur l'accompagnement social des restructurations : quelles hypothèses ont permis d'évaluer le plan d'accompagnement à 933 millions d'euros pour la durée de la LPM ?

Est-il possible de distinguer les montants affectés aux personnels militaires et aux personnels civils ? Les syndicats sont très inquiets...

Disposez-vous d'une évaluation du coût des dispositifs qui seront mis en oeuvre, et notamment de ceux prévus dans la partie normative de la LPM ?

Quant à l'accompagnement des restructurations, toutes les collectivités, quelles qu'elles soient, sont en difficulté pour accompagner de nouveaux projets...

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

J'ai bien noté le problème des bases militaires dans la dernière LPM. Je pense qu'il faudrait, pour la crédibilité du prochain plan, régler le sujet plus efficacement. Sur quelle hypothèse l'enveloppe des 150 millions d'euros affectés à l'accompagnement économique a-t-elle été déterminée ?

En ce qui concerne les ressources exceptionnelles, combien attendez-vous des cessions immobilières ?

Enfin, la mise à disposition des espaces d'entraînement est un élément important du maintien en conditions opérationnelles de nos armées, lequel est devenu un objectif important de la LPM. Ces crédits, comme ceux affectés aux conditions de vie des militaires, ont souvent constitué des variables d'ajustement dans l'exécution des précédentes LPM, notamment lors des arbitrages au sein des programmes d'infrastructures. Qu'est-ce qui garantit la réalisation de ces objectifs pour l'avenir ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Vous avez affirmé qu'il était plus intéressant de vendre que de louer. Est-ce bien sûr ? Cela dépend où on loue. Pour avoir été membre d'une autorité administrative indépendante lorsque j'étais à la commission des lois, je puis vous dire que la location avenue Floquet coûte bien plus cher qu'une location en banlieue ! A-t-on bien analysé ces points ? Lorsqu'il s'agit de bureaux, il peut être intéressant d'avoir des bureaux dans une banlieue bien desservie...

En outre, pourriez-vous faire le point sur l'opération Balard sur trente ans ? Est-ce si intéressant -même si je ne conteste pas l'intérêt fonctionnel de l'opération ?

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Couderc

Avez-vous une idée du rapport coût efficacité en matière de reconversion, à la lumière de ce qui s'est passé au cours des dernières années ?

Pourriez-vous par ailleurs ajouter un mot sur la demande faite aux collectivités territoriales, au cours des dernières années, pour intégrer du personnel ? Quel en a été le résultat ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Notre commission, ainsi que celle de l'Assemblée nationale, vont vraisemblablement demander que les contrôles de l'exécution budgétaire soient plus fréquents. Que pensez-vous de contrôles trimestriels ? Cela présente-t-il un intérêt ? Est-ce farfelu ? Cela a-t-il du sens ou non ?

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Le calendrier des restructurations des bases de défense pour 2014 devrait être connu à la fin de ce mois septembre. Les choses ne sont pas totalement calées. Les mesures applicables pour 2015, 2016, jusqu'à la fin de la période, seront annoncées dans un an, en 2014.

A ce stade, je ne puis dire combien de bases de défense pourraient être fermées. Il y a encore des discussions très importantes au sein du ministère à ce sujet. On ne peut donner d'informations précises.

Pour ce qui est des contrats de prestations, il existe un bilan assez précis de l'externalisation dans le domaine de l'alimentation. Je pourrais vous communiquer ces éléments. Je n'ai par contre pas d'indications globales...

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Roger

Les collectivités territoriales savent le faire. On peut vous y aider !

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Je vous ferai parvenir les chiffres dont nous disposons...

La vente des immeubles parisiens risque-t-elle d'entraîner une inflation du prix du mètre carré à Paris ? Une grande partie de ces immeubles va être vendue comme immeubles de bureaux. Il a été fait en sorte que l'objectif de logement social porte sur une partie de l'îlot Saint-Germain. Les immeubles de Bellechasse, de Saint-Thomas d'Aquin ou de rue de La Pépinière seront vendus comme immeubles de bureaux. Je ne sais quelles conséquences cela aura sur le prix du mètre carré des immeubles de bureau...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Je ne suis pas sûr que cela en ait beaucoup, compte tenu du peu de gens qui y sont pour l'instant logés...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Concernant l'accompagnement social des restructurations, nous disposons d'un tableau extrêmement précis du coût du plan, année après année, pour les civils comme pour les militaires. Nous allons vous le faire parvenir. Les choses sont détaillées par indemnité, avec indication des volumes de personnels pouvant en bénéficier et du coût.

Quant à l'accompagnement économique, l'enveloppe de 150 millions d'euros a été établie après les discussions avec la DATAR, à partir des dépenses faites dans l'actuelle LPM. On a déterminé un montant moyen par emploi supprimé. On y a affecté un mécanisme de pondération, selon la situation économique des territoires, pour aider les communes les plus impactées, et celles qui ont le plus de difficultés économiques. On pourra là aussi vous communiquer ces éléments.

Vous avez évoqué l'infrastructure opérationnelle et les centres d'entraînement. Tout un travail a été fait pour la mise à niveau des grands camps d'entraînement de l'armée de terre, où l'on a des problèmes d'infrastructures, d'accueil, d'hébergement, mais aussi de dépollution, de centres de tir et autres.

Il y a dans l'enveloppe des crédits d'infrastructures une partie spécifique consacrée à la partie entraînement des armées. On pourra vous en donner le chiffre précis.

Vous m'avez par ailleurs interrogé sur le sujet des locations et de la vente d'immeubles de bureaux. Si l'on réfléchit à la location, ce n'est pas pour s'installer en centre-ville ! Nous possédons encore, dans quelques grandes villes de province, quelques casernes qui abritent uniquement des bureaux. Quand nous nous interrogeons pour savoir si nous les conservons ou non, ce n'est pas pour relouer à prix élevé, en centre-ville !

Sur le bilan financier de l'opération Balard, je vous ferai parvenir un document sur ce sujet, avec une analyse de la répartition des loyers et des économies que l'on doit faire. L'opération Balard est financée par les économies de fonctionnement que nous pensons réaliser grâce au regroupement, mais aussi grâce à la diminution d'emplois, notamment dans les structures de soutien, où l'on transforme des crédits de titre II en crédits de fonctionnement. On pourra vous faire parvenir ces éléments...

Quant au rapport coût efficacité de la reconversion, des analyses ont été réalisées par l'agence de reconversion sur le nombre de personnels que l'on a réussi à aider. On est autour de 74 à 76 % de reclassement. Des analyses des coûts de fonctionnement interne, mais aussi des coûts de prestations, de formations et autres ont été menées. On peut donc vous apporter des éléments sur ce point.

S'agissant du reclassement du personnel militaire au sein des collectivités locales, les résultats sont moins importants que ceux attendus. Cependant, les reclassements en début de période, dans l'ensemble de la fonction publique d'Etat, ont approximativement été ceux que l'on espérait, mais ils commencent à connaître des aléas, les autres ministères ayant eux-mêmes des difficultés de gestion de leurs personnels.

Sur le contrôle de l'exécution budgétaire, Monsieur le Président, vous avez fait allusion aux réunions que nous avons périodiquement avec vous...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Aujourd'hui, c'est de l'ordre de deux réunions par an.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Il est peut-être compliqué pour vous de nous fournir les réponses aux questions que nous vous adressons...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Il faudrait que l'on puisse faire coïncider ces réunions avec celles du comité de gestion interne du ministère, au cours duquel on présente des éléments d'analyse au ministre. On peut alors prendre un certain nombre de décisions de réorientation en matière de gestion. Il faut que l'on essaye de bâtir un calendrier...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Je propose que les services du ministère et des deux commissions puissent travailler pour trouver la bonne méthode...

Debut de section - Permalien
Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration

Je vous propose d'aborder cette question avec la direction des affaires financières, qui prépare l'ensemble des dossiers pour les réunions que nous avons avec vous.

Pour ce qui est d'une réunion trimestrielle, nous allons avoir un problème avec le premier trimestre de l'année. Il va falloir étudier comment organiser cela.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Monsieur le Secrétaire général de la défense nationale, vous avez la parole...

Debut de section - Permalien
Francis Delon, secrétaire général de la défense nationale

Merci. Je vous avais apporté en avant-première, en juillet dernier, un certain nombre d'informations sur l'élaboration de la loi de programmation militaire (LPM).

Je suis aujourd'hui en mesure d'être plus précis et concentrerai mon propos sur la sécurité des systèmes d'information, le renseignement et la création d'une plateforme dite « Passenger name record » (PNR), les sujets liés à la programmation militaire relevant plutôt, me semble-t-il, du ministre de la défense et de ses services. Je répondrai toutefois à vos questions si vous en avez...

En premier lieu, le président Carrère et les vice-présidents Reiner et Gautier, membres de la commission du Livre blanc, savent combien la sécurité des systèmes d'information nous a occupés lors des travaux menés dans le cadre de cette commission. Les dispositions que je vais vous présenter reprennent pour l'essentiel celles que nous vous avions présentées en juillet avec Patrick Pailloux, directeur général de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI).

Au préalable, je souhaite vous rappeler en quelques mots les cybermenaces auxquelles nous sommes confrontés...

L'espionnage tout d'abord. Les informations visées peuvent être de nature politique, militaire, diplomatique ou économique lorsqu'un État est visé, technologiques, commerciales ou financières lorsque l'attaque cible certains acteurs publics ou des entreprises. La situation que nous observons est préoccupante. L'espionnage, souvent d'origine étatique, est massif. En matière industrielle, il atteint tous nos secteurs de souveraineté. Or ce n'est qu'une fois l'attaque réussie et le pillage accompli que les entreprises victimes comprennent la nécessité de renforcer la sécurité de leurs systèmes d'information. Nous ne voulons pas attendre que toutes nos entreprises se rendent compte au moins une fois d'une atteinte grave à leur compétitivité avant de réagir, d'où le choix du Gouvernement de proposer des mesures appropriées au Parlement. Les efforts déployés doivent aussi contribuer à protéger la compétitivité de nos entreprises nationales.

Le deuxième objectif possible pour un attaquant est la déstabilisation. L'attaque est alors médiatisée. Il s'agit de messages de propagande ou d'hostilité, placés sur des sites internet mal protégés, à l'occasion d'un conflit, armé ou non, ou bien même d'une décision politique qui suscite la controverse. On se souvient par exemple du black-out de l'internet estonien en 2007, qui a privé ce pays de l'accès aux services bancaires et à l'administration en ligne.

Le troisième objectif possible est le sabotage. L'attaquant cherche alors à perturber le fonctionnement d'installations connectées aux réseaux de communications électroniques. Il peut s'agir d'un service bancaire, d'un château d'eau de l'une de nos communes, d'une centrale de production d'énergie. L'exemple le plus frappant nous est donné par le virus informatique Stuxnet, qui a perturbé le fonctionnement des centrifugeuses de la centrale de Natanz, en Iran, détruisant un millier d'entre elles et retardant ainsi le programme nucléaire iranien.

Les précisions sur le cyberespionnage figurant dans le rapport de la société de sécurité informatique américaine Mandiant confirment le caractère méthodique d'un pillage systématique effectué à distance par des unités militaires. Depuis quelques mois, les révélations quasi quotidiennes issues des documents de l'ex-consultant en sécurité de la National security agency (NSA), Edward Snowden, montrent l'ampleur de l'espionnage et les moyens considérables qui y sont alloués...

Si les protestations diplomatiques et politiques sont indispensables et pleinement justifiées, elles ne sont pas suffisantes pour nous protéger. Il est urgent de renforcer de manière significative la sécurité des systèmes d'information de nos opérateurs les plus importants.

Les dispositions proposées dans le chapitre III du projet de loi, ont deux objectifs.

Le premier objectif est politique. Il est l'affirmation de la nature interministérielle et stratégique de la sécurité et de la défense des systèmes d'information. Le Livre blanc a placé les cyberattaques parmi les menaces majeures auxquelles nous sommes exposés. Et à travers l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information qui m'est rattachée, je suis témoin, au quotidien, de la réalité de cette menace, qui vise et touche tant le gouvernement et les administrations que les entreprises.

Le Parlement est également exposé, comme l'a montré l'attaque en déni de service dont a été victime le site internet de la Haute assemblée fin 2011.

Il s'agit ici de donner un signe à tous les acteurs concernés, y compris à ceux qui nous attaquent, de notre volonté collective de faire face à cette menace en adaptant notre droit, notre organisation et nos moyens.

Le second objectif découle du premier. Il s'agit d'accroître de manière sensible le niveau de sécurité des systèmes d'information les plus critiques pour la Nation.

J'en viens maintenant aux détails des dispositions qui vous sont proposées...

L'article 14 du projet de loi insère deux articles dans le chapitre consacré à la sécurité des systèmes d'information du code de la défense. Il précise les responsabilités du Premier ministre, qui a la charge de la définition de la politique en matière de défense et de sécurité des systèmes d'information, et coordonne à ce titre l'action gouvernementale.

Le Premier ministre dispose de l'agence nationale de sécurité des systèmes d'information (ANSSI) pour l'assister dans cette mission ; elle est chargée 24 heures sur 24 de prévenir et de réagir aux attaques contre nos infrastructures les plus importantes. Rattachée au Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), son domaine d'intervention, initialement centré sur les administrations et les organismes dépendant de l'Etat s'est rapidement élargi aux opérateurs d'importance vitale (OIV) et aux entreprises indispensables à notre stratégie de sécurité nationale.

L'article 14 a aussi une vocation opérationnelle et politique.

Opérationnelle, car il faut mettre un terme à la situation actuelle dans laquelle l'attaquant a tous les droits et ceux qui sont chargés de la défense, à peu près aucun. L'attaquant a généralement l'avantage sur le défenseur. Les agents de l'État chargés de la sécurité et de la défense des systèmes d'information doivent être en mesure d'utiliser toutes leurs capacités pour mieux appréhender la nature et l'ampleur d'une attaque, en prévenir et en atténuer les effets, ou la faire cesser lorsque les circonstances l'exigent.

Il est arrivé que, dans le cadre du traitement d'une attaque informatique en cours contre un fleuron de notre industrie, les ingénieurs de l'ANSSI soient en mesure de collecter des informations susceptibles d'anticiper les mouvements de l'attaquant. Ils auraient dû, pour cela, accéder au système d'information utilisé par l'attaquant. Ils ne l'ont pas fait : une telle intrusion aurait été illégale.

Dans l'état de notre législation, les agents de l'ANSSI comme ceux du ministère de la défense ou d'autres administrations de l'État compétentes, ne sont pas autorisés par la loi à effectuer toutes les opérations techniques qui leur permettraient d'être pleinement efficaces dans leurs actions. Ainsi, le code pénal prohibe-t-il de manière générale la pénétration de systèmes de traitement automatisé de données.

Le projet de loi vise donc à rétablir une forme d'équilibre, en permettant au défenseur d'accéder aux systèmes d'information participant à l'attaque, d'en collecter les données disponibles et, en tant que de besoin, de mettre en oeuvre des mesures visant à neutraliser les effets recherchés par l'attaquant qui « porte atteinte au potentiel de guerre ou économique, à la sécurité ou à la capacité de survie de la Nation ».

Debut de section - Permalien
Francis Delon, secrétaire général de la défense nationale

Dans le même esprit, le deuxième alinéa de l'article L. 2321-2 du code de la défense permet aux services désignés par le Premier ministre de détenir des programmes informatiques malveillants, d'en observer le fonctionnement et d'en analyser le comportement. Dans ce cas, il s'agit également de corriger la situation actuelle dans laquelle, en la transposant dans le monde médical, le chercheur n'aurait pas le droit de détenir ou d'étudier un virus pathogène meurtrier afin de fabriquer le vaccin correspondant.

Vous l'aurez compris, l'article 14, au-delà de ses aspects organisationnels et techniques, traduit la volonté du gouvernement de ne pas rester passif face à des attaques informatiques qui portent aujourd'hui atteinte à notre compétitivité et qui demain pourraient mettre gravement en cause notre sécurité ou perturber la vie des Français.

J'en viens à l'article 15 du projet de loi... Il vise à augmenter de manière significative le niveau de sécurité des systèmes d'information des opérateurs d'importance vitale, publics et privés.

Les nouvelles dispositions permettent au Premier ministre d'imposer des règles techniques aux opérateurs d'importance vitale. Il s'agit d'opérateurs « dont l'indisponibilité risquerait de diminuer d'une façon importante le potentiel de guerre ou économique, la sécurité ou la capacité de survie de la Nation », selon les termes de l'article L. 1332-1 du code de la défense. Ils sont environ 200.

Le Premier ministre pourra également demander des audits ou des contrôles de sécurité à ces opérateurs qui devront par ailleurs notifier les incidents affectant leurs systèmes d'information. Pour les situations de crise informatique majeure, un article précise que le Premier ministre pourra, lorsque la situation l'impose, soumettre les opérateurs à des mesures d'exception.

L'expérience opérationnelle de l'ANSSI acquise lors du traitement d'attaques informatiques montre que le niveau de sécurité des systèmes d'information des entreprises et administrations désignées comme opérateurs d'importance vitale est en général très insuffisant pour permettre à ces opérateurs d'assurer leur mission dans des conditions de sécurité acceptables. Certains systèmes très critiques doivent impérativement être strictement déconnectés de l'Internet pour garantir qu'aucun attaquant ne pourra facilement les pénétrer. Or, l'Etat n'est pas, à ce jour, en mesure d'imposer une telle règle aux opérateurs concernés.

Il est arrivé que l'ANSSI aide une grande entreprise française à reprendre le contrôle de son système d'information, et lui conseille la mise en place de règles techniques destinées à renforcer la sécurité de son réseau. Il est arrivé aussi que l'ANSSI découvre un peu plus tard que cette même entreprise avait subi une nouvelle attaque car elle n'avait pas appliqué l'ensemble des mesures proposées.

Quelques précisions concernant ces dispositions...

Si le projet est adopté, le Premier ministre disposera tout d'abord de la capacité d'imposer des règles de sécurité, organisationnelles ou techniques, susceptibles de renforcer la sécurité des systèmes d'information des opérateurs d'importance vitale. Il pourra, par exemple, imposer à un tel opérateur d'installer un dispositif de détection d'attaques informatiques.

Comme le Livre blanc le souligne, la capacité à détecter des attaques informatiques relève de la souveraineté nationale. Ce dispositif devra en conséquence s'appuyer sur des équipementiers de confiance labélisés par l'ANSSI, car le concepteur d'un équipement de sécurité est toujours le mieux placé pour contourner les règles de sécurité. L'exploitation de ces équipements devra être effectuée sur le territoire national, afin d'éviter toute interception ou compromission des données, et réalisée par les prestataires qualifiés par l'ANSSI ou par l'ANSSI elle-même.

Le projet de loi instaure aussi une obligation de notification d'incidents affectant le fonctionnement ou la sécurité des systèmes d'information des opérateurs d'importance vitale.

A ce jour, l'approche reste empirique : les attaques informatiques sont souvent découvertes tardivement. L'expérience acquise par l'ANSSI, après trois années de traitement d'attaques informatiques de grande ampleur montre, par exemple, que lorsqu'un opérateur est attaqué à des fins d'espionnage, il est vraisemblable que les opérateurs appartenant au même secteur d'activité d'importance vitale subissent, souvent au même moment, les mêmes attaques. Il est donc indispensable que l'Etat ait connaissance au plus vite de ces attaques, afin d'en informer les autres opérateurs du secteur concerné.

Le projet de loi propose aussi d'étendre à l'ensemble des opérateurs d'importance vitale, le droit pour le Premier ministre de procéder à des audits ou à des contrôles de leurs systèmes d'information. Cette disposition s'applique déjà aux opérateurs de communications électroniques, mais l'expérience montre que le niveau de sécurité des opérateurs d'importance vitale est très souvent très en deçà de ce qui leur permettrait de résister à des attaques informatiques de niveau intermédiaire.

Il est de la responsabilité de l'État de connaître le niveau de sécurité des systèmes d'information des infrastructures critiques de la Nation. Aujourd'hui, malheureusement, l'État n'a pas la possibilité d'opérer ni de faire opérer des audits ou des contrôles chez les opérateurs du secteur privé, à l'exception du secteur des communications électroniques. Cette disposition permettrait à l'État de disposer de cette capacité.

Enfin, en cas de crise informatique majeure -par exemple une infection virale destructive touchant nos secteurs d'activité les plus sensibles- qui exigerait la mise en oeuvre de contre-mesures dans des délais courts, la loi donnerait au Premier ministre la possibilité d'imposer des mesures techniques aux opérateurs concernés. L'ANSSI aurait alors la capacité d'imposer les mesures nécessaires pour réagir.

L'inscription dans la loi de cette disposition permet également, dans cette circonstance particulière et exceptionnelle, de dégager les opérateurs concernés de leurs responsabilités vis-à-vis de leurs clients.

Des dispositions d'accompagnement complètent ces articles. Elles assurent la confidentialité des informations recueillies dans le cadre des audits. L'effectivité des mesures prescrites est confortée par un dispositif de sanction en cas de manquement après mise en demeure.

Un mot du contrôle des équipements d'interception...

L'article 16 du projet de loi, dont l'actualité révèle la pertinence, vise à mieux maîtriser le risque d'espionnage à grande échelle des réseaux de communications électroniques.

Les opérateurs de télécommunication sont tenus de disposer de moyens d'interceptions afin de répondre, dans le cadre de la loi, aux réquisitions des magistrats pour des interceptions judiciaires, ou du Premier ministre pour les interceptions de sécurité.

Les équipements conçus pour réaliser les interceptions présentent un risque pour le respect de la vie privée de nos concitoyens. Ils ne peuvent donc être fabriqués, importés, détenus que sur autorisation délivrée par le Premier ministre comme le prévoient les articles R 226-1 et suivants du code pénal.

Les interceptions des communications étaient autrefois effectuées par des équipements dédiés. Or, les évolutions technologiques montrent que de plus en plus d'équipements de réseau, sans être des moyens d'interception en eux-mêmes, possèdent des fonctions qui pourraient être aisément utilisées pour intercepter le trafic du réseau.

A cet égard, les fonctions de duplication ou de routage du trafic de certains équipements de réseau, configurables et accessibles à distance, sont susceptibles de permettre des interceptions. Par exemple, certains équipements de coeur de réseau, alors même qu'ils n'ont pas été spécifiquement conçus à des fins d'interception légale, sont susceptibles, selon leurs caractéristiques, de permettre des interceptions du trafic.

N'étant pas spécifiquement conçus pour les interceptions, ces équipements ne sont pas actuellement soumis à l'autorisation prévue par l'article 226-3 du code pénal, qui ne porte que sur les appareils conçus pour réaliser les interceptions. Or ces équipements présentent les mêmes risques pour la sécurité des réseaux et des communications que ceux destinés spécifiquement à l'interception.

La modification législative qui vous est proposée permettrait donc d'étendre la délivrance d'une autorisation à l'ensemble des équipements susceptibles de permettre des interceptions, et ainsi d'assurer une plus grande sécurité des réseaux et des communications

J'en viens au renseignement...

Le bilan de ces dernières années en matière de connaissance et d'anticipation, et les travaux du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, ont montré la pertinence d'élever le renseignement au rang de priorité majeure. C'est ce que fait le projet de LPM dans sa partie programmatique et dans sa partie normative. Les propositions qui y figurent sont la conséquence de cette démarche.

L'effort d'équipement en matière de renseignement vise à conforter nos capacités d'appréciation autonome des situations. Dans le rapport annexé au projet de loi, la priorité est donnée aux composantes spatiales et aériennes, pour l'imagerie et pour l'interception électromagnétique.

L'effort sur les capacités du renseignement s'accompagne, dans la partie normative du projet de loi, de dispositions visant à clarifier et à renforcer le cadre juridique de l'action des services spécialisés.

Les travaux du Livre blanc ont mis en évidence le nécessaire équilibre entre l'accroissement des moyens mis à la disposition des services concernés et leur contrôle démocratique. C'est le sens de l'accroissement des moyens du contrôle parlementaire sur ce volet de l'activité gouvernementale.

Au-delà des dispositions relatives à la délégation parlementaire au renseignement sur lesquelles je vais venir dans un instant, le Président de la République a souhaité la création d'une inspection du renseignement, commune à l'ensemble des services spécialisés. Les travaux sont engagés pour une mise en place prochaine de cette inspection, qui se fera par le biais d'un acte réglementaire.

Le chapitre II de la partie normative du projet de LPM comporte donc diverses dispositions relatives au cadre juridique de l'activité des services de renseignement, qui traitent à la fois de l'accroissement des moyens mis à la disposition des services concernés et de leur contrôle démocratique.

Les mesures proposées partent d'un constat : en dépit des efforts importants réalisés, depuis le Livre blanc de 2008, le cadre juridique dans lequel les services de renseignement exercent leur activité est encore insuffisant sur plusieurs points pour leur permettre de répondre efficacement aux défis auxquels ils sont confrontés.

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 insiste de nouveau sur l'importance stratégique de la lutte contre le terrorisme et sur la contribution essentielle qu'apportent à cette lutte les services de renseignement. Il souligne en effet que le renseignement joue un rôle central dans la fonction connaissance et anticipation et qu'il irrigue chacune des autres fonctions stratégiques de notre défense et de notre sécurité nationale.

Il rappelle aussi les nouveaux défis auxquels doivent s'adapter les services de renseignement. Les guerres et les crises perdurent mais prennent des formes diverses et parfois difficiles à anticiper.

Le cadre juridique régissant l'activité des six services spécialisés de renseignement -Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), DGSE, Direction du renseignement militaire (DRM), la Direction de la protection et de la sécurité de la défense (DPSD), Tracfin et Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED)- a été renforcé et précisé par la création en 2007 de la délégation parlementaire au renseignement et par la précédente loi de programmation militaire du 29 juillet 2009.

Conformément aux recommandations formulées par le Livre blanc de 2008, la gouvernance et la coordination des services de renseignement a été réorganisée avec la création du conseil national du renseignement et celle de la fonction de coordonnateur national du renseignement (CNR).

En 2010, la création de l'académie du renseignement a également permis de doter les services d'une structure de formation commune.

Ces mesures de gouvernance ont été accompagnées d'une réflexion sur les modalités d'action et les moyens mis à la disposition des services. Plusieurs outils ont été créés afin de faciliter l'action de ces derniers et de renforcer la sécurité de leurs agents.

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 va plus loin pour traduire l'importance stratégique de la lutte contre le terrorisme et les atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation et la contribution essentielle qu'apportent à cette lutte les services de renseignement.

Il souligne que le renseignement « joue un rôle central dans la fonction connaissance et anticipation » et qu'il irrigue chacune des autres fonctions stratégiques de notre défense et de notre sécurité nationale, mais il rappelle aussi les nouveaux défis auxquels doivent s'adapter les services de renseignement, qui les contraignent à s'intéresser à un grand nombre de menaces et à une grande variété d'acteurs aux intérêts parfois convergents.

C'est pourquoi, en matière de renseignement, le projet de LPM contient des dispositions sur trois types de sujets :

- la protection de l'anonymat des agents ;

- l'accès aux fichiers ;

- la géolocalisation.

S'agissant du renforcement de la protection de l'anonymat des agents des services appelés à témoigner, la protection de l'anonymat des agents est essentielle, tant pour assurer la sécurité des agents et de leur famille que pour garantir l'efficacité de leur action. La loi du 14 mars 2011, dite LOPPSI II, a ouvert aux agents des services de renseignement la possibilité de recourir à une fausse identité ou à une identité d'emprunt. Elle a également inséré dans le code pénal un article protégeant l'identité des personnels, des sources et des collaborateurs des services de renseignement.

La procédure actuelle, qui prévoit une protection de l'identité réelle des agents, est cependant, apparue insuffisante. La présence physique des agents devant une juridiction à la suite d'une convocation, et leur participation à des comparutions présentent en effet le risque de dévoiler leur couverture, et de mettre en danger leur sécurité et l'efficacité de leurs missions.

Il a donc semblé nécessaire de faire évoluer la procédure afin de la faciliter la manifestation de la vérité tout en renforçant la protection de l'anonymat des agents. Le projet de loi, en son article 7, prévoit que, dans l'hypothèse où l'autorité hiérarchique de l'agent indique que l'audition comporte des risques pour l'agent, ses proches ou son service, celle-ci pourra être effectuée dans un lieu assurant son anonymat et la confidentialité, pas nécessairement au palais de justice, comme aujourd'hui.

Concernant l'accès des services de renseignement à certains fichiers administratifs et de police judiciaire, les menaces auxquelles doivent faire face les services de renseignement dépassent aujourd'hui le seul cadre de la lutte contre le terrorisme. Il s'agit de la prolifération d'armes de destruction massive -nucléaires, biologiques et chimiques- de la dissémination d'armes conventionnelles, des menaces des services d'États non coopératifs ou hostiles, de la criminalité transnationale organisée, etc.

Plus globalement, nos services de renseignement, intérieur et extérieur, s'attachent à préserver les intérêts fondamentaux de la Nation. Cette notion est clairement définie dans l'article L. 410-1 du code pénal : Les intérêts fondamentaux de la Nation s'entendent au sens du présent titre de son indépendance, de l'intégrité de son territoire, de la forme républicaine de ses institutions, des moyens de sa défense et de sa diplomatie, de la sauvegarde de sa population en France et à l'étranger, de l'équilibre de son milieu naturel et de son environnement et des éléments essentiels de son potentiel scientifique et économique et de son patrimoine culturel.

Le Conseil d'Etat, dans un avis du 5 avril 2007, puis le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 10 novembre 2011 sur le secret de la défense nationale, ont rappelé les exigences constitutionnelles inhérentes à la sauvegarde des intérêts fondamentaux de la Nation.

Le projet de LPM comporte une disposition permettant un accès élargi des services de renseignement aux fichiers administratifs mentionnés à l'article L. 222-1 du code de la sécurité intérieure. Il s'agit des fichiers nationaux des immatriculations, des permis de conduire, des cartes nationales d'identité et des passeports, des dossiers des ressortissants étrangers en France -visa et séjour.

Le texte prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat déterminera les services concernés ainsi que les modalités d'accès. Il est envisagé de faire figurer parmi ces modalités le fait que tous les accès aux fichiers feront l'objet d'une traçabilité et que la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) sera en mesure de les contrôler.

L'article 8 aligne, pour l'ensemble des services spécialisés de renseignement, les droits d'accès à certains fichiers administratifs déjà reconnus aux services relevant du ministère de l'intérieur. L'accès sera élargi aux services spécialisés de renseignement déterminés par le décret en Conseil d'Etat.

Par ailleurs, les motifs de consultation, aujourd'hui limités à la seule prévention des actes de terrorisme, seront étendus à la prévention des atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation.

Les articles 11 et 12 permettent aux services de renseignement relevant du ministre de la défense d'accéder directement à certaines données des fichiers de police judiciaire respectivement dans un objectif de recrutement d'un agent ou de délivrance d'une autorisation aux fins de vérifier le passé pénal du candidat et dans le cadre de missions ou d'interventions présentant des risques pour les agents, lorsqu'il s'agit de vérifier la dangerosité des individus approchés. Jusqu'à présent, la consultation de ces fichiers de police judiciaires était possible pour les enquêtes administratives, par l'intermédiaire de policiers ou de gendarmes spécialement habilités à cet effet.

L'objectif de cette disposition est notamment de permettre une sécurisation accrue des missions ou des interventions particulièrement dangereuses menées par les services de renseignement du ministère de la défense. Un décret en Conseil d'Etat encadrera les conditions d'accès pour s'assurer qu'elles sont adaptées et proportionnées aux besoins des services.

J'en viens à la géolocalisation en temps réel...

L'article 13 de la LPM autorise expressément les services de police et de gendarmerie chargés de la prévention du terrorisme à accéder en temps réel à des données de connexion mises à jour, ce qui leur permet de géolocaliser un terminal téléphonique ou informatique, et de suivre ainsi, en temps réel, certaines cibles. Cette disposition vise à lever une incertitude sur la base juridique des pratiques de géolocalisation, soulignée par la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité.

Comme le rappelle le rapport parlementaire sur l'évaluation du cadre juridique applicable aux services de renseignement, les services chargés de la lutte contre le terrorisme ont besoin de pouvoir agir le plus en amont possible, au besoin pour écarter d'éventuels soupçons. En outre, il leur faut pouvoir agir en temps réel, dans l'urgence, pour vérifier des renseignements, par exemple sur l'imminence d'un attentat.

L'accès à ces données répond à un besoin opérationnel de première importance. Ces données sont cruciales pour les services compétents, elles contribuent de façon déterminante aux enquêtes.

Ces mesures appellent un renforcement du contrôle démocratique sur la politique du Gouvernement en matière de renseignement.

C'est pourquoi le projet de LPM 2014-2019, dans ses articles 5 et 6, renforce les compétences de la délégation parlementaire au renseignement (DPR) en modifiant les dispositions de l'article 6 nonies de l'ordonnance du 17 novembre 1958, relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, ainsi que celles de l'article 154 de la loi de finances pour 2012 du 28 décembre 2011.

L'élargissement des compétences de la DPR va dans le sens souhaité par les quatre parlementaires membres du groupe de travail sur le renseignement au sein de la commission du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013, et dans celui des préconisations du rapport Urvoas, établi par la mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale relative à l'évaluation du cadre juridique applicable aux services de renseignement.

La DPR avait, jusqu'à présent, un pouvoir d'information et de suivi. Le projet de LPM innove, en lui confiant un pouvoir de contrôle et d'évaluation de la politique du Gouvernement en matière de renseignement.

Le projet de LPM confie à la DPR l'exclusivité, en matière de renseignement, des pouvoirs de contrôle et d'évaluation de l'action du Gouvernement dévolus au Parlement par l'article 24 de la Constitution. Cette disposition respecte le principe de séparation des pouvoirs, dont le Conseil constitutionnel a rappelé, en 2001, qu'il faisait obstacle à ce que les parlementaires interviennent dans le champ des opérations en cours.

Aujourd'hui, la délégation peut entendre aujourd'hui le Premier ministre, les ministres, le secrétaire général de la défense et la sécurité nationale et les directeurs des services de renseignement. Le projet de LPM permet en outre l'audition du coordonnateur national du renseignement et du directeur de l'académie du renseignement, ainsi que celle, après accord des ministres dont ils relèvent, des directeurs d'administration centrale ayant à connaître des activités des services spécialisés de renseignement. Il prévoit également l'audition des présidents de la Commission consultative du secret de la défense nationale et de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Le terme « après accord » présente un léger problème. Nous y reviendrons...

Debut de section - Permalien
Francis Delon, secrétaire général de la défense nationale

Le projet prévoit également que la DPR est informée de la stratégie nationale du renseignement qui, en l'état des travaux du Livre blanc, devait comporter une partie publique et une partie confidentielle. Il s'agit donc de communiquer la partie confidentielle à la DPR. Il prévoit également que la DPR est informée du plan national d'orientation du renseignement. Il prévoit aussi que soit présenté à la délégation un rapport annuel de synthèse des crédits du renseignement -rapport classifié- ainsi que le rapport annuel d'activité de la communauté française du renseignement établi pour le Président de la République et pour le coordonnateur.

Les dispositions actuelles permettent à la DPR d'adresser des observations au Président de la République et au Premier ministre. Le projet de LPM prévoit de permettre également à la délégation d'adresser à chacun des ministres chargés de la sécurité intérieure, de la défense, de l'économie et du budget, des recommandations et des observations relatives aux services spécialisés de renseignement placés sous leur autorité respective.

Le transfert au profit de la DPR des compétences de la commission de vérification des fonds spéciaux est un point majeur du dispositif proposé par le Gouvernement.

L'article 6 du projet de loi confie à la DPR les missions de cette commission. Il prévoit que ces missions seront assurées par une formation spécialisée de la délégation, constituée de la moitié des députés et des sénateurs membres de la délégation. Cette composition restreinte, proche de la composition actuelle de la commission de vérification des fonds spéciaux, répond à l'impératif de stricte confidentialité des informations qui seront examinées par cette formation.

Le projet maintient au profit de la formation spécialisée les pouvoirs particulièrement étendus de la commission de vérification des fonds spéciaux, notamment en matière de communication de pièces et de contrôle des documents utiles. Le rapport qu'elle établira sur les conditions d'emploi des crédits, sera présenté à l'ensemble des membres de la délégation parlementaire, au même titre qu'au Président de la République et aux ministres concernés.

S'agissant de la création d'un fichier PNR, dans la lutte contre le terrorisme, le domaine de la sûreté aérienne tient une place particulière, encore renforcée depuis les attentats du 11 septembre 2001. Les menaces sur le transport aérien font l'objet depuis une décennie d'efforts considérables en matière de sécurité dans le monde entier. Ces efforts portent notamment sur l'ensemble de la sûreté aéroportuaire et s'appliquent aussi bien aux personnes qu'au fret.

Le transport aérien étant en expansion permanente, terroristes et trafiquants utilisent de plus en plus ce mode de déplacement, comme tout un chacun, mais ils savent fractionner leurs itinéraires pour concilier rapidité et discrétion.

Or, la particularité du transport aérien, par rapport à d'autres modes de transport, est que chaque passager est nominativement enregistré. C'est pourquoi les dispositions de sécurité liées à l'exploitation des données d'embarquement -Advance passenger information (API)- et de réservation -PNR- ont été élaborées au niveau international depuis 2004.

A l'échelon européen, les transporteurs aériens ont obligation de transmettre aux autorités nationales les données API depuis la directive 2004-82 du Conseil. Par ailleurs, des accords existent depuis plusieurs années entre l'Union européenne et les Etats-Unis, l'Australie et le Canada, sur l'échange des données PNR. Nous nous trouvons donc dans la situation paradoxale où ces données, qui concernent les passagers européens comme les autres, existent, sont fournies à trois pays amis qui, eux, les utilisent pour surveiller les vols entrant et sortant de leur territoire, alors même que nous ne sommes pas encore en mesure de les exploiter pour notre propre sécurité nationale !

Au sein de l'Union européenne, seul le Royaume-Uni, pour le moment, avec son programme appelé « e borders », exploite les données PNR à grande échelle. D'autres Etats membres utilisent les données PNR comme les Pays-Bas, la Belgique, la Suède, le Danemark, mais sur de plus faibles volumes, et de manière moins automatisée. Dans ces Etats, comme en France, le respect de la vie privée et l'équilibre entre sécurité et libertés individuelles sont l'objet d'une grande vigilance, illustration que les dispositions européennes sont bien compatibles avec un respect strict de la liberté des citoyens européens.

Au niveau national, la directive 2004-82 du Conseil a été transposée en droit français par la loi antiterroriste de 2006, en l'élargissant à l'obligation de transmission de données PNR, comme la directive l'autorise. Le Gouvernement a décidé, en 2010, de créer une plateforme d'exploitation des données API et PNR, en s'appuyant sur le projet de directive PNR déposé par la Commission européenne en février 2011.

Au Conseil Justice et affaires intérieures (JAI) d'avril 2012, ce projet de directive a fait l'objet d'un consensus politique. Le texte est actuellement soumis à l'examen du Parlement européen, où les discussions sont difficiles. Le Gouvernement français est favorable à une adoption rapide de la directive.

En attendant, notre pays ne dispose pas encore du dispositif concret qui permettrait d'exploiter ces données. C'est pourquoi l'article 10 du projet de loi prévoit un dispositif qui sera applicable jusqu'au 31 décembre 2017. Si la directive européenne PNR devait être adoptée avant 2017, la France transposerait ce texte.

Il est important de préciser à quoi sert le dispositif PNR proposé dans le cadre de la LPM de 2013, et quelles sont les nombreuses garanties prévues pour préserver l'équilibre entre sécurité et libertés individuelles.

Le dispositif envisagé a pour unique finalité la lutte contre les formes les plus graves de criminalité, à savoir le terrorisme et les crimes graves, tels que définis par l'Union européenne, et de défendre les intérêts supérieurs de la Nation, tels que définis dans le code pénal.

La plateforme d'exploitation des données permettra d'effectuer les opérations suivantes :

Tout d'abord, le ciblage des passagers sera fondé sur l'analyse du risque, à partir de critères objectifs, qui, combinés entre eux, permettent de repérer en amont du départ du vol des comportements spécifiques ou atypiques de passagers. Les critères de ciblage, prédéterminés, peuvent être modifiés en fonction de l'évolution des trafics et des modes opératoires des réseaux criminels et terroristes. Les résultats du ciblage feront l'objet d'une analyse humaine avant qu'une action soit décidée -surveillance, contrôle ou interpellation. Les services européens exploitant les données PNR ont constaté une très forte augmentation de taux de contrôle positif et de résolution d'affaires.

Ensuite le criblage : la plateforme nationale de chaque Etat membre permet de confronter les données PNR et API aux bases de données utiles à la prévention et à la répression du terrorisme et des formes graves de criminalité, dont les bases de données concernant les personnes et les objets recherchés. Le résultat du criblage est une correspondance potentielle entre les informations croisées, qui pourra être discriminée de façon intelligente, afin de réduire au maximum les erreurs.

Enfin, l'inclusion des vols vers les départements et collectivités d'outre-mer, et les vols intracommunautaires, semble indispensable, en raison du fractionnement des déplacements effectués par les terroristes et les trafiquants, à l'image des candidats français au Djihad, qui ne partent généralement pas directement de Roissy vers les pays sensibles, ou des trafiquants de drogue sud-américains, qui transitent de plus en plus par les Antilles-Guyane.

Les données PNR seront transmises une première fois entre 24 et 48 heures avant le départ du vol. Pendant ce laps de temps, les services peuvent commencer à exploiter les données, et préparer si nécessaire une éventuelle action ou surveillance. Un second envoi sera effectué à la clôture du vol avec les données API. Ce second envoi permet de savoir si certains voyageurs ont réservé à la dernière minute, ce qui peut être un indice intéressant pour les services.

Les données PNR sont riches dans leur contenu : elles permettent par exemple de savoir à quel moment le passager a réservé son vol, et où il a effectué sa réservation. Elles apportent des informations sur l'agence de voyage auprès de laquelle le passage a réservé. Le mode de paiement a également son utilité.

Ainsi, lors de l'enquête sur Mohammed Merah, il a été relevé que le dispositif actuel n'avait pas permis d'évaluer la radicalisation de l'intéressé, malgré les informations potentiellement disponibles dans différents fichiers. Pourtant, Mohammed Merah avait suivi une évolution caractéristique en ayant passé plus de six mois au Moyen-Orient en 2010-2011, après avoir notamment emprunté de nombreux vols.

Dans ce cas précis, les données PNR auraient permis d'aller plus vite lors de l'enquête.

Le système envisagé prévoit de nombreuses garanties protectrices des libertés individuelles aux différents stades de traitement des données -collecte, conservation, échanges vers les Etats fiables. La mise en place de ce système d'information fera l'objet d'un décret pris en Conseil d'Etat après avis de la CNIL qui précisera l'ensemble de ces éléments.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Si on ne peut vous poser toutes nos questions, nous vous les poserons par écrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jeanny Lorgeoux

Qui fait obstruction à l'établissement du fichier PNR en Europe ? Un certain nombre d'Etats l'utilisent déjà, et il apparaît évident que cet outil est indispensable !

Debut de section - Permalien
Francis Delon, secrétaire général de la défense nationale

C'est une discussion compliquée, qui a pour l'instant connu des hauts et des bas. Le projet de directive a été examiné par la commission Libertés civiles, justice et affaires intérieures (LIBE) du Parlement européen, et a été rejetée à l'issue de la discussion. Cette commission a estimé que toutes les garanties nécessaires à la protection de la vie privée n'étaient pas réunies. L'affaire est revenue en plénière devant le Parlement européen, qui a décidé qu'on ne pouvait s'arrêter là, prenant en compte le fait que certains Etats européens ont déjà un dispositif PNR, et qu'il était paradoxal de s'interdire un tel dispositif pour lutter contre le terrorisme, alors que nous communiquons ces données à des tiers, l'accord avec les Etats-Unis par exemple, ayant été approuvé par les instances communautaires...

Le Parlement a donc décidé de renvoyer le dossier à la commission LIBE pour un nouvel examen. Le projet de directive de la commission va donc probablement faire l'objet d'amendements. L'idée du Parlement européen est de parvenir au juste équilibre entre la protection des données, celle de la vie privée, et les nécessités opérationnelles de la lutte contre le terrorisme. C'est l'objet du débat...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Concernant la protection des opérateurs d'importance vitale, vous avez repris une des propositions du rapport de la commission sur l'obligation de déclaration d'incidents. C'est fort bien. N'est-il pas paradoxal d'aller plus loin sans publier la liste de ces opérateurs ? Certains pays l'ont fait. Ce serait un plus, surtout vis-à-vis des personnes concernées, ce qui constitue un secret de polichinelle.

Pour de nombreux hackers, la publication des failles informatiques que prévoit la législation française constitue une forte incitation. Ne pourrait-on envisager, à l'inverse de la question précédente, de modifier la législation sur ce point ?

Si on avait eu davantage de temps, j'aurais engagé avec vous le dialogue sur les routeurs de coeur de réseau. Ce que le texte propose est assez intelligent : on n'interdit pas les routeurs de telle ou telle origine, ce qui avait été un temps évoqué dans des déclarations gouvernementales, mais on laisse l'ANSSI faire vers le travail. Pourquoi pas ?

Debut de section - Permalien
Francis Delon, secrétaire général de la défense nationale

Il existe aujourd'hui environ 200 OIV. Chaque opérateur d'importance vitale sait qu'il est OIV ; ses agents le savent également. L'arrêté fixant la liste n'est pas publié au Journal officiel. Il nous a en effet semblé que cela pourrait avoir pour effet de désigner des cibles. On ne voit pas très bien quel serait l'intérêt d'une telle publication ; les choses fonctionnant aujourd'hui fort bien sur le plan opérationnel.

Pour ce qui est de la publication des failles, la législation, sur ce sujet, est assez balancée. Il s'agit, d'une part, d'éviter que des failles encore inconnues soient révélées au grand jour, au risque d'affaiblir la sécurité des systèmes. A ce stade, nous avons estimé préférable de ne pas toucher à l'état du droit sur ce point. Nous sommes toutefois prêts à en discuter...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Voilà tout l'intérêt d'une audition !

Je me félicite de ce que vous avez proposé, que nous avions réclamé. Cela avait fini par faire l'unanimité du groupe de travail. C'est très bien ainsi.

La fusion avec la vérification des fonds spéciaux me paraît également rationnelle.

Je pense cependant que, sur certains aspects, nous aurions pu aller plus loin... Tout d'abord, la délégation parlementaire au renseignement, selon moi, pourrait être destinataire de la stratégie nationale du renseignement et du plan national du renseignement, et non simplement « informée ». Comment la délégation pourrait-elle évaluer efficacement l'action des services de renseignement si elle ne connaît pas précisément les objectifs assignés à ces services ?

Je pense par ailleurs que la délégation devrait pouvoir entendre tout agent des services de renseignement. Nous pouvons le faire à huis clos, en mettant en place des garde-fous.

Vous avez évoqué l'accord des ministres de tutelle : je ne suis pas du tout d'accord ! Ce n'est pas que je n'ai pas confiance dans les ministres, quelle que soit leur famille de pensée, mais un pouvoir de contrôle du Parlement, s'il est soumis à l'accord des ministres, ne constitue plus un pouvoir de contrôle ! Le ministre peut être « informé » d'une perspective de contrôle et avoir son mot à dire...

A la lumière de l'affaire Merah, il me semble qu'il faudrait clarifier les missions de la délégation en précisant expressément que la délégation est chargée de contrôler les graves dysfonctionnements constatés dans l'action opérationnelle des services, à l'exclusion des opérations en cours.

Par ailleurs, le rôle du Parlement est bien de contrôler. Or, les parlementaires détiennent des prérogatives dont ils n'usent pas. Utilisons-les ! Peut-être faudrait-il changer la dénomination de délégation au renseignement, en y ajoutant le mot de contrôle, afin de le marquer symboliquement. On ne peut concevoir des services de renseignement à la discrétion du seul exécutif, sans contrôle parlementaire !

Debut de section - Permalien
Francis Delon, secrétaire général de la défense nationale

La définition des pouvoirs de la délégation parlementaire constitue un exercice de haute couture, mené en conservant constamment à l'esprit le principe de séparation des pouvoirs, la question constitutionnelle planant sur tout cela.

Ce dispositif évolue. Je l'ai rappelé, la délégation parlementaire a été créée en 2007. On a réalisé là un pas considérable ; aujourd'hui, chacun est globalement satisfait, les services les premiers. On progresse et c'est ce que reflètent le projet de loi présenté par le Gouvernement, tout comme les discussions du GT 4 au sein de la commission du Livre blanc.

On peut bien sûr faire différemment et, en théorie, aller plus loin, mais je précise qu'il s'agit d'un équilibre. Il faudra voir dans le détail, point par point, ce qu'il en est.

Je peux vous apporter cependant quelques réponses...

La question de la communication, de l'information, de la stratégie du renseignement et du Plan national d'orientation du renseignement (PNOR) peuvent trouver des solutions. Je n'ai pas beaucoup de doutes à ce point.

Debut de section - Permalien
Francis Delon, secrétaire général de la défense nationale

La question de l'audition des agents demeure, elle, un sujet très délicat. En effet, un service de renseignement, plus que tout autre, est extrêmement hiérarchisé et centralisé. Seul le responsable détient toutes les informations, qu'il peut replacer dans leur contexte.

Autoriser un agent qui traite un sujet particulier à communiquer sur un sujet peut le conduire à révéler certaines informations liées à une opération en cours, sans qu'il le sache lui-même.

Sur ce point, je pense que le Gouvernement va s'en tenir à son texte...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Nous connaissons les procédures et savons faire voter des amendements !

Debut de section - Permalien
Francis Delon, secrétaire général de la défense nationale

C'est pourquoi on prévoit un accord du ministre pour les auditions des directeurs d'administration centrale qui utilisent le renseignement. L'exécutif est organisé ainsi, mais cela ne veut pas dire que les ministres vont refuser !

Vous avez évoqué le nom de la délégation...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

La fonction de contrôle n'apparaît pas. Peut-on y remédier ? C'est de l'affichage plus qu'autre chose...

Debut de section - Permalien
Francis Delon, secrétaire général de la défense nationale

C'est un point à étudier. Le texte de loi parle de contrôle de la politique du Gouvernement en matière de renseignement. On respecte donc les termes de la Constitution.

Quant au contrôle des dysfonctionnements, on joue là aussi sur des équilibres. C'est un point dont il faudra discuter avec le ministre. Je ne m'avance pas davantage sur ce sujet...